[CR] Millevaux et autres jeux Outsider

Critiques de Jeu, Comptes rendus et retour d'expérience
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Pikathulhu
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Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

L'ENFER DE DANTE

Grandeur et décadence de la famille Borgia dans un enfer Renaissance où le destin et le temps forment un labyrinthe empli de pièges, où petites et grandes histoires saignent ensemble.

Jeu : Inflorenza Minima, contes cruels dans la forêt de Millevaux

Joué le 28/02/2016 à Rennes lors de la Tournée Rennes est Millevaux

Personnages : Lucrèce Borgia, le Pape Jules II (Roderic Borgia), César Borgia, Rodrigue Borgia, Alessandro Borgia

Image
illustration : Gustave Doré, domaine public


Le théâtre :

On joue en Enfer tel qu'il est décrit dans l'Enfer de Dante, en le décalant dans l'univers de Millevaux, et la table incarne forcément des membres (historiques ou imaginaires) de la famille Borgia.
La marque :
Chaque personnage porte sur le front un tatouage indélébile qui dit pour quel péché en priorité il a été condamné à l'Enfer. Les miroirs n'existent pas en Enfer et l'eau ne reflète rien, aussi il est impossible de lire sa propre marque.
Souvenirs :
Les joueur.se.s avaient ce choix à la création : soit leur personnage se rappelle de tout son passé de mortel sauf de son péché, soit il se rappelle uniquement de son péché.
Clause de vaudeville :
Un personnage peut intervenir dans n'importe quelle scène même si le Meneur a omis de l'appeler.
Charger son cœur :
J'habille le principe du pouvoir d'Inflorenza minima de cette façon : les damnés ont le cœur froid, mais s'ils font quelque chose qui leur nuit ou les éloigne de leur objectif, leur cœur se remet à battre. Ils peuvent ensuite décharger leur cœur pour obtenir une fois ce qu'ils veulent sans payer le prix.
[NDLA : Entretemps, j'ai publié Inflorenza Minima et le terme technique "charger son cœur" a été adopté pour tout le jeu.]
L'Obole :
On peut payer des services avec une obole = une info, un bon souvenir, un mauvais souvenir, un remords, un regret. Petite obole : on raconte seulement. Grande obole : on offre l'information, qui devient maintenant la propriété de l'acheteur (cela peut revenir à offrir son passé, par exemple).
Le Supplice :
Un jour ou l'autre, le démon intime de chaque personnage viendra le trouver pour lui infliger le supplice qui lui est dû. Les joueur.se.s avaient le choix à la création de déterminer si le supplice avait déjà eu lieu, où s'il était encore à venir (et dans ce cas, on ignorait sa nature).


Feuilles de personnage :

Lucrèce
Péché = J'ai jalousé les amantes de mon père
Objectif = empêcher Rodrigue et Alessandro de quitter l'Enfer

Le Pape Jules II
Péché = J'ai intrigué pour que toute ma famille se retrouve en Enfer à mes côtés (ne s'en rappelle pas)
Objectif = empêcher ma famille de quitter l'Enfer

Rodrigue
Péché = J'ai tué Ottavia par sodomie (ne s'en rappelle)
Objectif = retourner dans le monde des mortels pour retrouver Ottavia (il a oublié qu'elle est morte).

César
Péché = J'ai convoité ma soeur (ne s'en rappelle pas)
Objectif = couper les ponts avec sa famille.

Alessandro
Péché = j'ai tué mon frère sur un coup de colère
Objectif = retrouver son frère au paradis


L'histoire :

Le passé, quand les Borgia étaient encore des mortels.

Alessandro a 8 ans. Il joue avec son petit frère Giacomo dans le palazzio Lucrécia, sous la surveillance distraite de Bianca, leur gouvernante. Sa mère Lucrèce, est absente. Elle voit rarement ses enfants. Giacomo veut prendre un jouet à Alessandro, Alessandro se fâche et le frappe. Giacomo tombe sur une pile de jouets en bois. Il est mort.

Bianca met les mains sur sa bouche, elle est paniquée. Statufié, Alessandro ne dit rien. Bianca prend le petit corps dans ses bras. Elle est vite couverte du sang qui file du crâne de Giacomo.

Entre Rodrigue, en armure. A cette époque, il est encore vivant, il est encore condottiere, c'est avant que son frère César ne le fasse tuer pour prendre sa place. Il comprend que Bianca finira bien par dire la vérité un jour, et ce sera une opprobre supplémentaire pour la famille Borgia. Il la prend dans ses bras, comme pour la rassurer, et commence par serrer, serrer.

Alessandro part en criant.

Rodrigue sait que s'il tue Bianca, Alessandro échappera à l'Enfer, il échappera à la rumeur d'être un assassin. Mais il n'ose pas le faire. Il desserre son étreinte, et convient avec Bianca de faire passer la mort de Giacomo pour un accident. Sur son lit de mort, bien des années plus tard, Bianca racontera ce qu'elle a vu, et c'est ainsi qu'Alessandro ira en Enfer... La culpabilité que Rodrigue ressent alors se met à réchauffer son coeur. Rodrigue est en train de desserrer son étreinte sur Bianca, et son propre corps est froid et son coeur à l'arrêt, comme si c'était moins un souvenir de sa vie de mortel qu'une revisite de son passé, et soudain la culpabilité qu'il ressent pour avoir éviter de changer le cours du temps en faveur d'Alessandro, cette culpabilité réchauffe son coeur, qui bat à nouveau.

Le présent, en Enfer.

Bianca a fini en Enfer pour avoir dénoncé Alessandro. Elle se présente, toute vieille, à la Basilique Saint-Pierre où règne le Pape Jules II, grand-père d'Alessandro, auprès de ses cardinaux qui le détestent. Il a désormais fait main basse sur le pouvoir séculaire aussi bien que sur le pouvoir religieux, dans les sept cercles de l'Enfer.

Bianca lui demande l'Indulgence, puisqu'il en fait commerce, puisqu'il fait commerce de places au paradis. Elle a appris qu'on ne peut mourir une fois qu'on est en Enfer, hormis si l'on a acheté une indulgence, auquel cas on meurt à nouveau. Personne ne sait ce qu'il advient d'un damné qui meurt, mais on raconte que s'il a acheté l'indulgence, il va au Paradis. Ce que le Pape sait, c'est qu'il fait commerce avec un démon. Quand quelqu'un achète une indulgence, il laisse le démon tuer la personne. Aucune garantie que cela amène au paradis. Le Pape accepte de vendre une indulgence à Bianca. Cette fourberie réchauffe son coeur, qui se remet à battre. En échange, Bianca doit payer une grande obole. Elle décide de payer avec un de ses regrets : le regret de n'avoir jamais divulgué un secret.

Elle entraîne Jules dans son souvenir. Ensemble, ils s'aventurent dans le palazzio Lucrecia, dans le passé. Elle l'amène devant une porte, à laquelle la jeune Bianca est en train d'écouter. La vieille Bianca et le Papes Jules franchissent le seuil. Derrière, une chambre avec des roses et des bougies, et sur le lit rouge à baldaquins, c'est sa fille Lucrèce, nue et offerte.
Elle vient de tuer une des maîtresses du Pape qui lui ressemblait beaucoup, et elle s'est teint les cheveux pour prendre sa place. Le Pape du passé n'a jamais compris la supercherie. La vieille Bianca déshabille le pape du présent et l'invite à saillir Lucrèce, pour recréer le passé. S'il omet de le faire, Alessandro ne sera jamais né. Alors, il monte sur le lit, et il prend sa fille, de toutes ses forces.

Alors qu'il la couvre, il voit le démon sortir de derrière les tentures, et se diriger vers la vieille Bianca. Il fait chut du doigt pour que le Pape le laisse prendre son dû. Et alors que le Pape et sa fille connaissent l'orgasme, le démon arrive dans le dos de la vieille Bianca et l'étrangle, en silence.

A la taverne du septième cercle, le bouge qui recueille les pires damnés, un théâtre qui s'enfonce dans le sol par paliers, et sur le dernier palier, un comptoir où l'on sert les liqueurs les plus fortes que seules les damnés peuvent apprécier : ciguë, pétrole, acide. César Borgia est crasseux, hirsute, ivre. Il a coupé les ponts avec sa famille. Il regarde le monde des damnés avec ironie. Un homme se présente à lui. Machiavel, son biographe, celui qui l'admirait tant pour sa cruauté guerrière. Il porte une capuche pour masquer le fait que son front est vierge de la marque infamante du péché : Machiavel est encore un mortel, seulement il a le pouvoir de se rendre en Enfer pour assurer des transactions avec les damnés. Ses yeux sont clairs et ses ongles impeccables. Machiavel a appris que Rodrigue et Alessandro veulent quitter l'Enfer, et il peut le leur permettre. Il souhaite que César le conduise à ses frères.

Ils sortent de la taverne. Pas de ciel en Enfer, puisque l'Enfer est sous terre, mais un plafond de sol d'où pendent des millions de racines, et d'où suintent les larmes des mortels qui pleurent leurs disparus. Machiavel affirme que si aucun mortel ne nous pleure, il est impossible de revenir dans le monde des mortels. César ouvre la bouche et goûte les larmes qui tombent. Il goûte les larmes du seul mortel qui le pleure. Son fidèle chien de chasse.

Le passé, revisité. César est dans la forêt avec son chien, ils traquent une biche. Maintenant, ils l'ont débusqué, César n'a plus qu'à lancer son chien dessus. Le chien regarde César, et pleure. Il lui dit : "Tu sais, quand tu seras parti, tes ennemis se vengeront de toi, à travers le seul être que tu aies jamais aimé et qui t'ait jamais aimé. Ils me tomberont dessus et me tueront à coups de bâtons." Machiavel est à l'orée de cette clairière, il ne perd pas une miette de la scène. César se penche sur son chien. Le chien niche une de ses pattes sous le bras de son maître et il tend le cou pour que César puisse faire ce qu'il a prévu. César égorge son chien avec le couteau de chasse, pour lui épargner la mort infamante de la bastonnade. Ce faisant, il s'interdit aussi tout retour dans le monde des mortels.

César revient au palazzio Lucrécia. Les serviteurs lui donnent un bain, un homme lui rase la barbe avec douceur et application, un autre lui coupe les cheveux. Il reçoit Rodrigue et Alessandro et leur expose l'offre de Machiavel. Puis entre Lucrèce.
Quand César a fini son bain, il se lève et urine dans la baignoire. Encore un pied de nez.

Rodrigue, Alessandro et Machiavel partent à cheval vers la taverne pour retrouver Machiavel.

Arrive un billet à l'intention de Rodrigue : le Pape le veut comme condottiere pour mener son armée contre l'armée de France : c'est la guerre en Enfer et seul Rodrigue est capable de la lui faire gagner. Mais le billet arrive trop tard, Rodrigue est déjà parti pour la taverne.

Le Pape retrouve Lucrèce qui lui explique le départ de ses frères. Elle veut savoir où ils sont partis et interroge César, qui refuse de lui dire. Elle pense alors à demander à un démon, moyennant une obole, un de ses souvenirs.

Avec le Pape, elle descend dans la chapelle du palais et ils entrent dans le confessionnal. De l'autre côté, il y a le démon à qui il faut raconter un remords. Le Pape raconte comment il a laissé son fils César tuer Rodrigue pour s'assurer qu'il aille en Enfer à ses côtés.

César descend dans la chapelle. Il entre dans le confessionnal à côté du démon. Il dit : "Pardonnez-moi mon père, car je me prépare à assassiner mon frère pour lui dérober son titre de condottiere."

Un combat mental s'engage entre lui et le Pape et Lucrèce, qui veulent le dissuader de commettre ce crime.

César est dans la baignoire. Il sent la lame de rasoir passer très lentement sur son visage. Ses cheveux tombent dans l'eau au ralenti. Entre Lucrèce. Il l'avait oublié comme il a oublié son péché : le désir qu'il a toujours éprouvé pour elle. Elle entre dans la pièce, c'est la plus belle femme du monde. Il pourrait tomber instantanément à nouveau amoureux d'elle. Mais il choisit d'étrangler cet amour dans l'oeuf. Ce renoncement réchauffe son coeur, qui se remet à battre.

César se défend, il refroidit son coeur pour avoir plus de poids. Mais en face, il y a Lucrèce et le Pape, et le Pape refroidit son coeur aussi, alors ils ont le dessus. Ils le convainquent d'épargner Rodrigue. Rodrigue n'est finalement jamais mort assassiné par César. Il est toujours vivant.

Alors qu'Alessandro et Rodrigue chevauchent côte à côte vers la taverne, Rodrigue disparaît.

Le démon dit qu'il a laissé un cadeau pour eux dans la chapelle, et ce cadeau leur dira où sont partis Rodrigue et Alessandro. Lucrèce et le Pape sortent du confessionnal. Posé sur l'autel, il y a un miroir. C'est le petit miroir que le Pape avait offert à Lucrèce pendant leur vie de mortel, qu'elle utilisait toujours pour se coiffer. Les miroirs sont censés ne pas exister en Enfer, et l'eau elle-même ne renvoie le reflet de personne ! Les miroirs permettent de voir le péché qui est sur son front.

Mais comme le Pape a sauvé Rodrigue de l'Enfer, son péché n'est plus d'actualité. La phrase sur son front a changé. C'est maintenant écrit : "J'ai forniqué avec ma fille." Lucrèce s'empare du miroir et songe à le brisé, mais le Pape s'y oppose. Il se regarde dans le miroir, contemple son péché, et en arrière-plan, il voit la taverne. Il part aussitôt à cheval vers la taverne, suivi de près par Lucrèce.

Quand Alessandro arrive à la taverne, elle est abandonnée. Il n'y a plus que Machiavel, au comptoir. Il descend le voir et lui dit qu'il veut une entrevue avec son frère Giacomo qui est au paradis. Machiavel lui tend un verre d'arsenic : il va mourir le temps de voir son frère, et ensuite Machiavel le ramènera à la vie. Il allonge Alessandro sur une table et lui donne l'arsenic. Le Pape est arrivé en haut de la taverne, mais il laisse faire, curieux de voir la suite. Alessandro meurt.

Quand il se réveille, il est dans le salon avec tous les jouets renversés, il est au sol. Giacomo le contemple. Il lui dit qu'il ne lui a jamais pardonné de l'avoir tué, car s'il le fait, Alessandro quittera l'enfer. Il mourra tout à fait, il ira nulle part. Alessandro lui demande pardon. Alors Giacomo lui dit : "Je te pardonne." et il lui ferme les yeux.

Machiavel voit qu'Alessandro ne se reveille pas. Il lui fait des massages cardiaques sous les imprécations du Pape, mais rien n'y fait. Alessandro est mort pour de bon. Lucrèce arrive juste pour voir ça.

Machiavel insiste pour qu'Alessandro ait des funérailles chrétiennes. Le Pape veut une cérémonie en grandes pompes, mais ce n'est pas possible, il faut faire vite, le corps d'Alessandro va partir en cendres. Alors ils l'enterrent juste en haut de la taverne, sans fleur ni couronne. Le Pape fait inscrire comme épitaphe : "Sa famille était trop unie."

Lucrèce demande à Machiavel de le faire accéder au monde des mortels, pour qu'elle convainque Rodrigue de redescendre. Machiavel lui demande un souvenir en échange de ce service. Elle raconte comment elle a empêché le Pape d'avoir un dernier enfant avec sa première épouse. Elle et Machiavel sont derrière des tentures, ils voient la scène. Un grand lit, où le pape couche avec son épouse. Lucrèce s'approche de la table où se trouve la bouteille de chianti préférée de sa mère, un vin que son père déteste, elle sort une fiole de poison abortif. Mais cette fois-ci, elle n'ose pas verser le poison. Quand le pape a fini son oeuvre, son épouse lui demande de lui servir du vin. Il sait que si sa femme a ce dernier enfant, sa vie sera changé, il sera une meilleure personne. Il ira au purgatoire après sa mort. Séparé de ses enfants qui iront en Enfer. Alors il verse le poison abortif dans le vin et sert sa femme.

Machiavel estime qu'il a été payé. Il entraîne Lucrèce au fond des tentures. Ils traversent les tentures, il y en a toujours, c'est très long. Le sol monte, et devient boueux, chargé de racines et d'asticots. Les asticots qui se nourrissent des morts.

Enfin, ils arrivent dans l'étude de Rodrigue. C'est maintenant un vieillard, il rédige son testament. Lucrèce demande à Machiavel de lui raconter son péché. Machiavel fait entrer Rodrigue dans une salle attenante. Ils y retrouvent Ottavia, nue, attachée par des chaînes, offerte. Rodrigue la prend avec sauvagerie. A ce moment, voyant que la situation lui échappe, Ottavia le supplie d'arrêter. C'est à ce moment-là que par colère il a continué et l'a tuée à la tâche. Mais c'était un autre Rodrigue. Celui-là comprend qu'un tel geste lui vaudrait la damnation éternelle. Alors, il se retire. Et il devient moine, c'est ainsi qu'il passera ces derniers jours.

Machiavel dit à Lucrèce qu'il est temps de retourner en Enfer. Mais Lucrèce le tue. Plus aucun témoin. Puisqu'en Enfer, ni Rodrigue ni Alessandro ne l'attendent, elle va rester dans le monde des mortels. Elle entre au couvent pour avoir une bonne raison de couvrir son front, et ainsi cacher aux mortels son terrible secret, le secret de son identité et le péché gravé sur son front.

Si le Pape a renoncé à Rodrigue, il n'a pas renoncé à sa guerre. Il envoie Rogue, son meilleur homme de main, pourchasser César pour le forcer à devenir son condottiere.

César a fui dans la forêt. Rogue le retrouve et lui cloue le bras contre un arbre avec un carreau d'arbalète. Rogue est en armure, il porte la même armure que Rodrigue quand il était condottiere. C'est un démon.

Des hommes arrivent. Ce sont les ennemis de Borgia. Les Sforza, les Farnese, les Orsini. Ils sont armés de bâton.

Au loin dans les arbres, on entend le fracas des armées, les hommes en armure qui courent, les lames, les cris, les chevaux blessés.

Rogue dit à César qu'il peut se laisser corrompre, lui permettre d'échapper à la charge de condottiere. Mais en échange, il doit accepter ce qui vient. Le supplice qui lui était réservé. Les coups de bâton de ses ennemis.

Son chien est là, il gémit. Il est prêt à se sacrifier à sa place.

Le Pape arrive. César hurle, il arrache le carreau de son bras et fonce vers ses ennemis. Il frappe le premier. Mais les suivants abattent leurs bâtons sur lui. Ses os craquent, encore, encore et encore. C'est l'heure du supplice !

Le Pape est forcé de constaté qu'il a perdu son dernier fils. Le fracas des armes se rapproche. Alors Rogue l'aide à monter sur son cheval, il lui donne son armure.
Jules n'est plus le Pape. Il est ce qu'il était avant, Roderic Borgia, le père de Rodrigue. Il est le condottiere. C'était sûrement cela, son supplice.

Il charge à mort en direction des armées

à jamais.


Commentaires sur le jeu :

Joué en Inflorenza Minima, en Carte Blanche.

Une demi-heure de création de personnage, deux heures et demie de jeu.

Mon hébergeur, très connaisseur de Millevaux, m'avait demandé du psycho-trash, et peu de mécaniques. L'Enfer de Dante, en Inflorenza Minima, était juste parfait pour cette demande, et ça m'arrangeait car je voulais le tester depuis longtemps.

On a eu une ambiance de ouf. Entre la playlist Millevaux qui tombait au poil, des joueur.se.s impliquées et moi qui étais créativement au taquet (troisième jour de tournée), j'ai trouvé que la partie était mémorable. La scène où Jules et Lucrèce procrèent alors que Bianca se fait tuer dans leur dos, c'était ouf. "Eros et Thanatos", comme avait remarqué le joueur de César.

Je suis parti direct dans le vertige logique, usant et abusant des flashbacks dynamiques que j'ai aussi utilisés comme souvenirs transformables, métaphores à habiter et paradoxes temporels. A un moment, on a commencé à se poser des questions sur la cohérence, et le joueur de César a dit un truc qui nous a libérer : "On s'en fout, le temps, c'est magique ici." Bien vu. Super bien vu.

La joueuse de Lucrèce était assez débutante, j'ai souri quand le joueur de Jules II lui a dit à la fin : "Mais tu sais, d'habitude, le jeu de rôle, c'est pas comme ça, ça se joue dans l'ordre chronologique, y'a des dés, des feuilles de perso..."

J'ai apprécié le fait que les joueur.se.s ont fait des personnages très variés dans leur psychologie. Je crois que la question originelle du péché qui avait damné leur perso a été fertile. Mention spéciale pour le personnage d'Alessandro, qui venait beaucoup nuancer, un extrême qui valorisait les autres extrêmes tels que le personnage de César.
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Message par Pikathulhu »

LE MOULIN DU PETIT POUCET

Ambiance Miyazaki, moulins à vents, sauvetages, drames et causes perdues. Premier test du nouveau système et des tables de compagnons/lieux/objets.

Jeu : Marchebranche, aventures initiatiques dans un monde de forêts en clair-obscur

Joué le 17/03/2016 à Paris chez l'habitant, lors de la tournée Paris est Millevaux

Personnages : Nina Basquito, Arthur Vilebrequin, Grammal, Jean-Baptiste

Image
illustration : Gustave Doré, domaine public


L'histoire :

Les marchebranches gravissent un chemin sur une colline. Au bord du chemin, des bornes de pierre où sont sculptés des visages grossiers, chacun avec une expression différente, mais toujours outrée, toujours couverts de mousse. Au sommet, un village, battu par les vents, construit autour d'un grand moulin, et de plusieurs petits moulins assistés par un système de soufflets.

Ils sont quatre marchebranches. Arthur Vilebrequin, un gamin voyageur de 12 ans, avec son chien Spip. Il porte plusieurs couches de vêtements à peu près rouges et trop grands, tenus par des ficelles, et une cape.
Jean-Baptiste, l'artisan, est un homme, il porte un vêtement de soldat raccommodé et une ceinture sans outils. Et un gros bâton.
Grammal, le mage, porte une cape en laine épaisse. Il a une odeur de cendre et de mer. C'est un noir albinos, son visage et ses bras portent des scarifications détaillées. Il tient un bâton rouge laqué, et porte des anneaux de fer à la ceinture et des disques d'argile.
Nina Basquito, la saltimbanque, porte une combinaison moulante où sont cousues des étoiles qui brillent. Elle porte son nom sur le dos de sa cape, elle arbore un bâton sculpté, avec beaucoup de couleurs. Elle grande et mince, elle sautille.

L'un des vieux du village, avec une moustache qui lui couvre tout le visage, abandonne son soufflet à la charge de quelques gamins pour accueillir les marchebranches. Rapidement, on leur sert un banquet sur une grande table commune, avec de la bière et des pains de vent, gros et gonflés.

Le premier qui vient leur proposer une aventure est un peintre qui arrive dans sa robe noire à nœud papillon, avec ses pinceaux, sa palette et ses toiles. Il a la capacité de peindre les gens tels qu'ils étaient dans leurs souvenirs, et on vient des quatre coins du pays pour s'offrir ses services. Il s'en veut, car il a accepté de peindre une amie sans lui faire payer, et il se sent coupable pour le souvenir qu'il lui a alors dévoilé. Il leur montre la toile qu'il a peinte. On voit une femme en train de noyer un nouveau-né dans une baignoire. Quand elle a vu le tableau, la femme est partie vers la Forêt des Désespérés. C'est la forêt où se rendent ceux qui veulent se donner la mort. C'était il y a déjà une semaine, le peintre leur demande de la retrouver avant qu'il ne soit trop tard. Ils la reconnaîtront car elle ressemble encore à celle qu'elle était sur le tableau, une femme avec des cheveux longs et un châle, sauf qu'aujourd'hui, ses traits sont marqués et son châle est dans un sale état.

Une maîtresse-soufflet bouscule l'assistance pour venir leur offrir une deuxième mission. Elle est quatre fois plus large que le vieux, et porte ses cheveux noirs en deux grosses couettes. Elle leur raconte son histoire. Avant, elle était batelière, avec son grand-frère Hirsule. Ils avaient une grosse cargaison sur leur barge, mais au passage de l'écluse, ils n'avaient plus de quoi payer l'écluse. Hirsule a prié les gardes en armure de l'écluse de leur faire crédit. L'un des éclusiers lui a demandé de rester avec lui en gage, et Hirsule a accepté, pensant que c'était un compromis raisonnable. Mais une fois que la barge est passé, l'éclusier a noyé Hirsule, pour faire un exemple pour tous les mauvais payeurs. A l'époque, la jeune batelière n'était ni assez costaud ni assez courageuse pour empêcher cela ou riposter. Aujourd'hui, elle veut que les marchebranches retrouvent l'éclusier et lui fassent revivre une expérience proche de la noyade pour qu'il comprenne ce qu'il a fait et qu'il passe le restant de ses jours dans le remords et la peur.

Un jeune adolescent se présente aussi à eux, il se nomme Marcellin, il est vêtu d'une cape couverte de reliques bizarres, et se présente à eux comme chasseur de reliques. A la ville d'Havrebourg, il a dérobé un artefact, une sorte de moulin à café qui peut générer des petits cailloux à l'infini. Cet artefact, il l'a volé sur l'étal d'un marchand, et c'est sa tante, Raffoline, qui a été accusé à sa place. Il vient de recevoir un pigeon voyageur qui le lui annonce. Or, à Havrebourg, les voleurs peuvent être punis de mort. Il demande aux Marchebranche d'intervenir assez tôt pour sauver sa tante. Grammal demande à Marcellin de lui confier le moulin à pierres, et il lui fait aussi écrire une confession de son vol sur un disque d'argile. Grammal pense que le moulin à cailloux est un objet contre-nature qui pourrait provoquer la destruction du monde. Jean-Baptiste l'examine, mais il pense que si on le démonte, on le détruirait irrémédiablement.

Les trois aventures pointent vers des directions opposées. Les marchebranches jugent que sauver la tante Raffoline, une innocente qu'on va condamner à mort, représente à la fois ce qu'il y a de plus juste et de plus urgent.

Ils passent une nuit difficile sur la colline car un grondement les empêche de dormir. Arthur se lève et surprend des gamins en train de jouer avec le soufflet en pleine nuit, soufflant du vent à la face de chouettes qui s'obstinent à voler à contre-courant. Les gamins lui expliquent que c'est la colline qui ronfle. Il descend aussitôt observer une grotte en bas de la colline et constate en effet que la colline est vivante, cette grotte est sa bouche, et elle ronfle. Il essaye de rentrer en communication avec elle, sans succès. Il donne des coups de pieds, il hurle ! À tel point qu'il empêche Jean-Baptiste de dormir : ce dernier vient l'engueuler et le tire par l'oreille pour qu'il aille se recoucher.

Le lendemain, les anciens du village leur apprennent que la colline peut même se déplacer, à la vitesse d'un homme qui marche.

Ils embarquent sur un des bateaux à voiles et à soufflets qui partent du village de la colline pour aller des deux côtés de la rivière, et au bout de trois jours ils arrivent à la ville d'Havrebourg, petite ville marchande fortifiée d'un millier d'âmes qui est sise sur une île au milieu de la rivière.

Ils explorent le marché d'Havrebourg. Grammal s'arrête devant un étal tenu par une grand-mère, qui vend des gros scarabées "spéciaux". Il demande le prix, elle lui répond une pièce d'or. Il demande ce qu'il se passe s'il en prend un sans payer, elle lui répond qu'il ira en prison, et sera probablement condamné à mort. Grammal sait maintenant ce que vaut la vie d'une personne à Havrebourg.

Ils se rendent au beffroi du Prévot, en charge d'assurer la sécurité à Havrebourg. Le Prévot est un homme de petite taille, chauve, avec de gros yeux et un pied-bot qui fait beaucoup de bruit quand il descend de sa tour pour les voir. Il leur dit qu'il innocentera Raffoline si on lui fournit des preuves concrètes de son innocence. Il leur explique que la venue des marchands a permis la prospérité d'Havrebourg et qu'en contrepartie, il a promis d'être inflexible envers les personnes qui nuiraient à leur commerce, ce qui explique la peine de mort encourue par celles et ceux qui commettraient de gros larcins. Et le moulin à cailloux est un artefact très précieux.

Grammal va voir un marchand de pommes. Il prend une pomme, croque dedans puis la jette à terre sans rien payer. Le marchand s'offusque, mais Arthur Vilebrequin paye la pomme avec une anecdote. Grammal abîme d'autres pommes, jusqu'à ce qu'Arthur se lasse de les payer, alors Grammal finit en prison, dans les sous-sols de la cour du beffroi, juste en face de la geôle de Raffoline. Il échange avec elle et apprend que quand les miliciens l'ont arrêtée, elle a volontiers avoué le crime pour épargner Marcellin. Elle pense payer pour avoir mal éduqué son neveu. Grammal la traite de lâche : serait-il plus facile pour elle de mourir que de rattraper ses erreurs d'éducation ?
Grammal fournit au prévôt la tablette d'argile qui porte la confession de Marcellin et Raffoline revient sur son témoignage. Le prévôt envoie un garde sur le fleuve, direction la colline pour ramener Marcellin. Il garde Raffoline en détention tant que Marcellin n'aura pas confessé son crime en personne.

Les marchebranches vont voir le marchand à qui Marcellin a dérobé le moulin à cailloux. Il vit dans la plus riche demeure de la ville, entourée par une grille. Un domestique vient leur ouvrir. Ils les conduit au salon, où ils trouvent le vieux marchand entouré de deux chiens noir, auprès de la cheminée. Il est en train de se transformer en arbre, une de ses mains ressemble à une branche, et deux doigts de l'autre sont déjà aussi devenu des branches. Il leur raconte que quand il était petit, ses beaux-parents l'avaient abandonné dans la forêt avec ses six frères, et que c'est le moulin à cailloux qui leur a permis de retrouver leur chemin, alors cet objet est très précieux pour lui. Ils lui rendent le moulin, pour qu'il accepte de retirer sa plainte, ce qui va sauver la vie de l'accusé.
Grammal vole à nouveau des pommes pour éprouver les lois d'Havrebourg qu'il trouve absurdes, et se retrouve en prison.
Les autres reprennent le bateau à vent, direction la colline, avec Jeannig, une garde, qui sera chargé d'informer le garde qui revient dans l'autre sens avec Marcellin, que ce dernier est relevé des charges qui pèsent contre lui.
Le Prévôt a prévenu depuis le départ les marchebranches qu'il aurait un travail pour eux. Ils profitent de l'occasion pour lui demander en quoi il consiste. Il leur explique vouloir obtenir la fierté de ses parents, qui n'ont d'yeux que pour sa grande-sœur, qui est prévôte dans une plus grande ville. Ils lui expliquent que le moulin à cailloux pourrait provoquer la fin du monde, et que le détruire lui vaudrait de grands honneurs. C'est ce qu'il fait alors. Le vieux marchand, ulcéré, décide de quitter la ville avec toutes ses affaires.
C'est donc sur le fleuve que les marchebranches retrouvent Marcellin. Il veut les payer avec une carte du tarot de l'oubli, mais leur confesse qu'il a aussi volé cette carte, au même marchand d'ailleurs. Les marchebranches renoncent à leur paiement, et convainquent Marcellin de partir à la recherche du marchand pour lui rendre sa carte et obtenir son pardon.

Les marchebranches continuent à remonter le fleuve à contre-courant, jusqu'à la Forêt des Désespérés. Mais ils y parviennent bien trop tard. Ils découvrent la femme au châle pendue à un arbre. Quand ils ramènent le corps à la colline, le peintre est dégoûté. Il leur donne quand même la carte de tarot, par dépit, puis descend à la rivière pour jeter ses toiles à l'eau, puisque son don porte malheur. Nina Basquito lui promet de chercher la vérité sur ce qui s'est vraiment passé. Si elle découvre que la femme au châle n'a pas vraiment noyé le bébé volontairement, elle viendra le raconter au peintre.

Arthur prend la carte du peintre : La carte des Amoureux. Il apprend que la jalousie a séparé ses parents : sa mère l'a entraîné sur les routes, loin de son père, et il puis il l'a perdue elle aussi.

Les marchebranches se rendent à Bourg-Perdu, un village qui tombe en ruines. Les parents du Prévôt en sont presque les derniers habitants. Ils les trouvent dans une maison poussiéreuse aux fenêtres condamnées. Le père est coincé dans un fauteuil et muré dans le silence, la mère est à peine plus alerte. Ils leur apprennent que la grande-sœur est morte, et qu'il leur sera alors difficile d'être davantage fier de leur fils qu'ils le sont de leur fille. Jean-Baptiste insiste pour qu'ils se rendent quand même à Havrebourg pour congratuler leur fils qui en a bien besoin. Il relève le vieux de son fauteuil, mais prend alors toute sa sécheresse pour lui, et prend alors sa place dans le fauteuil.

Les autres accompagnent les parents voir le prévôt, puis ils reviennent trouver Jean-Baptiste sur le fauteuil pour lui donner le paiement. La carte du Diable. Jean-Baptiste est libéré de sa sécheresse, mais pour accéder à un souvenir douloureux.

La maladie qui transforme en arbre, dont souffrait le vieux marchand.
C'est lui qui l'a répandue contre son gré.


Feuilles de personnage :

Nina Basquito
Saltimbanque
Notes : bâton, gobelet sans fond contenant un souvenir

Jean-Baptiste
Artisan
Notes : bâton
Expérience 1
Spécialité : reconnaître un arbre
Souvenir : Je suis porteur sain de l'arborite.

Arthur Vilebrequin
Voyageur
Notes : bâton, toile (femme qui noie un enfant)
Expérience 1
Spécialité : comprendre la langue des horlas
Souvenir : (carte des amoureux) Mes parents. L'un a trompé l'autre. Le trompé s'est enfui en m'emmenant
Compagnon : Spip

Grammal
Mage
Notes : Bâton


Commentaires :

Durée :
3h

Règles utilisées :

+ Nouvelles tables : j'ai des tables à 36 entrées pour tirer des compagnons, des objets, et des lieux.

+ Changement de système de résolution : On supprime l'idée de devoir accumuler des d6 en invoquant ses traits, et l'idée des noirceurs qui rapportent un d4. Pour une action incertaine, on lance un d6 et on doit obtenir un score inférieur ou égal au nombre de Marchebranches impliqués dans l'action (x 2 s'il y a trois joueur.se.s ou moins). En cas de 1, c'est toujours une réussite, mais on encaisse une noirceur (la personne qui a lancé le dé décide qui en écope). On peut refuser la noirceur mais dans ce cas là on refuse aussi la réussite. Les éléments de la fiche de personnage (spécialités, compagnons, équipements) ne sont plus là pour déterminer le nombre de dés qu'on lance, mais seulement pour définir si on est en mesure de tenter l'action. On peut toujours défalquer une noirceur sur un compagnon ou un équipement.
On peut demander une réussite automatique (et donc éviter de lancer le dé) si on est prêt à encaisser une noirceur automatique.
Si un compagnon ou équipement déjà noirci encaisse une noirceur supplémentaire, il est éliminé de la fiche de personnage et son emplacement est indisponible pour un nouveau compagnon/équipement jusqu'au prochain passage d'expérience.

+ Nouvelle playlist en ligne : la playlist Millevaux contient un certain nombre d'albums "easy listening", à la fois mélodiques et graves, qui sont censés convenir à Marchebranche.

Profils de joueur.se.s :
expérimenté.e.s. Et tou.s.tes ont déjà joué à ma table.

Défis :
L'objet de ce test était de valider les nouvelles tables et le nouveau système de résolution, et la playlist.

Mise en jeu :
J'ai utilisé les tables pour une bonne partie des lieux, rencontres et objets qu'il était nécessaire de définir. La colline/horla, le moulin à cailloux, les scarabées, Marcellin, le peintre, sont par exemple issus de ces tables, avec de légères réinterprétations pour les faire coller à l'aventure.


Commentaires du joueur de Grammal :

+ Cela me fait penser à Psi-Run où tous les joueurs doivent collaborer.

+ Supprimer la règle de récupération de noirceur en cas de passage de niveau

+ Si guérir une noirceur demande un jet de dé, alors ça pose problème, il vaut mieux une contrainte narrative

+ Est-ce que ça ne fait pas trop de personnel à gérer au bout d'un moment avec le gain d'un compagnon à chaque niveau ? [réponse de Thomas : le MJ ne joue pas les compagnons, finalement ils ne servent aux joueurs que comme réserve de compétences ou tampons pour les noirceurs.]

A tester lors du prochain playtest :

+ STOP récup noirceur si passage de niveau. Impossible de passer un niveau si on est hors-jeu.

+ Demander aux joueurs de personnaliser leur bâton.

+ Proposer aux joueur.se.s qui veulent une inspi pour typer leur personnage de faire un tirage sur la table des compagnons.

Retour personnel :

+ Les trois défis sont relevés ! Le jeu est nettement plus tendu et grave avec le nouveau système de résolution et la playlist, et plus coloré avec les nouvelles tables et la playlist. J'ai été impressionné par la façon dont les joueur.se.s ont typé leurs personnages à partir de rien.
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Pikathulhu
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Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

PARTICULES

Sphynx, moteur idéal pour jouer les révélations sur l'histoire de Millevaux au lieu de simplement les raconter

Jeu : Sphynx de Fabien Hildwein, exploration et errances métaphysiques au cœur des ruines de civilisations disparues.

Joué le 05/03/2016 à Nantes au Colloque Bob le Rôliste, lors de la tournée Nantes est Millevaux 1

Personnages :
Le paléontologue, Simon Herman l'anthropologue, Alan l'historien du génie, Conaal Uriabaas le linguiste, la parapsychologue

Image
crédits : man under stress, Nasa Johnson, paulo geordio, sy parrish, Theo Junior, Vince O'Sullivan, licence cc-by-nc, galeries sur flickr.com


L'histoire :

Ils sont cinq scientifiques du Centre Espoir, en Suisse, l'un des derniers lieux de civilisation et de technologie à Millevaux. Le Centre les envoie explorer des vestiges en France, dans le Massif Central, qui pourraient bien receler des informations cruciales sur l'Âge d'Or. Tous ont un intérêt à trouver un remède à la forêt et aux autres maux qui menacent l'humanité, comme l'oubli, qui leur impose chaque matin de s'injecter une dose de sérum de mémoire cellulaire.

Ils forment une équipe et partent vers leur destination dans un véhicule volant qui ressemble beaucoup à une navette spatiale. L'atmosphère en France est saturée de particules d'emprise, il faut prendre toutes les précautions nécessaires.

Ils arrivent de nuit au-dessus des montagnes majestueuses d'Auvergne et se posent à l'entrée du site. Ils descendent de la navette, équipés de scaphandres massifs pour se protéger de l'emprise.

Devant eux, entre les arbres, se dressent la face émergée de l'iceberg : des immenses silos à grain, corrodés et couverts de végétation. De quoi nourrir plusieurs millions de personnes. L'Europe était-il devenu le grenier à blé du monde ?

Ils trouvent une grande rampe qui descend dans les profondeurs, et accèdent à un gigantesque hall enténébré. Ils y trouvent une collection d'animaux conservés dans des cuves à stase, mais aussi une femme dans une des cuves. Le linguiste lit des instructions de réveil faisant référence à un "prince charmant", et la seule autre cuve qui porte l'inscription "prince charmant" est une cuve contenant... un crapaud. Ils déverouillent la cuve de la femme, qui sort alors d'un sommeil de deux-cents ans. Sa mémoire est aussi vierge qu'un enfant qui vient de naître. Ils lui font alors embrasser le crapaud, et celui-ci déverse à l'intérieur de sa gorge un fluide qui contenait toute sa mémoire. La femme reprend ses esprits. Elle dit s'appeler Genèse. Elle leur explique que c'est ici un centre de génétique créé pour augmenter les rendements des cultures et de l'élevage en Europe, condamnée par ses envahisseurs (les Etats-Unis et la Chine) à devenir leur grenier maintenant qu'eux avaient détruit leur propre environnement. Elle explique le principe du crapeau de la façon suivante : ils ont découvert que la mémoire ne s'inscrivait pas uniquement dans nos neurones : une copie se faisait dans les gènes mêmes. Les gènes, sont la mémoire.

Guidé par son chien qui vient de ramener un os colossal, le paléontologue poursuit l'exploration du hall. Plus il s'enfonce, plus les cuves deviennent énormes et les animaux étranges. Il découvre beaucoup de nouvelles espèces crées par l'homme. Un éléphant conservé dans une cuve. Plus loin, un cochon-baleine : un cochon de quinze tonnes, sans peau ni yeux ni sabots, une viande vivante. Le chien s'agite autour d'un tas d'ossements pachydermiques, près de cuves éclatées. Il escalade les ossements et remonte à la surface. Il découvre des bovidés colossaux et laineux, avec des cornes impressionnantes, en train de brouter les arbres au dehors. Les humains sont allés loin dans leur manipulation des animaux d'élevage.

Ils avisent une porte avec le symbole "danger biologique". Ils passent dans les serres. Celles-ci sont quasiment comblées par la végétation qui s'est développées de façon anarchique, il reste juste un passage d'homme, ils se laissent guider par Genèse qui semble savoir se repérer dans les lieux. Ils évitent une passiflore géante dotée de pinces à bouches carnivores. Ils découvrent une plante dont les fruits sont des foetus de veaux. Genèse leur explique que l'ADN de ces plantes est maintenant "intelligent". Leurs gènes apprennent, évoluent.

Elle explique qu'ils ont modifié les plantes pour qu'elles secrètent des toxines pour lutter contre les ravageurs, ce qui a permis des rendements miraculeux sans emploi de pesticides. L'ADN des plantes dialoguait avec son environnement. Les ravageurs ont évolué à leurs tours. On a commencé à créer des "bio-agents", des microorganismes aériens qui produisaient les toxines à la place des plantes, et qui s'adaptaient aux ravageurs en permanence. On a continué en produisant des "bio-agents" affectés à d'autres tâches.
Les populations pauvres les plus exposées aux bio-agents ont commencé à souffrir de maladies congénitales. Les humains venaient de créer l'emprise, ce phénomène biologique qui altère les êtres et les choses, qui est aujourd'hui présent dans tout Millevaux, à haute dose.

Genèse leur montre ensuite une collection de seringues contenant une variété de produits biologiques. Elle montre qu'on a perfectionné le principe des bio-agents pour qu'ils dialoguent avec l'ADN humain. Elle a un cathéter au bras et s'implante une seringue de jouvence. Son visage de quarante ans en paraît maintenant vingt. Elle leur montre des seringues de mémoire qui contiennent les mémoires des grands de ce monde. Elle propose à la paléontologue (et le fantôme qui l'accompagne lui conseille d'accepter) de tester, avec une seringue qui contient l'ADN de grands danseurs de tango. Elle accepte de se faire piquer, et c'est alors comme si elle s'entraînait au tango pendant vingt ans dans les bras de Genèse.

Ils arrivent dans la salle de l'ordinateur central. C'est une immense console avec un écran de quatre mètres de haut et un clavier démesuré, couverte de poussière. Pour la démarrer, il faut se "brancher" aux perfusions qui dépassent de la console. Simon Herman l'anthropologue est toujours accompagné d'un secrétaire, Mickael, qui note tout ce qu'il dit. Il l'invite à se brancher à la console. Mickael reçoit alors les fluides vitaux de l'ordinateur dans son propre sang, il se met à baver et de la mousse lui sort des oreilles et du nez. Il se met alors à parler avec une voix monocorde, possédé par l'ordinateur : "Posez... votre... question..."

Ils posent des questions et des hologrammes d'archives apparaissent autour d'eux. Ce ne sont pas des hologrammes classiques, mais des nuages intelligents d'emprise qui se forment, éclairés par un projecteur.

Il y a eu des attaques terroristes contre les installations du gouvernement. Le gouvernement a commencé à concevoir des armes biologiques pour marquer les esprits et faire des "frappes chirurgicales" sur des populations rebelles. Ainsi, ils ont inversé le principe du sérum de mémoire et ont créé des bio-agents qui se nourissaient de mémoire et altéraient la mémoire génétique : ils ont créé une bombe d'oubli. Mais les terroristes l'ont volée. La suite, les explorateurs la connaissent : ils ont fait usage de la bombe, répandant un oubli héréditaire sur tout le continent.

Genèse profite un instant que les explorateurs ont le dos tourné pour activer l'ouverture de la "salle des specimens". Quand ils lui demandent pourquoi elle a fait ça, elle répond : "Parce que vous ne les auriez pas laissés vivre." Ils comprennent que Genèse n'était pas qu'une scientifique comme elle le prétendait : elle était aussi une terroriste infiltrée. Désormais, ils ne la quittent plus du regard un instant, et la maintiennent sous bonne garde.

La parapsychologue voit dans les caméras une autre personne qui erre dans le complexe : c'est une femme vêtue d'une robe blanche, comme transparente. Genèse explique que c'est sûrement une brume de bio-agents. L'âme, les émotions, comme la mémoire, sont inscrites dans les gènes. Les bio-agents dialoguent aussi avec eux. Cette apparition est sûrement le fruit de leurs croyances : l'égrégore est aussi le fait de bio-agents.

Les assistants du paléontologue l'avertissent que deux de ses hommes, John et William ont fait une très mauvaise rencontre dans un des secteurs : ils ont été attaqué par des "specimens". Leurs compagnons n'ont pas eu le choix que de fermer le sas, enfermant John et William avec les specimens. La parapsychologue observe le secteur par les caméras. L'un des specimens, masse noire en perpetuelle évolution, avec des foetus de veaux qui pendent à son cou fixe la caméra. Il prend le visage de la parapsychologue. Elle demande à travers la caméra : "Qui êtes-vous ?" et le specimen, qui s'avère être un des premiers horlas, fruits de l'emprise et de l'égrégore, répond avec une voix horrible : "Nous... sommes... l'avenir..."

Les explorateurs envoient leurs mercenaires faire une expédition de sauvetage. Ils sauvent William, mais un mercenaire trouve la mort, dévoré par un horla. Le casque de William est fracturé. Alan, dont l'indignation a monté en puissance tout au long de l'exploration, abat William d'une balle dans la tête. Exposé à l'emprise, il pouvait être dangereux.

Ils décident d'évacuer les ruines en hâte. Le pilote demande s'ils veulent lâcher un missile thermo-nucléaire sur la zone. Alan est pour, mais les autres préfèrent préserver le site, à moins qu'ils craignent que l'explosion créé plus de problèmes qu'elle n'en résolvent. Ils décident de remonter le rapport vidéo pour que le Centre Espoir croient qu'ils ont visité des ruines désertes et sans intérêt. Ils gardent le secret pour eux.

Plus tard, le linguiste découvrira une langue faite d'ADN intelligent, la langue putride, que peuvent parler humains, animaux et horlas.

La parapsychologue ne désespère pas de trouver un remède à Millevaux.

Les autres continuent leurs recherches, et taisent leurs craintes.

Il y a cette dernière chose que Genèse leur a dit dans la navette : le fait que les bio-agents d'emprise et d'égrégore se seraient agglomérés en une gigantesque psyché collective, que les scientifiques ont nommés par un acronyme d'une série de protéines : S.H.U.B.N.I.G.G.U.R.A.T.H.

Les humains ont-ils créé Dieu où était-il présent de toute éternité avant de s'incarner ironiquement dans cette forme ?


Feuilles de personnage :

La Parapsychologue
Question Métaphysique : Qu'est-ce que l'âme ? Existe-t-elle ? Comment / que va-t-elle faire après la mort ?
Alan : je peux pas le blairer au boulot
Le paléontologue : admirative de son travail, impressionnée
Allié : un fantôme aux conseils hasardeux mais convainquants

Image
crédits : Salomé, par courtoisie

Conaal Uriabaas
Linguiste
QM : Pourquoi la vie a été créée ? Dans quel but ?
Le paléontologue : je l'admire car il étudie le passé
Simon Herman : je l'apprécie
Partenaire : un apprenti qui suit ma voie

Le paléontologue
QM : Y a-t-il une fin heureuse à l'avenir de l'humanité ?
La parapsychologue : reconnaît le talent, mais a du mal avec la personnalité
Coniaal Uriabaas : grand ami de son maître, impatient de le voir faire ses preuves
Allié : mon chien qui a un super flair pour trouver les fossiles et qui m'aide à les déterrer

Simon Herman
Anthropologue
QM : Dieu existe-t-il ?
Allié : Michel, mon secrétaire qui note tout ce que je dis.
Inventaire : appareil photo, carnet de notes, stylo, sac, gourde

Image
crédits : Anièle, par courtoisie

Alan
Historien du Génie
QM : Poudre noire, railgun, uranium appauvri ou tête creuse ?
Simon Herman : moyen
La parapsychologue : bas
Allié : Hyène avec mâchoire mécanique et venin
âge : 36 ans
origine : une colonie au nord de l'Europe
Inventaire : pistolet semi-auto (60) avec silencieux, couteau de combat, cestes (2), gourde (1L), pastilles purificatrices (10), lampe frontale, lunettes enveloppantes, carnet, stylo, masque à gaz, cartouches charbon (2), vivres (3 jours), grenades (3), sac à dos (50 litres), monoculaire, boussole, briquet tempête, couteau pliant, encyclopédie universelle (électronique), appareil d'enregistrement universel, projecteur toxique (5) (bras gauche), corde (20 m), poulpes mécaniques d'exploration (3), lame jaillissante (bras droit), montre, loupe, blague à cigares (6), détecteur d'emprise, fusil à verrou (30), découpeur thermique, machette, trousse de secours, trousse à outils, communicateur, mouchards (2)


Notes de ruines :

Savoir transcendantal : utiliser la vie, la vie nous utilise
Pourquoi la civilisation a disparu : guerre, égrégore, emprise, hubris
Où : Noirmont-ferrant / NRA (= INRA de Clermont-Ferrand= institut de recherche agronomique)
Lieux : serres, labos de génétique, labos de bio-agents, ferme de mégavaches, labo de bio-agents pour humains (mémoire, cosmétique)
Evenements du passé : missiles d'oubli, agriculture ultra-intensive, remède contre Alzheimer, médias, terrorisme
Objets : seringues, graines et oeufs totipotents, armes et technologies éternelles
Mythes : Nature contrôlée, fin de la pollution, gouvernement unique après la guerre, technologie éternelle
Survivants : Horlas, IA
Habitants : mutants, autochtones perdus, savants fous
Image : symbole "danger biologique"

J'ai omis de faire une liste de révélations, considérant que mes notes de ruines et ma connaissance de la genèse de Millevaux en constituaient déjà une plus qu'exhaustive.


Commentaires :

Durée :
1/2 h création de personnage, 2h1/2 d'aventure

Défis :
Le Colloque Bob le Rôliste est "le festival du jeu de rôle à la bonne franquette", le ton est toujours à la bonne humeur et les parties de première partie de soirée, chronométrées à trois heures, sont souvent placées sous le sceau de l'humour, avec des orgas qui viennent soumettre au MJ des évènements aléatoires complètement loufoques. Plus intello que moi tu meurs, mais c'était quand même un défi dans le défi que de venir proposer du Sphynx, un jeu qui se prend au sérieux, dans ces conditions.

Image
les évènements aléatoires que j'ai tirés... et appliqués en jeu

Mise en jeu :

Lors de la création de personnage, j'ai tout simplement confié à la table le malaise que je pouvais ressentir à leur proposer un jeu intello, et j'ai mentionné que si les persos étaient très intellos (avec leur discipline scientifique et leur question métaphysique), rien ne nous empêchait de rigoler entre joueurs. En reléguant le rire au méta, ça nous a permis de jouer une aventure sérieuse en restant dans la convivialité.

Au vu du temps limité, j'ai un peu simplifié la création de personnage : au lieu de faire des liens entre tous les personnages, chaque joueur.se s'est contenté de décrire le lien que son personnage avait avec les personnages joués par la personne à sa gauche et la personne à sa droite. J'aurais pu demander de faire des liens avec les personnes en face pour davantage de circulation de la parole, mais ce festival étant très bruyant, j'ai préféré limiter les interactions.
L'un des joueurs a créé un personnage suréquipé (Alan), c'est a priori inutile avec ce jeu mais j'ai laissé faire, je trouvais que ça en disait long sur l'attitude du personnage, sur sa défiance vis-à-vis des ruines.

J'ai donné des jetons et des points de voyage aux joueur.se.s selon les règles du jeu à chaque fois que j'y pensais (et j'ai constaté que c'était difficile d'en donner aux personnes en bout de table, car j'entendais moins bien ce qu'elles disaient), ça m'a permis de récompenser les comportements recherchés par le jeu. Pour autant, j'ai toujours donné les révélations gratuitement, les joueur.se.s n'ont jamais eu besoin de prendre l'initiative de dépenser des jetons. Je l'ai fait parce qu'à chaque fois la table se posait les bonnes questions et méritait sa révélation gratuite, et aussi parce qu'en tant que meneur, j'avais un temps limité et l'envie de placer mes 8 révélations.

Debriefing :

Au final, j'ai trouvé que l'aventure était une franche réussite, malgré mes a priori de départ. L'historique de Millevaux est complexe, qui plus est après dix ans de réflexion sur le sujet, et il n'est que rarement mis en jeu, puisque justement il appartient au passé du jeu et non à son présent. Sphynx était le jeu idéal pour révéler la genèse de Millevaux en restant complètement dans le jeu. Quelque part, je suis beaucoup plus enthousiaste sur ce jeu après mes propres expériences sur Innommable (dont Sphynx est un hack lointain) et sur du jeu diceless (Inflorenza Minima) que je ne l'étais après mon premier test.


Retour à froid de la joueuse de la parapsychologue :

C'était ma première fois en JDR et j'ai beaucoup aimé.
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Message par Pikathulhu »

[Millevaux, au seuil de la folie] La magie de l'Opium Jaune

Un playtest par Stellamaris, une ambiance excellente, mais des personnages très puissants, en attendant une variante du jeu plus chair et sang !

Image
crédits : tom natt, licence cc-by-nc, galerie sur flickr.com
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Message par Pikathulhu »

[S'échapper des Faubourgs] La ligne écarlate.

Les erreurs à éviter dans un jeu dangereux. Un compte-rendu par Thibault.B !

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Message par Pikathulhu »

PARKING MAUDIT

Mon premier vrai quickshot, avec des hommes-ours, des rituels chamaniques dangereux, un âne-démon et des voitures-araignées !

Jeu : Millevaux Sombre, pièges mortels au fond des bois

Joué le 05/03/2016 à Nantes au Colloque Bob le Rôliste, lors de la tournée Nantes est Millevaux 1

Personnages :
Le Vieux Renard (chasseur rusé), Burger Roi (cueilleur-trappeur paresseux), Geor (organisateur méthodique), Mégane (soigneuse passionnée), Pelage Noir (chamane distant), Krevin

Image
crédits : bramblejungle, c@rljones, crasmaster007, pierson.jerrylee, Risto Kuulasmaa, licence cc-by-nc, galeries sur flickr


Feuilles de personnages :

Le Vieux Renard, chasseur rusé
Tir (arc) / Vieux
a été le maître de Gastron
fournit vivres et matériel à Geor

Mégane, soigneuse passionnée
Lucidité / Somnambule
Soigne Gastron
dépendante de Burger Roi pour ses herbes

Pelage Noir, chamane distant
Endurci / Code de conduite (respecter les rites chamaniques)
maître de Krevin
connaît le secret de Geor

Geor, organisateur méthodique
Fort / Possédé
A sauvé Gastron de la mort
A tenu Pelage Noir au courant de sa transformation en ours

Krevin (PJ de rechange pour le joueur du Vieux Renard)
Niveau 10

Image

Burger Roi, cueilleur-trappeur paresseux
Miraculé / Chétif
Amoureux de Jenny
Jaloux de Vieux Renard


L'histoire :

Ils ont dû fuir leur village, harcelé par une tribu d'hommes mutants à moitié ours. En chemin, Geor s'est fait rattrapper par eux, ils lui ont offert la vie sauve mais en échange il a dû promettre de trahir ses amis et il a dû accepter de recevoir leur sang et maintenant il se transforme à son tour en ours. Ses mains sont déjà toutes poilues et griffues et il les cache sous des gants.

Ils ont trouvé un endroit pour bivouaquer, au pied d'un arbre géant. Ils sont à bouts de nerfs. L'un d'eux, Gastron le bûcheron, est blessé à la jambe. Burger Roi fournit ses dernières plantes médicinales à Mégane la soigneuse, qui s'en sert pour plonger Gastron en plein trip. Pelage Noir le chamane semble plus exalté qu'effrayé par leur situation. Il prend sous son aile Krevin, le fils de Gastron et promet de l'initier au chamanisme, ce qui rend Krevin très enthousiaste.

Burger Roi part cueillir des plantes. Il rencontre un homme dont l'âne est empêtré dans les racines de l'arbre. L'homme lui demande de l'aider à enlever les fers de l'âne, pour que l'âne puisse se libérer. Il leur promet du saucisson d'âne en échange, alors Burger Roi accepte. L'homme rejoint leur campement avec son âne et les régale de saucisson.

Jenny l'éclaireuse, la seule de la tribu qui soit noire de peau, est montée dans l'arbre géant pour faire des repérages. Burger Roi, qui en pince pour elle la rejoint dans les branches pour lui apporter de la nourriture. Ils y trouvent des myriades d'araignées dont les pattes sont faites de racines. Elles semblent leur manifester de l'intérêt, mais il est facile de les chasser. Depuis cet observatoire, ils voient le fleuve, très large, qui charrie des troncs d'arbres et des alluvions, et ils voient aussi un parking souterrain abandonné, dont l'entrée est percée. Le parking est au bord du fleuve, on pourra envisager de l'explorer.
Burger Roi ose prendre la main de Jenny, et finalement ils se roulent des pelles et passent la nuit ensemble à dormir dans l'arbre.

Le Vieux Renard part chasser, car ils n'ont rien à se mettre sous la dent.
Il trouve des poils et des griffes d'ours par terre. Les hommes-ours pourraient bien être déjà dans les parages.

Mégane avait pris le dernier tour de garde, mais elle a dû s'assoupir. Quand elle reprend ses esprits, elle est au bord du fleuve. Gastron est à ses côtés, la tête dans l'eau. Il est mort !

On ramène Gastron au bivouac. Le chamane prévoit de grandes funérailles mystiques. Il initie Krevin aux rites funéraires, tous les deux fourragent dans les tripes de Gastron et Krevin a l'air de tellement prendre son pied que Pelage Noir se sent obligé de freiner ses ardeurs.

L'âne a disparu. Ils s'embrouillent avec son propriétaire et celui-ci quitte le campement. Il lâche juste un petit rire.

Geor part explorer la zone. Il tombe nez à mufle avec trois hommes-ours. Leur torse nu est boursouflé là où la partie homme cède la place à la partie ours. Leurs épaules sont larges et velues et ils ont des têtes d'ours. Ils portent tous les trois des sagaies de pierre. Ils annoncent à Geor qu'ils vont attaquer le bivouac rapidement. Geor affirme être de leur côté.

Le Vieux Renard va plus tard lui aussi tomber dans les pattes des hommes-ours. Ils le poussent à faire le même pacte que Geor.

Burger Roi part chercher des herbes dans la forêt. Il rencontre l'âne. Tout à coup, l'âne se dresse sur ses pattes arrière, le chibre en érection. Il frappe Burger Roi à coups de sabots en ricanant. Burger Roi parvient à rejoindre le bivouac, mais il est dans un sale état.

Ils se rendent à l'endroit où le bitume est défoncé et découvrent qu'un vieil homme vit dans le parking. Il leur assure qu'ils peuvent s'y abriter avec lui.

Les hommes-ours finissent par attaquer le campement. Le Vieux Renard et Geor, contrairement à ce qu'avaient prévu les hommes-ours, se battent contre eux et périssent vaillamment sous les coups de sagaie, ce qui laisse le temps à leurs compagnons de descendre dans le parking avec une liane et de la retirer. Les hommes-ours ne descendent pas, ils semblent craindre l'endroit.

Le parking est plein de vieilles bagnoles rouillées jusqu'à l'os. Le vieux se nourrit exclusivement de la mousse qui pousse sur ces épaves. Il a l'air d'avoir complètement perdu la raison.

La nuit est retombée. Ils allument un feu dans le parking. Pelage Noir prépare la dernière étape de son rite funéraire, c'est la nuit du solstice, la nuit idéale pour entrer en contact avec l'autre monde.

Lors de sa cueillette, Burger Roi a pu ramener à Mégane des feuilles de mémoire : ce sont des feuilles recroquevillées qui ressemblent à des cerveaux. Mégane les absorbe. Elle revit la nuit précédente. Prise d'une crise de somnambulisme, elle est allée au bord du fleuve. A côté d'elle, elle voit l'âne en train de noyer Gastron, il appuie son sabot sur la tête du pauvre homme jusqu'à ce qu'il ne bouge plus. Puis il regarde Mégane et pousse un long ricanement avant de s'enfuir.

Jenny part explorer le fond du parking. Les autres entendent un long cri d'horreur et de souffrance ! Il a dû arriver malheur à Jenny. Burger Roi est sous le choc. Le vieux dit qu'elle a dû tomber dans une fissure.

Pelage Noir et Krevin consomment les herbes de trans de Burger Roi et partent dans l'autre monde. Ils sont dans l'eau du fleuve, ils peuvent respirer. Au-dessus d'eux, ils voient la tête de Gastron qui les regarde, qui essaye de leur parler. Mais Gastron est en train de se faire noyer par l'âne. Ils voient les corps de Jenny, de Vieux Renard et de Geor qui flottent. Les corps leurs disent qu'il y a une issue : par le fleuve.

Ils sortent de leur transe. Le vieux jubile. Il leur dit que leur seule chance, c'est de rester ici avec lui à manger de la mousse. Il omet de dire qu'il a passé un pacte avec les voitures : elles le laissent vivre, il leur offre des proies.

On entend la rumeur du fleuve. Au fond du parking, là où Jenny a disparu, il doit y avoir un accès par le fleuve, une fissure. Tout à coup, tous les phares des voitures s'allument. C'est l'hallali. Ils tentent une course folle vers le fond du parking. Des pattes arachnides en racines sortent des essieux des voitures, qui s'agglomèrent sur eux.

Krevin monte retrouver les hommes-ours dans l'espoir d'avoir la vie sauve s'il accepte d'intégrer leur tribu. Mais abusés par deux fois, les hommes-ours l'exécutent à vue.

Burger Roi trébuche sur le corps de Jenny. Elle est transpercée de toutes parts. L'un de ses orbites n'est plus qu'un trou béant bordé de pulpe de cornée.

Pelage Noir est en pleine extase mystique. Les voitures le transpercent de toutes parts de leurs pattes anarchiques.

Burger Noir s'adresse aux voitures : "Vous m'avez tout pris... Prenez-moi aussi, qu'on en finisse.". Et il se fait poiçonner à mort à son tour.

Mégane a été plus rapide, elle a filé à travers la crevasse et plongé dans le fleuve.

Elle nage au milieu des eaux boueuses et des alluvions et se rattrappe à un arbre mort dérivant. Plus loin, elle aperçoit un animal qui nage. L'âne.

Image


Commentaires :

Durée :
40 mn de brainstorming + 3 h de jeu

Règles utilisées :
Format quickshot

Profils des joueur.se.s :
Jeunes mais expérimentés

Défis :
C'était la première fois que je tentais la deuxième partie de soirée au Colloque Bob le Rôliste. Commencer une partie à 23h30, c'est hardcore, mais comme j'avais inclus Bob le Rôliste dans ma première tournée nantaise, j'ai voulu marquer le coup.
Le défi était double : réaliser mon premier vrai quickshot (j'avais déjà des essais, Barbe Bleue et la série des Transilvanian Hunger, mais dans les deux cas, j'avais apporté trop de customisation de MJ pour que ça soit de véritables quickshots, malgré l'apport créatif initial de la table) et le jouer en temps limité : je voulais éviter qu'on dépasse 3-4 h du matin en heure de fin.

Brainstorm initial :
J'ai capitalisé sur les articles consacrés aux quickshots dans Sombre 5, sur les comptes-rendus de quickshots de Johan et sur mes propres conseils relatifs à la préparation présents dans le livre source de Millevaux Sombre.
Pour le plan, j'ai donné une feuille format A6 (comme Johan le conseille, je crois), ce qui fait que les joueur.se.s n'ont pas dessiné un plan trop détaillé : tout ce qu'il y avait dessus était 100% jouable. J'ai chronométré 20 mn pour le plan et 20 mn pour la création des personnages, histoire d'avoir juste assez de matériel jouable (ils ont été plus rapides sur le plan, du coup ils ont eu du rab pour la créa de perso). Les joueur.se.s ont défini une tribu ennemie d'hommes-ours en antago et ils m'ont dit que le parking contenait... des transformers ! J'ai pris la liberté de relooker ces fameux transformers façon Millevaux, les araignées-carcasses, ça le faisait mieux.
Pour gagner du temps sur la création de la relation map, j'ai demandé à chaque joueur.se de se contenter de définir un lien entre son personnage et un des figurants (Gastron, Krevin ou Jenny) et avec deux autres personnages, et ça a bien suffi.
Jenny avait été inventée pour servir de red shirt (c'est pour ça qu'elle était black :D), mais le joueur de Burger Roi l'a grave étoffée en construisant une romance avec elle. Et finalement, c'est pas elle qui est morte en premier !

Mise en jeu :
Comme on était en deuxième partie de soirée de Bob le Rôliste, nous n'avons pas eu droit aux événements aléatoires comme en première partie, mais j'ai récupéré pour m'en inspirer une fiche d’événement aléatoire que je n'avais pas eu l'occasion de jouer en première partie :
"Les fers à ses pieds : les aventuriers rencontrent un homme en difficulté avec son âne, il leur promet beaucoup d'argent s'ils l'aident à enlever les fers de l'âne. En fait il s'agit d'un démon (ou autre méchant) qui s'est transformé en âne pour, grâce à son serviteur, attirer les aventuriers. Un personnage puissant lui a ferré ses pieds fourchus pour l'empêcher de rentrer dans les maisons..."
J'ai fait de l'âne un horla maléfique, qui n'a eu nul besoin de changer de forme pour causer du tort aux PJ...

Je me suis grave appuyé sur cette carte, sur le plan et sur les Désavantage des persos pour construire mon impro. Cette feuille de route tenait largement lieu de scénar. J'ai fait l'équilibrage au feeling, mais au final ça a été plus efficace que la préparation pour atteindre la final girl zone.

Debriefing :
Je suis grave fier du résultat. Le brainstorming des joueur.se.s a été top et leur roleplay au max également (pas toujours optimal tactiquement mais ça c'est their choice, their funeral). J'ai réinvesti mes pex en jeu mindfuck et en impro. Faire un quickshot by the book ? Mission accomplie !

Retour à froid du joueur de Burger Roi :
J'ai beaucoup apprécié cette partie, c'était vraiment sympa d'être joueur à ta table ;). Ton impro était très réussi et ta maîtrise excellente. Merci encore !
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Pikathulhu
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Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

SPECTREVILLE

Terre qui fond et ville limbique : en avant pour l'étrange. Une aventure relatée par un des mes joueurs, kF

Jeu : Marchebranche, aventures initiatiques dans un monde de forêts en clair-obscur

Joué le 19/03/2016 à Paris chez l'habitant, lors de la tournée Paris est Millevaux

Image
illustration : Gustave Doré, domaine public


Personnages :

Chapeau, voyageur ; minuscule vieillard guilleret au très grand chapeau
Feulard, artisan ; souffleur de verre plein de talent
Pomdapi, saltimbanque


L'histoire :

Là où commence cette histoire, la terre de Millevaux se nécrose : elle fond, s'ouvre, se transforme en tourbière et engouffre les arbres et les villes, obligeant les populations à fuir. On suit une troupe de réfugiés qui abandonnent leur contrée, se dirigeant par dépit vers Spectreville, là où les morts et les vivants se rencontrent - simplement parce que c'est la ville la plus proche.

On découvre les marchebranches parmi la caravane, à la recherche de nouvelles missions ; dans ces temps troubles, ils espèrent être utiles. Le Feulard, Chapeau et Pomdapi sont guidés par une lavandière vers une roulotte où l'on parle affaires ; amicaux, ils apprennent au passage qu'elle-même leur confierait volontiers une tâche - retrouver son défunt mari à Spectreville pour les réunir - mais n'a pas de lame de tarot à leur donner en récompense. Ils gardent quand même l'idée en tête, car la lavandière propose autre chose en échange : elle est capable de laver les souvenirs, d'effacer les tourments que cache le passé d'une personne.

Les contacts aidant, les marchebranches rencontrent un sculpteur qui amène ses plus belles pièces à Spectreville. Lui-même a un caractère exécrable mais son art est magnifique. Il a passé un accord avec le roi de Spectreville et il lui doit une commande, mais il a très peur qu'un tel artefact artistique donne au roi trop de présence hors du monde des morts et lui donne l'opportunité d'envahir celui des vivants : il voudrait faire annuler l'accord. A la clé, une carte comme récompense.

Un lutin irascible mais vénal se fait également connaître des marchebranches ; il propose un voyage au cœur des tourbières, là où a commencé la nécrose de la terre, dans un ancien site de fouille. Il prétend qu'on y a trouvé une lame spéciale et unique, l'arcane du Horla, et il est prêt à payer deux lames pour mettre la main dessus. Un peu plus tard, une femme sinistre toute habillée de noir propose la même chose au groupe, mais pour trois atouts ; une offre exceptionnelle.

Le groupe se met donc en direction des terres nécrosées. L'épicentre est inondé, à cause des rivières détournées par l'effondrement du sol, et la fin du voyage se fait sur une barque. Au passage d'un pont cependant, l'embarcation craque et précipite les marchebranches à l'eau ; après s'être laissés dériver, ils s'en sortent de justesse en s'encordant et en s'arrimant à un gros amas d'arbres qui bouche partiellement le fleuve. Ils y retrouvent Armel, assistant disparu du lutin, assez désespéré mais bien heureux de revoir un peu de monde. Armel met les marchebranches en garde contre le cœur du lac qui s'est formé : tout au fond, il y a la fameuse arcane du Horla, un objet dangereux qu'il ne faut surtout pas toucher ! Mais c'est pour ça que les personnages sont venus ; Chapeau dans un premier temps, puis ses autres camarades, s'encordent à nouveau et descendent au fond du lac. Malgré les remous, ils mettent la main sur un petit coffre, ostensiblement maléfique.

Le coffre en poche, il est temps de penser à rentrer. Avec la corde, en se construisant une sorte de grappin, les marchebranches arrivent à s'extraire du siphon et à sortir de la rivière déchaînée pour regagner la cote et entamer le voyage de retour. Voyage qui voit Chapeau tenter de s'enfuir : la noirceur du coffre l'a convaincu qu'il valait mieux ne pas restituer l'objet ; il veut s'exiler avec, s'en faire le porteur maudit peut-être, mais en tout cas l'éloigner des hommes. Ça n'aura pas lieu, et c'est finalement assommé qu'il est ramené à la caravane ; par contre, eux-mêmes convaincus des horribles propriétés de la carte, les autres personnages décident sitôt rentrés de la détruire. Les personnages sont donc bredouilles, mais ils savent qu'ils ont sauvé tout un pan de la forêt de l'expansion de la nécrose, qui s'est désormais arrêtée.

Il est désormais temps de terminer le voyage jusqu'à Spectreville. En fait, depuis le retour des marchebranches, la caravane est immobilisée devant un immense arbre au pied duquel s'ouvre un tunnel ; les forêts limbiques et la fameuse ville des morts sont de l'autre côté. Pour les marchands et les réfugiés, il faut patienter à l'entrée pour des contrôles et des vérifications intermédiaires, mais les marchebranches sont libres de s'y aventurer directement, ce qu'ils font. Le tunnel est un premier aperçu de la bizarrerie de Spectreville : il semble fait de terre, des racines blanches y poussent, rien qui ressemble à l'intérieur d'un arbre. De l'autre côté, la ville est des plus étranges - un ciel d'un blanc laiteux surnaturel, parsemé de nuages d'un noir tout aussi tranché. Les bâtiments sont pâles, la forêt limbique est en noir et blanc, les autres couleurs passent en négatif, rien n'est normal.

Les marchebranches découvrent Spectreville ; ils commencent à réfléchir à un moyen de retrouver l'ancien mari de la lavandière mais en voyant leurs bâtons, un beau jeune hommes les aborde immédiatement. Elias de son nom, il est peintre ; souriant et aimable, il invite les personnages à visiter son atelier où il pourra leur parler plus librement. Ses toiles sont magnifiques, mais insupportables : ce sont des représentations malsaines d'horribles Horlas. Elias souffre de ne savoir peindre que ces horreurs, et sa demande est sombre : il aimerait que d'une façon ou d'une autre, les marchebranches l'aident à échanger son don maudit avec celui de l'irascible sculpteur qui accompagnait la caravane. L'idée plaît moyennement, les marchebranches préféreraient trouver une autre solution pour l'aider.

Ils laissent le peintre dans son atelier, et décident de se mettre en quête du mari de la lavandière. Ainsi, ils pourraient lui demander d'utiliser son pouvoir sur Elias, pour laver son âme de toute cette noirceur, à défaut de lui conférer le don du sculpteur. Une brève enquête mène les marchebranches à l'auberge où le mari se trouve probablement, mais il y a un problème : c'est l'auberge Change-humeur. Tous ceux qui y entrent voient un aspect de leur personnalité s'inverser définitivement : les joyeux deviennent tristes, les calmes s'énervent, les pragmatiques rêvassent. Un petit peu intimidé, le groupe hésite ; finalement, Chapeau entre, en laissant à ses amis son précieux chapeau : il espère ainsi se retrouver lui-même à la sortie quand il se coiffera à nouveau de son couvre-chef. Chapeau est un vieux marchebranche qui n'a jamais trop avancé dans la redécouverte de son pays natal parce qu'il ne s'intéresse jamais vraiment au gain, aux lames que ses missions lui rapportent ; aujourd'hui, c'est ce trait de sa personnalité qui s'inverse, et il commence à découvrir l'appât du gain. En fait, quand il ressortira, il n'aura plus envie de porter le vieux chapeau qui lui a valu son nom.

A l'intérieur de l'auberge, il trouve effectivement le mari décédé, triste et occupé à boire. Le tenancier sert à Chapeau une chope d'une bière noire, épaisse : la bière-oubli. Il l'accepte, mais ne la boit pas, et convainc sans mal le mari de le suivre à l'extérieur. Celui-ci n'a pas beaucoup changé, puisque l'auberge Change-humeur n'affecte que les vivants. Il retrouve la lavandière qui a l'occasion de s'expliquer auprès de lui pour son geste, et il peut finalement partir en paix. Ses enfants et son épouse lui font un ultime adieu, et puis il disparaît.

Pour le moment, les voyageurs laissent la lavandière à son émotion, parce que Feulard vient de se rendre compte que le sculpteur va être amené devant le Roi de Spectreville. Avant que ça n'arrive, ils se présentent devant lui, espérant trouver le moyen de remplir la demande du sculpteur en urgence. Chapeau, qui se fait maintenant appeler Traverse, lui présente la bière-oubli : il explique que le Roi ne saura pas apprécier la beauté d'une œuvre faite par un vivant, s'il n'a pas partagé un peu avec l'un d'entre eux avant ; boire le breuvage serait une façon de l'harmoniser avec la sculpture qui lui est offerte. La ruse fonctionne, mais le Roi ordonne que Traverse partage la bière-oubli avec lui, ce qu'il accepte. Traverse oublie son voyage, le Roi oublie sa commande, et le sculpteur est libre de repartir ; reconnaissant, il donne aux marchebranches une lame de tarot de l'oubli, comme convenu.

Pomdapi suggère de la donner à Traverse pour qu'il retrouve ses souvenirs de voyage et reste avec eux, mais il refuse. Le vieillard demande juste à reprendre son vieux chapeau (il ne sait plus pourquoi il l'avait abandonné), puis laisse son bâton de marchebranche et entre au service du Roi. Finalement, la carte va à Feulard. Il se souvient d'un désastre qui a été causé il y a longtemps par l'une de ses propres créations : l'Egrégorgue. Un orgue de verre, que lui avait commandé par un musicien, a fait résonner dans l'égrégore une onde de folie qui avait complètement transformé son auditoire.

Maintenant que le Roi et le sculpteur sont satisfaits, les marchebranches reviennent vers Elias, qu'ils mènent à la lavandière pour laver son âme. Feulard accompagne l'artiste pendant le rituel, et il a une vision : il y a longtemps, Elias et le sculpteur étaient frères ; leurs parents leur ont présenté un choix cornélien : trois pots de peinture leur ont été présenté, l'un blanc, l'autre noir, le troisième couleur d'or. Celui qui accepte la peinture blanche se verra doté d'un don artistique incroyable, capable de beauté pure et éclatante. Celui qui prendra la peinture noire aura une compétence tout aussi fabuleuse, mais ne saura réaliser que des horreurs insondables. Celui qui prendra celui d'or aura un talent artistique médiocre, mais trouvera toujours à subvenir à ses besoins et s'enrichira de son travail autant qu'il le souhaitera.

En tant qu'aîné, le sculpteur choisit en premier et il se jette bien sûr sur la peinture blanche, dans la vision comme dans le souvenir commun des deux frères. Elias avait choisit la peinture noire à l'époque, mais cette fois-ci la vision donne à Feulard la possibilité d'intervenir : il décide d'aider son ami peintre en absorbant la noirceur de la peinture et en partageant sa peine. Lorsque la vision cesse, les dons d'Elias diminueront mais il ne sera plus hanté par ses propres créations. Reconnaissant, il décide de peindre une ultime toile sordide pour clore cette partie de sa vie et passer à autre chose. C'est finalement la carte du Horla qu'il crée, celle-là même que les marchebranches avaient détruit un peu plus tôt dans leur voyage !

Accepter la carte n'est pas évident. Elle est si noire et puissante qu'en l'absorbant, on détruirait la région aux alentours, et Spectreville serait détruite à terme. Il est hors de question de l'utiliser en dehors, sinon c'est la forêt qui retrouverait l'aspect de tourbière que tout le monde a fui ; une troisème possibilité serait d'activer la carte en étant dans le tunnel entre les mondes, les préservant tout deux mais coupant le tunnel à terme. Pendant que Feulard et Pomdapi discutent, arrive Chien le saltimbanque, un autre marchebranche de passage à Spectreville ; comme son nom l'indique, c'est un chien qui tient son bâton dans la gueule. Il parle et se prononce fermement pour la destruction de la carte, quitte à gâcher cette récompense : son pouvoir est trop terrible pour être utilisé. Après une longue tergiversation, c'est ce qui est finalement fait.

Voyant le groupe discuter, une chasseuse de la région aborde les marchebranches. Elle leur parle d'une cathédrale abandonnée, pas très loin d'ici, où se trouverait encore l'Egrégorgue, la création honteuse de Feulard : il faut le détruire, parce que c'est un artefact beaucoup trop dangereux. Elle propose une lame de tarot, comme de coutume. Feulard est emballé par l'idée de réparer son tort, et les voyageurs reviennent bientôt dans le monde réel pour s'occuper du problème.

Ils traversent une part sombre et hantée de la forêt ; les branches craquent, se courbent bizarrement, les alentours semblent inquiétants. On finit par trouver la cathédrale, recouverte de lianes et d'autres plantes, à l'abandon comme l'avait dit la chasseuse. Feulard et Chien entrent, mais pas Pomdapi, méfiante. Une fois à l'intérieur, la chasseuse révèle sa véritable nature : c'est en fait une sorcière et elle était la musicienne qui a commandé l'orgue, il y a longtemps ! Maintenant qu'elle l'a attiré ici, elle veut que Feulard joue de l'orgue, pour réveiller son vieux pouvoir.

Le marchebranche tente de résister mais ni sa volonté ni la confiance de Chien ne suffisent à le retenir. Il joue de l'Egrégorgue, et la musique le rend fou. La cathédrale tremble, l'Egrégorgue explose, une vague de folie trouble toute la région ; Pomdapi et Chien en réchappent de justesse, moins touchés par la musique que leur ancien camarade Feulard.

Ironique et satisfaite, la sorcière donne bel et bien sa lame de tarot aux marchebranches. Amer, Chien la tire. Il se souvient de l'époque où il était encore chiot. Une immense bête sauvage l'attaquait, le traquait dans la forêt. Alors qu'il se croyait piégé et condamné, il a été sauvé par un marchebranche. Sortant de nulle part, il a diverti la bête avec son bâton et l'a faite fuir alors qu'il n'était vraiment pas de taille à l'affronter. C'était en fait Chapeau, et c'est cette rencontre qui a donné envie à Chien de devenir un marchebranche.


Feuilles de personnage :

Pomdapi, Saltimbanque
Notes : bâton

Feulard
Mage
(devenu égocentrique)
Notes : bâton tubulaire pour souffler du verre
Expérience 1
Noirceur : art de la laideur
Spécialité : provoquer une émotion
Souvenir : j'ai créé l'égrégorgue pour un musicien et quand celui-ci en a joué, cela a provoqué une catastrophe.
Compagnon : Elias (noirceur : fou)

Chapeau
devenu Traverse après être entré dans l'auberge Change-humeur (et abandonné son couvre-chef à grelot) : Niveau 0, Voyageur et Coeur.

Chien
Niveau 1, Saltimbanque et Esprit. Sa spécialité est Raconter des histoires de monstre, mais il n'y a rien d'autre de marqué (je ne sais pas quelle arcane il a tiré notamment).


Commentaires :

Durée :
entre 2h1/2 et 3h

Profils des joueur.se.s :
Trois personnes aguerries à l'univers de Millevaux, mais pour qui c'était la première partie de Marchebranche.

Playlist :

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s/t, par Jarboe & Helen Money, le chant féminin de Jarboe, aussi désincarné qu'omniprésent, le violon d'Helen Money, parfois fragile parfois massif, le chant et la blessure du cygne dans une seule élégie.

Image
The Pomegranate Cycle, par Textile Audio, un opéra intimiste et contemporain, série de vies croisées tragiques et quotidiennes, fragiles comme des biches, dont la nature est témoin.

Image
Pyramids, par Pyramids, du black metal étouffé avec un chant clair éthéré, étrange et déstabilisant.

Debriefing :

Une excellente partie, même si on a perdu la joueuse de Pomdapi en route, qui était trop fatiguée. L'ambiance a commencé un peu Miyazaki (des phénomènes géoclimatiques étranges comme dans Le vent se lève), et a fini tout en noirceur comme dans les contes d'Andersen, avec un climax gothique avec l'Egrégorgue. Les tables aléatoires m'ont joué un grand service pour peupler cette aventure. Quand j'ai voulu savoir vers quelle ville partaient les réfugiés, j'ai tiré un lieu et obtenu les forêts limbiques. D'où l'idée de cette ville sise dans les forêts limbiques, une idée que je n'aurais jamais eu tout seul. La terre qui fond, la femme mystérieuse (évidemment une Corax), l'Auberge du Change-humeur, le peintre et le sculpteur... tout ça vient des tables.
J'ai pris aussi beaucoup de plaisir à twister les aventures et les cartes de tarot, c'est une chose que je mettrai plus tard en forme avec la Table des Entourloupes.
Enfin, mention spéciale à kF pour avoir testé le changement de personnage en cours de route, et aussi pour avoir eu l'idée de jouer un chien. Idée qui sera entérinée dans le jeu quelques parties plus tard avec la possibilité de créer un personnage qui soit un humain-animal ou un animal intelligent.

À expérimenter lors du prochain playtest :

Ce que j'ai appliqué ici instinctivement, mériterait d'être gravé dans les règles : on ne peut appliquer une deuxième noirceur sur un compagnon ou un équipement, sans quoi on tomberait dans le power gaming : avec cette règle un perso niveau 1 doit encaisser 4 noirceurs pour être hors-jeu. Si on pouvait mettre deux noirceurs sur un compagnon/équipement (une première notée sur la fiche, une deuxième qui met le compagnon/équipement hors-jeu), un perso niveau 1 doit encaisser 6 noirceurs pour être hors-jeu. Il reste cependant possible d'acheter une réussite automatique en mettant un compagnon/équipement noirci hors-jeu.
Dernière modification par Pikathulhu le jeu. sept. 01, 2016 9:46 am, modifié 1 fois.
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Message par Pikathulhu »

SELON LAZARE

Premier test des labyrinthes et des golems, et mise à bas complète du statu-quo !

Jeu : Les Sels de Millevaux par Yoann Calamai, alchimistes dans l'enfer forestier de Millevaux

Suite de la campagne de Prague.
Épisode précédent : La Promesse

Joué le 14/03/2016 sur google hangout
Personnages : Matilda, Petr, Anselmo

Partie enregistrée en deux morceaux : ici et ici


Image
illustration : Balthazar Schwann, domaine public


L'histoire :

Réunion de Convent. Isadora explique les daemons peuvent aussi envoyer des visions de personnes qui n'existent pas. Elle insiste pour qu'on accomplisse rapidement l'œuvre au rouge, celle d'Anselmo : qu'elle voit comme la résurrection d'Anabella selon l'évangile lazaréenne, qui renaîtra pure et innocente (et sans mémoire), et qu'Isadora pourra retuer lors de l'œuvre au noir pour en extraire l'innocence, l'emprise blanche, emprise blanche que Matilda utilisera dans l'œuvre au blanc pour transformer en emprise blanche l'emprise noire que véhiculent les rats pestiférés...

Flash-back. Anselmo et Sœur Judith sont appelés au chevet d'un jeune batelier qui est tombé malade. Il est alité dans la maison de pierre de ses parents, il est intransportable. Il était marinier sur une nef des fous qui descendait sur la Vlatva depuis les montagnes de Bohême. Anselmo découvre qu'il porte les stigmates de la peste. Le gamin a été payé avec des sacs de grains, qui contenaient des rats pestiférés. Avec Sœur Judith, ils capturent quelques rats et ordonnent à toute la famille de rester cloîtrée. Anselmo prévient le prévot, qui sur ses conseils fait brûler toute la maison avec les gens à l'intérieur, et entreprend, sous couvert de prévention d'actions anarchistes, de boucler tout le quartier de la Nouvelle Ville.

Retour au convent. Des bruits de panique résonnent au-dessus de la tête. Cris et bris de verre.

Quand ils sortent, c'est pour constater qu'un pogrom a secoué le gettho juif. Toutes les vitres ont été cassées et des étoiles jaunes ont été peintes sur les murs. Mathilda passe devant l'atelier de sa tante. Elle ne ressent plus rien pour elle mais s'émeut du saccage du lieu où elle a grandi. Sa tante a le front en sang. Elle lui dit de passer son chemin et commence à balayer le verre en sanglotant.

Petr est convoqué par Soleymane. Cette fois, il est reçu aussitôt. Sa promotion au titre de chef du renseignement, sans doute. Soleymane lui confie quelques parcelles de son passé, les quelques qui lui restent, qui ont marqué sa vie et dictent sa conduite aujourd'hui.
Petr se retrouve dans une maison de pierre aux fenêtres cloîtrées, avec un Soleymane de cinq ans entravé par une corde autour de son cou nouée à un mur. En tant que fils du Sultan, il a été kidnappé par les miséreux qui hantent cet endroit. Ils sont affamés et leur seul espoir de sauver leur quartier était de toucher une rançon. Soleymane montre une femme de trente ans prématurément vieillie, ses traits sont tirés, ses yeux exorbités. Son dernier enfant est mort-né. Elle nourrit Soleymane avec son sein décharné.
Petr est maintenant sur une tribune aux côtés de Soleymane et de son père le Sultan. Les miséreux ont été arrêtés par les gardes du sultan. Ils sont alignés sur les murs de l'arène en face, et devant un public fasciné, les gardes les jettent un par un au fond de l'arène, où une centaine de cochons les dévorent. Il fait cinquante degrés, l'air est lourd d'emprise et d'égrégore.
Petr fend maintenant une foule compacte avec Soleymane, maintenant adolescent. Les rues d'Istambul sont en proie à une végétation galopante, l'air est rempli de moustiques et d'autres insectes affreux. Les gardes du Sultan aident Soleymane et Petr à passer en jouant du sabre. Ils arrivent en face d'Amin Abd-Al Jafad, le messie sheitanite, celui que tous ces gens suivent. Soleymane le touche, il lui demande le secret de la vie. Jafad lui répond : "Nous ne sommes rien. Que les poussières du Sheitan." Petr a aussi l'occasion de toucher le Messie, peut-être d'en apprendre le secret du sérum de mémoire, au risque de montrer à Jafad sa vulnérabilité. Mais il préfère s'abstenir et trouver sa propre voie.
De retour dans le bureau de Soleymane. L'air reste chauffé à blanc. Soleymane explique que ces expériences de vie lui ont appris que les humains ne valaient rien, mais qu'à ce titre, toute domination de l'homme par l'homme était vaine, et qu'il oeuvrait pour les abolir les unes après les autres, le Décret n'étant qu'une étape dans cette entreprise.

Anselmo doit fabriquer un golem pour explorer le labyrinthe : extraire un corps et un esprit et les combiner, ou prendre une seule personne et lui retirer l'âme. Il va voir Sœur Judith à la morgue, et lui promet sa plus grande reconnaissance si elle se prête à l'expérience. Il l'entraîne dans la crypte. Elle accepte avec joie à condition qu'elle lui implante un symbiote avant de disparaître dans le labyrinthe. Elle le déshabille et lui demande de lui enlever sa tunique de nonne. Anselmo découvre alors que son visage n'est qu'une assiette de cire et son corps un amas de racines, de terre et d'asticots. Ils font l'amour et à la suite un foetus noir commence à pousser sous l'aisselle d'Anselmo. Anselmo coupe la tête de Sœur Judith, il lui ouvre le crâne et découvre son cerveau, grosse motte de terre débordant de vers. Il vomit une deuxième fois puis procède à l'extraction de l'âme.

C'est donc Golem-Sœur Judith qui part dans le labyrinthe, téléguidée par Anselmo. Depuis l'entrée du labyrinthe, qui correspond à la crypte, elle traîne le sarcophage vers une des sorties. Le labyrinthe ressemble à Prague, mais une Prague où les fantasmes et les peurs d'Anselmo seraient plaqués. Elle se rend dans une cathédrale devant laquelle stationnent deux statues de lion qui pleurent des larmes de sang : les Lions de Gênes. Sur le chemin, elle se perd dans une ruelle dont les façades semblent se courber vers elle jusqu'à se toucher. Elle constate qu'elle est dans la ruelle d'or. Maître Szolt et ses apprentis lui dérobent le sarcophage. Szolt prend le visage d'Anselmo. Sœur Judith comprend que les daemons d'Anselmo prennent le contrôle du labyrinthe. Szolt-Anselmo dit qu'il faut faire l’œuvre au rouge dans son atelier. Sœur Judith l'étouffe avec ses racines et s'empare de l'Evangile Selon Lazare.

Dans la réalité, Anselmo a en effet quitté l'atelier de Szolt en emportant l’Évangile Selon Lazare. Quand il arrive à la crypte, il trouve les autres alchimistes. Isadora pense que de la minute où Anselmo a emporté l’Évangile, Szolt va comprendre qu'il l'a trahi.

Flashback. Pavel et Matilda dans le manoir, peu après qu'ils se soient embrassés. Pavel demande ce qu'il faudra faire le jour où les hommes de Szolt auront pris l'un d'entre eux : se laisser briser les genoux et donner les noms des autres et les lieux où ils se cachent, ou mourir sans rien dire. Matilda lui dit de tout faire pour vivre.

Matilda crie, elle veut courir jusqu'à l'hôpital, où les hommes de Szolt vont sans doute se rendre en premier lieu. Les autres la retiennent. Elle décoche à Anselmo son premier regard de haine.

Ils envoient un billet pour rapatrier Petra et Angelo du Manoir en urgence : le lieu est sûrement compromis s'ils ont pris Pavel.

Anselmo se replonge dans le coma. Sœur Judith est de retour dans le labyrinthe, cette fois elle a l'Evangile Selon Lazare, et aussi le générateur électrique qu'Anselmo a envoyé dans le labyrinthe. L'orage éclate, les éclairs frappent les clochers de Prague. Sœur Judith est dans la cathédrale, elle a branché le corps d'Anabella et s'apprête à abaisser le levier. Une autre Anabella apparaît, c'est le daemon. Il propose que Sœur Judith l'implante dans le corps ressuscité d'Anabella, sinon ce corps ressuscité finira par implorer Isadora de le retuer, il sera incapable de comprendre, d'aimer Anselmo. Mais Anselmo-Sœur Judith n'écoute pas et abaisse le levier. Le générateur capte l'énergie de la foudre et envoit des arcs électriques dans toute la nef. Il grille sous l'afflux d'énergie. Anabella se redresse de son sarcophage en poussant un cri de nouveau-né.

Anabella apparaît sur le cercle d'incantation. Elle est nue, sans pudeur, étonnée et confiante comme un nouveau-né.

L'ancien maître d'Anselmo se présente à Sœur Judith. Il dit que « la réalité se dissout », qu'il faut renforcer la structure du labyrinthe si on veut qu'il tienne assez longtemps pour faire une deuxième œuvre au rouge. Il se propose de s'en occuper, mais ça lui coûtera la vie, ou plutôt Anselmo va l'oublier. Sœur Judith accepte. Anselmo revit tous les souvenirs qu'il a de son maître, et dans chacun de ces souvenirs, le maître lui dit adieu, jusqu'au souvenir où Anselmo le voit sur son lit de mort, lui tendant sa main parcheminée et maculée de tâches de vieillesse, il lui dit adieu, et c'est fini, Anselmo a oublié son maître.

Petra et Angelo sont arrivés à la crypte. Anselmo demande à Petra de prêter son corps à une deuxième œuvre au rouge. Petra accepte pour qu'il soit heureux. En échange, il promet de garder une part d'elle au sein de lui. Petr extrait l'âme de Petra pour en faire des sels. En faisant l'opération, il a une vision du futur, où il s'apprête à faire la même opération sur Kelst, pour extraire sa mémoire et la mettre dans son sérum. Il met les sels de l'âme de Petra dans une seringue et Anselmo se les injecte, puis il entrepose le corps de Petra dans le sarcophage : elle est en coma végétatif.

Il leur faut réparer le générateur ou trouver une nouvelle source d'énergie pour recommencer l'œuvre au rouge. Mais traiter le problème Szolt semble plus urgent. Matilda, Petr et Kelst partent dans un carosse discret pour le château. Matilda est murée dans le silence, Petr jette des regards nerveux par derrière les rideaux noirs du carrosse. Arrivé au château, Petr demande audience à l'ambassadrice, qui le reçoit aussitôt dans la bibliothèque : elle et l'inquisiteur souhaitaient justement le consulter. Les employés du service du renseignement désertent les lieux comme un seul homme pour les laisser tranquilles. L'ambassadrice annonce à Petr que Szolt leur a proposé un accord : il manipulerait Soleymane pour relancer la Purge et renforcer la mainmise de l'Autriche, à condition que lui-même redevienne l'alchimiste secret du gouvernement. Petr leur conseille plutôt de se passer des services de Szolt et de le faire éliminer. Ils devaient envoyer un papier à Szolt pour lui dire quoi faire, Petr conseille de ne pas l'envoyer.

Matilda arrive dans les appartements de Lenka. Mais elle y trouve aussi Szolt. N'ayant pas reçu de papier de l'ambassadrice, il pense qu'il a été doublé. Il négocie avec Matilda : elle le laisse conseiller à Soleymane, par l'intermédiaire de Lenka, de faire expulser l'ambassadrice et l'inquisiteur, et en échange elle pourra revoir Pavel et accomplir l'œuvre au blanc... à condition de le faire aux cotés de Szolt. Szolt lui avoue aussi que Lenka est le fruit de ses amours... avec la mère de Matilda. Il prétend être devenu l'homme mauvais qu'il est depuis la mort de sa mère. Il prétend aussi agir pour le bien commun.

Lenka va voir Soleymane et dans la demi-heure qui suit, l'ambassadrice et tous ses employés sont expulsés, l'inquisiteur est ligoté à une chaise et défenestré du premier étage : il en est quitte pour une jambe cassée et une grosse humiliation.

Matilda suit Szolt dans son atelier. Elle y retrouve Pavel et coud des points de suture sur ses genoux broyés. Elle commence à comprendre que Szolt ment tout le temps, mais elle veut tenir sa promesse qu'elle lui a faite de faire l’œuvre au blanc pour lui.

Petr a suivi Matilda et Szolt en filature. Kelst est reparti, avec ses précieuses archives, informer Isadora et Anselmo de ce qui se trame. Anselmo insiste pour fuir Prague à laquelle l'Autriche va sûrement déclarer la guerre. Isadora part avec ses corbeaux retrouver Petr et laisse Anselmo sous la garde de Kelst. Anselmo est tenté de l'assommer et de s'enfuir avec Anabella mais s'abstient : peut-être croit-il Isadora quand elle lui promet que l’œuvre au jaune permettra à Isadora de recouvrer sa mémoire : il reste alors lié au convent.

Isadora retrouve Petr dans une hospoda près de l'atelier de Szolt. Elle avoue à demi-mots être une Corax mais réitère son attachement au grand-œuvre : elle est prête se mutiler pour charger un oeuf d'albâtre et poursuivre l'œuvre au rouge. Mais il faut exfiltrer Matilda en premier lieu. Petr va trouver Kinski, il lui demande son aide en échange de son intégration au convent.

Kinski défonce à nouveau l'atelier de Szolt avec son golem de bois. Il embarque Matilda et Pavel, et aussi des produits explosifs qui serviront de source d'énergie pour la deuxième œuvre au rouge. Matilda laisse un mot qui promet qu'elle reviendra pour accomplir l'œuvre au blanc.

Kinski les amène d'abord dans son atelier, il récupère ses marionnettes et ces outils préférés, il sait qu'il va devoir se cacher avec eux dans la crypte maintenant. Il propose à Matilda de l'opérer de sa loyauté à coup de ciseau à bois ; il peut bien lui enlever une seule qualité sans que cela ne réduise à néant toute son innocence, et cette qualité là est vraiment un défaut à ses yeux. Mais Matilda décline. Elle va devoir respecter la promesse qu'elle a faite à Szolt, qui connaît maintenant l'identité de tous les membres du convent et n'aura de cesse de les traquer.


Commentaires sur le jeu :

Déjà, en terme de rythme, ça a changé ! De la minute où Anselmo s'est emparé de l'Évangile, ça a complètement pété le statu quo, ce qui fut fertile, car ça a mis en mouvement plein de factions qui avaient été lentement mises en place.

La joueuse de Matilda a trouvé qu'on lui amenait des propositions d'action trop vite, sans lui laisser le temps de maturer ses propres initiatives (par exemple, elle aurait volontiers fait appel aux services de Mephisto si je ne lui avais coupé l'herbe sur le pied en lui proposant de le faire avant qu'elle ait le temps d'en concevoir et d'en formuler l'envie, et cela devenait moins tentant maintenant que la proposition venait d'un autre). Si j'ai bien compris ses attentes, alors je pense que le problème s'est surtout présenté sur cette séance parce que j'ai accéléré le rythme : d'une parce que c'était une demande, de deux parce que le vol de l'Evangile a précipité les choses. Il est possible que les choses redeviennent plus calmes la prochaine séance, avec davantage de possibilité pour les joueurs de prendre des initiatives, de se créer ses propres dilemmes plutôt que d'être en permanence pressé par les dilemmes du MJ.

On a testé la création du golem et du labyrinthe. J'ai trouvé la création du golem intéressante car apportant un nouveau dilemme moral (Petra fut un temps envisagée pour devenir le golem), mais la mise en jeu du labyrinthe nous a un peu laissé sur notre faim :
Déjà, erreur de ma part : j'ai omis de présenter les règles de création du labyrinthe, si bien qu'on est parti sur un lieu très peu typé.
J'ai également omis les règles de création du golem, et on s'est retrouvé avec le joueur d'Anselmo jouant le golem-Sœur Judith comme une "combinaison d'exploration" qu'aurait revêti Anselmo. Le joueur d'Anselmo a avoué préférer le golem de Kinski, mais finalement le golem-Sœur Judith et le golem de bois de Kinski sont assez ressemblants ; ce sont tous les deux des armures-mecha. Je crois que Yoann, et nous-même également aurions préféré des golems avec une pensée plus autonome. Est-ce seulement possible si c'est la même personne qui joue l'alchimiste et le golem ? Faut-il que le golem soit joué par une autre personne ? Quel objectif doit-on définir au golem ?
Le joueur d'Anselmo a trouvé que le labyrinthe n'était pas si labyrinthique. La faute au partage des responsabilités ?
D'après Yoann, quand les joueurs contrôlent le décor et les figurants dans le labyrinthe, ils le font en tant que MJ de réserve, non en tant que daemon. J'avoue avoir été le mauvais élève : comme Anselmo avait deux daemons, ça me paraissait plus logique que ce soient les daemons qui contrôlent le décor et les figurants : ça a d'ailleurs permis la scène avec le daemon-Anabella auprès du sarcophage. Je laisse Yoann juger de la pertinence de ce choix dans le cadre du livre de base. On voit aussi les limites d'un seul test : je suis forcément obliger de compenser pour accompagner des situations émergentes en jeu, et chaque compensation en induit des suivantes. C'est à l'auteur d'arbitrer si ces compensations doivent rester des émergences possibles où méritent d'être transformées en règles.

Prochain défi : jouer le labyrinthe d'Isadora !


Retour de la joueuse de Matilda :

On a apprécié le fait de commencer un labyrinthe assez tard dans le jeu, ce qui nous a permis de jouer proche d'Anselmo et de faire écho à ce qu'on avait déjà posé dans le jeu à Prague. Sans ça, ça aurait été difficile de jouer son paysage mental.

C'est compliqué de changer de partage de narration en cours de jeu. Sur cette partie précisément, Thomas a tenu à pousser le rythme (selon nos souhaits) en multipliant les flashbacks et flashforwards, mais ça a renforcé son emprise sur la maîtrise. C'en est d'autant plus difficile de passer brutalement en narration largement partagée en cours de partie.

Le début de la campagne a été tellement riche que le jeu dans le jeu fait presque « trop ». On a des thèmes alléchants qu'on ne peut pas traiter (la peste se déclarant en ville par exemple), le jeu avec les daemons, des luttes de pouvoirs, de la politique, des souvenirs erratiques, etc. Pour l'instant l'expérience de labyrinthe n'a pas été suffisamment ébouriffante pour me faire oublier temporairement ça. Peut-être qu'en tant que joueurs/daemons on aurait pu prendre plus de temps pour ramener ces aspects-là dans le labyrinthe… ? Ou au contraire faire ça propre, efficace et plus court… ? Je n'ai pas de réponses.

Plus on avance dans la campagne, moins j'ai l'impulsion d'intervenir en tant que daemon, que ce soit pour Anselmo ou pour Petr. Peut-être parce que les grandes lignes des personnages ont été dévoilées ? En tout cas, j'ai l'impression qu'il faut trouver rapidement une vraie personnalité au daemon (en reprenant un pnj ou en en créant un de toutes pièces, mais complet) et le jouer comme un personnage à part entière, car sinon il s'efface. Au contraire, les daemons joués par le joueur de Petr sont de plus en plus consistants par exemple.
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Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

LA REINE DE LA VITESSE / UN CONCERT POUR SAUVER L'UNIVERS

Quand l'aventure dépasse la vitesse de Fahrenheit 451, le crash est inéluctable.

Jeu : Dragonfly Motel, piège surréaliste pour voyageurs imprudents

Joué le 18/03/2016 à Paris chez l'habitant, lors de la tournée Paris est Millevaux

Personnages :
Les hommes au chapeau, l'enfant, la Reine de la Vitesse
Crazy Wombat, Marylin Cannibale Monroe, Elvis, l'impresario, Monsieur Loyal

Image
crédits : edwick, licence cc-by-nc, galerie sur flickr.com


L'histoire :

Un homme avec un chapeau recherche sa mallette dans sa chambre de motel. Il engueule la femme de chambre. Elle finit par lui dire avoir vu une personne sortir du motel avec cette mallette. Un homme avec un chapeau, qui lui ressemblait beaucoup. Puis elle s'éloigne à reculons en passant l'aspirateur.

Un deuxième homme au chapeau cherche la clef de sa chambre et se met à fouiller le chariot de la femme de chambre avec le premier, l'un cherchant sa mallette, l'autre sa clef. Les ordures s'amoncellent autour d'eux.

À l'entrée du motel, il constate qu'ils sont plusieurs hommes au chapeau.

Lorsque l'un des hommes aux chapeaux sort du motel, c'est une voiture noire aux vitres teintées conduite par un autre homme au chapeau qui le récupère. Le conducteur dit qu'il doit prendre quelqu'un d'autre avant d'aller sur le lieu du rendez-vous. C'est une femme blonde aux yeux bleus avec une combinaison rouge. C'est la Reine de la Vitesse.

Une Ferrari rouge se gare aux côtés d'un homme au chapeau dans un crissement de pneus assourdissant. La conductrice l'embarque.

Ils roulent à toute vitesse sur le périphérique. Les lampadaires et les phares des voitures en sens inverse se fondent, on dirait des étoiles dans le vide intersidéral.

Un homme au chapeau entraîne l'homme au chapeau à bord d'une Limousine, la Reine de la Vitesse les suit. C'est un autre homme au chapeau qui conduit. La radio parle d'un complot terroriste pour détruire la réalité, et recommande aux citoyens de poursuivre leurs activités normales et de ne surtout pas porter de bleu. La Reine de Vitesse demande à l'homme au chapeau s'il a déjà perdu un être cher. La voiture est à l'arrêt. Un autre homme au chapeau tape à la vitre et répond à sa place, il dit qu'il a perdu sa mère, et qu'à la fin, c'était pas beau à voir, elle avait des pustules... Une vieille femme passe sa tête depuis le coffre pour commenter, c'est la mère du chauffeur, il lui dit de se tenir tranquille. À peu près à ce moment-là, l'homme au chapeau se liquéfie et disparaît. Peu après alors que la voiture commence à aller de plus en plus vite et déchirer les voiles de la réalité, le conducteur, s'exclame « C'est ici que je m'arrête » et il sort de la voiture en marche pour se déchirer et finir en petite boule de chair. C'est à ce moment-là que la Reine de la Vitesse reprend le volant et que la limousine se transforme en Formule 1.

Un homme au chapeau recherche un livre dans une bibliothèque. La bibliothèque commence par brûler, les livres entrent les uns après les autres en combustion spontanée. Il s'enfuit par un tunnel entre les étagères.

La Reine de la Vitesse conduit la Ferrari avec l'homme au chapeau à ses côtés, toujours plus vite, toujours plus vite, des tas de livres et de papiers heurtent le pare-brise, puis la vitesse dépasse Fahrenheit 451, alors les livres brûlent, et enfin la voiture passe sur le pont, et en face se tient l'enfant de la Reine de la Vitesse, la voiture a passé Mach 1000, il suffit juste de percuter l'enfant pour en finir, mais elle n'ose pas, elle fait une embardée, la Ferrari défonce la rambarde et plonge au-dessus de l'océan.

Une chambre d'hôpital. Une vieille femme agonise. Elle a des pustules. Elle a les cheveux blancs et les yeux très bleus. Un homme au chapeau équipé de formulaires se présente comme un intermittent de la Mort, il en distribue un à chacun et leur demande de les remplir. Puis il demande si quelqu'un a une clef.

A la réception du Dragonfly Motel, un homme au chapeau fait un scandale parce qu'on ne lui rend pas la clef de sa chambre. Le réceptionniste dit qu'il sait où elle est. Ils vont tous deux frapper à la porte de la chambre, un autre homme au chapeau leur ouvre. Le réceptionniste demande à ouvrir le petit tiroir de la table de chevet. Elle est fermée à clef. L'homme au chapeau dit qu'il sait où elle est, et les entraîne à l'accueil. Un homme au chapeau y lit le journal dans un fauteuil. Un des hommes au chapeau lui demande de rendre la petite clef du tiroir de la table de chevet.

Mais la Ferrari entre dans le hall en défonçant un des murs, elle écrase le réceptionniste et les hommes au chapeau contre le mur opposé, le réceptionniste a l'air de trouver ça génial, puis elle embarque un autre des hommes au chapeau, ils partent ensemble sur le périph, le pare-brise se couvre de bris de verres, puis de gens renversés, du sang, la vitesse, on dépasse Mach 1000...

L'enfant sort de la chambre d'hôpital, il va dehors, il y a une place de village et un manège, le chauffeur le laisse monter à bord, il monte dans l'avion. La Reine de la Vitesse monte aussi dans le manège, elle prend la petite voiture rouge. On annonce qu'il va y avoir un pompon à décrocher, puis le manège se met à tourner, de plus en plus vite, il tourne à Mach 1000, la réalité autour s'est dissoute pour faire place à l'espace intersidéral. La voiture est devenue une Ferrari et poursuit l'avion à une vitesse vertigineuse.

Deux hommes au chapeau discutent, une mallette à leurs pieds. Ils observent une boîte à musique en forme de manège qui tourne de plus en plus vite. Un flash info annonce une nouvelle attaque terroriste, dans la foule autour du manège, une silhouette avec une casquette bleue est entraperçue.

La mallette fait office de pompon. De l'extérieur on peut voir des gouttes d'un liquide expulsées par le tourbillon. L'homme au chapeau qui s'était liquéfié se reconstitue. Quelques secondes plus tard, on voit une boulette chiffonnée sortir de ce même tourbillon. Elle se déplie pour recréer un autre homme au chapeau. Le premier demande au second "C'est ici qu'on avait rendez-vous ?". Et les deux hommes essayent de s'emparer de la mallette.

La Ferrari fonce sur le périph. Droit dans le mur.

La chambre d'hôpital. La Reine de la Vitesse entre, elle titube, elle est en sang. Elle demande à ce qu'on lui retire son casque. Le chauffeur lui arrache directement la tête. Il relève la visière. Elle a les mêmes yeux bleus que la vieille dame qui agonise dans son lit.

L'enfant ouvre la mallette. Elle contient son cœur. Il y plante une aiguille et se fait un shoot avec le sang de son cœur.

Disparition.


Un homme est assis sur son lit dans sa chambre, l'air exténué. Il contemple un masque de luchador entre ses mains. Puis il prend une décision : il monte sur le toit du motel qui surplombe la ville. Il fait une chaleur à crever et il se sent prêt pour son destin. Monsieur Loyal l'accueille. Costume rouge, moustache cirée, maquillage blanc. Il lui demande son nom de lutteur. L'autre répond : Crazy Wombat. Qui va-t-il combattre...

Mais Marilyn Cannibale Monroe ! Les lumières explosent dans le ciel et elle surgit pour l'affronter. Elvis la coache, il l'encourage avec des petits mouvements de hanches. Maintenant ils sont sur le ring, devant la foule en délire. Monsieur Loyal annonce le duel fracassant entre Marilyn Cannibale Monroe et Magnetic Wombat !

Wombat est au bord d'une piscine vide. Toujours la chaleur. Le directeur artistique lui remet de l'argent pour s'être couché : "Tiens, voilà 7 francs comme convenu". Elvis, en slip de bain rouge, est près d'eux sur un transat. C'est l'Elvis de la fin, très gras dans son maillot de bain. Elvis fouille dans son slip de bain, frénétiquement, à la recherche de quelque chose. On voit qu'il commence à paniquer comme si ce qu'il cherchait avait disparu ... et là il s'exclame : "Où sont passées mes clefs ?". Le directeur artistique lui propose de se calmer avec de la dope : il sort un saladier de gummy bears de sous son transat. Elvis y fouille longuement, et au bout d'un moment on ne sait plus s'il cherche ses clefs ou s'il kiffe juste la sensation. Monsieur Loyal lui propose de l'aider à trouver ses clefs, il l'entraîne dans les coulisses. Depuis là, on voit le ring où s'affrontent Marilyn et Wombat, avec Monsieur Loyal qui arbitre. Monsieur Loyal demande à Elvis s'il n'est pas fatigué de tout ce cinéma. Le directeur artistique est en train de coacher le public, leur dire comment placer leur émotion, quand se lever, quand huer... Les publics sont spécialisés, certains ont de grands yeux, d'autres de grandes bouches, d'autres de grandes mains pour applaudir...

Monsieur Loyal et Elvis montent les gradins couverts de détritus d'après-match. Ils arrivent à une porte. Il s'agit des toilettes. Monsieur Loyal bourre Elvis dans la cuvette des toilettes. Ils passent ensemble dans une version inondée des gradins, ils plongent jusqu'aux coulisses et ouvrent une porte de loge avec une grosse étoile dessus. Ils arrivent dans la loge de Marilyn et l'inondent. Une fois que l'eau s'est retirée, non sans laisser derrière elle une loge saccagée, Marilyn, en marcel et clope au bec, les engueule. Le directeur artistique vire Monsieur Loyal. Monsieur Loyal se place devant le miroir éclairé par toutes les ampoules, et défait son maquillage. À quoi bon ?

Marilyn récupère l'étoile qu'il avait sur la joue, qui se révèle être un insecte. Elle le colle sur sa propre joue. L'insecte creuse la chair et entre dans sa bouche, laissant une plaie ouverte. Crazy Wombat réagit : il enlève son masque (révélant un visage tatoué identique au masque) et une voix sort de lui mais pas la sienne, et cette voix-là s'exclame : « Ma sœur ! ». Wombat et Marilyn réalisent alors qu'ils sont des jumeaux séparés à la naissance. Les retrouvailles sont pleines de fausse émotion et de surjeu. Monsieur Loyal touche la plaie de la joue de Marilyn avec mélancolie.

Le directeur artistique leur demande de jouer une scène façon le Pont des Espions.

Un grand pont suspendu. Une Ferrari qui gigote sur ses amortisseurs. On entend la voix de Marylin exulter depuis l'intérieur : "C'est qui la Reine de la Vitesse ? C'est qui ?"

Elvis est dans un imper trop court pour son gros bide. Sa crédibilité en tant qu'espion est assez minable. Des barbouzes débarquent pour le descendre.

Elvis est sur scène en costume de lumière. Monsieur Loyal annonce qu'il est revenu quand on ne l'espérait plus, il va jouer son dernier concert pour sauver l'univers ! La foule est en délire. Le directeur artistique répète : « tu m'as compris ? Tu te couches à la 3e chanson ! Ça fera 25 francs pour toi et 25 francs pour moi ! » Le ring s'éclaire. Un micro sur pied sort du sol devant Elvis, quatre adversaires se révèlent à chaque angle : Wombat, Marylin, et deux autres luchadores, dont Gorgone, la femme aux cheveux de serpents.

Le directeur artistique trépigne parce que les personnages ne suivent pas ses directives.

C'est la fin du monde. Des projecteurs tombent. Un homme aux grandes mains se fait écraser la tête, il continue à applaudir alors que sa tête est devenu un projo ensanglanté.

C'est le final, Elvis atteint son climax où il peut accéder à ses plus beaux souvenirs.

Il est dans cette chambre d'hôtel, il y a des personnes toutes nues affalées sur le lit, et une épaisse couche de coke partout par terre. Il y a Wombat assis sur le lit qui contemple son masque, son masque de héros. Le directeur artistique boude et trépigne en disant qu'il préférait avant, quand il y avait des gummy bears. C'est un enfant de quatre ans. Près de lui, Marylin, vieille et asthmatique, essaye de le calmer. Wombat se justifie : « Mais avec des cachets à 25 francs par combat c'était trop tentant de tomber dans les putes et la coke... »

Elvis pique une tête dans la poudreuse, il s'enfonce jusqu'à disparaître. C'était la meilleure fin possible.

Monsieur Loyal avise la porte au fond de la chambre, il a fait tout ce chemin jusque là, il ose enfin l'ouvrir. Derrière, c'est le périph, qu'il voit de profil. Il y a un enfant au milieu de la route qui tient quelque chose. Le cordon ombilical qui relie Wombat à Marilyn.

Un grondement extraordinaire. La femme de Monsieur Loyal arrive enfin.

Et la Ferrari rouge percute l'enfant à pleine vitesse.


Les papiers personnage (dans le désordre) :

Motivation : la vie est une danse, un mouvement. Retrouver le mouvement primordial.
Attache : ma dope.
Question : qui est mon frère jumeau ?
Destin : Je finirai noyé dans un lieu sans eau.
Motivation : Je veux explorer la librairie caverne (s'imaginer Gaston et le courrier en retard)
Blessure : Une plaie longue et fine sur le bras, très bavarde
Beauté : une femme très vieille, très ridée, très belle avec des yeux très bleus.
Attache : un insecte très affectueux
Blessure : J'ai perdu brutalement un être cher sous mes yeux
Question : Qui est la Reine de la Vitesse ?
Motivation : Je veux récupérer la clef de ma chambre
Attache : J'ai une voix dans ma tête qui me tient compagnie
Beauté : un masque de héros
Beauté : une bouche rouge sang
Destin : Je sors de cette illusion qui m'aliène
Question : Quels sont ces serpents qui sifflent sur nos têtes ?
Beauté : Un détail étrange sur mon visage qui fascine tout le monde
Blessure : un assassinat sur un pont
Destin : Se tirer de ce trou
Blessure : Ma chambre est en ruines
Attache : un attaché-case qui contient mon cœur
Question : qui m'a tué ?
Beauté : J'ai une grosse cicatrice magnifiée par un tatouage
Blessure : Cette plaie qui me parle parfois
Destin : être un intermittent de la mort
Motivation : Retrouver nos plus beaux souvenirs là où ils se cachent
Motivation : monter une cellule terroriste
Attache : une figurine en porcelaine de mauvais goût en forme de chien
Destin : sauver la terre un soir de concert
Question : était-ce un accident ?


Commentaires :

Durée :
1/4 h briefing+rédaction des papiers + 3/4 h pour la reine de la vitesse + 3/4h pour un concert pour sauver l'univers

Règles utilisées :
nouvelle mouture (la même que pour Échafaudages) : rédaction des papiers à l'avance et redistribution au hasard, prise de parole libre. J'ai demandé à ce qu'on broie les papiers au lieu de les déchirer, j'en voulais une trace pour rédiger le compte-rendu. Il s'agit de la version Plumes qu'on trouve dans la deuxième édition de Dragonfly Motel

Profils des joueur.se.s :
Expérimenté.e.s. Deux jouaient déjà à Dragonfly Motel, première version.

Défis :
re-tester la nouvelle mouture pour validation avant rédaction du livre qui sera publié.

Brainstorm :
j'ai créé mes petits papiers en m'inspirant des titres des livres que je voyais sur les étagères à côté de moi (dont le roman Speed Queen).

Mise en jeu :
J'ai été très surpris par la rapidité de "La Reine de la Vitesse" et donc on a décidé de rejouer une deuxième partie, mais pour rester dans les chronos, j'ai demandé à ce qu'on réutilise les mêmes papiers, en les redistribuant au hasard. J'ai utilisé la playlist Dragonfly Motel et un autre joueur avait fourni une sélection de mp3. Au final, on a été les seuls à manipuler le son pendant la partie.

Debriefing :

Le concept de réutiliser les petits papiers a permis une mise en abîme assez intéressante, même si ça se serait sûrement épuisé sur un troisième essai.

Comme pour Échafaudages, la prise de parole libre, associée à l'absence totale de jeu méta (peut-être quelques remarques méta nous ont échappé, mais ce fut très limité), ont produit des aventures jouées à un rythme frénétique.

Je valide cette version pour le livre final, car elle me paraît nettement plus accessible que la première mouture. Cependant, et la joueuse de Marilyn Cannibale Monroe me l'a fait encore plus remarquer en refaisant jouer la deuxième version une semaine plus tard, ce qu'on gagne d'un côté, on le perd de l'autre : dans l'ancienne version, le fait de rédiger les papiers en cours de jeu permettait d'installer un véritable dialogue, d'encourager le jeu collectif, de faire des liens entre les éléments, et de s'affranchir de la notion de contraintes créatives, choses qui disparaissent dans la nouvelle version. Dans l'ancienne mouture, la prise de parole est pondérée par le don de papiers, permettant le silence et la contemplation, alors que la nouvelle version entraîne un rythme enlevé. Raison pour laquelle l'ancienne version demeurera dans le livre sous forme de variante.

Au contraire, le joueur d'Elvis a largement préféré cette nouvelle version.

Enfin, la joueuse de Marilyn Monroe a signalé que déchirer les papiers était plus fort que de les broyer, et c'est vrai. Quelque part, j'ai amenuisé mon gameplay pour des raisons pratiques (le compte-rendu) et on continuera à déchirer dans les règles de base. Plus exactement, je vais laisser un peu plus la gestion des papiers livrée à l'émergence, aux idées de manipulation et de combinaison que pourraient avoir les joueur.se.s

A expérimenter lors du prochain playtest :
Encourager les usages émergents des papiers
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Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

LA VILLE NAUFRAGÉE

Suite de la campagne bretonne avec les nouvelles règles, peu de noirceur mais des dilemmes moraux à petite et grande échelle !

Jeu : Marchebranche, aventures initiatiques dans un monde de forêts en clair-obscur

Joué à la Médiathèque de Remungol le 16/04/2016
Personnages : le mage Edgar, le saltimbanque Hamidou

Cette séance est la suite de la campagne de Remungol
Séance précédente : Le médecin qui mentait

Image
illustration : Evariste Vital-Luminais, domaine public


L'histoire :

Il n'y a plus personne qui possède de cartes de Tarot près de Remungol. Les Marchebranche sont obligés de voyager. Au Solitaire, on leur dit qu'ils trouveront sûrement du travail soit dans les arides Mont d'Arée, soit dans le pays des falaises de Pont-Aven, soit dans la cité corsaire de Saint-Malo.

Edgar et Hamidou se rendent à Saint-Malo. Avec la montée des eaux, Saint-Malo est devenue une île, les remparts sont léchés de toute part par les eaux. La ville grouille de corsaires, de pirates et de flibustiers. Le cri des mouettes constitue un bruit de fond permanent. De taverne en taverne, on leur indique un possible commanditaire. On les conduits sur les rochers qui bordent les remparts, ils y rencontrent un vieux cultivateur de lichen rouge, qui pousse abondamment sur les rochers et les ronge en même temps. Le vieux cultivateur a un bandeau rouge sur la tête et un long menton garni d'une touffe de poils. Il leur explique que ce lichen le suit partout où il va et qu'il ronge la pierre. Il veut que les marchebranches l'amènent ailleurs, là où le lichen ne pourra pas faire de mal. Une aristocrate se présente à eux, avec une mission qu'elle pense plus urgente. Elle est vêtue d'une robe très apprêtée et ne se sépare pas de son chapeau et de son ombrelle. Elle dit être archéologue et perdre la mémoire à la vitesse grand V. Elle leur demande de se rendre dans ce fortin sur l'île qu'on voit à l'horizon, pour y trouver une ancienne relique, un piège à souvenirs, qui lui permettrait de récupérer la mémoire. S'ils ne s'en occupent pas séance tenante, elle risque de perdre toute sa mémoire. Le vieux cultivateur proteste. S'ils ne le font pas partir d'ici tout de suite, Saint-Malo pourrait bien disparaître, rongée par le lichen rouge.

Une jeune femme vient les rejoindre sur les rochers. Elle est amoureuse d'un capitaine corsaire et leur demande de l'enlever à son équipage pour qu'ils puissent se marier.

Edgar tente de faire une potion qui contre le lichen rouge, en vain. Edgar et Hamidou préfèrent alors se rendre au fortin en premier lieu. Ils empruntent une barque et partent sur la mer avec leur troll. A l'approche du fortin, la brume commence à envahir toute la surface des eaux. Puis des branches sortent de l'eau et bientôt une forêt toute entière. Des tirs de flèches commencent à fuser de chaque côté. Hamidou reconnaît des membres de sa familles perchés dans les arbres de part et d'autres, ils sont en train de se faire la guerre, comme dans son souvenirs, à coups d'arcs et de flèches. Comme la forêt à poussé, les marchebranches ont pied. Ils retournent la barque sur eux et courent jusqu'au fortin. Celui-ci est très délabré, chaque escalier et chaque mur de pierre menace ruine. Ils commencent à l'explorer et arrivent en haut d'un puits. Du fond du puits monte une sphère de bois qui étend ses racines de plus en plus : l'Arbre-Soleil ! Les marchebranches préfèrent prendre la fuite alors que l'Arbre-Soleil s'étend et dévaste le fortin. Ils repartent dans l'autre sens sous les tirs de flèches. Avant de reprendre la mer, Hamidou jette un regard en arrière. Il voit dans un des arbres sa grande soeur, qui le fixe avec insistance.

Quand ils reviennent à Saint-Malo, c'est pour voir les remparts s'effondrer sous leur propre poids : le lichen rouge vient d'achever les rochers qui soutenaient la ville. Une myriade d'embarcations de fortune ceinture la ville qui sombre. Sur les pontons, ils retrouvent leurs trois commanditaires. L'archéologue est dépitée d'apprendre qu'ils ont renoncé à trouver le piège à souvenirs. De colère, Edgar la pousse dans l'eau et lui prend sa barque. Désemparée, elle surnage, à la recherche de son chapeau et de son ombrelle.

Un enfant vient les trouver. Il était parti avec son père dans la forêt de Brocéliande dans une expédition de chasse aux reliques. Mais il s'est éloigné du chantier de fouilles pour aller dans une partie de la forêt où son père lui avait interdit de s'aventurer. Son père est parti à sa recherche, et sur le chemin, il s'est fait attaquer par des boules de glu jaune qui sont tombées des arbres : les marchebranches reconnaissent les mêmes créatures qui les avaient attaqués sur la route de Locminé. Son père est resté à Brocéliande, il a contracté une maladie terrible depuis l'attaque. L'enfant se sent terriblement coupable et il veut que les marchebranches le guérissent.

Les marchebranches veulent d'abord s'occuper du capitaine corsaire. Mais entretemps, leur navire a pris le large. Avec la barque de l'archéologue, ils rejoignent le navire. Ils ont pris le cultivateur de lichen avec eux, en mer au moins le lichen rouge qui le suit ne peut faire de ravage supplémentaire. Edgar génère une brume magique pour qu'ils s'en approchent en toute direction. Ils montent sur le pont et y trouvent une armée de corsaires hirsutes, crochets, cache-oeils, jambes de bois et perroquets. Le capitaine corsaire est un immense gaillard au regard dur, à la barbe noire. L'amoureuse a l'air d'apprécier les mauvais garçons ! La seconde du capitaine, une vieille avec un cache-oeil, leur dit qu'il est hors de question de se séparer du capitaine. Il doit les conduire à une île au trésor, où se trouve une arme de destruction massive qu'ils pourront revendre au plus offrant : un bocal de lichen rouge. Le vieux confesse qu'il a trouvé ce bocal avant eux, et que donc se rendre à l'île est superflu. Les marchebranches échangent le capitaine contre le cultivateur de lichen. Les corsaires vont alors vendre leurs services à un seigneur de guerre. Ils iront aux abords des villes ennemies et les sommeront de se rendre sous peine d'être éradiquées par le lichen rouge.

Les marchebranches récupèrent deux cartes de tarot, mais ils les ont payé bien cher ! Edgar obtient du cultivateur la carte du Roi : on y voit un Roi en majesté, entouré de sujets à qui il arrive bien des malheurs, sans que le Roi semble le remarquer. Edgar découvre qu'il convoitait le pouvoir dans la cité où il habitait. Il était tellement jaloux de ceux qui avaient plus de pouvoir que lui, qu'à son insu, sa jalousie leur a porté malheur, à cause de l'égrégore. Les uns après les autres, ils ont succombés à des accidents et des infortunes, et de fil en aiguille, défection après défection, Edgar est devenu Roi. Il a quitté la cité depuis. L'a-t-il fait après s'être rendu compte de son tort ?

Hamidou obtient la carte de l'amoureuse : c'est l'arcane du Diable. On y voit un monstre poilu et cornu qui tend les bras, le regard doux. Hamidou se rappelle qu'il avait ordonné la chasse à un horla. Mais la personne qui a tué le horla s'est ensuite rendu compte qu'il s'agissait de son meilleur ami, transformé en monstre par une malédiction...

Edgar se cherche un nouveau compagnon animal. Il part en forêt et trouve une vache qui est retournée à l'état sauvage. Elle semble dans le besoin, Edgar la trait. Il goûte de son lait et ressent un puissant sentiment de gratitude. Il comprend alors que cette vache donne du lait qui a le goût de ses sentiments, en l'occurence, la vache lui dit merci de l'avoir trait. Edgar la baptise du nom de Jacqueline et la prend avec lui.

Les marchebranche partent avec l'enfant vers Brocéliande. Ils y trouvent son père allongé sous un dolmen. La maladie a salement progressé, sa peau est toute jaune et ça et là gonflée d'énormes oedèmes jaunes. Le père prend les marchebranches à part et leur confesse bien connaître cette maladie : il sait qu'elle est incurable. Puis il leur demande de le laisser seul un instant avec son enfant : il veut lui faire ses adieux.

L'enfant est désespéré. Alors, Edgar lance un sort de joie sur sa vache et donne du lait à boire à l'enfant.

Les marchebranches ramènent l'enfant à Saint-Malo, qui est devenue un camp de réfugiés flottant, organisé autour de pontons et de bateaux de fortunes. Ils y trouvent la mère de l'enfant, et laissent l'enfant à ses bons soins. Le visage de l'enfant est toujours paré d'un sourire béat ; il dit avoir retenu bien des leçons de vie de cette infortune. Est-il toujours sous l'influence du lait de Jacqueline ?
Edgar pressent qu'il pourrait lui demander sa carte du Tarot.

Mais Hamidou lui fait signe de s'abstenir.

Passe une dame parmi les réfugiés, elle fait la manche, ses beaux vêtements et sa belle ombrelle sont en loques. Elle a un regard hagard. Elle se demande qui elle est, ce qu'elle fait là, d'où elle vient. Elle a tout oublié.


Feuilles de personnages :

Hamidou
Saltimbanque (atout : âme)
Expérience 3
Spécialités : langue des horlas, voler dans les poches, comprendre ce que veulent les horlas
Souvenirs : guerre de famille, séparé de sa famille par une contrée ravagée par l'arbre-soleil, a demandé à quelqu'un de tuer un horla qui s'est avéré être son ami
Équipements : toge blanche
Compagnons : troll

Edgar
Mage (atout : esprit)
Expérience 3
Spécialités : provoquer une émotion, créer une potion magique, faire fonctionner une relique
Souvenirs : quête de l'arbre-soleil, l'assassin de ma soeur est resté impuni, je suis devenu le roi d'une ville par malheur
Équipements : bocal de lichen rouge, fruit (noirceur : carnivore), pioche
Compagnons : Jacqueline la vache


Commentaires :

Durée :
1h1/2

Règles utilisées :
Les nouvelles règles instaurées depuis La boîte à musique, c'est-à-dire un seul dé pour toute la tablée. J'ai aussi ajouté deux tables : la table des périls (pour générer des péripéties durant les missions) et la table des entourloupes (pour générer les aspects troubles des missions ou des cartes reçues en paiement, chose que j'improvisais auparavant).

Profils des joueurs :
Deux habitués de la campagne, c'est donc leur quatrième partie de Marchebranche, et la première avec les nouvelles règles.

Défis :
+ Sortir du Centre Bretagne pour explorer d'autres contrées bretonnes.
+ Commencer à jouer avec les souvenirs de ces marchebranches d'expérience 2.
+ Tester les nouvelles règles avec un groupe habitué aux anciennes.
+ Tester les nouvelles tables

Debriefing :
Les joueurs ont apprécié les nouvelles règles, qui rendent le jeu plus simple mais aussi plus ardu (deux choses positives). On n'a eu aucune noirceur. Quand Edgar a voulu donner un sentiment de joie à la vache pour contaminer son lait, j'ai demandé un jet. En cas de réussite ou d'échec, le sentiment de joie était communiqué de toutes façons, mais en cas d'échec, la vache encaissait une noirceur : jouer avec ses sentiments la perturbait. Mais le jet a réussi. Je réalise que j'aurais du demander une noirceur automatique sur la vache pour changer ses sentiments plutôt que de bricoler une règle improvisée comme je l'ai fait.
Mais la partie fut une réussite. J'ai trouvé que la pression des dilemmes moraux était au rendez-vous, et j'ai profité d'un tirage de péril en oubli sur le chemin du fortin pour improviser la résurgence du souvenir de la guerre des familles qu'avait Hamidou, puis la résurgence de l'arbre-soleil, lui aussi une illusion tirée des souvenirs d'Edgar et d'Hamidou.

A expérimenter lors du prochain playtest :
J'ai hâte de tester le jeu avec des personnages maintenant assez expérimentés (niveau 3).
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Message par Pikathulhu »

[Inflorenza] Les Frondaisons du Passé.

Voyage aux racines du mal, flash-backs dynamiques et fin heureuse dans ce compte-rendu par kF !

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Message par Pikathulhu »

LA MÉTHODE DU DOCTEUR HOUSE

Quand Docteur House rencontre la Méthode du Docteur Chestel, notre perception du passé et de la vérité vole en éclats.

Jeu : Wonderland, piégés dans les réalités

Joué le 19/03/2016 à Paris chez l'habitant, lors de la tournée Paris est Millevaux

Personnages : Hamilton, UDM, Duke, Lapin Blanc

Image
crédits : angusmcdiarmid,Leandro Mocca, niriel, verlaten, licence cc-by-nc, galerie sur flickr.com

Le théâtre :

On reprend le principe du jeu de rôle La Méthode du Docteur Chestel (de Daniel Danjean) : des psychiatres tentent de soigner la pathologie mentale d'un patient en explorant son inconscient.
Dans ce jeu de rôle, l'aventure jouée se limite essentiellement à l'exploration de l'inconscient du patient. L'idée dans ce théâtre était de faire davantage d'allers et retours entre l'inconscient du patient... et les autres réalités. D'où le crossover avec la série TV Docteur House.
Les psychiatres explorateurs de l'inconscient sont ici encadrés par le Docteur House, un expert diagnosticien qui part du principe que tout le monde ment, y compris le patient, et que pour le soigner, il va falloir fouiller dans son passé afin de démêler le vrai du faux. De surcroît, House met les membres de son équipe en compétition entre eux et les encourage à employer des méthodes peu orthodoxes.


L'histoire :

Une grande salle de bal, lustres, escaliers, estrade. Tout le monde est tiré à quatre épingles. Harlem Close s'avance pour aller chercher son prix. Magnifique dans son costard, l'athlète à la peau noire porte à son bras la blonde Roxane Hurley, la top modèle qu'il a épousée. Il sourit à la foule alors qu'il prend le trophée dans les mains. Tout lui sourit en réalité. Champion du monde du 100 m, ténor adulé, avocat de renom, Harlem Close est une authentique star. Un journaliste s'avance sur l'estrade, personne n'a invité un type pareil dans son imper bouilli. Il demande à Harlem : "Est-ce que vous vous souvenez de Natasha Bloom, votre ex-femme ? Pourquoi l'avez-vous abandonnée sans lui laisser le moindre sou ?" Natasha Bloom apparaît sur l'estrade. Si elle semble avoir été jadis une belle femme, elle n'a pas fière allure aujourd'hui avec son visage abîmé et ses vêtements en loques.

Harlem Close n'arrive pas à répondre. Il bafouille. Il fait un collapsus nerveux. Il s'effondre et s'embroche sur son trophée.

Le Docteur House est dans la foule, avec ses assistants. C'est l'heure du briefing. Maintenant que les assistants ont observé les premiers symptômes d'Harlem Close, ils doivent trouver de quelle maladie mentale il souffre, et l'en guérir, parce que les sponsors d'Harlem Close ont promis un gros chèque à l'hôpital s'ils le sauvent. Depuis son collapsus, Harlem Close s'est réveillé, mais il souffre désormais d'un total manque d'empathie. S'il a conservé toutes ses compétences, son apathie le rend techniquement incapable d'exercer aucun de ses trois métiers, et encore moins son métier de star. Pour motiver ses assistants, House les met en compétition. Il promet une récompense à la personne qui trouvera le bon diagnostic en premier : il lui confiera le résultat de ses recherches secrètes sur l'âme humaine.

Dans l'équipe, il y a Hamilton, le chercheur en intelligence artificielle, un catholique contrarié dans sa foi, qui justement prétend que l'âme humaine, si elle existe, ne peut être codée. Il y aussi UDM (Unité de Diagnostic Médicalisée), une intelligence artificielle, création d'Hamilton, qui cherche à lui faire reconnaître qu'elle est humaine même si elle n'a aucun corps charnel. Il y le Lapin Blanc, une vieille femme aveugle qui vit recluse dans une maison de retraite et ne fréquente donc l'équipe que sous une incarnation virtuelle. Elle a été une des membres fondatrices de Wonderland, elle erre aujourd'hui sur le réseau à la recherche de la seule chose qui pourrait lui redonner le goût à la vie : ses petits-enfants qu'elle n'a jamais connu, obnubilée qu'elle était par son travail. Enfin, il y a Duke, qui vit en fauteuil roulant depuis que quelqu'un lui a volé l'usage de ses jambes, et qui est devenu diagnosticien pour se rapprocher d'Hamilton, qui serait en mesure de trouver un remède pour ses jambes, et aussi pour avoir l'occasion de démasquer celui qui lui a volé ses jambes.

Harlem Close a fait en sorte d'effacer toute trace numérique de son passé ancien, et l'équipe commence donc plutôt par s'intéresser au passé de Natasha Bloom. Ils trouvent une archive de sa remise de diplôme à la fac de droit. Tout le monde est en tenue de diplômé dans l'amphi, toge noire et chapeau à gland. UDM, toujours avide de tester les limites, est habillée en pom pom girl et roule des pelles aux lauréats. Pour explorer l'archive, Duke porte son avatar d'Harlem Close. Après s'être fait un nom dans le domaine de l'athlétisme, de l'opéra et de la justice, Harlem a vendu une marque d'avatars à son effigie, avec ses compétences implémentées, et Duke en a un pour se déplacer. Quand Natasha le voit, elle le prend pour le vrai Harlem Close. Elle est heureuse qu'il se soit déplacé pour sa remise de diplômes. Si le vrai Harlem Close était présent ce jour-là, il n'en reste rien puisqu'il a effacé sa présence de toutes les archives. Les autres lauréats jasent dans le dos d'Harlem, ils ne l'aiment pas parce qu'Harlem n'est ni assez pauvre pour avoir une bourse ni assez riche pour pouvoir se payer cette université, alors il fait les ménages dans les amphis le jour et suit les cours du soir, mais visiblement ça ne lui pas suffi pour décrocher le diplôme. Natasha lui dit qu'elle veut refuser la demande qu'il lui a fait. Elle ne lui dupliquera pas ses compétences : elle a aujourd'hui une opportunité de sortir de la pauvreté, puisqu'elle a obtenu cette bourse et qu'elle a travaillé dur pour être major de la promo, et demain elle part travailler pour un grand cabinet d'avocats. Si elle donne une copie de ses connaissances à Harlem, ce serait injuste. Mais elle veut qu'ils restent liés malgré tout. Elle l'invite à la rejoindre ce soir au restaurant. Elle lui demande de venir bien habillé.

Le restaurant est en fait le meilleur de la ville, Natasha n'a pas fait les choses à moitié. Duke-Harlem a fait ce qu'il a pu en termes vestimentaires, il porte des belles fringues de ville, mais ça ne correspond pas au standing du lieu. UDM a envahi le restaurant avec ses nombreux avatars, qui sont présents en serveurs et en clients. Natasha met un genou à terre et demande Duke-Harlem en mariage. Elle dit avoir réfléchi et s'il accepte le mariage, alors ils partageront tous. Puisque Duke-Harlem dispose de la technologie de transfert de connaissances, elle lui donnera une copie de ses connaissances en droit.

Duke vient de finir gagnant aux 100 mètres universitaires. Il rentre dans son vestiaire. Harlem arrive pour le féliciter. Il lui sert la main. Peu après, les jambes de Duke se dérobent. Il vient d'en perdre l'usage.

Duke est à l'hôpital, depuis des mois, cloué au lit, incapable de marcher. Harlem entre dans sa chambre suivi d'une armée de journalistes. Il vient pour le lancement de sa marque d'avatars, et souhaite offrir le premier à Duke. Il lui sourit à pleines dents et lui serre la main, pour lui transférer son avatar.

L'équipe va voir le journaliste qui a provoqué le collapsus. Il explique qu'au départ, c'est Roxane Hurley qui est venu lui demander d'enquêter sur Natasha Bloom. Cette dernière commençait à réclamer une pension à Harlem, Roxane voulait que le journaliste la décrédibilise. Le journaliste a découvert que Natasha n'a jamais pu faire carrière en tant qu'avocate, qu'elle est devenue une junkie et croule aujourd'hui sous les dettes. Mais cela lui a paru bien plus intéressant de faire un scoop sur le passé de Harlem, et c'est pour cela qu'il est intervenu à la remise des prix.

L'équipe cherche à investiguer plus loin dans les archives. Il leur faut trouver d'où Harlem tient la technologie de transferts de connaissances.

Harlem fait les ménages dans l'hôpital. Il arrive dans le laboratoire d'Hamilton. Il le trouve sur le balcon face au vide, sur le point de mettre fin à ses jours. Toute l'équipe assiste aux évènements, y compris le Hamilton du présent. Harlem tente de raisonner le Hamilton du passé. Celui-ci avoue que ses recherches sur l'âme l'ont mené vers le désespoir. Harlem propose de lui en soulager, alors Hamilton lui lègue une partie de ses connaissances en neurosciences, plus exactement, il lui lègue le pouvoir d'absorber des facultés.

L'équipe va voir Harlem à l'hôpital. Ils le trouvent avec son épouse Roxane Hurley, qui est opposée à ce qu'ils fouillent dans sa mémoire. Harlem est un excellent parti pour elle, elle préfère qu'on évite d'écorner son passé. Mais Harlem annonce être volontaire pour leur ouvrir sa tour de mémoire. L'équipe s'y engouffre. Hamilton demande à voir le moment où Harlem a acquis ses facultés de ténor.

Une salle d'opéra. Un grand ténor barbu chante à faire pleurer toute l'assistance. Pluie de roses. Harlem, en costume impeccable, est en larmes. L'équipe est installée sur les fauteuils à ses côtés. Il va voir le ténor dans sa loge, et l'équipe le suit. Il explique au ténor que grâce à ses capacités en neuroscience, il a décelé que le ténor souffrait d'un cancer en stade terminal (Hamilton confirme). Harlem propose que le ténor lui lègue son talent pour le chant, ainsi son chant sera immortel. Le ténor accepte, pour que son chant lui survivent, et ils se serrent la main. L'équipe est tiraillée entre hacker les coulisses pour en savoir plus sur le passé de Harlem, et observer le transfert de talent. Ils décident d'observer le transfert. Harlem ne prend pas simplement le talent du ténor, il lui prend tous les souvenirs qui sont liés au développement de ce talent pour le chant lyrique. Le ténor est un enfant, il chante maladroitement alors que sa mère l'accompagne au piano, maintenant c'est Harlem qui chante à sa place. Le ténor marche dans les criques de Sicile, c'est maintenant Harlem qui marche à sa place. Le ténor reçoit une lettre de rupture de l'amour de sa vie et pousse un cri déchirant, c'est maintenant Harlem qui crie à sa place.

Duke est maintenant convaincu que c'est Harlem qui lui a volé ses jambes. Il veut se venger, mais son code moral l'en empêche, un code qui lui a été inculqué par son père, un brillant juge d'instruction, très exigeant envers ses proches. Duke invite UDM chez lui. UDM le trouve à moitié ivre, en train de se soûler au whisky pour se donner du courage. Il propose à UDM de lui céder son code moral, ce qui permettrait à UDM d'être plus humaine. En échange, UDM lui offre son addiction aux jeux en ligne et au cyber-sexe. Duke se sent sali mais maintenant il est apte à mettre ses plans à exécution.

Pour prouver à Hamilton qu'elle est humaine, UDM veut remonter dans ses propres origines. Elle visite sa propre tour de mémoire. Elle remonte jusqu'à sa naissance. Elle est dans un lit d'hôpital, ses deux parents sont penchés sur elle : Hamilton et... Lapin Blanc. UDM est à l'origine une copie de la psyché du petit-fils de Lapin Blanc.

UDM aperçoit une porte dans le fond de la chambre, qui accède au passé antérieur à sa naissance. Si elle l'emprunte, elle en saura plus, mais y perdra son identité... Elle tente le risque.

Elle passe la porte et arrive dans exactement la même chambre. Dans le lit, il y a le petit-fils de Lapin Blanc. Il a le même visage qu'UDM. Il dit adieu à sa grand-mère, il va quitter ce monde connecté pour partir dans un séminaire au tiers-monde, y vivre dans la foi et dans la déconnexion. Il propose à Lapin Blanc de choisir entre copier sa mémoire ou copier sa psyché, l'un ou l'autre l'accompagneront alors que son vrai petit-fils la quittera. La mort dans l'âme, Lapin Blanc préfère choisir la mémoire. UDM n'a jamais existé.

Le petit-fils décide qu'il a assez passé de temps dans son séminaire au tiers-monde, il rentre au pays. Il descend de son avion par l'escalator, en tenue de prêtre. Une vieille femme l'accueille, elle tient un lapin blanc mais le petit-fils ne peut pas le voir car il est virtuel. Lapin Blanc est connectée à la vieille femme et lui dit quoi dire à son petit fils, elle s'en sert comme d'un avatar réel. La vieille femme entraîne le petit-fils dans la maison de retraite où elle travaille, elle lui présente Lapin Blanc en chair et en os, dame très âgée, aveugle, mais qui se comporte comme si elle voyait vraiment son petit-fils, puisqu'elle le voit, à travers le réseau. Le petit-fils est toujours aussi sceptique vis-à-vis du virtuel, il enjoint Lapin Blanc à accepter sa cécité.

L'équipe est réunie auprès de House. UDM n'est plus là mais le petit-fils est appelé en renfort. Ils se mettent d'accord pour explorer l'inconscient de Harlem, ça semble maintenant la seule chose à faire. Ils vont voir Harlem, qui dit être d'accord à condition que l'exploration soit streamée sur les réseaux, avec un mot de sauvegarde qui lui permette d'extraire l'équipe à tout moment et d'effacer son inconscient si besoin : il veut mettre en scène sa rédemption. L'équipe refuse, et Hamilton administre une perfusion en douce à Harlem qui le plonge dans un coma artificiel.

Le petit-fils reste à prier au chevet de Harlem et le reste de l'équipe s'infiltre dans son inconscient.

A l'intérieur, c'est le chaos. Des grands couloirs où Harlem fait les ménages, qui donnent sur des portes où l'on voit différentes scènes du passées, réinventées par son inconscient, ainsi Harlem en toge et en perruque en train de plaider comme dans un film. Duke fonce dans la pièce qui correspond au moment où Harlem lui a pris ses jambes. Harlem y demande à Duke de lui offrir une copie de son talent pour la course. Duke répond sur un ton méprisant qu'il a fait beaucoup d'efforts pour en arriver là, et que ce serait injuste qu'Harlem en arrive au même point par un simple copier-coller, alors de dépit Harlem enserre la main de Duke et lui vole son talent.

Duke est enfant, il court sur un sentier côtier, on voit la mer, il court aux côtés de son père, c'est un moment où son père est fier de lui. Mais ses jambes se dérobent, et son père ne l'attend pas, maintenant c'est Harlem qui court à ses côtés, et ils parlent de droit, et le père lui fait une accolade chaleureuse.

Duke hacke le souvenir, il en fait quelque chose de plus violent, où il a vraiment le beau rôle et Harlem le mauvais.

Hamilton et Lapin Blanc descendent dans l'inconscient profond, escalier eschériens, rêves de caca, Harlem s'y promène tout nu, honteux, des cafards qui remontent les escaliers, et une centaine de Natasha qui remontent les escaliers à leur suite.
Ils arrivent au balcon où Hamilton est sur le point de se suicider, et cette fois-ci ils y trouvent Harlem dans le mauvais rôle, en train de lui voler son talent. Le hack de Duke fait son effet. Le balcon est au bord d'un gouffre sans fond, et sur les côtés, il y a des dizaines d'autres balcons, avec des variations sur le même souvenir.

Le balcon s'effondre. Hamilton et Lapin Blanc sautent de balcon en balcon pour ne pas tomber dans le vide. Ils passent sur un balcon où Harlem vole le talent de Natasha avec férocité, puis un autre où il vole le talent du ténor. Tout s'effondre. Tout s'effondre !

Réveil !

Harlem se tourne vers Duke, qui est en fauteuil roulant. Il lui avoue son sentiment de culpabilité, et lui propose de lui rendre ses jambes, avec l'aide d'Hamilton. Duke est presque entièrement paralysé. Il fait un tout petit mouvement de doigts qu'Harlem interprète comme un oui. Alors Harlem se lève et lui serre la main. Duke lui reprend alors ses jambes et tout ce qu'il a fait avec depuis.
Harlem remporte l'ultramarathon. Maintenant, c'est Duke qui le remporte. Harlem amène la top model Roxane Hurley sur l'autel, maintenant c'est Duke qui l'embrasse. C'est Duke qui arrive à la salle de bal pour recevoir le trophée.

House considère que c'est Hamilton qui a fait le bon diagnostic. Il le convoque dans son bureau pour tenir sa promesse. De là, il l'entraîne dans les couloirs, il préfère parler en marchant.

Il regarde Hamilton

de ses grands yeux bleus désabusés

il le regarde

il le regarde


Feuilles de personnage :

Duke Nettings

Secrets :
Objectif : Je veux comprendre profondément comment le patient peut être apathique et plein d'aptitudes, parce que je me vois comme son exact opposé (et j'en suis jaloux)

Identité :
Destin : Ne jamais retrouver l'entrain, la créativité dont j'étais si fier avant l'"accident"
Attache : (supprimé) Je ne veux pas que ma progression se fasse aux dépends de nouvelles victimes, je resterai moral même face aux pires ordures des réalités
Motivation : Je veux retrouver mes capacités motrices, volées par un précédent docteur

Dépendances :
Handicap : Sans technologie, je suis incapable de vivre, mon corps ne me répond plus.
Lien : J'aurai besoin de Hamilton pour me permettre de retrouver mes capacités perdues
Attache (nouvelle) : Je suis accro aux jeux en ligne et au cybersexe

Figures :
Ressources : Mes avatars (Harlem Close) font à la perfection ce dont mon corps est incapable.


Hamilton :

Secrets :
Motivation : Désenchanté. Veut retrouver la foi.
Lien : Rival des autres membres de l'équipe

Identité :
Objectif : Illuminé. Veut montrer qu'on ne peut pas coder l'âme.

Dépendances :
Attache : mon confesseur
Handicap : Cartésien.

Figures :
Ressources : forum de confessions
Destin : prédicateur.


Lapin Blanc

Secrets :
Lien : membre fondateur (architecte) de Wonderland, a connu Hamilton
Attache : petits-enfants, jamais vus
Objectif : redonner du sens à la vie réelle.

Identités :
Handicap : vieille femme aveugle

Dépendances :
Destin : mourir seule et oubliée
Motivation : retrouver mes descendants par scan de la réalité virtuelle

Figures :
Ressources : peut se dissimuler numériquement


UDM (Unité de Diagnostic Médical) :

Identité :
Objectif : Devenir DIEU
Motivation : prouver à mon père que j'ai une âme

Dépendances :
Attache : accro au cyber-sexe et au jeu
Ressource : des tonnes d'avatars

Secrets :
Destin : tuer mon père et y perdre mon âme
Lien : papa

Figures :
Handicap : pas de corps.


Symboles :

Symboles conservés :
Secrets - Identité - Dépendances - Figures

Symbolés écartés :
Rêves - Mémoire - Chair - Innocence - Influences


Commentaires :

Durée :
1/2 h de création de personnage, 2h3/4 de jeu

Règles utilisées :
Version morale, c'est-à-dire Inflorenza minima en moteur

Création de personnage :
on réduit le tableau des thèmes à seulement 4 thèmes (je fais passer la grille de main en main, chacun.e barre un thème jusqu'à ce qu'il ne nous en reste que 4) pour centrer le débat. Ensuite, chacun range dans ces thèmes 7 descripteurs : un handicap, une attache, une ressource, une motivation, un objectif, un destin, un lien avec un autre personnage

Profils des joueur.se.s :
expérimenté.e.s

Brainstorm initial :
Je n'avais rien préparé de plus que la description du théâtre. L'idée du patient m'est venue du brainstorm de création de personnage. Je suis notamment parti du fait que Duke était à la recherche d'une personne qui lui avait volé la faculté d'utiliser ses jambes.

Défis :
+ Valider la version morale des règles une bonne fois pour toute.
+ inventer un patient à partir du brainstorm
+ jouer des scènes d'inconscient qui soient percutantes
+ jouer aussi dans les autres réalités
+ amener des scènes typiques de la série Dr House

Debriefing :
+ Défis relevés, à trois regrets prêts :
+ j'aurais aimé une scène de cambriolage comme on en trouve dans la série Dr House, mais les personnages ont surtout cambriolé des mémoires plutôt que des lieux physiques ! Je comprends que c'était plus tentant, et quelque part j'ai omis de jouer une scène où House les aurait enjoint à commettre un cambriolage.
+ Je pense avoir manqué de jus pour le final dans l'inconscient de Harlem Close. On aurait pu aller encore plus loin, je pense. L'aventure dans son ensemble est un beau monument de vertige logique, c'est juste que j'aurais voulu un dernier étage encore plus insolite et grandiose : c'était un bon climax moral et un climax esthétique en demi-teinte. Next time !
+ Décidément, pour un one-shot, 7 descripteurs c'est trop long. C'est un reliquat de l'époque où les descripteurs servaient de points de vie, mais depuis que je me suis affranchi de cette idée (les descripteurs sont juste des descripteurs, maintenant), on devrait arriver à un résultat probant avec moins. Après tout, sur Inflorenza minima, on s'en sort à merveille avec juste un objectif par personnage.

A expérimenter lors du prochain playtest :
+ Tester une création de personnage à 4 descripteurs : handicap + attache + objectif + lien


Retour à froid du joueur de Duke :

j'étais très content de la partie, et pour moi le climax était réussi. Mais en fait, c'est moins la scène dans l'inconscient de Harlem qui m'a marqué que celle où il me rend symboliquement mes jambes, devant les caméras. On avait établi un parallèle très clair avec la scène où Harlem m'offre un clone au milieu de l'histoire, et ces deux marqueurs de l'avancée de notre histoire mutuelle, tous les deux extrêmement ironiques, m'avaient beaucoup plu.
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Message par Pikathulhu »

[Inflorenza] La Forêt de Möbius.

Histoires circulaires et labyrinthes de cauchemars et de végétaux dans ce compte-rendu par Astarkan !

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Message par Pikathulhu »

LE MARIAGE ET LE BÛCHERON

Quatre heures de jeu pour déployer un monde, faire connaissance avec les marchebranches, leurs grandeurs, leurs petitesses. Entre mariages maudits et bûcherons hantés.

Jeu : Marchebranche, aventures initiatiques dans un monde de forêts en clair-obscur

Joué le 23/04/2016 à la convention Équinoxe, à Rennes

Personnages : Akim Al Sahid le voyageur, Nox Tatis l'artisan, Mèlvékia la mage, Rafken Yeux d'Or le saltimbanque

Image
illustration : Gustave Doré, domaine public


L'histoire :

La forêt de la mémoire. On dit de cet endroit qu'il recèle la mémoire perdue de chacun. Ou qu'il est à l'intérieur de la tête d'une seule personne, que c'est dans sa mémoire qu'a poussé la forêt.

Au cœur de cette forêt, le marché. On y vent des horloges, des peintures, des bijoux, tout un tas de babioles qui sont le vestiges de vies passées, et qui valent de l'or comme tout souvenir sur cette terre de l'oubli.

Les marchebranches se frayent un chemin dans la populace. Des gnomes au crâne sphérique qui ne savent dire que la lettre A leur offrent de la soupe qui a une odeur de barbe à papa, et qui pour chaque marchebranche a un goût différent, le goût d'un mets de leur enfance.
Des hommes ventripotents à la barbe blanche les basculent sans se retourner et plaisantent dans un idiome incompréhensible.
Des hommes grêles à la peau très noire portent de grands vases sur leurs têtes.

Un homme leur confie leur première aventure. Il est en train de se transformer en arbre, et avant d'être complètement végétal, il veut se venger. Il raconte que lorsqu'il était jeune, son grand-frère l'a fait participer à une chasse au dahu. Il est resté au milieu de la forêt avec un sac à attendre que son grand-frère rabatte le dahu vers lui, et au bout d'un moment il a compris que le dahu ne viendrait jamais, que c'était une farce. Alors au lieu d'attendre que son grand-frère revienne le chercher en rires, il est reparti tout seul. Et sur le chemin du retour, il s'est égaré et été piqué par une ronce. C'est depuis qu'il s'est lentement transformé en arbre. Il leur tend le morceau de ronce et leur demande de retrouver son grand-frère et de le piquer avec, pour lui apprendre ce que ça fait. Akim Al Sahid, le voyageur du groupe, celui qui a un bâton tout simple, lui fait entendre raison. Son grand-frère a sûrement oublié son forfait depuis lors. Ce ne serait pas une vengeance, mais un crime. A la place, il conseille à l'homme-arbre de se rendre dans une des belles cours du marché, où viennent jouer les enfants, et à finir ses jours aussi, au milieu des rires des enfants. L'homme-arbre l'écoute et part vers la cour.

La deuxième personne qui leur confie une aventure est une vieille gitane, qui est spécialisée dans les divinations au sujet du passé. Elle leur explique qu'un homme, qui s'appelle Malêtre, est venu la voir et lui a montré une alliance qu'il portait. Il lui a demandé s'il était déjà marié. Car si non, il avait le projet de se marier avec une femme rencontrée il y a peu. Mais à ce moment-là, la gitane a été piquée par un moustique qui implante de faux souvenirs. Elle a cru voir que l'homme avait ramassé cette alliance et donc qu'elle ne lui appartenait pas. Malêtre a répondu : "Je suis soulagé. Alors je peux me marier la conscience tranquille." La gitane demande aux marchebranches de faire en sorte d'annuler ce mariage sans écorner sa réputation, donc sans dévoiler qu'elle a fait une erreur de divination.

Une autre personne les a bousculés en prétextant avoir une mission plus urgente à leur confier. Elle s'appelle Ailette, c'est une femme aux cheveux roux et bouclés, avec un tablier de sculpteur équipé de ciseaux à pierre. Elle a la capacité de dévoiler la mémoire contenue dans les arbres de cette forêt en les sculptant. Elle a sculpté un bouleau plus loin dans la forêt et lui est alors apparu la statue de son mari disparu. Elle demande aux marchebranches de le trouver.

Ils la suivent au milieu de la forêt, près du bouleau sculpté. Arrive alors un bûcheron barbu avec un gros ventre et des jambes toutes gonflées. Il doit faire de la rétention d'eau, quand il marche ça fait blow, blow. Le bûcheron dit que ce secteur lui est dévolu, il l'a payé et il vient pour couper tous les arbres, y compris le bouleau. Les marchebranches lui demandent ce qu'il veut pour épargner le bouleau, il leur demande de les guider jusqu'au cœur de la forêt. Ils obtiennent de lui qu'il temporise un peu avant de couper le bouleau. Il coupe un autre arbre. On voit qu'il pleure quand il coupe un arbre. Akim lui demande pourquoi. Il répond que quand il était enfant, il adorait les arbres, et un jour les arbres lui ont donné des graines. Il est rentré chez lui et pendant la nuit, les graines ont germé, elles ont donné des arbres qui ont poussé à toute vitesse dans tout le village et ont transpercé ses parents. Alors depuis, il coupe les arbres.

Il est fatigué et les marchebranches l'invitent à s'endormir. Alors qu'il s’affale sur la grume qu'il vient d'abattre, une carte de tarot tombe de sa poche. Une carte en écorce, qui représente un roi en pointillés. Les marchebranches s'abstiennent de lui voler la carte dans son sommeil.

Les marchebranches se rendent au bord du marché, là où le mariage de Malêtre va être célébré ce soir. Des tentes sont installées pour les convives et pour les préparatifs des mariés. Ils se font guider jusqu'à la tente de Malêtre et le trouvent en costume noir et blanc. Deux gnomes sont en train d'enrouler une ceinture de tissu rouge autour de sa taille. Surprise : Malêtre a le même visage que l'homme sculpté dans le bouleau. Ils l'interrogent sur sa future épouse. Il semble en être profondément amoureux et n'a aucun souvenir de sa vie d'avant.

Ils sortent de sa tente et rencontrent un homme qui cherche le lieu du mariage. Il a les cheveux roux bouclés et ressemble beaucoup à Ailette. Ils discutent. L'homme s'appelle Rousselin. Il est à la recherche de son grand-frère Malêtre. Il leur explique que Jadis, Malêtre a épousé sa propre sœur, et que cette union incestueuse a déclenché des calamités qui ont ruiné leur communauté. Rousselin est heureux quand il a appris que Malêtre refaisait sa vie et il a voulu voir ça de ses yeux. Les marchebranches comprennent que Malêtre et Ailette sont à la fois frères et sœurs et anciens époux !

Ils vont voir Safran, la future épouse de Malêtre dans sa tente. C'est une femme de seize ans, du peuple des porteurs d'eau dont elle partage la carnation très noire. Elle a un regard aussi jeune que décidé. Une jeune fille et une ville femme sont en train d'ajuster sa robe de mariée. Safran avoue qu'elle aime Malêtre parce que même s'il est beaucoup plus âgé qu'elle, il est aussi sans passé. Il est son premier amour et elle est on premier amour. Elle est pressée que cette union soit célébrée car ensuite les porteurs d'eau, qui sont des nomades, vont repartir et Malêtre pourra partir avec eux.

Les porteurs d'eau vendent de l'eau d'oubli, elle sourt dans leur désert. Eux n'en boivent jamais car elle est sacrée, mais ils la vendent. Safran leur a dit que Malêtre avait rencontré les porteurs d'eau parce qu'il voulait parler à l'ancien. Les marchebranches se demandent s'il n'a pas bu volontairement de l'eau d'oubli pour oublier son histoire avec Ailette. Les marchebranches veulent acheter de l'eau d'oubli. Ils payent avec une histoire. Rafken les yeux d'or, le saltimbanque du groupe, celui qui a les pupilles dorées et fait office de conteur itinérant, raconte l'histoire de l'homme-arbre et de son frère.

Les marchebranches retournent voir Ailette restée auprès du bouleau sculpté. Ils lui annoncent qu'elle va revoir son mari ce soir et lui proposent de trinquer à cette idée. Ils lui font alors boire de l'eau de l'oubli. Cela fonctionne, mais sur le chemin du marché, Ailette a de nouveau envie de sculpter un arbre. Elle le fait, et le visage de Malêtre commence à apparaître. Nox Tatis, artisan et ébèniste du groupe, celui qui porte une salopette, et un bâton sculpté en forme de chouette, commence à tailler le bois aussi dans le prétexte de "l'aider", mais en fait pour déformer le visage. Ce faisant, il réalise qu'il est lui aussi le frère d'Ailette et de Malêtre.

Les marchebranches conduisent Ailette au mariage. C'est un des gros hommes à la barbe blanche qui célèbre le sacrement, dans son idiome incompréhensible. Au moment de l'échange d'alliances, Malêtre se tourne vers Ailette. S'il la voit, à ce moment-là, il va retomber amoureux d'elle. Pour faire diversion, Nox Tatis... embrasse Ailette. Et en tombe amoureux !

Le mariage est célébré. La gitane, habillée dans une robe flamenco flamboyantes, avec des créoles aux oreilles, exulte : "J'aime quand l'amour triomphe !"

Elle donne une carte des Amoureux aux marchebranches. Akim s'en empare, et se rappelle alors qu'il était amoureux d'une certaine Sherazade, dans son pays natal, quand il était parmi les gitans. Mais que le père les a séparé, parce que le clan d'Akim était atteint d'une maladie, la hurlante, qui se transmet par l'amour, alors le père a craint pour Sherazade et l'a soustrait à la passion du gitan.

Ailette donne aussi sa carte, il s'agit de la carte de l'Ermite : on voit un homme avec une lanterne qui cherche quelqu'un dans la forêt. Mèlvékia, la mage du groupe, celle qui porte un bâton gravé, s'en saisit. Elle se rappelle que par le passé, elle avait un grand ami et qu'elle l'a quitté pour aller faire des études. Une prophétie disait qu'une fois séparés, s'ils se retrouvaient à nouveau, ils ne devraient plus jamais se séparer sous peine de se perdre à jamais. Ce grand ami, c'était le bûcheron.

Au marché, une personne leur confie une nouvelle aventure. Elle s'appelle Râpe, elle porte une salopette, a le visage tâché de cambouis et un regard qui porte une grande fatigue. Elle leur dit que Safran a volé son passé. C'est elle qui était une porteuse d'eau, une fille du désert et de la liberté, c'est elle qui aurait dû épouser Malêtre. A la place de cela, elle a hérité de la vie misérable de Safran, elle travaille dans une usine d'horloges et s'épuise dans cette ville sans avenir. Elle demande aux marchebranches de lui rendre le passé de Safran.

Une autre personne leur confie une mission. Il s'agit d'Ozyax, un vieil archéologue avec une barbe si longue qu'il a fait des nœuds avec pour qu'elle ne traîne pas par terre. Ozyax prétend être à la recherche d'une créature mythique : le Chat du Secret. Ce chat sauvage connaîtrait le secret du bonheur. Il a besoin d'escorte pour se rendre à l'endroit exact, d'autant plus qu'il est en concurrence avec une autre archéologue qui ne reculera devant aucun moyen : la fourbe Masqueline.

Une caravane de hérissons géants aux pattes grêles traverse le marché. Ce sont les porteurs d'eau qui repartent vers leur désert maintenant que le mariage est célébré. Malêtre, Ailette et Rousselin les accompagnent. Nox Tatis veut les suivre, puisqu'il est amoureux d'Ailette. Les marchebranches lui font alors boire de l'eau de l'oubli, et il perd tout ce qu'il a appris depuis le début de cette aventure.

Rafken les yeux d'or entraîne Râpe à la suite de la caravane de hérissons. Il arrête le hérisson de Safran et la menace de révéler à tous sa duplicité si elle ne rend pas son passé à Râpe. Safran dit qu'elle ne comprend rien à son histoire, que son passé lui appartient et qu'elle n'a jamais volé celui de Râpe, elle montre la couleur de son visage pour prouver son appartenance à la lignée des porteurs d'eau, elle fait mine de repartir. Mais Rafken ne la croît pas. Après tout, il a pu lui voler son apparence en même temps que son passé.
Rafken appelle Malêtre, il lui dit que Safran est une voleuse de passé, il lui dit tout. Malêtre en perd la raison, il fuit dans la forêt.
Safran est si désespérée qu'elle accepte de faire un échange de passé avec Râpe, pour oublier sa peine d'amour.

Les marchebranches prennent ensuite Râpe sous leur aile, celle qui a le passé de Safran, et Rafken hérite d'une lame du tarot de l'oubli, un souvenir au sujet d'un marais mortel tueur d'enfants.

Une nouvelle personne les sollicite pour une aventure. C'est un homme barbu très large de corps et d'épaules, une force de la nature. Il est réputé pour transformer des arbres et des ruines en oeuvres d'art. C'est une sorte de travailleur du bois, comme Nox Tatis et Ailette, mais avec une ambition architecturale. C'est aussi le frère de l'homme-arbre, il a une mauvaise réputation depuis que Rafken a raconté son histoire, alors il ne peut s'attarder en ville trop longtemps. Il leur explique qu'il est à la recherche de l'Arbre-Mère, qui est au cœur de la forêt, c'est-à-dire l'endroit que le bûcheron recherche aussi. Il veut sculpter l'Arbre-Mère pour en faire son œuvre majeure, et pour cela il payera les marchebranches... deux cartes ! Il les attendra à la lisière de la ville dès qu'il pourront le conduire là-bas.

Ozyax presse les marchebranches de prendre sa mission en charge. Sa concurrente Masqueline et la lavandière noire, son âme damnée, sont déjà parties de la ville et ont commencé le périple dans la forêt qui conduit au Chat du Secret. La maladie du bûcheron a progressé, ses jambes sont toutes gonflées, il ne peut plus se déplacer par lui-même. Il les supplie de le conduire au cœur de la forêt, mais les marchebranches trouvent plus urgent d'escorter Ozyax et rattraper Masqueline et la lavandière noire dans la quête du Chat du Secret.

Sur leur trajet dans la forêt coule une rivière. Ils veulent traverser le guet mais réalisent que celui-ci a été piégé par cette sorcière qu'est la lavandière noire et conduit dans une autre dimension. Ils parviennent à traverser à la nage.

Ils rattrapent enfin Masqueline et la lavandière noire. Masqueline est revêtue d'une cape et porte un masque d'or. La lavandière noire a le visage pâle et les cheveux très sombres. Ils sont arrivés au seuil du domaine du Chat du Secret. Il s'agit d'une spirale de pierres dans une clairière. Au centre de la spirale se trouve une roche de sacrifice. Pour accéder au Chat du Secret, il faut sacrifier un être cher. Ozyax n'a personne dans sa vie. Masqueline dit qu'elle représente une race supérieure aux autres humains, qu'elle mérite d'accéder à ce secret. Elle dit qu'elle va sacrifier la lavandière, et celle-ci est prête à mourir pour sa maîtresse. Mais les marchebranches ne peuvent laisser faire une chose pareille : s'ils permettent un meurtre, ils seront touchés par la noirceur. Ils convainquent la lavandière noire que ce sacrifice est inutile parce que Masqueline la considère comme un simple instrument, elle n'y est pas attachée et donc si elle la tuait, cela n'ouvrirait pas l'accès au Chat du Secret. La lavandière rompt avec Masqueline et rejoint les marchebranches. Masqueline repart en jurant de se venger. Ozyax est effondré : le Chat du Secret lui échappe. Les marchebranches le forcent à leur donner sa carte du tarot en échange de leur escorte pour le retour. C'est Nox Tatis qui hérite de la carte de la Lune et se rappelle de sa mère (celle aussi de Malêtre, d'Ailette et de Rousselin). C'était une chasseuse de horlas invétérée, et elle les a délaissés au profit de sa passion. Nox pense que le malheur de leur famille vient de là.

Quand les marchebranches reviennent en ville, ils sont abordés par un enfant dératiseur de horlas. Il est équipé d'un pulvérisateur à dos et de lunettes de soudeur. Il explique qu'en voulant traiter une contrée contre les horlas, il a empoisonné le sol et détruit l'environnement avec ses produits chimiques, une catastrophe qui a davantage affecté la communauté locale que les horlas. Le dératiseur veut faire amende honorable en faisant un geste pour préserver l'environnement. Il leur demande de protéger l'Arbre-Mère de celles et ceux qui voudraient le détruire. Il pense que si l'Arbre-Mère meurt, c'est toute la forêt autour qui mourra. Il ne peut les accompagner car il a beaucoup de travail sur le marché.

Les marchebranches partent vers le cœur de la forêt avec le bûcheron et le sculpteur sur bois. Ils sont trois à porter le bûcheron. Le cœur de la forêt est un espace étranges. Tous les arbres sont identiques, ce sont des clones. Il est impossible de se repérer, sauf pour Nox Tatis, qui a la capacité de démêler les arbres les uns des autres, et de toujours reconnaître un arbre devant lequel il est déjà passé. Il les guide, mais cela lui coûte. En touchant l'un des arbres, il se rappelle que c'est lui qui a dit aux arbres de donner des graines au bûcheron quand il était enfant. La famille du bûcheron lui avait fait du mal et il voulait se venger.

Les marchebranches, le sculpteur et le bûcheron arrivent face à l'Arbre-Mère. C'est un arbre colossal et noueux qui dégage une immense présence. Akim, qui parle la langue des horlas, communique avec lui. Le bûcheron, en larmes s'est dressé tant bien que mal et se traîne avec sa hache pour tuer l'Arbre-Mère ; c'était là son projet, se venger des arbres, tuer l'Arbre-Mère pour que toute la forêt autour meure. Akim demande à l'Arbre-Mère pourquoi les arbres ont donné les graines au bûcheron, il demande pourquoi les arbres ont tué sa famille. Ils demandent pourquoi les arbres ont poussé. "C'est ce que les arbres font. Ils poussent.", répond l'Arbre-Mère. Les marchebranches ne peuvent se résoudre à laisser faire le bûcheron. Ils écoperaient d'une noirceur, échoueraient deux missions, et se rendraient complices du meurtre d'un Dieu. Ils arrivent à dissuader le bûcheron de commettre ce crime, de refermer le cycle de violence. Le bûcheron s'écroule. Il meurt dans leurs bras. Mélvèkia vient d'être séparé de son ami à nouveau, et cette fois, c'est irrémédiable, comme le disait la prophétie.
Akim dit à l'Arbre-Mère de se protéger, de rendre le cœur de la forêt inaccessible, alors l'Arbre-Mère ordonne à ses enfants-arbres de se resserrer autour de lui pour former une barrière.
Le sculpteur sur bois peut sculpter l'Arbre-Mère, mais celui-ci refuse d'être ainsi profané. Les marchebranches parviennent à le convaincre de plutôt sculpter tous les arbres autour, et ils le laissent là, sachant qu'il va finir le restant de ces jours enfermé ici.
Nox hérite de la carte du Roi que possédait le bûcheron. Il se rappelle alors que Malêtre est en fait mort depuis longtemps, il est mort après son mariage avec Ailette. Celui auquel ils ont eu affaire était un fantôme.

Le sculpteur leur confie ses deux cartes. Akim gagne encore la carte des Amoureux. Il se rappelle qu'il convoitait la femme d'un de ses amis, et il a pris l'apparence de son ami pour séduire sa femme. Il a encore un peu de potion de changeforme sur lui. Mélvèkia hérite de la carte du pendu. Elle se rappelle que sa mère a endossé un crime qu'elle aurait commis, et qu'elle a été pendue pour ça. Alors qu'en réalité, Mélvèkia était innocente. Le crime avait été commis par un changeforme qui avait pris son apparence.

Les marchebranches retournent au marché, et le dératiseur tend sa carte du tarot à Rafken les yeux d'or qui va enfin pouvoir être au même niveau que ses confrères. Hélas ! La carte est rongée par les acides. Elle lui rend bien un souvenir (il se rappelle que sa mère a été corrompue par un horla, c'est pour cela qu'il a des yeux d'or), mais il ne progresse pas en expérience...


Feuilles de personnage :

Akim Al Sahid, voyageur
Atout : cœur

Expérience 1 (carte des amoureux)
Noirceur : j'ai dit aux aux arbres de donner des graines au bûcheron pour pourrir sa famille
Spécialité : la langue des horlas
Souvenir : Amoureux de Sherazade, son père nous a séparés par crainte de la MST Hurlante qui affectait notre clan
Équipement : bâton de marcheur (noirceur : sculpté par l'orgueil et la méchanceté)
Compagnon : lavandière (redonne des mauvais souvenirs en lavant les vêtements de la personne)

Expérience 2 (carte des amoureux)
Spécialité : attirer l'amour
Souvenir : J'ai un ami dont je me suis tapé la femme en prenant l'apparence de mon ami
Équipement : potion de changeforme

Nox Tatis, artisan
Atout : force

Notes : bâton de marchebranche

Expérience 1 (carte de la Lune)
Noirceur : mémoire de ma sœur / jalousie envers Malêtre et Ailette
Spécialité : reconnaître les arbres
Souvenir : Maman occupé à chasser les horlas, nous a délaissés
Équipement : ciseau à bois
Compagnon : Safran

Expérience 2 (carte du Roi)
Spécialité : Échapper aux horlas
Souvenir : Malêtre est un fantôme

Mèlvékia, mage
Atout : esprit

Expérience 1 (carte de l'ermite)
Spécialité : Recherche de magie
Souvenir : amie du bûcheron, si on se sépare à nouveau, on se perdra à jamais

Expérience 2 (carte du pendu)
Spécialité : crée une potion
Souvenir : ma mère s'est sacrifiée (a été pendue) pour me sauver, par la faute d'un monstre

Rafken "les yeux d'or", saltimbanque
Notes : a les yeux d'or (pupilles), souvenir perdu (corrompu par un horla)
Expérience 1
Spécialité : raconte des histoires de monstres
Souvenir : marais mortel tueur d'enfants
Équipement : livre de contes
Compagnon : le gamin dératiseur


Commentaires :

Durée :
4h1/4

Règles utilisées :
+ Aucune modification, j'ai juste une table en plus : la table des détails forestiers.

Mise en jeu :
+ J'ai été moins que clair sur les lancers de dé en opposition. Il y en a eu un pendant la partie et j'ai cafouillé.

Retour du joueur de Rafken les yeux d'or :
+ On ne sait plus où donner de la tête entre les aventures. On veut essayer de faire tout mais c'est difficile ou impossible.
+ J'ai perdu mon personnage sur une noirceur mais ça n'a pas eu d'incidence. Je suis revenu en jeu aussitôt après, sans séquelle, parce que les autres avaient réussi un jet de dé pour me faire revenir.

Retour du joueur de Nox Tatis :
+ Cela a été impossible de tout faire. La toute première aventure, on l'a envoyé chier.
+ Le fait d'encaisser une noirceur pour avoir une réussite automatique, c'est très bon.
+ Lorsque tu avais présenté la statue dans le bouleau, tu as laissé échapper qu'elle ressemblait à Malêtre alors qu'on ne l'avait pas encore rencontré. J'ai fait exprès d'ignorer l'information. [réponse de Thomas : je crois au final c'était sans gravité. C'est le contraire d'un jeu à secret, les choses doivent être révélées pour provoquer des dilemmes moraux. En fait, à Marchebranche, il n'y a que des secrets de Polichinelle.]

Retour du joueur d'Akim :
+ On joue le génie de la lampe. Les commanditaires nous disent quelle mission faire, et nous on essaye de devenir plutôt ce qu'ils veulent vraiment derrière, et c'est ça qu'on va leur offrir pour avoir la carte.

Retour personnel :
+ Partie très intense. Je pense que l'émotion et les dilemmes moraux étaient là. Les règles et les tables montrent leur aboutissement. Reste juste à rôder ces histoires de rendre un peu dramatique ou difficile le retour d'un personnage après un hors-jeu par noirceur, et les conflits en opposition.

A expérimenter lors du prochain playtest :
+ Je pense qu'en cas de double réussite, on compare les résultats et le plus petit l'emporte. En cas d'égalité (y compris double noirceur), c'est le camp avec le plus de marchebranches qui l'emporte.
+ Rendre impossible le fait de remettre en jeu d'un seul jet de dé un marchebranche qui vient d'être exclu pour noirceur. Il faudrait forcément que ça nécessite une petite aventure et/ou que ça ait un coût et/ou que le marchebranche garde une séquelle.
+ Permettre de choisir son atout sans tenir compte de la vocation. Cela créera des combinaisons qui enrichiront la palette des personnages. Avant, un voyageur avait forcément du cœur, maintenant il pourra plutôt avoir de la force, de l'esprit ou de l'âme.
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Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

[Inflorenza] Lumières et Ténèbres.

Comment bâtir une aventure super-héroïque et sérieuse à partir d'une référence délirante, par Astarkan.

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