Une fois équipé, je suis redescendu de la tour et, malgré la fatigue, je gardais le sourire aux lèvres car je n’étais plus seul : Kluly serait toujours à mes côtés dorénavant. Il m’avait cependant prévenu que les autres n’allaient probablement pas être capables de le voir, car il n'était visible qu’à ceux qui l'aimaient vraiment.
Accompagné par Sorana, je rejoignais les autres commandants. Torkemada me demanda de lui raconter tout ce qu’il s’était passé depuis le jour de ma disparition, et j’entamais mon récit en commençant par l’arrivée de Nurah dans ma tente. Elle était venue m’expliquer que pour revoir Kluly, je devais d’abord ingérer la potion qu'elle avait emmené avec elle, suite à quoi elle partit mais aussitôt fût remplacée par Kluly lui-même, le même qu’à l’époque à la seule différence de ses yeux, alors rouges. Il m’avait demandé si je voulais le retrouver et, après avoir répondu par l’affirmative, ce dernier tomba au ralenti, laissant sa place à une ombre qui se précipita sur moi. Quelques minutes plus tard je me retrouvais dehors avec mon paquetage et ma pique ! Je me déplaçais alors malgré moi, comme possédé. En voulant quitter le camp, cette furie de Selka m’avait sauté dessus pour mettre fin à mes jours en hurlant que Nurah et moi étions en train de trahir tout le monde ici. Encaissant difficilement ses coups, je tombais dans l’inconscience, mais c’est alors que je vis une nouvelle fois l’ombre quitter mon propre corps. Je me réveillais quelques instant plus tard, déjà debout et contemplais Selka au sol couverte de marques de griffe. Un coup de pied pour m'assurer de sa mort et je n'ai plus réussi à contrôler mes gestes jusqu'au moment où Kluly m’a tendu la main dans la tour du dragon.
Après toutes mes explications, l’inquisiteur a eu l'air étrangement convaincu. Je lui dis que j'avais désormais retrouvé Kluly et il m’a répondu avoir eu tort et, en passant a côtés de moi, tapait sur mon épaule comme pour me souhaiter la bienvenue. Ce geste d’une symbolique incommensurable fut gravé dans mon cœur à jamais. Les autres étaient aussi présents : Kaptra, équipée de l'Épée du Courage, avait l'air décidé d'aller rendre visite un certain Joran Vhane dans les geôles. De son côté, Kluly me rappelait que Lann m’avait fait une promesse, et je m'empressais donc d'aller le voir.
Après avoir recueilli le plus d'informations possible auprès de Lann, je partais à la recherche de Narwenn, la seule personne ayant vécu en Plaie du Monde, afin de savoir si elle connaissait des lieux d’intérêts dans les environs. Kluly me conseillait de me faire accompagner du spécialiste des investigations, mon ami Torkemada. Sur le chemin, il m’a raconté tout ce qu'il s’était passé pendant mon absence. Il me proposa d'aller plutôt voir les tieffelins dans un premier temps car ils avaient peut-être croisé les deux tourtereaux en se rendant à Kénabres. Longue Ombre, comme à son habitude, se jeta au sol à notre rencontre afin de nous montrer son meilleur profil. Il a avoué avec déception ne pas être passé par cette route pour attaquer Kénabres. En le voyant, je ne pouvais m’empêcher de penser qu’avec Drézen libéré, lui est ses congénères l’étaient aussi physiquement, mais pour une raison qui m’échappait, il restait à nos côtés et considérait Hécate comme sa "Maîtresse". Nous avions profité de l'occasion pour lui demander s'il avait des informations sur le transfert, ou capture, d'âme. Tout ce qu’il pouvait nous apprendre sur le sujet restait que les âmes de tous les tieffelins stationnés ici avaient été capturés par de puissants démons, afin sans doute de les rendre plus dociles. Il acceptait cependant avec joie de chercher plus d’informations sur ce sujet dans les archives de Drézen, que nous n’avions pas eu le temps de consulter jusqu’à présent.
Notre discussion avec Narwenn nous fournissait aussi quelques informations sur les environs : nous étions déjà au courant de l’existence d’une chapelle de Desna à l’est, mais apprenions qu’il existerait un ancien temple sarkarien désormais profané et dédié au culte de Baphomet, à environ 50 km à l’ouest de notre position. En passant, je n’avais pu m’empêcher de remarquer son changement de style de combat : si elle arborait toujours fièrement un arc long, elle semblait désormais se concentrer plus précisément sur le combat au corps à corps. Ma fesse gauche l’en remerciait.
Quand je recroisais Kaptra et Sorana, elles m’ont informé être à la recherche d'Aravashnial afin de purifier la "forge de corruption". Le but de la naine était de transformer l’épée de Yaniel en marteau qu’elle pourrait manier plus aisément. Cette forge m’intriguait au plus haut point, il fallait que j’aille voir cela de plus près. Irabeth quant à elle nous conseilla de retirer les cadavres qui jonchaient Drézen. Pour plaisanter je proposais de les manger mais la paladine s’en offusqua et m’enjoignit de ne pas propager ce genre de rumeurs, enclines à faire penser aux autres races que les orcs n’étaient que des sauvages ! Sorana de partir consacrer le cimetière avec l’aide de quelques prêtres et paladins, puis de faire le tour des différentes ethnies présentes ici pour déterminer quoi faire de leurs défunts, en fonction des croyances de chacun.
Au final, les tieffelins avaient rappelé que leur peau était naturellement résistante au feu, et que l’inhumation semblait une meilleure solution pour eux, alors que les sarkariens prétendaient que le feu purificateurs leurs permettrait un accès direct à l’autre monde. Le peuple de Lann rappelait quant à lui avoir vécu des générations sous terre, et par principe souhaitait quitter ce monde depuis la surface…
Après plusieurs jours passés à consacrer le cimetière et enterrer et ou incinérer les défunts, Torkemada a été demandé afin de participer lui-même à la purification de la forge. A en croire le mage elfe, il s’agissait d’une tâche qui aurait pu lui prendre plusieurs jours mais, par miracle, mon ami s’en était acquitté en un jour seulement.
Pendant ce temps-là j'avais réparé les tourelles des tours de garde qui avaient été sabotées par Kluly, et commencé à emménager un laboratoire d’alchimie dans une petite pièce des sous-sols de la citadelle dans laquelle un cercueil avait été abandonné, afin de faire quelques potions en attendant.
L’inquisiteur s'élançait déjà et décocha une flèche de diversion sur le guerrier pendant que je crachai un mollard d'acide qui atteignit sa cible de plein fouet. Je plaçais mon bouclier pour protéger mon ami archer, mais c'est Kaptra qui s’est avancée sans réfléchir pour en fin de compte devenir la cible du courroux vengeur d’Orik. Sorana tendit sa main et des flammes jaillirent de sa paume. Le bouclier du guerrier le protégeait partiellement, mais une flèche de Torkemada le transperça juste au moment où j'arrivais dans son dos. Kluly, qui m’avait suivi, me montrait où attaquer et malgré l’armure lourde de mon adversaire, je perforai sa défense comme une lame chaude dans du beurre. Ce dernier n'avait pas apprécié mon assaut, et après avoir repris son souffle, il m'attaqua à de nombreuses reprises. Sa première tentative me toucha, et il en profitait même pour tenter de m'intimider par une grimace sanguinaire. Il n’avait pas fait attention à mon visage d'une laideur sans nom ? Je croyais son attaque terminée mais, comme pour un baroud d'honneur, il me délivra un dernier coup que j’ai pu éviter de justesse grâce à l'intervention de Kluly, qui avait déplacé mon bouclier au bon endroit en m'hurlant de ne pas sous-estimer mon adversaire.
Torkemada tendait la main en incantant quelques paroles obscures, et je pu lire dans les yeux du guerrier qu'il était désormais incapable de bouger. Kluly, comme pour me signaler où frapper, avait posé son doigt sur le guerrier et me hurlait « Ici ! ». Je plongeai ma rapière centimètre par centimètre dans le corps de l’homme immobilisé : sa vie s'échappait au moment où la pointe atteignit son cerveau.
Sans perdre de temps nous nous sommes ensuite dirigés vers un des nids de goules au fin fond des égouts. Étrangement, aucun de nous n'était incommodé par le manque de lumière, Kluly mis à part, qui précisa que sa vue allait s'habituer à l'obscurité. Je ne perdais pas de temps et ingurgitai une potion capable de me rendre invisible. J’ai descendu quatre à quatre les marches devant moi pour finalement apercevoir plusieurs goules qui se cachaient à ma droite. Pendant ce temps, mes coéquipiers arrivaient eux aussi. Kaptra s’est positionnée au milieu de la salle centrale alors que Torkemada et Sorana attaquaient à distance les goules. De mon côté j'essayais de contourner ces créatures putrides et, arrivé dans leur dos, j’attaquai l’une d’elle pour me retrouver rapidement submergé par leurs assauts. Malgré le nombre, j’étais parvenu à esquiver la totalité de leurs tentatives sans grande difficulté. Torkemada vit que les goules étaient toutes regroupées autour de moi et n'hésita pas à décocher une flèche qui explosa sur tous mes adversaires. Kluly avait deviné ses intentions et me prévint juste à temps pour que je me mette à couvert. J’ai dû réitérer cet exploit lorsque l'énorme boule de feu qu’avait invoqué Sorana explosa à quelques pas de moi. Avaient-ils une confiance aveugle en mes réflexes ? Ou plutôt ne m’avaient-ils pas vu ? Quoi qu'il en était, je m'en étais sorti sans une égratignure, tandis que la pièce dégageait alors une puissante odeur de goule brûlée.
J'entendais au loin Kaptra se faire assaillir par plusieurs morts-vivants ! Je me précipitai pour l'aider mais deux d’entre elles m'en ont empêché pendant que deux autres traînaient la naine au sol vers leur tanière : elle semblait totalement paralysée. Après avoir supprimé la faible opposition, nous retrouvions Kaptra au sol, deux goules occupées à lui grignoter les membres. Torkemada élimina l'une d'elle pendant que je me jetai sur l'autre pour la transpercer de ma rapière. Nous sommes ressortis après ce succès, avec malgré tout un blessé. J’aurais dû suivre le plan de Kluly : le laisser appâter les cadavres ambulants pour les prendre en embuscade...
Quelques jours de repos plus tard, j’apprenais que Longue Ombre avait offert une "pierre d'âme" à sa maîtresse Hécate pour lui prouver sa loyauté : si un jour son âme se retrouvait libérée, celle-ci aurait dû selon les propos du tieffelin être attirée par cette pierre. C’était une magnifique preuve d'amour, je ne le pensais pas si poète. J’envisageais de profiter des jours ici pour discuter avec lui et je comptais probablement en faire de même avec le nain de la forge afin d'en apprendre plus sur ce qui l’avait motivé à suivre son frère à Drézen. Pendant ce laps de temps, Aravashnial en avait appris d’avantage au sujet du "Ver-qui-marche" qu’il recherchait : il serait un fidèle de Baphomet et se nommerait Xanthir Vang. L’elfe pensait qu’il s’agissait probablement d’un des chefs des Templiers du Labyrinthe d’Ivoire.