[CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Critiques de Jeu, Comptes rendus et retour d'expérience
Répondre
abetorius
Profane
Messages : 4
Inscription : dim. janv. 06, 2013 6:16 pm

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par abetorius »

Merci pour ta réponse éclairante.
En ce qui me concerne, j'essaie d'opter pour l'option que tu n'as pu développer faute de temps, en me laissant la possibilité de changer les protagonistes proposés.
Le contexte de ma table fait que j'essaie d"articuler le début de campagne autour des pjs et que je mets donc un temps fou pour les créer, pour être certain que les backgrounds, les liens entre eux et ce qui les rattache à l'histoire, soient bien ficelés.
Et, dans ce sens, vos debrief me sont d'une utilité rare dans la mesure où ils permettent une vue d'ensemble d'une des manières dont peuvent se dérouler les évènements...
Avatar de l’utilisateur
Lotin
Dieu d'après le panthéon
Messages : 2153
Inscription : jeu. août 30, 2012 9:31 pm
Localisation : Back to the trees !

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par Lotin »

Et hop, le tout dernier CR qui sera divisé en deux parties (je viens de découvrir qu'il y a une limite de 60 000 caractères). Le tout dernier acte de la campagne, un voyage en des terres inhospitalières.


JOURNAL DE H. VAN BAUMER
Averheim, le 26 Vorgehein 2523

Les évènements que je m’apprête à relater se sont déroulés il y a un peu moins de deux ans. Si je décide aujourd’hui de les raconter, c’est que la situation ici est très grave. Averheim est dans un état d’insurrection et, si je ne devais pas m’en sortir, je veux que mes proches connaissent cette histoire.
Qui sait ce que les gens inventeront après ma mort...


C’était donc quelques semaines seulement après la bataille du Temple sacré de Sigmar, à Altdorf. Ce jour funeste avait vu bien des horreurs déferler au cœur de l’Empire, à cause de la conspiration d’un homme, le Capitaine Baerfaust.
C’est une bien triste destinée que celle de ce soldat célèbre pour sa bravoure et sa loyauté à l’Empire et qui se laissa corrompre par le dieu sombre Tzeentch, le Seigneur du Changement et de la Magie. Malheureusement, même les plus solides dans ce monde peuvent succomber. C’est une lutte difficile et quotidienne ; j’en ai fait l’amère expérience dans ma chair et dans mon âme.
J’ai vu ce que bien peu d’humains osent à peine imaginer, j’ai traversé des contrées maudites et côtoyé des créatures immondes. Tout cela est loin maintenant, mes souvenirs se sont étiolés, mais ils n’ont pas disparu et ils reviennent parfois, quand je m’y attends le moins, brusques, partiels, mais toujours tellement effrayants. Alors, la frontière entre le rêve et l’éveil, entre la réalité et l’artifice devient si ténue que je ne sais plus exactement de quel côté je me trouve, si mes sens et mes émotions sont encore fiables et si ma raison tient encore.

Ainsi donc, après la bataille du Temple, mes compagnons d’aventure, Grunilda la farouche naine, les braves Lars et Klueber et le taciturne Eckhart, s’apprêtaient à quitter Altdorf.
Pour ma part, j’étais retournée au Collège Flamboyant. La dernière campagne militaire dans les provinces du nord de l’Empire avait été dévastatrices pour mon ordre. Le Magister Patriarche Thyrus Gormann avait rappelé tous les mages encore disponibles, il fallait reconstituer les troupes et former de nouveaux apprentis au plus vite. Ainsi, dans les mois et les années à venir, je devrais me consacrer à l’instruction du dernier élève de mon Maître Werner, le jeune Stephen Näder, un adolescent malingre et pas toujours très inspiré, mais plein de bonne volonté. Je m’étais installée dans les anciens appartements de mon Maître. Ma vie était sur le point de reprendre un cours à peu près normal.
Un matin, le Magister Patriarche me convoqua dans son bureau pour me faire part d’un message que lui avait adressé son homologue du Collège Lumineux. Il s’agissait d’un rendez-vous avec Maître Mauer le Lumineux qui devait avoir lieu dès le lendemain, dans une discrète auberge en ville.

Je me rendis donc à la luxueuse hôtellerie de la Couronne et des deux Avocats. J’y retrouvais mes quatre compagnons. Mauer patientait en compagnie du Graf von Kaufmann. Tous deux semblaient heureux de nous voir. Ils nous invitèrent à nous asseoir et nous offrirent un excellent vin bretonnien. Mauer était comme toujours un peu distrait et perdu dans ses pensées. Le Graf était plutôt pâle et paraissait épuisé, cependant, il se montra comme à son habitude très courtois, prenant de nos nouvelles et insistant fortement sur l’importance décisive qu’avait eu notre action pour sauver l’Empire et l’Empereur dont il nous dit qu’il se portait de mieux en mieux.
Autant de compliments, annonçait forcément une nouvelle requête ; elle ne se fit pas attendre. En préambule, Mauer précisa qu’il s’adressait à nous à la demande de Balthasar Gelt, le Patriarche suprême des Collèges de Magie, et de l’Empereur lui-même. Mauer nous parla de la déchirure qui s’était ouverte entre notre monde et les Terres désolées du Chaos, à l’issue du combat avec la Capitaine Baerfaust. En dépit de tous leurs efforts et leurs multiples tentatives, les hiérophantes ne parvenaient pas à refermer cette faille. Tout le répertoire de la magie lumineuse avait été éprouvé, mais rien n’y faisait. Le portail résistait et il représentait un grave danger au cœur même de l’Empire. Mauer commença à épiloguer sur la nature fascinante de cette porte ; le sujet le passionnait, mais je ne compris pas un traître mot de ce qu’il nous expliqua. C’est le Graf qui l’interrompit, disant qu’il était tant d’en venir à la raison de cette rencontre.
Face aux échecs répétés, les mages lumineux avaient fini par s’accorder sur plusieurs points : la faille ne pouvait être fermée tant qu’une personne, avec des attaches dans ce monde, restait de l’autre côté. Plus inquiétant, tout ce qui avait traversé le portail dans un sens pouvait revenir et surtout ouvrir le passage à d’autres démons. Ainsi, tant que Baerfaust demeurait dans le royaume du Chaos, la déchirure entre les mondes persisterait et constituerait une brèche béante, risquant à tout moment de vomir des hordes sanguinaires dans Altdorf. Il n’y avait qu’une solution pour empêcher cette catastrophe : partir de l’autre côté, rattraper le capitaine et le ramener ici à Altdorf ou, à défaut, le tuer une fois pour toutes.
Évidemment, il s’avérait que mes compagnons et moi étions les mieux placés pour accomplir cette pénible tâche. D’abord, il fallait envoyer une petite compagnie qui puisse traverser aussi discrètement que possible ces désolations. Ensuite, nous connaissions très bien Baerfaust, il nous serait donc plus facile de le retrouver. Enfin, nous avions maintes fois combattu avec détermination les créatures du Chaos, nos talents et notre résistance n’étaient plus à prouver.

- Si un groupe est capable de mener à bien cette mission et de revenir vivant, c’est bien vous, ajouta Von Kaufmann. Et vous serez bien entendu récompensés proportionnellement au danger que vous aurez affronté.
Il avait l’air parfaitement sincère. En filigrane, il y avait aussi un autre argument qu’ils se gardèrent bien d’avancer : au sein de l’Empire, des personnes, beaucoup plus puissantes que nous auraient pu être plus compétentes pour ce travail ; mais nous, nous étions assez insignifiants pour être sacrifiables.

Qu’importe ! La requête venait de l’Empereur, nous ne pouvions refuser.
Mauer poursuivit :

- Je ne vous mentirais pas, c’est extrêmement dangereux, mais ce n’est pas suicidaire non plus. Et puis, je vais essayer de vous aider un peu d’ici.

Il posa sur la table un délicat coffret, joliment orné. À l’intérieur était rangée une grosse pierre violette, de la taille d’un poing, enroulée dans un précieux tissu blanc.

- Aussi longtemps que vous la garderez près de vous, cette gemme bénie vous protégera des énergies néfastes des Terres désolées. Elle vous permettra également de revenir. Elle est une sorte de clef. Quand vous souhaiterez revenir, prenez-la dans votre main, établissez un contact physique avec vos compagnons, en vous tenant tous par la main, par exemple, et dites « Heimkomen ! »
- Mais comment trouverons-nous le Capitaine ? demanda Lars. Les Royaumes du Chaos doivent être si vastes !
- Je ne pense pas que ce sera un problème, répondit Mauer, car la nature même de ce monde devrait vous y aider. C’est un espace en évolution permanente et qui réagit selon la volonté et le désir de ceux qui y résident et donc les vôtres à partir du moment où vous y serez aussi. Quand vous entrerez, vous devrez vous focaliser sur votre cible et il devrait vous être révélé. C’est pour cela qu’il est nécessaire que vous y alliez, car vous le connaissiez bien et il existe certainement un lien entre vous.

Nous posâmes quelques questions de plus. Dans l’ensemble, Mauer essayait de se montrer rassurant. Nous finîmes par lui demander pourquoi il ne nous accompagnait pas. Sa réponse fut simple : « J’ai trop peur pour ça ». Il ajouta qu’il ne nous servirait à rien dans cet état et, étant un mage lumineux, il risquait en outre d’attirer tous les démons à des lieues à la ronde.

Quand je suis retournée au Collège, j’ai dû prévenir le Magister Patriarche de la mission qui m’avait été confiée. Il eut l’air un peu contrarié ; peut-être la perspective de perdre encore un sorcier. Mais il me recommanda la plus grande prudence : « Ce n’est guère dans notre nature, mais essayez d’éviter autant que possible les combats et n’utilisez la magie qu’en dernier recours. Qui sait comment cela peut tourner dans ces terres maudites ». Puis il me congédia en me disant de faire mon devoir avec honneur.
Alors que je m’éloignais dans le couloir, j’entendis un bruit de vaisselle renversée, suivi d’une exclamation rageuse et d’un chapelet d’insultes adressées à Balthasar Gelt. Comme beaucoup, je savais que la rivalité entre ces deux mages si puissants était exacerbée, surtout depuis que Balthasar Gelt lui avait ravi la place de Patriarche suprême lors du duel rituel de désignation.
Cette affaire ne risquait pas d’améliorer leur relation.

Étonnamment j’ai conservé un souvenir très net des derniers instants que j’ai passés dans ce monde, avant de franchir le portail.
Afin de ne pas trop éveiller les soupçons des nombreux ouvriers qui travaillaient à la restauration du temple, nous traversâmes l’édifice en procession avec Mauer et plusieurs acolytes du collège Lumineux chantant des hymnes et balançant des encensoirs. Nous arrivâmes devant la porte de la tour qui était gardée par un soldat de la Reiksguard. Il nous laissa passer sans un mot.
Au sommet, nous nous retrouvâmes face au portail. Il semblait avoir rétréci depuis la dernière fois où nous l’avions vu. C’était une étrange fente flottante, d’où jaillissaient des couleurs vives se mélangeant et donnant naissance à des nuances indescriptibles tant elles paraissaient irréelles.
Mauer nous demanda si nous avions des questions avant de rentrer. Je l’interrogeai sur ce à quoi nous pouvions nous attendre de l’autre côté.

- Je ne suis pas vraiment un expert, commença-t-il. Tout ce que je peux vous conseiller c’est de n’avoir aucune idée préconçue et de ne rien prendre pour acquis. Ne vous fiez pas à ce que vous verrez, ce que vous entendrez. N’agissez pas sous le coup de vos émotions, mais essayez plutôt de vous appuyer sur votre bon sens et votre raison. Je ne sais pas ce que vous trouverez derrière cette porte. Vous risquez de tomber sur des monstres sanguinaires, prêts à vous arracher tous les membres, mais vous pouvez tout autant rejoindre un jardin luxuriant débordant des fruits les plus savoureux et des fleurs les plus extraordinaires. Gardez à l’esprit que ces deux situations seront en réalité aussi dangereuses l’une que l’autre. Et surtout, ne perdez jamais de vue votre objectif.

Mauer me suggéra de prendre la gemme.

- Je crois me souvenir que vous avez été blessée avec de la malepierre. Cela vous protégera un peu…

Je mis la pierre dans un petit sac que je suspendis autour de mon cou.
C’est Grunilda qui entra la première, suivie de Lars, puis, Klueber ; je m’engageais ensuite, avant Eckhart qui fermait la marche.
Avec une horrible appréhension, je passai d’abord une jambe puis un bras, l’épaule et enfin la tête dans le portail. Je m’attendais à être directement de l’autre côté, mais en fait j’étais dans une sorte de tunnel multicolore. J’avais une sensation bizarre, comme lorsque l’on a trop bu et que ce qui nous entoure devient distant et intangible. D’ailleurs, la ressemblance ne s’arrêtait pas là, car je fus pareillement saisie de vertiges et de nausées. Je ne voyais plus mes compagnons et la lumière était aveuglante. J’avançais lentement quand soudain, j’eus l’impression de tomber en avant comme si j’avais raté une marche dans un escalier. Commença alors une chute qui me parut infinie ; je traversais à une vitesse ahurissante des nuages pourpres, bleus et jaunes. Finalement, tout s’immobilisa et j’étais debout, un sol dur sous mes pieds, le plus surprenant était que je n’avais ressenti aucun choc en « atterrissant ». Une brume colorée s’éleva autour de moi puis s’évapora et laissa place à un paysage extrêmement étrange.
Je me tenais dans une plaine aride et grise, parsemée de rares rochers noirs et luisants. Mon premier réflexe fut de regarder en l’air pour voir d’où j’étais tombée : le ciel était très sombre. Tandis que je pensais voir des nuages, tout ce que je pus observer fut un océan en furie avec des vagues démesurées. Une tempête se déchaînait au-dessus de ma tête, mais l’eau au lieu de descendre restait en suspension. Dans tout orage, il y a des éclairs ; ici ils étaient prodigieux et déchiraient les flots dans un éblouissement fulgurant. Quant au tonnerre, les coups étaient assourdissants et leur principale différence avec ceux que j’avais entendus jusque-là était que les grondements se terminaient en terrifiants cris de douleur.

À quelques mètres de moi, je distinguais mes compagnons, l’air hébété, et je suppose que je devais avoir la même mine. Nous nous regroupâmes. Aucun de nous n’était blessé, mais nous étions tous un peu choqués.
Autour de nous, la plaine s’étendait à perte de vue. Çà et là, entre les rochers, parfois nous crûmes entrevoir des ombres, mais il était difficile de dire s’il s’agissait vraiment de créatures ou de notre imagination.
Vers où partir ?
Nous pensions tous très fort à Baerfaust. Le temps semblait s’écouler différemment : faire un simple pas ne prend qu’une seconde, dans ce monde, autant qu’ailleurs, pourtant là, entre chaque geste, se déroulait une éternité. Ainsi donc, je ne sais au bout de combien de temps nous aperçûmes le château. Il avait surgi brusquement au loin, planté dans les cieux, flottant sans soutènement visible. L’architecture du bâtiment était complètement grotesque et changeait en permanence, les tours se déplaçaient, des fenêtres et des portes apparaissaient puis disparaissaient. Alors que je le regardai consciencieusement en essayant de comprendre ce que je voyais, les murs se mirent à onduler et, pendant un court moment, ce ne fut plus un bâtiment, mais un visage, déformé par un cri silencieux de douleur. Je reconnus le Capitaine Baerfaust ! L’instant d’après, il ne s’agissait plus que d’un château.
Nous avions tous observé cette transformation et d’après ce que nous avait dit Mauer, ce devait être l’indication dont nous avions besoin. Comme nous discutions de la manière d’atteindre l’édifice, nous vîmes distinctement une silhouette ailée sortir des nuages-océan et descendre en décrivant de larges courbes avant de se poser sur un des remparts. Pendant qu’elle s’étirait lentement nous pûmes constater que cette créature était, d’une part, immense et d’autre part qu’il s’agissait d’une sorte d’épouvantable hybride entre un oiseau et un homme : les ailes et la tête munie d’un bec démesuré se combinaient horriblement avec un corps humain long et maigre.
Ainsi, une fois que nous aurions rejoint le château, nous devrions certainement affronter ce terrible geôlier pour mettre la main sur ce qu’il resterait de la Cagoule noire.

Et nous entamâmes donc notre interminable périple en direction de la citadelle flottante. Le chemin aller est devenu plus flou dans ma mémoire que ces premiers instants. Tout d’abord, je serais parfaitement incapable de dire combien d’heures, voire de jours, il nous prit. Le temps comme l’espace se distordaient, s’allongeant ou se rétractant à l’envi. Il n’y avait aucun changement tel que le jour succédant à la nuit, et nous éprouvâmes tous très vite une grande fatigue. Nous nous arrêtâmes plusieurs fois, mais il était très difficile de dormir dans un environnement si menaçant. Chaque bruit et chaque ombre nous faisaient sursauter. Nous craignons à tout moment de devoir livrer un combat, mais nos ennemis restaient cachés et ce petit jeu était bien pire.

La plaine grise laissa peu à peu la place à un paysage plus rocailleux et accidenté. Au loin de titanesques montagnes dressaient leurs silhouettes déchiquetées, tels des crocs géants. Un vent glacial se mit à souffler et rendit notre progression encore plus difficile. Lentement, nous réalisâmes que les cailloux sous nos pieds étaient, en fait, des os et des crânes brisés et le sable que les bourrasques soulevaient en légers tourbillons était une poudre d’os certainement broyés par une force incommensurable. Nous étions au milieu d’un vaste champ de bataille. Puis nous entendîmes les bruits d’un cours d’eau avant de les voir. Il nous fallut un peu de temps pour repérer dans le paysage une longue crevasse au fond de laquelle il devait s’écouler. Mais alors, en nous penchant nous observâmes avec dégoût et horreur une rivière non pas d’eau, mais de sang visqueux et fumant.
Le château flottait toujours au loin, mais il était impossible de traverser, car le lit de la rivière était à la fois large et profond. Même avec un sort de lévitation, cela paraissait difficile et je préférais limiter tout recours à la magie ainsi que me l’avait conseillé Thyrus Gormann. Il était hors de question de prendre le risque de tomber dans cet affreux liquide. Nous choisîmes donc suivre la rive en remontant le courant.
Assez rapidement, me semble-t-il, nous aperçûmes au loin d’autres rivières et toutes provenaient manifestement d’un seul point. Il s’agissait d’un tertre monumental, au sommet duquel trônait un grand monolithe d’où partaient six rivières, dans des directions opposées. Autour du monticule tout était silencieux, mais au fur et à mesure que nous nous rapprochions, nous vîmes de terrifiants amoncellements de corps et de têtes bien séparés, probablement des restes de sacrifices. Certaines dépouilles avaient l’air récentes, tandis que d’autres dans un état de putréfaction avancée exhalaient une odeur insoutenable. En dessous, on reconnaissait des os blanchis. Nous comprîmes alors que le tertre lui-même était composé de ces couches successives de cadavres.
Même à ce niveau, nous ne pouvions toujours pas traverser. Après quelques tergiversations, nous entreprîmes de gravir cet horrible monticule. Il y avait des constructions bizarres au sommet et nous espérions que c’étaient des ponts. Nous accédâmes à une vaste plateforme entourée d’une enceinte où nous pénétrâmes. Là, le monolithe apparut dans toute son énormité. Il surmontait un large bassin duquel coulaient les rivières. L’immense pierre était maintenue par d’étranges supports à l’aspect organique, comme des muscles et des tendons. Le pire était que ces supports bougeaient et se tordaient, animés d’une vie surnaturelle. À y regarder de plus près, le monolithe aussi paraissait vivant, toute sa surface était marbrée de centaine de vaisseaux qui pulsaient en rythme. C’était parfaitement hideux.
Heureusement, le long du bassin plusieurs petites passerelles surplombaient les rivières. Si nous devions traverser, c’était là. Nous accélérâmes le pas. Il fallait nous échapper d’ici très vite et le plus discrètement possible. Nous repérâmes le château au-delà de l’enceinte et passâmes trois ponts. Grunilda escalada la muraille sans difficulté et nous lança une corde. Enfin, parvenus de l’autre côté du mur, nous dégringolâmes du tertre aussi rapidement que nous le permirent nos jambes tremblantes.
Je compris depuis que nous étions dans le domaine de Khorne le Dieu du Sang et le Maître de la Guerre. Et je ne sais par quel miracle, mais nous nous en sommes sortis si facilement, sans attirer l’attention d’aucun de ses serviteurs.

À l’horizon, nous aperçûmes ensuite les frondaisons obscures d’une forêt. À mesure que nous approchions, le sol, jusque-là aride et dur, devint plus mou sous nos pieds, puis carrément spongieux. Les premiers arbres semblaient très vieux ; ils avaient perdu presque toutes leurs feuilles et étaient complètement recouverts de mousse et de lichens. Des lianes pendaient lamentablement telles des dizaines de serpents. Le vent de la plaine avait laissé place à une légère brise qui loin d’être agréable poussait vers nous une puanteur fétide. Des nuées d’insectes achevaient le décor de cette nouvelle zone, guère plus accueillante que la précédente. Cette fois, nous n’avions pas de doute sur l’endroit où nous arrivions et cette perspective nous fit frémir. Nous allions pénétrer dans le domaine du Père Nurgle, le Maître de la Peste, le Seigneur des Mouches.
Avec un profond dégoût, nous nous enfonçâmes dans ce marécage nauséabond. Une route incertaine sinuait entre d’épais buissons épineux et d’affreux champignons puants, disproportionnés, flasques ou au contraire avec de longues ramures tortueuses. Une brume putride s’infiltrait partout. En quelques minutes, nous étions trempés. Sous nos pas, le sol en décomposition pullulait de centaines d’insectes rampants : mille-pattes, cancrelats, asticots et autres limaces aux couleurs répugnantes.
En dépit du bourdonnement incessant des insectes, nous perçûmes assez vite des bruits d’éclaboussures et des craquements de bois mort de part et d’autre du chemin. Nous nous arrêtâmes pour observer plus précisément. Des ombres glissant dans la brume et entre les arbres nous avertirent que nous n’étions pas seuls. Mais ces créatures restaient à distance et nous regardaient sans faire le moindre mouvement pour nous attaquer. Lorsque nous fîmes mine de reprendre notre trajet, elles nous suivirent toujours en demeurant assez loin. Cette troupe assez nombreuse était composée d’humains ou de choses qui l’avaient été, mais que l’on reconnaissait à peine sous les boursouflures et les pustules de la maladie. D’autres êtres n’avaient plus qu’une apparence très vaguement humanoïde tant les mutations étaient profondes. Verdâtres, couverts de plaies purulentes, dotés d’un unique œil et d’une grosse corne, je les identifiai sans mal, c’étaient des porte-pestes. À leurs pieds, bondissaient de petites créatures encore plus difformes et écœurantes. C’étaient les plus audacieuses ; elles fonçaient régulièrement sur nous, mais dès que nous les regardions s’enfuyaient vers les arbres avec un rire dément.
Ces monstres semblaient bien décidés à nous accompagner, mais ne se montraient pas spécialement menaçants. Évidemment, nous étions terrifiés. Plusieurs fois, il fallut retenir Grunilda qui s’impatientait et voulait essayer de se débarrasser d’eux.

Nous aboutîmes dans une trouée au milieu du marécage, avec en son centre une petite colline. Les créatures restèrent à l’orée des bois et n’entrèrent pas dans cet endroit. Nous grimpâmes ce monticule, ravis d’avoir à nouveau une vue dégagée pour repérer le château flottant. Néanmoins, une surprise désagréable nous attendait au sommet.
Un immense et ignoble monstre trônait là. C’était la chose la plus abjecte que je n’ai jamais regardée. Comment la décrire ? Une sorte de crapaud, de la taille d’une maison, vert moisi, avec des verrues, des pustules et des plaies de tous formats et de toutes couleurs et des cornes imposantes, certaines cassées et d’autres couvertes de crasses et de pourriture. Imaginez ensuite que ce crapaud soit mort depuis plusieurs semaines et vous aurez une idée de ce que fut notre vision. Et je ne parle même pas de l’odeur… Immédiatement, je me sentis souillée et je dus faire un effort surhumain pour résister au désir de fuir. Rien que d’y repenser, j’ai une envie irrépressible de prendre un bain chaud et savonneux !
Notre sinistre escorte s’installa dans la clairière en contrebas, toujours sans le moindre signe d’agressivité. Seules les plus minuscules créatures gambadèrent jusqu’à l’immonde chose et se mirent à lécher ses plaies avec de petits gémissements de satisfaction obscène. Loin de s’en offusquer, le crapaud paraissait également ravi. Il prit un certain temps pour choisir un de ses insignifiants démons puis le porta au trou béant et visqueux qui lui tenait lieu de bouche et l’éclata entre ses dents. Nous pouvions entendre ses os qui craquaient à chaque bouchée.
Avec une voix mélangeant gargouillement et gémissement de douleur, la chose nous souhaita la bienvenue.

- J’espère que mes serviteurs ne vous ont pas ennuyés. Ils ont des instructions pour escorter les visiteurs jusqu’ici et ils savent que mieux vaut ne pas me décevoir.

Le démon face à nous, en plus d’être extrêmement repoussant était probablement aussi très puissant. Je n’en étais pas bien certaine, mais je crus reconnaître un Grand Impur, un des plus dangereux champions de Nurgle. Nous n’avions aucun moyen de fuir cette fois. Cependant, il semblait avoir surtout envie de parler et nous préférâmes l’écouter poliment en espérant gagner du temps. Il nous dit s’appeler Virulens et nous proposa de partager avec nous ses connaissances sur les Terres du Chaos. Il était extraordinairement poli. Il nous expliqua qu’il souhaitait juste discuter un peu avant que nous reprenions notre voyage. Il ajouta qu’il désirait que nous parvenions à nos fins et que nous puissions retourner tranquillement dans nos foyers. Il nous invita même à boire et à manger, ce qu’évidemment nous refusâmes aussi respectueusement que possible. Nous lui parlâmes du château volant.

- Oh ! n’allez pas là-bas ! C’est très dangereux pour des gens de votre espèce. C’est le domaine d’un des ducs du Changement qui sert Tzeentch. Et celui-là est bien comme son maître, tout doit changer continuellement, au moindre caprice…
- Comment pourrons-nous atteindre cette citadelle ?
- Oh ! c’est très simple. Il suffit que vous le souhaitiez et cela se réalisera. Mais vous ne devrez pas aller à l’encontre de la volonté du maître des lieux, c’est son château et il est très puissant.

Au bout d’un certain temps, nous n’avions plus de questions à lui poser et nous tentâmes de prendre congé. Nous redoutions sa réaction, mais, en fait, ce ne fut pas un problème. Virulens nous salua, toujours très poliment, nous souhaita bonne chance et nous offrit même l’aide de trois Porte-Pestes pour nous accompagner hors de la forêt.
Là encore, nous étions surpris d’être sortis de cette situation, avec aussi peu de désagréments. Quel bonheur de retrouver un air respirable et d’être débarrassés de ces milliers d’insectes grouillants et bruissants !

Malheureusement, avant d’atteindre le château, il nous restait encore un domaine à traverser. C’était le jardin des délices de Slaanesh, le Prince des Plaisirs et de la Souffrance.
À un moment, un rayon doré fendit les nuées sombres et éclaira une joyeuse prairie. L’herbe y était vert pâle et de délicates fleurs se balançaient dans une douce brise qui apportait jusqu’à nous leur parfum suave. Dans ce lieu idyllique, de petits groupes de jeunes filles et de jeunes hommes dansaient et jouaient de la musique. Tous étaient beaux comme des dieux ; ils étaient vêtus de robes vaporeuses qui dissimulaient à peine des corps parfaits. Leurs fins cheveux flottaient au vent. Chacun de leur mouvement était imprégné d’une grâce infinie.
Je fus submergée par un intense sentiment de bien-être. Je sentais l’herbe sous mes pieds et elle était incroyablement douce. Je n’avais plus qu’une envie : m’allonger là et écouter tranquillement les rires et la musique. Les jeunes gens s’approchèrent de nous. Ils voulaient nous entraîner dans leurs rondes. Ils nous offrirent du vin, des fruits et des friandises appétissantes. Comme c’était dur de résister ! Toute la tension, toute la fatigue de cet interminable voyage étaient en train de s’évanouir, laissant place à une merveilleuse insouciance.
Eckhart me criait de revenir. Je l’entendais, mais ne le voyais pas. En revanche, j’aperçus Klueber en train de danser avec de jolies demoiselles et Grunilda dévorer avec gourmandise de gros gâteaux débordant de crème.
C’est alors que je reçus une formidable gifle. Je rouvrais les yeux : Lars et Eckhart se tenaient en face de moi et leurs visages trahissaient à la fois de la colère et de l’inquiétude.

- Mais vous êtes devenus fous ! hurlèrent-ils. Vous suivez des démons !
- Mais non…

Je regardais autour de moi. Le beau jardin n’était plus qu’une plaine cendreuse avec de rares arbustes rabougris. Il était peuplé, non plus d’éphèbes et de jouvencelles, mais de démonettes à la peau pâle et aux yeux luisants d’un vert surnaturel. Elles étaient à la fois effrayantes et fascinantes : leurs bras se finissaient en lames courbées ou en griffes cruelles, au lieu de ravissantes tuniques de soie, elles étaient vêtues d’armures qui semblaient avoir fusionné avec leur peau. Elles me rappelèrent immédiatement le démon qui nous avait emprisonnés dans le miroir chez Esméralda à Ubersreik.
Au milieu du jardin, dansait une créature plus grande, avec de grosses cornes et une expression farouche. Sa peau était de couleur bleu pâle et ses jambes se terminent par des griffes noires et acérées. Elle pirouettait sur des membres graciles, menant une sarabande au rythme endiablé ; c’était un spectacle magnifique et en même temps très troublant, car sa chorégraphie ne s’arrêtait jamais et ne ralentissait même pas. Elle dansait toujours et encore, sans repos.
Nous arrivâmes à « réveiller » Grunilda qui ingurgitait des fruits pourris. En revanche, il n’y eut rien à faire pour Klueber : notre joli cœur était totalement subjugué. Moi-même, j’avais du mal à rester ferme : par moment, le splendide jardin refaisait son apparition et la grande démonette devenait un être d’une époustouflante beauté, il aurait été impossible de dire si c’était un homme ou une femme : il ou elle était simplement l’être le plus attirant que l’on puisse imaginer. Sa voix se faisait languissante, presque musicale.
Nous devions fuir. C’était la seule solution. Lars et Eckhart attrapèrent Klueber et nous partîmes à toutes jambes, loin de la prairie. Les démonettes nous poursuivirent, nous appelant, nous proposant toutes sortes de mets délicieux et nous promettant des plaisirs extraordinaires. Pendant ce temps, la créature au centre du jardin ne fit pas le moindre mouvement dans notre direction, continuant son ballet comme si nous n’étions jamais venus. Quand nous eûmes gagné le seuil de la clairière, les démonettes nous abandonnèrent pour retourner à leur farandole.

Nous reprîmes donc notre longue marche. Le château semblait enfin à notre portée. Il dérivait lentement et changeait de trajectoire de manière totalement aléatoire. Nous parvînmes finalement juste en dessous. Il était très haut dans le ciel, au moins à deux cents pieds, et il n’y avait visiblement aucun moyen de grimper. Pour ne rien arranger, des centaines de rapaces et de furies tournaient autour du rocher flottant, nous lançant parfois des regards mauvais et sans doute prêts à nous agresser au premier mouvement. Ils engendraient une rumeur assourdissante. Toutefois, par moment, de grands claquements d’ailes couvraient ce vacarme ; il s’agissait certainement du duc du Changement que nous avions observé de loin et contre lequel Virulens nous avait mis en garde.
S’élever à une telle hauteur même avec un sort de marche dans les airs paraissait impossible. En revanche, s’il venait à descendre un peu, je pourrais prendre une corde et monter jusqu’à la roche. Il faudrait alors que mes compagnons fassent fuir les monstres volants, le temps que j’ai bien attaché le tout. Ainsi que Mauer et le serviteur de Nurgle nous l’avaient suggéré, dans les Terres du Chaos, parfois il suffisait de vouloir une chose pour qu’elle se réalise. J’expliquais mon plan à mes camarades. Nous n’étions pas certains du résultat, mais nous n’avions pas de meilleure idée. Nous nous concentrâmes donc pour inciter le château à se rapprocher du sol et étonnement, cela fonctionna, il n’était plus qu’à une dizaine de pieds. Avant de m’élancer, j’incantais un bouclier d’Aqshy en espérant que cela découragerait les volatiles. J’avais très peur de pratiquer la magie dans cet environnement, mais à ma grande surprise tout se déroula au mieux ; j’éprouvais même une puissance exceptionelle. Prenant une corde, je sautais. Indifférentes au feu qui m’entouraient, les furies foncèrent sur moi, les serres en avant. Plusieurs s’enflammèrent, mais certaines passèrent et je sentis leurs griffes s’enfoncer dans ma chair. Depuis le sol, mes compagnons essayèrent de les chasser, mais c’était risqué, car ils voulaient évidemment éviter de me toucher. Heureusement, le trajet était court. Je pus atteindre une petite saillie et de là je balançais quelques boules de feu pour les faire reculer. Mes bras étaient complètement tailladés : sales bêtes ! Je dus improviser des bandages de fortune pour arrêter les saignements. Une fois la corde fixée, mes camarades me rejoignirent luttant à leur tour contre les furies qui paraissaient ne pas se lasser de nous attaquer malgré les lourdes pertes que nous leur infligeâmes.

Depuis notre promontoire, un chemin se dessina dans la roche permettant d’arriver sans difficulté jusqu’à l’entrée du château. Nous décidâmes de prendre un peu de repos. Nous n’avions plus comme je l’ai expliqué de notion du temps, mais il nous semblait que nous avions marché depuis des heures et des heures…
Nous voulions essayer de manger un peu, malgré l’inquiétude qui nous tenaillait les entrailles. Hélas, nos provisions avaient gâté et notre eau était croupie. Certainement, un petit souvenir des marécages de Nurgle…

Le château était un prodigieux enchevêtrement de murs, de tourelles et de flèches, construits apparemment sans le moindre plan d’ensemble. Les murs étaient bâtis dans une pierre étrange dont la surface était parsemée de visages et de membres en saillie, telles des centaines d’âmes damnées étaient piégées à l’intérieur. Les portes étaient faites d’un métal poli et brillant dont les couleurs changeaient en permanence. Elles semblaient parfaitement épaisses et rigides, cependant lorsque nous voulûmes les toucher pour tester leur solidité, nous nous enfonçâmes sans aucune résistance, comme si ce n’était rien de plus que du brouillard.

Une fois à l’intérieur, nous dûmes faire face à un espace en constante évolution. Nous nous attendions à rencontrer des gardiens dès notre arrivée, au lieu de cela nous traversâmes de grandes salles vides et de couloirs interminables, nous montâmes puis descendîmes des centaines de marches. Dans chaque pièce lorsque nous franchissions une porte, celle-ci disparaissait derrière nous. Nous ne pouvions pas revenir en arrière, nous étions condamnés à avancer.
Toutefois, nous restions sur nos gardes, prenant soin de ne rien toucher, faisant attention où nous mettions les pieds. Nous visitâmes ainsi des dizaines de salles, notamment, un étrange laboratoire, rempli de cornues et de creusets où régnait une très forte odeur ; nous courûmes vers la sortie en retenant notre respiration. Nous traversâmes également une grande bibliothèque avec des étagères de livres du sol au plafond qui formaient un véritable labyrinthe. Des rangées entières tombaient sur notre passage et nous devions avoir les yeux partout et être prêts à esquiver en permanence.
Le maître des lieux ne pouvait ignorer notre présence. Si nous arrivions à avancer sans désagrément, c’est que telle était sa volonté ; il jouait avec nous et nous guidait où bon lui semblait.

La pièce qui se révéla la plus dangereuse était une longue galerie sans fenêtres, avec toutes sortes d’armes et des blasons de diverses couleurs accrochés sur les murs. L’un des écussons me parut étonnamment familier : le violet et les symboles dorés étaient ceux du culte de la Main Pourpre que nous avions affrontée à Middenheim.
De chaque côté, des mannequins dressaient une haie d’honneur. Il y en avait au moins une centaine, certains étaient équipés d’armures ouvragées avec de curieux signes tandis que d’autres portaient des robes finement brodées de motifs tout aussi étranges.
Nous étions particulièrement inquiets en longeant cette galerie et nous redoutions de voir les mannequins s’animer et nous attaquer, nous ne les quittions pas des yeux. Malheureusement pour nous le danger était ailleurs et nous nous en rendîmes vite compte. La pièce était truffée de pièges et de trappes. C’était Grunilda qui comme toujours ouvrait la marche, Lars la talonnait de près mais n’avançait pas exactement dans ses pas. Il fut le premier à chuter. Un sinistre craquement brisa le silence et Lars disparut dans le sol qui s’effondra, manquant d’entraîner également Grunilda et Eckhart qui se trouvaient à proximité. Il atterrit au fond d’une grande fosse dont les côtés avaient été enduits d’huile glissante. En tombant, il se fit assez mal à la cheville. Nous pûmes le remonter grâce à la corde que, par chance, nous avions gardée avec nous. Plus loin, nous esquivâmes une volée de flèches, sorties de je ne sais où. Enfin, juste avant d’atteindre la porte, un énorme bloc de pierre dégringola du plafond et faillit nous écraser.
Après ce dernier choc, nous entendîmes un cliquetis saccadé et il ne nous fallut pas longtemps pour comprendre que c’était le bruit des armures qui s’animaient. Heureusement, nous étions tout près de la porte et nous nous échappâmes très vite avant qu’elles ne nous assaillent.

Après une longue errance dans ce château dément, nous touchâmes au but de notre quête.
Une ultime porte s’ouvrit sur une pièce sombre avec des parois de pierre brute et d’affreux relents qui mêlaient vomissures, excréments et humidité. La seule lumière provenait d’un brasier au milieu de la salle ; les flammes jetaient au sol et sur les murs des ombres démesurées et grotesques.
Le Capitaine était solidement attaché sur une table ; il était à peine reconnaissable. Autour de lui, de nombreuses petites horreurs roses, comme celles que nous avions vues au Temple de Sigmar, et d’autres monstres bleus gambadaient avec une jubilation sadique. Certains le torturaient avec des fers chauffés à blanc ou des lames effilées, d’autres préféraient le mordre de leurs dents aiguës ou le lacérer avec leurs griffes. Ce faisant, ils enlevaient des lambeaux de chair qui étaient remplacés par des excroissances dénaturées ; sa bouche et son nez commençaient à ressembler à un bec crochu et des touffes de plumes poussaient un peu partout sur son corps. Ses bras avaient été allongés de manière extraordinaire. La transformation était terrifiante.
Mais le pire, c’étaient ses hurlements de douleur : ils étaient terribles et s’amplifiaient en se répercutant sur les murs et le plafond. Malgré toute la haine que j’éprouvais pour cet homme, en qui nous avions confiance et qui nous avait trahis, mais surtout qui avait ébranlé l’Empire jusque dans ses fondements, je ne pus m’empêcher d’être bouleversée.
Une voix ou plutôt un grondement profond s’élevait entre ces cris d’agonie. Les mots résonnaient en une interminable litanie accusatrice.

- Tu as cherché à utiliser les serviteurs de Tzeentch pour accomplir tes propres desseins. Piteux, ridicule mortel ! Pensais-tu pouvoir te mesurer aux Forces du Chaos ? Tes actions étaient médiocres et puériles. Tu n’es qu’un insecte devant la gloire de Tzeentch. Tu n’es rien ! Renais, désormais, transformé selon sa volonté ! Ainsi, tu œuvreras à son triomphe !

Toutes à la jouissance de la torture, les horreurs ne semblaient même pas avoir remarqué notre arrivée. Nous discutâmes rapidement de ce que nous devions faire. Mauer nous avait dit que le plus simple était de ramener la Cagoule noire avec nous à Altdorf. Il fallait pour cela le libérer et nous étions certains que dès que nous approcherions les démons roses et bleus allaient nous attaquer. Lors de la bataille du temple, nous avions constaté combien ces créatures étaient dangereuses ; il fallait éviter autant que possible qu’elles ne nous touchent. Il valait donc mieux les éliminer à distance.
En conséquence, nous décidâmes de cogner les premiers. Grunilda empoigna sa hache et mit son bouclier en position, Klueber et Lars chargèrent leurs pistolets et leurs arbalètes, étalant autres munitions à portée de main, Eckhart et moi incantâmes des armures aéthyriques, avant de focaliser nos énergies sur les vents de magie. Comme je l’avais déjà noté plus tôt, la pratique de la magie était étonnement facile dans ce monde, c’était un peu inquiétant, mais dans ces circonstances nous préférions ne pas trop nous en soucier.
Il y avait une dizaine d’horreurs. Nous attaquâmes tous simultanément.
Les garçons ouvrirent le feu et je réussis à lancer trois grosses boules enflammées. Deux monstres bleus et un rose explosèrent dans un nuage multicolore. En revanche, un des roses se divisa en deux autres horreurs plus petites et bleues et les créatures qui se trouvaient à proximité des explosions se mirent à luire étrangement ; l’une s’évanouit et l’autre se vit affublée de pattes velues et terminées par de puissants sabots. Eckhart avait fait apparaître des tentacules et avait emprisonné trois de nos adversaires.
La réaction des monstres fut immédiate. Une des horreurs bleues qui n’était pas immobilisée se rua sur Grunilda. L’horreur rose qui avait disparu se matérialisa, dans notre dos, à quelques pieds seulement d’Eckhart et moi. Elle laissa échapper un ricanement de fou furieux, des sortes de tuyaux poussèrent sur son corps flasque et commencèrent à cracher de grandes gerbes multicolores. Elle fonça vers Eckhart, concentré sur son sort d’emprisonnement. Je fis volte-face et envoyais dans l’urgence une volée de fléchettes. Cela ne lui causa apparemment pas le moindre mal et son rire redoubla. Le seul point positif était que j’avais attiré son attention et qu’elle se dirigeait maintenant vers moi. Je m’écartais légèrement du groupe. Une éruption d’étincelles fusa vers moi. Je tentais d’esquiver, mais plusieurs m’atteignirent à la hanche et à l’épaule. Je ressentis une sorte de secousse dans tout le corps, puis une ardente brûlure là où j’avais été touchée. Ce n’était pas un feu « normal », il était chargé d’une magie vénéneuse qui ne se contentait pas de détruire, mais qui infectait les chairs et l’esprit. J’essayais de ne pas paniquer et de me concentrer : une grande inspiration, focaliser toute l’énergie, toute la pensée dans la création d’un projectile enflammé, comme je l’avais appris et comme je le faisais depuis des années. Et elle apparut devant moi. Je ripostais. Le démon rose fut percuté de plein fouet. Cette fois, il s’arrêta instantanément, changea de forme et se mit à vibrer, de plus en plus vite ; finalement, il explosa dans un nuage de couleur et de lumière. Je m’écartais aussi rapidement que possible pour ne pas entrer en contact avec cette vapeur néfaste. Je manquais de tomber et m’adossais à un mur pour essayer d’évaluer la situation. Il ne restait plus que deux horreurs roses et trois bleues qui sautillaient allègrement en hurlant ou en riant. Grunilda avait plusieurs flaques moirées à ses pieds, mais je remarquais que son armure luisait de manière inhabituelle. Lars et Klueber combattaient désormais à l’épée en s’efforçant d’esquiver les jets irisés. Des sphères de lumières multicolores volaient à travers toute la pièce en suivant des trajectoires totalement aléatoires. Par-dessus cette cohue, les plaintes de Baerfaust continuaient de résonner, surtout lorsqu’il était atteint par la magie des horreurs ou que l’une d’elles passant à proximité en profitait pour aller lui arracher encore un morceau de chair. Et la voix démoniaque répétait inlassablement sa sentence.
J’aperçus que le mur froid dans mon dos qui commençait à bouger. Le danger était partout. Je me redressais. Je vis Klueber aux prises avec la créature aux pattes bestiales et je m’élançais vers lui en incantant des fléchettes. Le combat fut plus long que je ne l’aurais cru. Ces choses étaient très pugnaces et résistantes. Celle que nous affrontions avec Klueber parvint en outre à se diviser, alors que nous pensions l’avoir tuée ; deux petites horreurs bleues avec de grandes pattes apparurent devant nous et nous dûmes redoubler d’efforts pour en venir à bout.
Enfin, les derniers rires des créatures s’éteignirent. Nous avions réussi à nous en débarrasser, mais nous n’étions pas au mieux. Le tourment infligé par les « brûlures » magiques gagnait en intensité et en voyant les grimaces qui tordaient les visages de mes amis je compris que je n’étais pas la seule à avoir été blessée. Toutefois, une autre douleur m’inquiétait beaucoup plus. Je sentais des picotements de plus en plus cuisants dans le dos, à l’endroit où ce maudit skaven m’avait frappée avec sa lame en malepierre. Je me doutais bien que, tôt ou tard, cet environnement et les confrontations à la magie du Chaos ne pourraient que réveiller ma vieille blessure. Mauer m’avait prévenue… La gemme mystique m’avait bien protégée jusque-là, mais peut-être ces forces néfastes étaient-elles trop puissantes.

Peu importait. Plus rien ne nous empêchait de libérer Baerfaust et de fuir à Altdorf grâce à la pierre. Nous nous hâtâmes vers son lit de torture. Nous pataugions dans son sang et d’autres liquides encore plus répugnants. Il continuait de gémir. Les mutations étaient affreuses, son corps était complètement vicié et d’une maigreur terrifiante. Ses bras avaient au moins doublé de longueur et des membranes, sortes d’ailes, pendaient en dessous.
À cet instant, je me demandais s’il ne serait pas plus charitable de simplement l’achever. Je lisais bien dans les yeux de Grunilda qu’elle pensait exactement la même chose.

- Et si…, commença-t-elle en levant sa hache au-dessus du cou du Capitaine.
- Mauer a dit de le ramener, répondit Lars.
- Oui, mais bon… il a dit aussi qu’on pouvait le tuer, le résultat serait le même.
- Ça ira plus vite de le détacher et de partir avec lui, coupa Klueber. Inutile de s’attarder.
- Oui, nous avons déjà passé trop de temps ici, ajoutais-je.

Comme nous souhaitions tous rentrer au plus vite, nous ne perdîmes pas de temps en tergiversations. Les chaînes qui retenaient le corps martyrisé du Capitaine étaient solides et s’étaient incrustées dans sa chair. Ce fut assez difficile de le délivrer.
Il paraissait très faible, probablement mourant. C’est pour cela que nous ne nous méfiâmes pas. Malheureusement, la Cagoule noire nous réservait encore une dernière fourberie. Comme nous l’avions presque libéré, un seul de ses interminables bras restant attaché, il glissa et s’effondra au pied de la table.
Soudainement, le sol et les murs se mirent à trembler ; les pierres se soulevèrent et s’écartèrent les unes des autres. Le plafond disparut et tout l’espace se réorganisa. Nous nous retrouvâmes ainsi sur une plateforme à l’air libre. Une silhouette massive et terrifiante plana au-dessus de nous. Ses grandes ailes claquaient, telles des détonations, et ses cris gutturaux donnaient l’impression que des dizaines d’oiseaux de proie se précipitaient sur nous. La créature avait une forme vaguement humanoïde, à l’exception des immenses ailes et du bec disproportionné, et elle était couverte de plumes aux teintes indéfinissables et mouvantes. À son approche, une fulgurante douleur me déchira le dos. Le vent d’Aqshy que je voyais très bien jusque-là se mit à se comporter de manière tout à fait inhabituelle. Eckhart et moi nous regardâmes, lui aussi semblait médusé. Notre hôte devait perturber les vents de magie.
Je crus d’abord que le duc du Changement allait fondre sur nous. Mais au lieu de cela, il se posa sur une grande tour et se contenta de nous observer. La voix que nous avions entendue plus tôt gronda à nouveau.
- Minables vermines ! Vous avez fini de ramper à travers nos Royaumes et dans ce château. Je sais ce que vous êtes venus chercher, mais il appartient désormais au seigneur Tzeentch et il a d’autres projets pour lui. Toi ! hurla-t-il en s’adressant à Baerfaust. Lève-toi ! Ta transformation n’est pas terminée, mais tu devrais pouvoir éliminer ces imbéciles. Montre-toi digne du don qui t’a été octroyé ! Bats-toi ! Pour la gloire de Tzeentch !

Comme par miracle, la dépouille du Capitaine se redressa avec une énergie inattendue. D’un geste, il arracha la dernière chaîne. Son grand corps dégingandé nous dépassait désormais tous très largement. Il déploya ses embryons d’ailes, déjà très imposantes ; ses mains s’étaient devenues d’effrayantes serres, noires et luisantes. Son maigre cou soutenait une grosse tête plus proche de celle d’un vautour que d’un d’homme et un énorme bec tranchant finissait de le rendre méconnaissable. C’était une copie, en un peu plus petit, du duc du Changement qui possédait ce château. Une grande épée apparut dans la « main » droite ; c’était une arme singulière de couleur bleutée et avec une pointe de glace.
D’un même élan, nous nous écartâmes rapidement de lui. Il leva son bec vers le maître des lieux et poussa un cri interminable et d’une force terrifiante ; je perçus les vibrations du sol sous mes pieds. Je tremblais de tous mes membres, jamais de ma vie je n’avais ressenti une telle angoisse et j’étais certaine que nous n’en sortirions pas vivants. Pire, nous courions même le risque de subir un sort similaire à celui du Capitaine et d’être à notre tour changés en démon.
Le duc reprit son envol avec un rire perfide.
Immédiatement, le vent flamboyant retrouva une allure à peu près normale. J’avisais Eckhart et il me renvoya un petit geste avec un soulagement évident. J’en profitais pour me retisser une armure aéthyrique. Lars et Grunilda étaient à mes côtés. En essayant de paraître sûre de moi, je leur chuchotais, que nous si nous voulions attaquer, c’était maintenant. Les deux firent un signe de la tête en même temps ; Lars saisit ses pistolets, Grunilda ajusta son bouclier. Je me préparais à lancer mes sorts.
Mais, c’est Baerfaust qui frappa le premier. Abaissant son étrange épée, il projeta vers nous de gros dards de glace. C’était raté pour l’entrée en matière… Grunilda s’abrita derrière son bouclier, tandis que nous autres ne pouvions que plonger. J’entendis les projectiles siffler au-dessus de moi. Nous ne devions pas rester groupés. Je roulais sur moi-même et me redressais juste assez pour décocher mon sort. Trois boules apparurent et filèrent droit devant ; le monstre n’avait pas bougé, elles arrivaient sur lui. Mais, alors, il battit des ailes et deux des boules s’évaporèrent en un clin d’œil. La troisième l’atteignit, mais ne l’ébranla même pas. Il y eut bien une odeur de plumes roussies, mais rien de plus.
Les explosions des tirs de Lars retentirent puis ce furent les cris de Grunilda et de Klueber qui chargeaient Baerfaust. Celui-ci leur répondit par un glapissement de défi. J’essayais de contourner le combat pour me placer sur l’un de ses flancs. Le monstre me jeta un regard terrifiant et, tout à coup, mes membres refusèrent de m’obéir, j’étais complètement paralysée. Je vis Klueber stoppé aussi nettement dans sa course, seule Grunilda continuait d’avancer. Qu’à cela ne tienne ! je me concentrais pour envoyer encore des sphères de feu, il ne pouvait être complètement immunisé, cela finirait bien par passer.
Lorsque Grunilda le percuta, bouclier en avant, l’étreinte qui m’immobilisait se relâcha. Je repris ma course et m’arrêtais quand je trouvais un bon angle d’attaque. Je me reconcentrais et j’expédiai deux boules enflammées ; nouveau battement d’ailes, une seule l’atteint et n’eut pas plus d’effet que la première. Eckhart avait pris position exactement en face de moi, il était nimbé de lueurs violettes. Il me sembla qu’à un moment une des ailes commença à se flétrir, mais le sort ne dura pas. Décidément, la magie n’était pas très efficace contre un tel adversaire. Klueber puis Lars rejoignirent Grunilda au corps à corps ; tous trois tentèrent de l’assaillir par plusieurs côtés. Il riposta de son épée et en infligeant des coups avec ses gigantesques griffes. Puis, pour se dégager, le démon agita violemment ses ailes. Mes compagnons furent projetés au sol ; même à ma distance, je vacillais sous le souffle et faillit perdre l’équilibre. Baerfaust se précipita sur Klueber en rugissant. Il leva son arme et l’abattit avec force ; Klueber s’enroula à terre et essaya de se protéger avec ses bras. J’étais trop loin pour lui venir en aide d’une quelconque manière, mais j’incantais une nouvelle volée de boules de feu. Grunilda s’était relevée et l’attaquait avec rage à coups de hache. Distrait, le démon ne vit pas arriver les projectiles enflammés et il les encaissa avec un peu moins de désinvolture. Eckhart avait aussi profité de son inattention pour le bloquer avec des tentacules. Lars parvint également à l’atteindre et le frappa de toutes ses forces avec son épée. Le monstre commençait un peu à céder du terrain. Malheureusement, ce répit fut de courte durée.
Klueber ne bougeait plus. Il était à quelques pas de moi et je m’empressais de le rejoindre avec l’idée de le tirer hors de portée de Baerfaust. C’est alors que celui-ci se remit pousser des cris extrêmement stridents, c’était à la limite du supportable et tout oscillait sous l’effet des vibrations. Il battit des ailes pour se débarrasser de mes compagnons les plus proches et il enchaîna en renvoyant à nouveau des éclats de glace avec son épée. J’eus à peine le temps de me baisser, mais une des lames gelées me toucha à l’épaule. Je sentis une déchirure cuisante dans ma chair. J’étais tout près de Klueber ; il y avait beaucoup de sang autour de lui et ses vêtements en lambeaux laissaient apparaître plusieurs plaies assez profondes. J’attrapais ses bras et le tirais sur quelques pas en restant accroupie. Je tentais une cautérisation rapide.
Moi aussi, j’aurais eu bien besoin de quelques soins. En plus de cette nouvelle blessure, d’affreux élancements me parcouraient le dos. En plus de la souffrance, c’était surtout terriblement effrayant, comme si mes muscles palpitaient. Je pensais que cela ne pouvait signifier qu’une chose : ma plus grande crainte, mon corps allait subir ou subissait peut-être déjà une mutation !

Grunilda et Lars avaient également été lacérés par les éclats de glace. Lars avait le visage en sang. Tous deux se relevaient difficilement. En fait, nous avions tous été surpris. Même Eckhart ! Je vis un pont brumeux partir de sa main et rejoindre Baerfaust. J’avais déjà vu ce sort : il établissait un drain de vie pour se soigner. Mais le Capitaine comprit le danger et esquivant les attaques de Grunilda, il fonça sur le sorcier améthyste. Sous le choc, Eckhart recula de plusieurs pas et tomba à la renverse. Baerfaust lui asséna de nombreux coups d’épée. J’envoyais encore des boules de feu, avec un peu de chance cela pourrait au moins le distraire. J’aurais voulu utiliser des sorts plus puissants, mais la fatigue et la tension qui me tenaillaient étaient telles qu’elles m’empêchaient de me concentrer correctement. Néanmoins, ma magie n’était pas complètement inopérante. À force, c’étaient des plaques entières de plumes qui avaient brûlé et lorsque mes projectiles atteignaient la peau à vif, il subissait enfin de réels dégâts.
Grunilda chargea pour venir en aide à Eckhart. Baerfaust fit volte-face et se campa sur ses maigres pattes ; le choc fut terrible. Grunilda fut légèrement rejetée en arrière, mais elle parvint à grader son équilibre et entreprit même une feinte. Miraculeusement, elle passa sous sa garde. Sa hache s’enfonça profondément sous le bras. Le démon beugla et lâcha son épée. Il se tortilla de douleur, roula des yeux furieux, mais réagit aussitôt avec ses griffes implacables. Sous la violence de la contre-attaque, l’armure de notre naine vola en éclat ; elle avait certainement été déjà fragilisée lors du combat contre les horreurs roses et bleues. Mais Grunilda se releva, encore une fois, et chargea, encore une fois. Lars aussi se précipitait. À mon tour, j’incantai une épée ardente et je m’élançai. Sous l’effet d’un nouveau battement, Grunilda et Lars furent projetés à nouveau de plusieurs pas en arrière. Cette fois, notre vaillante naine demeura inerte. Il n’y avait plus que Lars et moi. Eckhart se traînait vers le démon ailé, probablement pour essayer de relancer un drain de vie, Klueber n’avait pas repris connaissance. Dans mon dos, mes cicatrices me semblaient sur le point de se rouvrir. J’avais effroyablement mal. Je redoutais à tout moment de voir des tentacules ou toute autre excroissance me sortir du corps.
Cependant, nos charges successives avaient aussi entamé Baerfaust qui comptait plusieurs blessures assez sévères. Un sang aux couleurs changeantes poissait ses plumes. Nous nous toisâmes quelques secondes en silence. Puis il recommença à brailler. Lars et moi nous adressâmes un dernier regard, puis criant à plein poumons pour nous donner du courage, nous nous lançâmes dans un ultime assaut.
Je m’attendais à rencontrer une grande résistance au moment de le toucher, si par miracle j’arrivais jusqu’à lui, par conséquent, je tenais mon épée crépitante à deux mains, bien fermement, les coudes bien plaqués contre le torse et la pointe en avant. J’aperçus un fin filet violet qui s’élevait derrière le monstrueux volatile. Eckhart continuait de drainer son énergie. Mais cela pourrait-il l’affaiblir suffisamment ?
Plus rapide, Lars l’atteint en premier et Baerfaust tenta de riposter d’un coup de serre. En me voyant arriver de l’autre côté, il déploya une de ses ailes, mais j’évitais son mouvement et je parvins à me glisser sur son flanc. L’aile était positionnée comme un bouclier, mais j’étais vraiment tout près et la lame magique de Rhuin est une arme très efficace. Je rassemblai toute l’énergie qu’il me restait et repoussai l’épée de toutes mes forces. Elle s’enfonça jusqu’à la garde. La membrane de chair et de plumes se déchira avec une facilité inattendue. Je retirai ma lame et frappai à nouveau, exactement de la même manière. L’aile se fendit à un autre endroit. Sur l’autre flanc, Lars, plus habile et plus rapide que moi, retenait son attention. Mais Baerfaust parvint néanmoins à m’asséner un coup au visage. Je vacillai sous l’impact et j’entendis le cartilage de mon nez qui craquait ; un goût de fer se répandit dans ma bouche. Poussée par la vigueur du désespoir, je me relevai et repartis à l’attaque. Baerfaust commençait à courber l’échine. Le drain d’Eckhart gagnait en intensité, à mesure qu’il recouvrait sa vitalité. Lars se défendait comme un beau diable et moi, je luttai avec une détermination dont je ne me serais jamais cru capable. La lame de feu rencontrait de moins en moins de résistance. Le sang sombre s’échappait des blessures avec de petites étincelles irisées. Les vociférations du monstre devinrent des plaintes puis des râles.
Enfin, il s’écroula.
Mais nous devions être bien certains qu’il était mort, cette fois. Je me précipitais sur son cou et j’abattis mon épée, encore et encore. Je tombais à genou. Je ne sentais plus mes bras, du sang coulait sur mon visage, la douleur dans mon dos était devenue si vive qu’elle m’arrachait des larmes et ma vue se voilait. Lars comprit ce que je voulais faire et vint m’aider. Le sang corrompu du démon engluait nos mains. Quelle abomination !
Enfin, le cou se brisa. Lars donna un grand coup de pied dans la tête.
C’était fini.


La suite dans le post suivant.
Avatar de l’utilisateur
Lotin
Dieu d'après le panthéon
Messages : 2153
Inscription : jeu. août 30, 2012 9:31 pm
Localisation : Back to the trees !

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par Lotin »

La suite donc du dernier CR de la campagne.

Juste après le combat contre la créature...

C’était fini.

Eckhart nous avait rejoints et il soutenait Grunilda encore un peu groggy. J’essayais de reprendre mon souffle. Un silence de mort régnait sur la plateforme. Mais il fut de courte durée. Une explosion déchira l’air. Le duc revenait à tire d’ailes.

- Celui-ci n’était pas digne de servir le Seigneur du Changement. Mais vous… vous ferez de bonnes recrues pour les forces du Chaos et pour la gloire de Tzeentch !

Il piqua sur nous. Nous courûmes tous vers Klueber toujours inanimé, nous nous donnâmes la main. Je sortis la gemme mystique du petit sac. Puis nous criâmes tous en chœur : « Heimkomen ! »
J’entendis un terrible hurlement de colère qui sembla se perdre au loin. Le château s’évanouit dans un jaillissement de couleurs et une clarté aveuglante. Puis plus rien.

Je sentis un sol rugueux sous ma joue. Mes oreilles bourdonnaient. Une forte lumière traversait mes paupières. Je perçus une douce chaleur sur ma peau. Le soleil ! Tout mon corps était meurtri, j’avais l’impression qu’un cheval m’avait piétinée. En revanche, la douleur dans mon dos s’était un peu atténuée. Comme j’essayais de bouger la tête, une douleur cinglante irradia à partir de mon nez cassé. Je dus m’appuyer sur mes bras pour me relever. Et j’ouvris les yeux.
Il me fallut quelques secondes pour recouvrer la vue. Nous étions en plein jour. Mes compagnons étaient dispersés autour de moi et eux aussi étaient en train de reprendre connaissance, même Klueber remuait faiblement. Un autre moment me fut nécessaire pour reconnaître l’endroit où nous nous trouvions. Lentement, je distinguais une rumeur agréablement familière. Une foule de badauds s’était agglutinée autour de nous.
Nous étions sur la grande place devant le Temple sacré de Sigmar à Altdorf.
Je ressentis une joie indéfinissable. Nous avions réussi et nous étions vivants !
C’était tellement incroyable !

Un jeune prêtre s’approcha de nous ; il parut nous reconnaître, ses yeux s’élargirent et il retourne en courant vers le Temple. Quelques instants plus tard, Mauer le Lumineux se précipita hors du bâtiment. Il était accompagné par plusieurs acolytes et des soldats de la Reiksguard. Il souriait comme jamais et nous salua avec enthousiasme.

- Ces courageux aventuriers ont sauvé l’Empire ! dit-il en se tournant vers son escorte et les curieux rassemblés autour de nous. Ils ont déjoué les plans maléfiques des forces du Chaos.

La foule commença à nous acclamer. Les « hourras » fusèrent. Plusieurs femmes s’approchèrent de nous et nous offrirent des fleurs. Tous étaient souriants et amicaux. Je ne suis guère habituée à ce genre de manifestations ; généralement je suscite plutôt de la méfiance ou de la peur. Une fillette maigrichonne, avec de grands yeux noirs vint vers moi et me tendit une poupée en chiffon, très usée avec des vêtements déchirés et à laquelle il manquait un œil en bouton.

- Elle s’appelle Anna et je l’aime très fort. Mais je n’ai rien d’autre à te donner pour te remercier. Maintenant, à chaque fois que je penserai à elle, je penserai à toi. Plus tard, je veux être aussi intelligente et courageuse que toi.
Plusieurs hommes sortirent de la foule. Un s’approcha de moi avec un grand sourire amical. Il me souleva comme un fétu de paille et avant que je puisse réagir m’assit sur son épaule. D’autres firent de même avec mes compagnons et nous voilà portés en triomphe à travers les rues de la ville. De petits attroupements se formèrent le long du trajet. Les gens chantaient et nous criaient des mercis. On nous jeta des fleurs et des rubans ; on nous donna des bouteilles de vin.
Le joyeux cortège se dirigea vers le palais impérial. Mauer nous avait devancés et nous attendait dans la cour avec le Graf von Kaufmann. Il fallut un moment avant que la foule ne consente à nous laisser entrer. Nous étions tous abasourdis par cet accueil.
Mauer et le Graf nous conduisirent à travers le palais, dans de magnifiques couloirs, ornés des tentures et dorures. J’étais tellement émue d’être là que j’en éprouvais même quelques difficultés à respirer. Puis nous arrivâmes devant une immense porte, gardée par des Chevaliers-Griffons à la mine sévère. Les deux battants s’ouvrirent, c’était la chambre impériale.
L’Empereur était couché dans un grand lit avec des draps fins, superbement brodés. Il était encore très pâle. Il resta silencieux, mais nous fit un petit signe de la main. Deux serviteurs l’aidèrent à se redresser et le calèrent avec des coussins. Ensuite, ils sortirent discrètement et le Graf nous proposa de faire notre rapport. Karl Franz nous écouta avec attention, mais à plusieurs reprises, je vis ses yeux se fermer et sa tête dodeliner. Je ne suis pas sûre qu’il comprenait bien tout ce que nous lui racontions.
Quand nous eûmes terminé notre récit, Mauer et le Graf nous attirèrent un peu à l’écart de l’Empereur qui sembla se rendormir.

- Je croyais que Sa Majesté était en voie de guérison, dis-je.
- Hélas, il a fait une rechute, chuchota Mauer, l’air attristé. Malgré l’éloignement de Baerfaust, le mal a repris sa progression et il sombre de plus en plus rapidement. Rien ne fonctionne. Les médecins, les prêtres et les mages sont tous impuissants.
- Des rumeurs commencent à circuler à Altdorf, continua von Kaufmann. Quelques ambitieux piaffent d’impatience et parlent même de procéder à une nouvelle élection puisque l’Empereur n’est plus en mesure de gouverner.
- C’est d’autant plus grave, ajouta Mauer que la menace du Chaos reste bien présente. L’ordre n’est pas encore rétabli dans le Nord. Nous avons besoin de fortes personnalités, capables de rassurer le peuple, de faire taire les grandes familles et d’effrayer nos ennemis. De vrais héros, comme vous !
- Pardon !? laissais-je échapper, sous le coup de la surprise.
- Où voulez-vous en venir ? demanda Lars.
- Vous êtes devenus des héros, reprit Mauer. Ceux qui savent ce que vous avez fait seront prêts à vous suivre et nous le raconterons encore et encore pour que tout le peuple de l’Empire en soit informé. Je peux vous assurer du soutien des collèges de magie.
- Et de la plupart des nobles, ajouta le Graf.
- Personne ne mérite de gouverner plus que vous, dit Mauer.
- Il y a plusieurs possibilités pour cela. Dans l’immédiat vous pouvez facilement être nommés conseillers auprès de l’Empereur. Ensuite, nous aviserons… Faites comme bon vous semble, dans tous les cas, il ne pourra pas s’y opposer.

Nous étions tous profondément choqués et nous avions du mal à en croire nos oreilles. Mauer et von Kaufman étaient-ils vraiment en train de nous proposer de diriger l’Empire ? C’était parfaitement inconcevable. Certes, nous étions allés en Enfer et nous en étions revenus ; nos actions avaient sauvé l’Empire d’une menace qui aurait pu lui être fatale. Mais de là à gouverner… nous n’en étions tout simplement pas capables. Nous n’étions pas qualifiés pour cela et surtout, aucun de nous ne le souhaitait.
Nous n’avions même pas besoin d’en discuter et nous signifiâmes notre refus catégorique à nos deux interlocuteurs. Soudainement, tout devint plus sombre. La somptueuse chambre disparut et laissa place à une grande pièce au mur de pierres brutes, avec ça et là des visages ou des membres fusionnés dans la paroi. Nous étions donc toujours dans le château du Serviteur de Tzeentch ! Tout cela n’était qu’une illusion… Mais nous étions également encerclés par des horreurs roses et bleues.
- La gemme, criai-je en saisissant la pierre qui se trouvait dans le sac autour de mon cou. Nous nous donnâmes la main.
- Heimkomen !

Comme précédemment, je me réveillai sur la place devant le Temple sacré de Sigmar. Je sentis un sol rugueux sous ma joue. Mes oreilles bourdonnaient. Une forte lumière traversait mes paupières. Nous étions tous un peu abasourdis. En étions-nous vraiment sortis cette fois ? Je me relevais en m’époussetant. Tout semblait normal ici. Le temple était toujours en travaux, mais il y avait beaucoup moins de gravats et de pagaille que lors de notre départ. Les ouvriers avaient dû avoir le temps de ranger… Un jeune prêtre arriva du temple, nous reconnut et retourna à l’intérieur aussi rapidement. Il revint avec Mauer, plusieurs mages Lumineux et d’autres prêtres de Sigmar. Ils nous acclamèrent et nous bénirent. Ils entreprirent de nous escorter jusqu’au palais impérial. Le monde se rassemblait sur notre passage pour nous applaudir. Une gamine avec de grands yeux noirs s’approcha de Grunilda et lui offrit une vieille poupée, usée et tachée :

- Elle s’appelle Ilse et je l’aime très fort. Mais je n’ai rien d’autre à te donner pour te remercier. Maintenant, à chaque fois que je penserai à elle, je penserai à toi. Plus tard je veux être aussi forte et brave que toi.

Nous étions tous très attentifs au moindre détail, cherchant des indices d’une nouvelle illusion. Mais tout semblait normal. Une multitude en liesse nous accompagna jusque devant le palais. L’Empereur nous attendait dans la cour d’honneur, entouré de tout un détachement de Chevaliers-Griffons en grande tenue d’apparat. Il y avait même Griffe Mortelle qui se tenait à ses côtés, s’ébrouant et déployant ses magnifiques ailes.
En approchant de l’Empereur, je sentis mon cœur s’emballer, j’osais à peine le regarder. Il avait l’air en parfaite santé et malgré l’épreuve qu’il venait de traverser, je lui trouvais une très belle allure. C’était la première fois que je le voyais d’aussi près et je me dis qu’il paraissait encore très jeune.
Nous nous agenouillâmes. Mais l’Empereur s’avança vers nous et nous demanda de nous relever.

- Ce serait à moi de m’incliner, dit-il avec un sourire chaleureux. Mes bons amis, Mauer et von Kaufmann, m’ont raconté tout ce que vous avez fait pour nous : le complot que vous avez aidé à déjouer. Votre courageuse mission dans les terres du Chaos. L’Empire sera éternellement redevable. Et même l’ensemble du Vieux Monde ! Mais je doute que nous n’obtenions jamais de remerciements des Bretonniens ! ajouta-t-il en riant. Comment puis-je vous récompenser à la hauteur de ces mérites ? Rien ne serait assez beau, hélas, mais j’ai quelques idées. L’Averland n’a toujours pas de comte-électeur et j’ai demandé à mon chambellan d’établir une liste d’autres titres et charges qui sont actuellement vacants. Puis, il leva les bras en signe de bienvenue et ajouta : mais, entrez ! Nous aurons tout le temps pour discuter de cela pendant le dîner que nous allons organiser en votre honneur. Mes serviteurs vont s’occuper de vous préparer des bains chauds et nous devrions trouver des costumes plus appropriés. Ensuite nous pourrons profiter d’une bonne nourriture et d’excellents vins.

On nous conduisit à l’intérieur du palais, dans un dédale de pièces et d’antichambres. Grunilda et moi fûmes amenés dans une magnifique salle de bain. Il flottait dans l’air une douce senteur de vanille. Comme je me déshabillai, je me souvins brusquement des blessures dans mon dos. Discrètement, j’appelais Grunilda et lui demandais de vérifier l’état de mes cicatrices avant qu’une servante ne les voie. Grunilda laissa échapper une exclamation de surprise. Je manquais de défaillir. Non ! c’était donc si horrible ?

- Eh bien… tu n’as presque plus de traces !
- Comment, tu es sûre ? J’ai eu si mal pourtant…
- Regarde toi-même, dit-elle en me poussant vers un miroir.
Je me contorsionnais entre les psychés. Effectivement, les stigmates se devinaient à peine.
Comment cela se pouvait-il ?
Grunilda et moi flairâmes une supercherie. Nous décidâmes d’être plus attentives et méfiantes. Nous n’avions pas fait très attention jusque-là, mais il nous semblait que nous n’avions pas trop vu de symboles de Sigmar, ni marteaux ni comètes à double queue. Il n’y en avait pas dans cette salle de bain, passe encore, mais comme nous repartions à travers les couloirs, vêtues de belles robes de soie, nous n’en remarquâmes pas plus, alors qu’il y aurait dû y en avoir un peu partout dans la demeure de l’héritier du Dieu.
Le festin était servi dans une immense salle à manger. L’Empereur présidait et il nous invita à sa table, aux places d’honneur. Il n’y avait que du grand monde. La Comtesse Emmanuelle si bien apprêtée qu’elle paraissait dix ans de moins. Je vis aussi plusieurs ambassadeurs elfes. Tous ces gens étaient bien parés, coiffés, maquillés. On aurait dit que les plus belles personnes de l’Empire s’étaient toutes donné rendez-vous. Même Mauer avait arrangé avec un soin particulier sa barbe d’habitude négligée. Quant au Graf von Kaufmann, il a toujours été charmant et très bien habillé, mais ce soir, il avait l’air presque divin. Il vint s’asseoir entre Grunilda et moi.
La fête commença. Le service était assuré par de jeunes nobles qui devaient appartenir à de grandes familles d’après les armoiries qu’ils arboraient sur leurs vêtements. Tous étaient particulièrement élégants et je remarquais, chose plus surprenante, que les yeux brillaient d’admiration lorsqu’ils nous regardaient ou s’adressaient à nous. Les plats étaient magnifiquement présentés et leurs fumets tout à fait exceptionnels. Toutefois, quelque chose, un doute, me retenait d’y goûter. Mes camarades ne semblaient pas avoir beaucoup plus d’appétit que moi, à part Klueber qui se délecta de plusieurs mets. Le Graf se montra particulièrement amical envers moi. Au début, je me sentis flattée, mais il se fit un peu… pressant. Il s’approchait très près pour chuchoter toutes sortes de compliments à mon oreille, à un moment, ses lèvres frôlèrent même mon cou. Il posait sa main sur la mienne et me caressait le bras. Cela me mit assez mal à l’aise. J’essayais de m’écarter. Lars était assis en face de nous et, à plusieurs reprises, il me lança des regards interrogateurs. Pour me redonner une contenance, je bus un peu de vin, du bout des lèvres. Il était à la fois capiteux et grisant. Jamais je n’en avais savouré de meilleur.
La soirée était très gaie. Tout le monde paraissait heureux. Lorsque les conversations revinrent sur les récompenses qui nous étaient promises, l’empereur nous expliqua qu’il nous octroierait des titres, des terres et des revenus ; nous n’aurions plus jamais à travailler ou à risquer nos vies et nous étions libres de faire ce que nous voulions.
Tout semblait si incroyablement parfait…
À mesure que la soirée avançait, j’étais de plus en plus convaincue que tout cela n’était pas réel. Mes compagnons aussi devenaient de plus en plus sceptiques. Seul Klueber profitait du festin et s’amusait beaucoup.
D’un commun accord, nous nous levâmes et dîmes que nous refusions tous ces cadeaux. Et tout à coup, le palais s’évapora laissant place à un bâtiment qui semblait être construit à partir de formes humaines nues et entrelacées. Au lieu de la noblesse de l’Empire, nous étions entourés d’inquiétantes démonettes de Slaanesh. Voyant que nous avions découvert leur imposture, elles tentèrent de nous attaquer. Eckhart parvint à les ralentir avec des tentacules. Une fois de plus, nous nous regroupâmes – même s’il fallut tirer Klueber de son état d’hébétude – et nous utilisâmes la gemme mystique pour fuir. Tout disparut autour de nous, il n’y eut plus que de la lumière puis l’obscurité.

Je sentis un sol rugueux sous ma joue. Mes oreilles bourdonnaient. Une forte lumière traversait mes paupières.
Après les chimères de Tzeentch et de Slaanesh, il fallait certainement s’attendre à ce que Nurgle ou Khorne ait à son tour envie de jouer avec nous.
Tout se déroula exactement comme les autres fois : le jeune prêtre, la foule, Mauer et ses suivants…
Toutefois, nous avions beau tout inspecter, rien ne trahissait une illusion. Les rues d’Altdorf me semblaient parfaitement normales alors qu’avec un peu de recul je réalisais que précédemment elles étaient beaucoup trop propres. Les ongles de Mauer étaient un peu sales et ses cheveux emmêlés ; un des acolytes était défiguré par une large cicatrice sur le visage. Au moins, tout n’était plus aussi lisse et faussement idéal.

Une fillette avec de grands yeux noirs s’approcha timidement de Klueber et lui donna une poupée, plutôt jolie et en assez bon état ; elle avait dû en prendre beaucoup de soin.
- Elle s’appelle Clothilde et je l’aime très fort. Mais je n’ai rien d’autre à te donner pour te remercier. Maintenant, à chaque fois que je penserai à elle, je penserai à toi. Plus tard je veux être aussi vaillante et loyale que toi.

Le trajet jusqu’au palais impérial ne présenta aucune nouveauté remarquable. Mais nous avions du mal à nous enthousiasmer cette fois. Le Graf von Kaufmann nous rejoint dans la cour. Je constatais qu’il était nettement moins séduisant que lors du festin ; il toussait légèrement et il semblait un peu fatigué, comme avant notre départ. Je ne pus toutefois m’empêcher d’être un peu gênée en sa présence et je me tins à une certaine distance. Lars remarqua mon embarras et cela le fit bien rire.
On nous conduisit jusqu’à la chambre de l’Empereur. Karl Franz était couché dans son lit, les yeux mi-clos et respirant avec difficulté. Son corps était enflé et son visage congestionné. Une odeur nauséabonde flottait dans la pièce. Nous fîmes notre rapport, mais il ne nous écouta pas. Je ne suis même pas certaine qu’il était conscient.
Mauer et von Kaufman semblaient totalement accablés.

- C’est l’œuvre de Nurgle, indiqua Mauer à voix basse. Un simple initié pourrait le voir. Impossible de dire de combien de maladies il est atteint. Mais, étrangement, il reste en vie. Cela me dépasse… Est-il en train de se transformer comme ces abominables Porte-Pestes ?

Un silence pesant s’installa. Je ne pus m’empêcher d’espérer qu’une fois de plus tout cela ne fût qu’un mirage… C’était vraiment horrible à voir.

- Cette situation ne pourra plus être dissimulée très longtemps, reprit Mauer. Cela fait des semaines que les gens réclament leur Empereur… mais nous ne pouvons leur montrer cela !
- Si la nouvelle de son état venait à se savoir, il y aurait une immense panique, peut-être même une guerre civile, ajouta le Graf. Certains comtes-électeurs pourraient en profiter pour revendiquer l’indépendance de leurs provinces ; ils pourraient aussi se battre pour récupérer le trône. Je reste fidèle et dévoué à Karl-Franz, mais… regardez ! Aujourd’hui, c’est un mutant. Il est devenu un danger pour nous tous.
- N’y a-t-il donc rien à faire, questionna Klueber.
- Nous avons tout tenté, souffla Mauer, les yeux brillants de larmes. Si seulement, il pouvait mourir rapidement. Au moins, ce serait la fin de sa souffrance.
- Oui, renchérit Von Kaufmann. Il doit partir promptement et paisiblement. Il doit être enterré et pleuré comme le héros qu’il était. Ensuite, il sera plus simple d’élire un nouvel empereur capable de défendre l’Empire.
- Et… qu’attendez-vous exactement de nous, demanda Eckhart ?

En réalité, nous redoutions tous la réponse parce que ce que nous comprenions à demi-mot était assez effrayant.

- Je pense que nous n’avons pas besoin d’être plus explicites… c’est une idée qui nous est tout aussi désagréable, mais ce serait lui rendre service autant qu’à l’Empire. Au moins, il pourrait partir honorablement.
- Tuez-le donc vous-même ! grogna Grunilda. Ce n’est pas à nous de faire cette sale besogne.
- Jamais je ne porterai la main sur notre Empereur, renchérit Lars.
- Moi non plus, confirmai-je.

Klueber et Eckhart opinèrent du chef en signe d’approbation.
Soudain, nous n’étions plus à Altdorf, mais dans un vieux manoir branlant et empestant la pourriture. L’Empereur avait été remplacé par un Grand Immonde, Mauer et Von Kaufmann, par d’affreux Porte-Pestes. Ils nous fixèrent en se moquant de nous, mais ne firent aucun mouvement pour nous attaquer.

- Vous êtes bienvenus ici. Restez aussi longtemps que vous le souhaiterez et partez quand bon vous semblera…

Mais nous n’avions aucune envie de nous attarder !
Heimkomen !

Je sentis un sol rugueux sous ma joue. Mes oreilles bourdonnaient. Une faible lueur traversait mes paupières. J’ouvris les yeux. Le ciel était encore un peu sombre, nous étions juste avant l’aube.
La place devant le temple sacré de Sigmar était déserte. Il faisait un peu frais. Tous mes membres étaient douloureux et je réalisais que j’étais totalement exténuée.
Un chevalier de la Reiksguard s’approcha de nous, avec son épée à moitié tirée de son fourreau.

- Qui va là ? cria-t-il.

Nous le saluâmes en levant nos mains vides en signe d’apaisement et nous nous présentâmes. Nous demandâmes à parler à Maître Mauer le Lumineux. Mais il nous répondit qu’il était encore trop tôt et qu’il n’était pas arrivé. Il héla les autres gardes qui patrouillaient autour du temple. Un jeune prêtre se précipita avec une lanterne et expliqua que nous étions bien ceux que nous prétendions. Alors, seulement le chevalier rangea son épée et consentit à nous saluer. Il s’entretint quelques minutes avec un soldat qui partit en courant. Immédiatement, le jeune prêtre un peu affolé se précipita à sa suite disant qu’il allait prévenir Maître Mauer.
S’étant radouci, le chevalier nous dit que ce serait un honneur de nous accompagner jusqu’au palais impérial ; le Champion de l’Empereur allait être informé de notre présence et il souhaiterait certainement nous recevoir. Il s’enquit ensuite de notre état. Je pense que nous faisions peine à voir. Il demanda à l’un de ses collègues de nous amener du pain et de la bière. Le pain était dur et la bière éventée, mais j’avais tellement faim, qu’ils s’avérèrent tout à fait délicieux.
Le court trajet se déroula cette fois de manière beaucoup plus calme. Les rues étaient encore peu animées, seuls quelques artisans et ouvriers matinaux traînaient déjà, vacants à leurs occupations. Ici un boulanger essuyait la farine de ses mains, là un laitier tirait une charrette à bras pleine de bouteilles de lait, là encore des charbonniers avec leurs visages noircis avançaient en pressant le pas. Quelques femmes ouvraient leurs volets. Tous nous dévisagèrent, se demandant certainement qui nous pouvions être ainsi escortés. Je dois avouer que je préférai de loin ce retour discret.
J’avais beau scruter tous les détails, rien ne me paraissait anormal cette fois. En avions-nous vraiment fini ? Seul Khorne n’avait pas encore participé au petit jeu de ses frères. Peut-être n’en avait-il simplement pas envie. Au fond, nous ne représentions rien pour le seigneur du Sang et il était peu probable qu’il se préoccupa de l’échec que nous avions fait subir à Tzeentch.

Nous traversâmes la Kaiserplatz, jusqu’à l’entrée principale du palais. Un petit bataillon de la Reiksguard était aligné en rang serré. Mauer accourut, les cheveux en bataille et la mine froissée de celui qui a été tiré du lit plus tôt que prévu.

- Vous êtes enfin rentrés ! s’exclama-t-il en nous voyant. Nous ne vous espérions plus : voilà cinq jours que vous nous avez quittés. Où est Baerfaust ? L’avez-vous ramené ?
- Non, répondit Lars. Il nous a attaqué et nous avons dû le tuer. Mais, cette fois, il est bien mort.
- Très bien, très bien, convint-il, pourtant il avait l’air un peu contrarié. Je vais faire prévenir les autres mages du Collège Lumineux pour que nous entamions immédiatement les incantations et le cérémonial de fermeture du portail.

Il fit signe à un jeune apprenti qui le suivait comme son ombre, lui chuchota quelques mots et celui-ci détala ventre à terre.
Le Graf von Kaufmann aussi était là, guère mieux réveillé, mais arborant un sourire radieux. Une petite foule commençait à se rassembler sur la place.
Un homme de forte stature apparut. Il était vêtu d’une armure de plate ornementée. Une couronne de laurier ceignait son casque et un grand talisman à l’effigie de Ghal Maraz pendait à son cou. Il portait une barbe touffue et son visage était parcouru de nombreuses cicatrices. À sa ceinture brillait la Rechtsthal, l’épée de Justice. Je l’avais déjà vu lors de parades après de grandes batailles, mais d’aussi près, il était particulièrement impressionnant ; je compris à cet instant pourquoi on le surnommait le Colosse.
Ludwig Schwarzhelm s’adressa à nous assez cordialement, mais avec une certaine froideur ; cela ne m’étonna pas, tout le monde connaît son austérité.
Il nous félicita sans effusions, après tout nous n’avions fait que notre devoir en servant l’Empire. Il nous dit que l’Empereur était encore un peu faible, mais qu’il souhaiterait assurément nous recevoir quand nous serions un peu… rafraîchis. Il ajouta qu’il espérait que nous pourrions lui faire en privé un compte rendu détaillé de notre aventure.
Conscient de la foule qui ne cessait de grossir, il improvisa toutefois un petit discours en notre honneur. Il nous demanda de nous tourner vers l’assemblée et commença :

- Dans l’heure la plus sombre de l’Empire, ces courageuses personnes se sont avancées pour défendre notre bien-aimé Empereur et son peuple. Nous accueillons ces héros à Altdorf, dans…

Le reste de l’éloge ne fut jamais prononcé. Le lugubre son d’un cor de guerre résonna sur la place et entraîna un silence de mort. Les soldats de la Reiksguard saisirent leurs armes et se mirent en formation. Entre nous et les chevaliers, l’air étincela brièvement, puis une aura de teinte rougeâtre apparut. Rapidement, elle sembla se solidifier et constituer une sorte de membrane. Puis, soudain, l’espace se déchira, le sol se couvrit de milliers de gouttes de sang et une troupe de démons bondit hors cette faille en rugissant. C’étaient de gigantesques créatures musclées et affublées de pattes de chèvre. Leur peau était rouge et leurs têtes bestiales étaient dotées de grandes cornes incurvées. Ils étaient armés d’ahurissantes épées dégoulinantes. Il y en avait une vingtaine.
Il s’agissait de Sanguinaires, ces démons qui forment le gros des légions de Khorne. Nous avions pu les éviter dans les désolations du Chaos, mais ils étaient parvenus à nous suivre jusqu’ici. Ou bien est-ce encore une illusion ? Nous n’eûmes guère le temps de nous interroger, car immédiatement ils passèrent à l’attaque.
Un cri retentit : « Du sang pour le Dieu du Sang, des crânes pour le trône de Khorne ! »

Cette brusque apparition avait fait fuir les badauds. En revanche, les soldats réagirent sans attendre et se ruèrent sur les démons. Mauer lança un éclair éblouissant sur le portail qui commença à se rétrécir. Ludwig Schwarzhelm se positionna à la porte du palais et dégaina l’épée de Justice. Rien ne passerait !
En dépit de la fatigue et des blessures qui nous handicapaient, nous nous battîmes aussi de toutes nos forces. Je remarquais très vite que je n’avais plus mal au dos et que ma magie se comportait tout à fait normalement.
L’affrontement fut particulièrement violent. Ces monstres étaient totalement déchaînés ; leur soif de sang et de mort ne connaissait aucune limite. Mais c’était sans compter le courage des chevaliers de la Reiksguard, le talent de Mauer et surtout la détermination et la force du Champion de l’Empereur : à lui seul, il dut bien éliminer quatre ou cinq démons.
Néanmoins, je ne vis pas la fin du combat. Dans la mêlée, je me retrouvais face à un immense Sanguinaire. Il me toisa avec un rictus féroce. Je crois qu’ils éprouvent une haine particulière pour les magiciens… Il chargea. J’eus juste le temps de lancer une boule de feu, mais il continua d’avancer, malgré les flammes qui léchaient sa peau. J’esquivais un premier coup d’épée, mais il me faucha de son autre main. Je fus projetée de plusieurs pas en arrière. En heurtant le sol, je perdis connaissance.

Je me réveillai dans une petite chambre de l’hospice de Shallya. Impossible de dire depuis combien de temps j’étais ici. Tout était silencieux. Il me fallut quelques minutes pour me remémorer les évènements qui m’avaient conduite là. Une jeune prêtresse s’approcha avec un sourire amical.

- Enfin, vous voici revenue parmi nous !
- Que… que s’est-il passé ?
- Eh bien, vous avez pris un mauvais coup à la tête. En plus, du nez cassé, de divers hématomes et coupures, dont une assez profonde à l’épaule. Ah ! vous étiez aussi déshydratée et dans un état d’épuisement inouï. Vous êtes restée inconsciente pendant quatre jours.
- Et mon… mon dos ?
- Euh… je crois que vous devez avoir quelques contusions, mais rien de très grave. Pourquoi ? Vous avez mal ?
- Non, répondis-je après une rapide analyse de mes sensations. Mais j’ai de grandes entailles… sont-elles… normales ?
- Je n’ai rien observé de particulier. Et maintenant, vous aurez une ribambelle de cicatrices supplémentaires. Par chance, votre nez ne devrait pas être trop tordu, nous avons réussi à le replacer convenablement. Vous avez encore besoin de repos. Je vais vous ramener quelque chose à manger. Plusieurs personnes sont venues vous voir, regardez, on vous a même apporté des fleurs. Ils devraient être ravis de pouvoir enfin vous rendre visite.

De fait, quelques heures plus tard, Grunilda et Klueber arrivèrent dans la chambre en poussant des cris de joie. Ils me racontèrent comment ils avaient réussi à triompher des Sanguinaires. Schwarzhelm et Mauer y étaient pour beaucoup.

- À l’occasion, tu pourras remercier Mauer, précisa Klueber. Tu lui dois une fière chandelle. C’est lui qui a empêché ce démon de te tuer. Lars et Eckhart ont été blessés aussi. On les a conduits ici en même temps que toi. Mais, c’était moins grave et ils sont déjà sortis. Ils se reposent à l’auberge.

Notre mission avait porté ses fruits et le portail au Temple avait enfin pu être fermé. Altdorf n’était plus en danger, au moins pour le moment. La veille, mes compagnons avaient été invités par l’Empereur. Il les avait félicités chaleureusement. Mes deux amis en étaient encore exaltés. Mais il ne fallait pas que je m’inquiète, je n’avais rien raté car, constatant qu’il manquait une personne, Karl-Franz avait demandé de mes nouvelles et avait promis de me rencontrer aussi. Je me sentis à la fois heureuse mais déjà angoissée à l’idée de me retrouver face à l’Empereur.

- Et là, ce n’était pas une illusion, chantonna Grunilda. L’Empereur est encore convalescent, mais il est tout à fait normal. Tout est normal ! Nous sommes rentrés à la maison !
- Enfin… ça en a l’air au moins, rajouta Klueber, la mine un peu sombre. Mais, est-ce qu’on peut vraiment s’y fier cette fois ?
- Oh, allez, grogna Grunilda. Ne sois pas rabat-joie ! Nous l’aurions remarqué si nous étions encore dans les Désolations.

Malheureusement, j’étais plutôt d’accord avec Klueber. Nous allions désormais devoir vivre avec cette incertitude.

J’étais encore faible et j’avais du mal à parler. Aussi mes camarades ne restèrent pas longtemps. Comme ils s’apprêtaient à partir, un homme entra, caché derrière un gros bouquet de fleurs.

- La prêtresse m’a dit que tu étais enfin réveillée. Le Magister Patriarche va être content de l’apprendre.

Il me fallut quelques instants pour reconnaître cette voix.

- Oh, mais tu as déjà de la visite. Bonjour ! Sacha Welfen, pour vous servir !

Il posa les fleurs, s’approcha de moi et déposa un baiser sur mon front.

- Par Sigmar ! dans quel état ils t’ont mise… Ma chère Hannah ! J’étais mort d’inquiétude !
Il avait l’air sincère… Quel plaisir de le revoir ! Grunilda et Klueber le regardaient, mi surpris, mi amusés.

- Bien maintenant, il faut que tu récupères au plus vite. Le Magister Patriarche veut que je m’occupe de ton apprenti tant que tu ne seras pas sur pieds. Mais ce Stephen est un mollusque ! Comment notre maître a-t-il pu récupérer ce garçon ?
- Eh bien, tu es entre de bonnes mains, Hannah, dit Grunilda avec un clin d’œil appuyé. Nous allons vous laisser. Nous reviendrons demain ; il y a quelques petites choses que nous devrons éclaircir…

Ils sortirent en riant.
Sacha resta encore de longues heures. Nous avions tant de choses à nous raconter. Mais, comme j’étais encore faible, c’est surtout lui qui parla.
À Marienburg, il travaillait pour une puissante famille d’armateurs qui commerçaient avec plusieurs cités du littoral au Nordland, en Ostland et jusqu’en Kislev. Or, ces provinces avaient été les premières touchées par l’invasion. Entre les raids sanglants des Maraudeurs norses, une recrudescence de la piraterie dans toute la Mer des Griffes et même quelques incursions d’hommes-bêtes, la situation était vite devenue critique. Les riches maisons de Marienburg avaient tenté de riposter et envoyé des contingents importants dans de nombreux navires. Sacha avait donc passé ces derniers mois en mer à chasser des pirates ou dans des ports à soutenir la résistance. Cela faisait moins de deux semaines qu’il était rentré. C’est alors qu’il avait appris la disparition de notre Maître. En toute logique, il pensait que je l’avais accompagné et que donc j’étais morte aussi. Presque immédiatement et comme la plupart des mages flamboyants, il avait reçu une convocation de Thyrus Gormann lui enjoignant de venir au Collège. Il avait tout juste eu le temps d’organiser son voyage et de prendre ses dispositions pour une absence qu’il estimait à quelques semaines.
Il n’était donc arrivé à Altdorf que depuis trois jours. Là il lui avait dit que j’étais encore en vie. Le Magister Patriarche lui avait confié Stephen et lui avait juste dit que j’avais joué un rôle décisif dans les derniers évènements qui avait secoué l’Empire.

- Il avait l’air fier de toi, rajouta Sacha. Et quand je te vois je me dis que tu as dû traverser des épreuves terribles et que si par bonheur tu t’en es sortie, c’est que tu as dû bien te battre. Mais, ma pauvre Hannah, comment t’es-tu laissée embarquée dans tout cela ?

Mais, il me fallut plusieurs jours pour répondre à ses questions et lui raconter nos aventures.

Je revis peu mes compagnons dans les jours qui suivirent. Klueber et Eckhart furent les premiers à quitter Altdorf pour retourner à Ubersreik. Le premier pour retrouver sa jeune épouse, le second pour soutenir sa famille face aux intrigues politiques liées au prochain rattachement de la ville au Reikland. Nous en profitâmes pour faire une petite fête et pour l’occasion j’eus la permission de sortir de l’hospice. Lars en profita pour nous annoncer qu’il allait rejoindre la prestigieuse Reiksguard : nos exploits lui avaient ouvert les portes de cette troupe d’élite au service de l’Empereur. Nous étions tous très heureux pour lui. Grunilda, quant à elle, projetait de repartir à l’aventure ; elle souhaitait retourner tout d’abord à Karak-Azgaraz ; elle avait promis au maître archiviste de la ville et au gardien des rancunes de revenir quand nous aurions accompli notre mission dans les Montagnes Noires.
Après avoir passé tout ce temps ensemble, chacun devait repartir de son côté.

Rapidement, Sacha et moi reprîmes notre relation là où elle s’était arrêtée à Marienburg ; sa présence et son soutien furent une bénédiction pour moi car le retour au Collège allait se révéler bin plus difficile que prévu. Je n’avais jamais été très populaire, mais désormais, les autres mages flamboyants m’évitaient. Les apprentis partaient en courant quand j’arrivais. Personne ne m’adressait la parole. On détournait le regard et on chuchotait sur mon passage. Seul le Magister Patriarche restait cordial. Ce qui évidemment aggravait encore l’hostilité des autres.

Le lendemain même de mon retour, Thyrus Gormann demanda me convoqua. Je dus lui exposer, point par point, notre périple dans les désolations du Chaos. Un peu de « thé », m’aida à ne rien oublier. Il parut assez inquiet quand j’évoquais les blessures dans mon dos et il voulut les inspecter. Il ne fit aucun commentaire, mais semblait perplexe ; je ne sus comment interpréter cela.
Sacha eut beau me dire que mes cicatrices, étaient moches, certes, mais n’avaient rien d’anormal, je continuais d’être angoissée.

- Plus tu y penseras, plus il y a de risque que ça dégénère un jour, disait-il. Nous sommes des sorciers, nous sommes de toute façon sensibles à la corruption. Une blessure de plus ou de moins, ça ne change rien à l’affaire.
- Je vois bien comment les autres sorciers et les apprentis me regardent, ils pensent que je suis maudite !
- Nous sommes tous maudits, Hannah, dès le jour où nous voyons danser devant nos yeux les flammes d’Aqshy… Et ils ne savent pas pour tes blessures, il n’y a que le Magister Patriarche et moi qui sommes au courant.
- Mais tu vois comment ils réagissent…
- Ils savent que tu as poursuivi des démons jusque dans leur antre. Ils te craignent et ils envient ton courage aussi. Surtout, ils sont jaloux parce que le Magister Patriarche s’intéresse à toi, parce que tu vas rencontrer l’Empereur.

Effectivement, quelques jours après mon retour, Thyrus Gormann m’accompagna au palais impérial où l’Empereur nous avait convié à partager son repas. Le Magister Patriarche est un ami personnel de Karl-Franz, il est donc habitué à ce genre de rencontre, mais moi… J’en vomis de trac plusieurs fois dans la matinée et, une fois devant l’Empereur, je ne fus capable de bredouiller que d’insipides banalités.

- Ne soyez pas intimidée mademoiselle, dit-il en constatant mon trouble. Je crois savoir que vous avez affronté bien pire qu’un déjeuner en ma compagnie.

Le repas fut simple mais délicieux, au moins pour le peu que je pus avaler. La conversation tourna sur les dernières nouvelles de la guerre dans le nord, puis sur la réorganisation du Collège suite au nombreux décès que nous avions dû déplorer.
L’Empereur se montra affable et même chaleureux. Il avait l’air presque totalement remis. Hélas, cette entrevue fut gâchée par les horribles souvenirs que je gardais de lui agonisant. Même si j’étais consciente qu’il ne s’agissait que d’illusions ces images me hantaient.
Au moment du dessert, alors que nous buvions un étrange vin pétillant, il m’annonça que par décret impérial, j’allais être promue au rang de Magister de mon Ordre. Thyrus Gormann ajouta qu’il était pleinement d’accord avec cette décision. En dépit de mon jeune âge et de mon inexpérience, ma participation active contre la conspiration et l’aller-retour dans les Terres du Chaos justifiaient cette nomination. J’étais heureuse évidemment, mais je me dis aussi cela risquait encore de nuire à ma réputation auprès de mes confrères. Les sorciers sont généralement très pointilleux sur respect des règles de promotions hiérarchiques.
Je ne mettais pas trompée.

Physiquement, je récupérais assez vite, mais mentalement les choses prirent plus de temps. Je faisais d’affreux cauchemars : j’errais dans les Désolations, je me noyais dans des rivières de sang ou bien j’étais torturée par des horreurs roses… quand j’émergeais de ses épouvantables rêves. Il me fallait parfois plusieurs secondes pour reconnaître Sacha auprès de moi et non une démonette de Slanesh ou un cadavre pourrissant. Pendant ma convalescence, ces hallucinations étaient presque quotidiennes. Ce monde était-il bien réel ou étais-je perdue dans une illusion ? Cette question me taraudait sans cesse. Là encore, c’est Sacha qui m’aida à surmonter ces moments difficiles. Il sut trouver les mots pour m’aider à reprendre le dessus, à défaut de véritablement me réconforter.

- Le monde dans lequel nous vivons est dangereux, violent et injuste. Les gens se font massacrer par des créatures monstrueuses, la faim et les maladies sont partout. Crois-tu vraiment qu’il y ait besoin de créer des illusions pour nous faire vivre en enfer ?
- Ces démons sont malins, ils peuvent imiter la réalité. Mais je n’ai aucun moyen d’être sûre…
- Vous avez déjoué les autres chimères, pourquoi celle-là tiendrait-elle ?
- Je ne sais pas…
- Et même si c’est faux, qu’est-ce que tu y perds ? Si tu dois te réveiller, tu te réveilleras un jour… En attendant, il ne te reste qu’à vivre ici, comme tu le faisais avant toute cette histoire et comme nous le faisons tous.
- Mais…
- Essaye de voir les bons côtés, les plaisirs, même les plus intenses sont déjà tellement fugaces… Ne perd pas de temps à te tourmenter. Et puis, tu as des choses à faire, tu dois travailler pour notre Ordre et pour l’Empire. Tu as déjà beaucoup donné, je sais, mais servir est notre raison d’être.

Chaque fois que je faisais un cauchemar, que j’étais inquiète ou déprimée, il me répétait ces arguments ; à force, il finit par me convaincre, au moins un peu. Aujourd’hui encore, quand le doute m’assaille je repense à ces conversations. Avec le temps, les mauvais rêves se sont raréfiés. Aujourd’hui, il y a que lorsque Morrslieb luit sinistrement dans le ciel que j’ai ce genre de vision. Elles m’effraient encore, mais j’arrive à vivre avec.

Malheureusement, Sacha ne pouvait rester indéfiniment à Altdorf et il dut retourner à Marienburg au bout de quelques semaines. J’hésitais presque à partir avec lui. Mais je savais bien que ma place n’était pas là-bas et le Magister Patriarche s’y serait certainement opposé.
Après son départ, je me suis sentie affreusement isolée. Je consacrais l’essentiel de mon temps à m’occuper de Stephen ou à étudier, enfermée dans mes appartements. J’ai lu à cette époque beaucoup plus de livres que je ne l’avais fait durant toute ma formation. Je quittais rarement les tours enflammées du Collège, mais je vis plusieurs fois Lars que la vie à la Reiksguard paraissait absolument combler.
Moi, j’étais loin d’une telle béatitude, au Collège, les autres sorciers me fuyaient et toute sorte de rumeurs circulaient à mon sujet. Seul Thyrus Gormann continuait de se comporter normalement. Un jour, Stephen arriva à son cours avec un œil au beurre-noir et la lèvre fendue. Quand je l’interrogeais il refusa d’abord de me raconter ce qui s’était passé, puis comme j’insistai et qu’il est un peu couard, il finit par m’avouer qu’il s’était battu avec deux de ses condisciples qui disaient que j’étais un agent de Slaanesh et que je cherchais à corrompre les hommes en les séduisant. Évidemment, notre liaison avec Sacha n’était pas passée inaperçue, bien que nous ayons fait de notre mieux pour rester discrets. Je savais que cela allait provoquer des jalousies mais je m’en moquais. En revanche, j’ignorais que depuis son départ une nouvelle rumeur avait commencé à circuler : on racontait que j’aurais jeté mon dévolu sur le Magister Patriarche. Cette fois, cela m’amusait beaucoup moins.
Évidemment, nier ce type de racontar n’aurait fait que le renforcer. Mais là, je n’avais pas vraiment envie que cela remonte aux oreilles de Thyrus Gormann et je ne voulais pas non plus que Stephen souffre de cette situation. Je sais combien il est compliqué d’être apprenti sorcier, inutile d’en rajouter.
J’insistais donc pour qu’on nous confia quelques petites missions hors du Collège. C’était de toute façon utile pour la formation de Stephen et changer d’air nous faisait le plus grand bien.
Ainsi, nous fîmes un petit voyage à Ubersreik pour escorter un messager de l’Empereur. J’en profitais pour rendre visite à Klueber. La douce Esmeralda était enceinte de leur premier enfant et ils semblaient nager dans le bonheur. J’ai d’ailleurs appris récemment qu’elle en avait mis au monde un second. Klueber me raconta qu’il passait beaucoup de temps avec Lord Rickard et ce dernier était de mieux en mieux placé pour prendre la direction de la cité. Il m’apprit aussi que notre ami Eckhart avait décidément la bougeotte et était parti en voyage en Bretonnie.
Par chance, une belle opportunité se présenta à moi. Pendant l’hiver suivant, je reçus une missive du Graf von Kaufmann. Je savais qu’il était rentré depuis plusieurs mois à Averheim. Son action pendant la guerre et ensuite auprès de l’Empereur lui avaient valu une grande popularité et il était désormais un prétendant très sérieux au poste de comte-électeur. Cependant, il n’était pas le seul. Il me proposait donc de travailler pour lui afin d’assurer sa sécurité personnelle et celle de ses affaires. Il disait avoir besoin de collaborateurs courageux et en qui il pouvait avoir pleinement confiance, car ses ennemis étaient nombreux et dangereux.
J’avais un grand respect pour le Graf et la vie au Collège était devenue très pénible. Il fallait que j’accepte ! Toutefois, le Magister Patriarche devait donner son accord. Je passais une nuit entière à préparer soigneusement mon argumentation, mais cela se révéla finalement inutile. Placer un sorcier auprès d’un potentiel comte-électeur était une occasion qu’un fin politicien comme lui ne pouvait laisser échapper.

Stephen et moi fîmes nos bagages sur le champ et nous quittâmes Altdorf quelques jours plus tard. Un fin manteau neigeux était tombé sur la ville et les campagnes environnantes. Le chemin a été long et fatiguant. Nous restâmes plusieurs jours chez mon père à Nuln. Nous n’avons pas pu emprunter la voie fluviale à cause des glaces et, par sécurité, nous avons donc voyagé avec une caravane de commerçants.

Nous avons fini par atteindre la capitale de l’Averland une semaine après le nouvel an de 2522.
Le Graf nous reçut le jour même, en compagnie de Curd Weiss, son bras droit. Il paraissait vraiment ravi que j’aies accepté sa demande. Je notai immédiatement qu’il avait beaucoup maigri et semblait très préoccupé. Il entra immédiatement dans le vif du sujet. Il devait faire face à plusieurs rivaux prêts à tout pour avoir le droit de brandir le croc runique ; les plus sérieux étaient les Leitdorf et cet idiot de Theodosius von Tuchtenhagen. La succession de Clothilde avait posé de nombreux problèmes ; finalement, c’est une de ces cousines, Magdalena, qui avait repris les rênes de la famille von Apltraum. C’était une alliée, mais elle était jeune et inexpérimentée. Le Graf parlait encore de Clothilde avec beaucoup d’émotion et ne semblait pas encore complètement remis de sa disparition. Depuis, j’ai eu de nombreuses fois la confirmation qu’il était vraiment très amoureux d’elle.
Dans la course qui s’était engagée, tous les coups étaient permis. Le Graf avait déjà dû subir d’assez lourdes pertes : convois attaqués par des hors-la-loi probablement rétribués par un de ses rivaux, dépôts incendiés, etc. L’organisation de l’élection était sans cesse retardée par les candidats eux-mêmes et un certain nombre d’autres personnes qui au niveau local avaient tout intérêt à ne pas voir l’installation d’un pouvoir fort. L’activité des peaux-vertes dans les Montagnes Noires ne s’était calmée qu’à la faveur de l’hiver mais reprendrait inévitablement au printemps. C’était le rôle de Tuchtenhagen de maintenir l’ordre à l’Est, mais il en était incapable et préférer passer son temps à intriguer. Enfin, à Averheim même, la trahison de Baerfaust a profondément troublé la population et en particulier les forces de l’ordre ; ces dernières en étaient sorties, de surcroît, complètement désorganisées. Les délinquants et criminels de tout poil en avaient évidemment profité.
En résumé, la situation était complexe et potentiellement explosive.

Les mois qui ont suivi n’ont pas manqué de le démontrer. Voilà plus d’un an et demi que cette affaire dure. Une forme de statu quo s’installe parfois, mais ce n’est que temporaire et cela n’a jamais empêché les rixes et les coups fourrés. Je n’ai pas chômé depuis mon arrivée. Grunilda nous a rejoint il y a quelques mois. Elle était de passage dans la ville sur la route des forteresses naines des Montagnes Noires et, en fin de compte, elle est restée. Son aide a été un grand soulagement. La reprise en main des militaires et le rétablissement de la sécurité a été un premier chantier indispensable et l’occasion de placer quelques pions. Nous avons réussi à déjouer plusieurs complots et le Graf a même échappé à deux ou trois attentats. Un des moments les plus critiques a été l’organisation et la surveillance d’un des rares évènements joyeux de ces derniers mois : le mariage entre le Graf von Kaufmann et Gavin Magdalena von Alptraum.

Les choses ne se débloquant pas, l’Empereur, à bout de patience, a décidé d’intervenir. Il y a quelques semaines, il a envoyé Ludwig Schwarzelm pour accélérer l’organisation de l’élection du nouveau comte-électeur. Nous avons reçu une lettre de Lars qui a fini par apprendre à écrire et qui nous prévenait de sa venue prochaine avec l’armée qui accompagne le Champion de l’Empereur.
Cette arrivée, loin d’apaiser la situation l’a au contraire amenée à complètement dégénérer.

Depuis ma fenêtre de la résidence des von Kaufmann, je vois s’élever plusieurs colonnes de fumée : une partie de la ville est en flamme. Je vais devoir aller rejoindre Grunilda et nos hommes qui se battent dans les rues. Stephen et Curd m’attendent dans la cour avec nos chevaux.
Je suis fermement convaincue que le Graf von Kaufmann est celui qui sera le plus capable d’assumer le rôle de comte-électeur. C’est un homme intelligent, courageux et dévoué à l’Empire. Son élection serait une bénédiction pour l’Averland et au-delà pour l’Empire.
Je suis fière de défendre sa cause et je le ferais avec toute mon énergie.
Antharius
Ascendant
Messages : 1629
Inscription : mar. janv. 15, 2013 3:23 pm

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par Antharius »

C'est tout simplement génial comme CR à lire!

Et le passage dans les désolations du chaos est vraiment impressionnant!

Par contre as tu envisagé que tes joueurs se laissent séduire par le chaos?

Amitiés Franck
Avatar de l’utilisateur
Arkham
Initié
Messages : 184
Inscription : mar. févr. 18, 2014 10:48 pm
Localisation : Lyon

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par Arkham »

Géniale cette fin dans les Terres du Chaos!
Et même l'épilogue, c'est toujours aussi plaisant à lire!
On en redemande! :D
The most important aspect of a story is how it affects the characters in it, not whether the characters manage to save the world in the end.
Jeepform rpg piece of cake
Avatar de l’utilisateur
Thingrim
Profane
Messages : 15
Inscription : mer. juil. 29, 2009 6:12 pm
Localisation : Bangkok

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par Thingrim »

J'ai découvert ce sujet il y a quelques semaines, et j'ai dévoré ces compte-rendus passionants ! Étant fan de l'univers de Warhammer j'y ai retrouvé tout ce que j'aime et surtout une furieuse envie d'y rejouer. Un grand bravo à la rédactrice et à toi pour avoir mené cette campagne épique. Une suite est-elle prévue ?

PS: L'évolution narrative des personnages était très intéressante à suivre, mais serait-il possible d'avoir une idée de leur évolution technique au fil de la campagne (carrières notamment) ?
Par la barbe de Skalf Marteau Noir !
Avatar de l’utilisateur
Lotin
Dieu d'après le panthéon
Messages : 2153
Inscription : jeu. août 30, 2012 9:31 pm
Localisation : Back to the trees !

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par Lotin »

Thingrim a écrit : ven. sept. 22, 2017 6:58 pm Une suite est-elle prévue ?

PS: L'évolution narrative des personnages était très intéressante à suivre, mais serait-il possible d'avoir une idée de leur évolution technique au fil de la campagne (carrières notamment) ?

Pour la première question. J'ai déjà un début de quelque-chose pour le jour où le groupe de joueurs sera à nouveau réuni. Mais va falloir rajouter du muscle, des tendons et du gras à ce squelette (qui est lui-même bien incomplet pour le moment).

Je peux replonger dans mes docs pour te retranscrire l'évolution technique des personnages.
Avatar de l’utilisateur
Thingrim
Profane
Messages : 15
Inscription : mer. juil. 29, 2009 6:12 pm
Localisation : Bangkok

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par Thingrim »

Merci pour ta réponse, ne te casse pas trop la tête pour les fiches, je voulais surtout savoir comment avaient évolué les joueurs non mages^^.
Par la barbe de Skalf Marteau Noir !
Avatar de l’utilisateur
Lotin
Dieu d'après le panthéon
Messages : 2153
Inscription : jeu. août 30, 2012 9:31 pm
Localisation : Back to the trees !

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par Lotin »

Thingrim a écrit : dim. oct. 01, 2017 1:16 pm Merci pour ta réponse, ne te casse pas trop la tête pour les fiches, je voulais surtout savoir comment avaient évolué les joueurs non mages^^.

Alors :

Klueber Schonburg : Garde -> Mercenaire -> Vétéran
Lars Goetze : Patrouilleur rural -> Chasseur de primes -> Duelliste
Grunilda Durakson : Brisefer -> Apprenti Maître des Runes (opportunité en jeu donc pas canon) -> Compagnon Maître des Runes
Les deux magiciens sont arrivés tout juste niveau 3 avant de mettre les pieds dans les terres du Chaos...
Avatar de l’utilisateur
Thingrim
Profane
Messages : 15
Inscription : mer. juil. 29, 2009 6:12 pm
Localisation : Bangkok

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par Thingrim »

Je remarque que les trois personnages non-mages ont choisi une autre carrière de base en deuxième carrière, plutôt qu'une carrière avancée. C'est une règle maison, ou juste une coïncidence ?

J'ai l'impression que les CR n'ont pas beaucoup mentionné l'activité runique de Grunilda, sauf pour parler de son apprentissage. Est-ce du à la difficulté de jouer la magie runique ?
Par la barbe de Skalf Marteau Noir !
Avatar de l’utilisateur
Lotin
Dieu d'après le panthéon
Messages : 2153
Inscription : jeu. août 30, 2012 9:31 pm
Localisation : Back to the trees !

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par Lotin »

Thingrim a écrit : lun. oct. 09, 2017 7:23 am Je remarque que les trois personnages non-mages ont choisi une autre carrière de base en deuxième carrière, plutôt qu'une carrière avancée. C'est une règle maison, ou juste une coïncidence ?

J'ai l'impression que les CR n'ont pas beaucoup mentionné l'activité runique de Grunilda, sauf pour parler de son apprentissage. Est-ce du à la difficulté de jouer la magie runique ?

Pour les trois personnages non-mages c'est de la pure coïncidence (même si je considère que le Brisefer devrait être une carrière avancée de la 3e ed. :D ). Il y a même eu des choix plus roleplay qu'une volonté d'optimisation.

Pour la carrière de maître des runes, la joueuse s'en est très peu servie au final, elle a placé deux fois une rune, elle en détenait une mystérieuse aussi qu'elle comptait ramener chez les nains après le passage à Altdorf. Les règles des Royaumes de la Sorcellerie impliquent à l'artisan de passer beaucoup beaucoup de temps à forger sa rune, ce qui peut ne pas être trop compatible avec un groupe très mobile. Pour couronner le tout, les cr sont du point de vue de la magicienne flamboyante qui n'a pas du tout mis la focale sur ce point là.
Antharius
Ascendant
Messages : 1629
Inscription : mar. janv. 15, 2013 3:23 pm

Re: [CR] Warhammer V3->V2 - Balades en Reikland

Message par Antharius »

Par contre c'est très sympa d'avoir des joueurs qui font des choix logiques plutôt que de la vile optimisation.
Répondre