Mechwarrior Destiny
Ceci est une copie d'une critique que j'avais faire sur ce jeu en 2020, mais qui a visiblement disparu dans les profondeurs du forum. je la remet à la demande d'un forumiste
Mechwarrior: destiny est à Battletech Time of War ce que SR : Anarchy est à Shadowrun, à savoir une proposition de jdr avec une mécanique bien plus légère et orientée sur la narration plutôt que sur le crunch et la précision.
Le livre (version pdf) est au standard des publications Battletech, avec beaucoup d’illustrations, certaines très réussies, d’autres moins. Le texte assez dense et demande une attention soutenue lors de la première lecture pour bien suivre. Heureusement les règles sont souvent bien explicitées et des exemples sont fournis régulièrement.
La bonne nouvelle, c’est que le système de règles tient en 25 pages, ce qui est quand même un petit exploit pour un jeu de mecha tendance hard-science. Le reste étant soit du background, soit des règles de conversion entre les différents jeux Battletech (Total Warfare, Alpha Strike) qui prend une place importante, soit des conseils au MJ (avec pas mal de réflexions sur les questions de narration partagée ou pas). D’ailleurs comme tous les jeux Cue System, on peut y jouer en MJ tournant mais les options pour jouer en « MJ classique » sont présentes aussi. Evidemment la partie catalogue de matériel est aussi importante en particulier avec les différents Mechs à disposition (ce qui est bien normal) .
Le jeu se propose de commencer en 3025 en pleine guerre de Succession, la période historique initiale du jeu de plateau. Mais j’évacue tout de suite la question, oui les Clans sont également présentés au sein d’une annexe qui leur est entièrement consacrée. On peut donc faire un bond en avant en 3049 pour les afficionados…quiaff ?
En avant pour la décomposition.
L’ouvrage débute, tout comme Anarchy, sur la partie background ou comment se mettre à jour sur les affaires de la Sphère intérieure en 3025 en une dizaine de page. C’est succinct mais le tour d’horizon est assez complet. Je ne m’étendrai pas plus sur cette partie, que j’ai parcouru rapidement car c’est de l’archi-connu pour moi.
Le système
Les personnages sont définis de façon assez similaire à Anarchy par
- des attributs (6)
- des compétences
- deux traits (un positif et un négatif) qui vont avoir un impact fort et permanent en jeu
- Des life path (héritage des vieux jeux Mechwarrior) qui vont permettre de peaufiner le personnage en conférant certaines valeurs de compétences
- On retrouve aussi les cues et les tags (mots clefs, répliques et comportement dans Anarchy)
- Des jauges de taille variable pour la fatigue et la condition physique
- L’armure, les armes, le materiel etc
- Et bien sur le Hardware ( = véhicule) éventuel !
Alors par véhicule j’entend là aussi bien le mech, que l’aeronef, le tank ou un simple hover car. Les règles utilisent par défaut le mot « mech » mais les règles sont les mêmes pour tous les véhicules quel que soit leur type.
Les actions se résolvent toujours de la façon suivante :
2D6 + (Compétence + Attribut lié) + modificateur. La partie Compétence+ Attribut lié étant précalculée sur la feuille de PJ. Ce jet se fait en opposition soit à une action d’un PNJ, soit à un seuil de difficulté définit par : Facile (2D6), Medium (3D6), Difficile (4D6). Le plus haut l’emporte.
Les règles précisent également, et ça à son importance, qu’on n’utilise les jets de dés que lorsqu’il y’a un doute sur la réussite de l’action. Donc un spécialiste de l’électronique n’a pas besoin de faire de jet pour pirater un intercom standard et un pilote de mech ne fait jamais de jet de pilotage sauf circonstances exceptionnelle comme lorsque son mech perd une jambe.
La feuille de PJ tient sur deux pages aérées, on y retrouve l’ensemble des données du personnages et un petit encart pour le mech/véhicule avec la sacro-sainte silhouette de mech est ses petites cases à cocher au fur et à mesure que le mech prend des dégâts. Plusieurs pré-tirés sont proposés afin d’illustrer les possibilités de création et de personnalisation. (j’ai noté avec intérêt et bien que leurs illustrations ne le suggère pas, que la plupart des pré-tirés souffre de léger surpoids si je me fie à leur rapport taille/masse. Biais cognitif américain ? ou erreur lors du passage, méritoire, en unité S.I plutôt que Imperial?)
Il n’y a pas d’initiative dans le jeu normal, les rounds se déroulent selon le tour de table, toujours le même qui prévaut. Le MJ commence sa narration, ensuite la joueuse à sa gauche, puis la suivante, etc. Ça parait très figé et injuste, mais il y’a une raison à cela comme on va le voir. (A savoir qu’il y’a une option pour gérer les rounds autrement, soit de façon plus mécanique avec des jets de dés, soit en distribuant la parole librement jusqu’à ce que tout le monde ait agit)
Autre mécanisme fondamentale : la coexistence de deux échelles de jeu lors des combats : celle des individus et celle des mechs/véhicules. Ces deux échelles induisent des différences, mais en termes de jeu les deux se fusionnent sans problème au cours d’un tour de table. Un PJ entrain de poser des charges de démolitions peut parfaitement s’intégrer dans le tour alors que ces camarades sont entrain d’en découdre dans leurs mechs.
Les joueuses ont des ressources à disposition pour influer sur leur destin.
Les Plot Points, au nombre de 3 par PJ et avec un max de 5. Pour en gagner c’est simple => Une bonne narration qui fait kiffer la table, et hop un plot point !
Ces plot points permettent au PJ de :
- Interrompre le tour de table pour agir immédiatement
- Augmenter la distance de déplacement
- Récupérer une case sur une des jauges de santé
- Prendre un coup à la place d’un autre
- Faire une attaque de riposte immédiatement
De façon assez astucieuse, lors du passage à l’échelle mech, les plots points permettent aussi de gérer les situations de tir direct dans le cockpit (afin de maitriser la dangerosité de ces tirs, car dans le jeu de figurines ça se solde souvent par la mort instantanée du pilote), on s’en sert également pour pouvoir s’éjecter à temps ou repousser les limites de son engin.
Les plots points servent aussi aux joueuses pour acheter (avant le départ en mission) du support tactique comme par exemple un passage de Chasseurs-Bombardier qui fera un run de bombardement sur une cible durcie qui leur donne du fil à retordre.
Un peu comme à FATE les plot points dépensé par les PJ vont au MJ qui pourra alors s’en servir à son tour pour rendre la monnaie aux PJ trop audacieux.
L’autre ressource c’est l’attribut d’Edge (plus ou moins la chance, l’instinct), un point dépensé permet de rejeter ses dés ou, plus vicelard, d’obliger le MJ à rejeter les siens. Le second jet s’applique alors obligatoirement. L’Edge se renouvelle seulement à la partie suivante.
Le Combat
Alors tout d’abord : la mort. (ca ressemble fortement à l’option présenté dans la VF de Anarchy) C’est à la table de jeu de décider si la mort est une option ou non. Le jeu propose plusieurs façons de gérer un KIA de PJ au combat. On peut bien sur tuer un PJ tout le monde est OK avec l’idée. Mais on peut tout à fait transformer un KIA en quelque chose de moins définitif grâce aux plot points ou alors sauver le personnage mais avec des morceaux en moins, etc. Les propositions restituent assez bien l’ambiance des romans Battletech ou la mort des protagonistes reste rare et n’est là que pour donner un sens dramatique aux évènements. Je trouve les options assez intéressantes, car le PJ trompe-la-mort devient alors un vétéran qui porte les marques de son ordalie et qui va devoir vivre avec pour le reste de ses aventures.
Le combat fonctionne comme les actions avec des jets d’oppositions. C’est là qu’on a la plus grande complexité car il faut gérer la portée entre les protagonistes (vu la nature du jeu c’est un peu logique) car le mouvement joue un grand rôle dans la tactique des combats de Mechwarrior destiny. Tous ceux qui ont joué à Battletech sur plateau ou sur jeux vidéo le savent bien.
Les dégâts se gère comme à Anarchy, on tient compte de l’armure avant d’appliquer les blessures, etc. C’est pareil pour les Mechs où on retrouve le blindage puis la structure et les fameux dégâts critiques qui vont parfois pulvériser votre mech en l’espace d’un round si vous n’êtes pas assez méfiants (vive les plots points !).
Parmi les éléments propres au véhicules et mechs, le mouvement se gère au travers de points de mouvements qui permettent de changer de zone de portée et d’accomplir certaines attaques (charge ou l’inénarrable Death from Above pour ceux qui ont des jumps jets) . Ces points de mouvements vont aussi conditionner la capacité du mech à se positionner dans les terrains difficiles ou sur le toit d’un immeuble (d’ailleurs il y’a une petite table pour savoir avec quel type de mech on peut aller sur quel bâtiment sans l’écrouler)
Les mechs peuvent effectuer des attaques de corps à corps (un truc de freeborn ça !) comme à distance. Le jeu différencie les Armes principales des groupements d’armes afin de refléter le fait que certains mechs sont construit autour d’un système d’arme alors que d’autres sont plus génériques. Mais dans les faits les deux se gèrent à l’identique mais ça permet de ne pas avoir à faire des jets de dés pour chacun des 12 canons lasers d’un Nova par exemple.
Une petite règle tout simple permet de gérer les tirs indirects (comme les tirs de missiles LRM) de façon différente des tirs directs, ce qui reflète les spécificités propres à ces systèmes d’armes et donc de les utiliser différemment en jeu. Là encore on retrouve le souci d’introduire un sentiment de combat avec de la tactique de mecha
Note : 1 point de dégats d’une arme de mech vaut 10 points à l’échelle individuelle. Et un personnage touché par un tir direct de mech est KIA automatiquement…ben ouai.
Dernier point, la surchauffe ! le truc emblématique de Battletech est bien sur présent aussi. La Chaleur se gère avec des tokens tout simplement et contrairement au jeu de figurine classique, il n’y a que 5 niveaux de chaleur quelque soit le mech. La chaleur augmente lorsque le pilote réalise certaines actions ou utilise certaines armes ou subit des dégats dans certaines zones. A la fin de son tour on retire autant de tokens que le mech est capable d’évacuer avec ses systèmes de refroidissement et on compte ce qui reste, si c’est trop haut…shutdown ou explosion probable.
Je ne m’étendrais pas sur la partie Conversion entre les systèmes de règles, mais elles ont un intérêt même pour ceux qui n’envisage pas de jouer avec différents systèmes, elles permettent de récupérer toutes les datas des catalogues pléthoriques du jeu de figurines afin d’importer dans Mechwarrior Destiny votre mech préféré qui bine sur ne figure pas dans le livre de base. Cette partie contient aussi des idées pour gérer des choses comme les inter-scénario, le scavenging, les réparations etc qui s’inspirent des règles du jeu de figurines et qui peuvent avoir leur place dans une campagne de jdr.
La fin du bouquin contient plusieurs Mission briefing qui sont des scénarios au format Cue System, tout à fait comparable aux fiches de missions de SR : Anarchy.
Conclusion :
C’est le premier jdr basé sur battletech que j’ai envie de faire jouer (et pourtant j’ai tous les précédents). Il est un peu crunchy, peut-être un chouïa plus que SR : Anarchy mais pas tellement. En outre la plupart des éléments de crunch sont hérités de Battletech, les habitués seront en terrain connu.
Mais c’est aussi la question que je me pose, je ne suis pas certain que pour des débutants complets à Battletech le jeu soit tellement accessible, car tel que les choses y sont décrites, il peut paraitre dense techniquement en proposant un univers assez pauvre narrativement. Sentiment renforcé par les Cues et les tags de tous les prétirés qui sont quasi exclusivement tournés vers …la baston. Il n’y a quasiment rien sur leur personnalité sociale, leur sexualité, leur croyance, leur sentimentalité, leur rêve, leur crainte, etc or les Cue sont censés être le carburant qui alimente la narration des PJ.
fort heureusement il ne tient qu’aux joueuses d’introduire des Cue qui soit plus profonds et plus intéressants pour humaniser leurs personnages et avoir de quoi faire du drama. Car que serait les histoires de Battletech sans leur drama ?
Et SR : Anarchy dans tout ça ?
SR anarchy contient pas mal de bonnes idées pour customiser un peu plus le Cue System. Voici les points d’Anarchy VF que j’injecterai sans doute dans Mechwarrior Destiny
- Le système pour regagner des plots points qui donne plus d’intérêt aux Cue
- La règle du jeton « Cible prioritaire » pour encourager à faire preuve d’originalité plutôt que de spammer les LRM de derrière la colline
- La séparation des Cue en Comportement et Répliques
- Les Atouts pour permettre de créer des talents particuliers propre à un personnage déjà expérimenté pour illustrer qu’il a atteint un niveau hors du commun et peut faire des choses incroyables