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Re: Inspi historique

Publié : lun. avr. 03, 2017 10:52 pm
par Lord Foxhole
Orlov a écrit : lun. avr. 03, 2017 9:21 pm Le rapport aux cadavre de l'homme médiéval et fort différent du nôtre. Les prédicateurs n'hésitaient pas à déterrer des morts, à discuter avec des crânes pour faire le show. Ils demandaient par exemple au crâne où il était et le crâne répondait qu'il était en enfer parce qu'il avait été un mauvais chrétien, etc. ... L'idéal de la mort chrétienne s'est imposé au Moyen-Age, mais cet idéal concernait bien d'avantage les rites et les sacrements que l'enterrement et la conservation du corps qui étaient tantôt conservé, tantôt enterré, tantôt abandonné ...
Le rapport des gens du Moyen Âge avec la mort était fort différent de celui que nous avons au 21 siècle...
Tout simplement parce que la vie était souvent très brève : la moitié des accouchements se terminaient par la mort du nouveau-né ou de la mère. Encore heureux quand la mère et l'enfant ne mourraient ensemble... Les taux de mortalité infantile étaient ceux que l'on avait dans les pires régions du Tiers Monde, il y a un demi-siècle. Ensuite, les diverses maladies et la malnutrition emportaient la moitié des enfants avant qu'ils n'arrivent à l'âge adulte.
Les vaccins n'existaient pas et il était pratiquement impossible de soigner les infections (les antibiotiques n'ont été popularisés en Europe qu'après 1945 ! )... On pouvait mourir de n'importe quoi : une appendicite voire un abcès dentaire.
Donc oui, bien avant la guerre, la famine, les bêtes sauvages ou les accidents bêtes (on se noie dans la rivière ou on tombe du haut d'un arbre), les problèmes de santé se chargeaient de liquider la plupart des gens avant qu'ils n'atteignent 40 ans ! Le gars qui - par chance - atteignait 60 ans passait pour l'équivalent contemporain du centenaire !
Voilà le genre de réalité qui ne transparaît pas dans la plupart des jeux de type médiéval-fantastique...

Ceci dit, la religion faisait justement passer la pilule : peu importe, finalement, une vie miséreuse puisque le bon chrétien va au Paradis.
A l'époque, l'athéisme est complètement impensable... Si tu ne crois pas en Dieu, qu'est-ce qui peux te pousser à vivre une existence de merde en ce bas monde ?
L’église est toujours au milieu du village, et le cimetière est autour... Les morts encerclent l'église, pour être plus proche de Dieu.
Et comme on ne les enterre pas trop profond, il arrive fréquemment que leurs ossements remontent à la surface.
Donc, oui, les gens sont habitués à la mort, dès leur plus jeune âge... C'est naturel pour eux.

Re: Inspi historique

Publié : mar. avr. 04, 2017 6:25 am
par Ravortel
C'est aussi un rapport à la société : l'union fait la force, la communauté doit être soudée contre l'adversité, humaine ou naturelle (grands travaux de d'assèchement ou de déboisement). Un éventuel athée est forcément un être à part de la société, un égoïste sur lequel on ne peut compter. Donc, in fine, un danger.
Ce raisonnement ne vaut pas seulement pour les chrétiens ! Déjà avant (polythéisme romain ou animisme franc), le principe est le même.
Dans la société médiévale, les seuls qui ont le loisir pour accéder à l'écrit (et donc au savoir), ce sont les religieux. Même les nobles sont en général à peine capables d'écrire leur nom. Donc l'Histoire, la Médecine, les Mathématiques (et la Finance), tout cela est de facto entre les mains des moines et clercs. Et donc par définition, un athée sera inculte ;) sa seule utilité sociale devenant ses capacités pratiques. On peut imaginer un forgeron (personnage hautement respecté) athée, mais son isolement social le mettrait à l'écart des autres, voire amènerait des suspicions de diableries, sur le principe du "si tu n'es pas avec moi, tu es donc contre moi".
Les religions autres que chrétienne (en Europe, donc juifs, musulmans, animistes) se regroupent en communautés, pas d'assimilation.

Re: Inspi historique

Publié : mar. avr. 04, 2017 2:16 pm
par Orlov
Ravortel a écrit : mar. avr. 04, 2017 6:25 am Dans la société médiévale, les seuls qui ont le loisir pour accéder à l'écrit (et donc au savoir), ce sont les religieux. Même les nobles sont en général à peine capables d'écrire leur nom. Donc l'Histoire, la Médecine, les Mathématiques (et la Finance), tout cela est de facto entre les mains des moines et clercs.
Mouais .. autant le rapport à la mort évolue peu durant le Moyen Age, autant le rapport à l'écrit que tu décris est plutôt celui du Haut Moyen-Age. En Europe occidentale et méditerranéenne, le XII° siècle marque une vraie rupture dans le contact avec l'écrit et l'appropriation des "arts".
Ravortel a écrit : mar. avr. 04, 2017 6:25 am Et donc par définition, un athée sera inculte ;) sa seule utilité sociale devenant ses capacités pratiques. On peut imaginer un forgeron (personnage hautement respecté) athée, mais son isolement social le mettrait à l'écart des autres, voire amènerait des suspicions de diableries, sur le principe du "si tu n'es pas avec moi, tu es donc contre moi".
Je pense surtout que l'athéisme au Moyen Age, n'en déplaise à Michel Onfray, n'est pas vraiment l'athéisme actuel ... On devrait plutôt parler de scepticisme et celui-ci est suffisamment répandu, même chez les moines, pour que l'Eglise mette tout en oeuvre pour rappeler régulièrement ce que signifie le fait d'être chrétien et ce qu'il faut faire pour accéder au Salut. Un athée médiéval est d'avantage un hérétique, quelqu'un qui croit hors de l'Eglise, que quelqu'un qui nie l'existence de Dieu.

My two cents, hein ...

Re: Inspi historique

Publié : mar. avr. 04, 2017 2:31 pm
par Ravortel
Two cents worth it.
Orlov a écrit : mar. avr. 04, 2017 2:16 pmMouais .. autant le rapport à la mort évolue peu durant le Moyen Age, autant le rapport à l'écrit que tu décris est plutôt celui du Haut Moyen-Age. En Europe occidentale et méditerranéenne, le XII° siècle marque une vraie rupture dans le contact avec l'écrit et l'appropriation des "arts".
Là tu restreins énormément le champ, reconnais ! Tu parles de la fraction occidentale qui a subi l'influence de l'Espagne sous domination arabe, où le rapport "aux Lettres" est très différent. le nombre de landgraves ou margraves "lettrés" en pays d'Oil est à moins avis bien plus faible.

Re: Inspi historique

Publié : mar. avr. 04, 2017 3:28 pm
par Orlov
Ravortel a écrit : mar. avr. 04, 2017 2:31 pm Two cents worth it.
Orlov a écrit : mar. avr. 04, 2017 2:16 pmMouais .. autant le rapport à la mort évolue peu durant le Moyen Age, autant le rapport à l'écrit que tu décris est plutôt celui du Haut Moyen-Age. En Europe occidentale et méditerranéenne, le XII° siècle marque une vraie rupture dans le contact avec l'écrit et l'appropriation des "arts".
Là tu restreins énormément le champ, reconnais ! Tu parles de la fraction occidentale qui a subi l'influence de l'Espagne sous domination arabe, où le rapport "aux Lettres" est très différent. le nombre de landgraves ou margraves "lettrés" en pays d'Oil est à moins avis bien plus faible.
"Langrave et margrave de pays d'Oil", tu fais référence à quels espaces et surtout à quelles époques ?
Encore une fois, il ne faut pas calquer le rapport au savoir du Haut Moyen Age à tout le Moyen Age.
Il me semble, que la montée en gamme culturelle de l'aristocratie à partir du XII° siècle s'observe dans toute l'Europe, y compris en Scandinavie.
Cela ne veut pas dire que les nobles aiment lire, même s'ils savent le faire.
Parce qu'il ne faut pas oublier qu'au Moyen Age, la lecture silencieuse est loin d'être majoritaire. Les livres sont écrits pour être lus à haute voix et le travail du lecteur est de restituer proprement la musique du texte. Cela ne veut pas dire que celui qui reçoit le texte ne sache pas lire. Par ailleurs, la multiplication des livres dans l'iconographie à partir du XIII° siècle montre bien, qu'en plus d'être des beaux objets, les livres (et la lecture silencieuse) sont de plus en plus répandus.
Mais bon, là on est plus dans la discussion d'historiens que dans l'inspi historique (sauf à imaginer ce que pourrait donner une lecture à haute voix du Nécronomicon :runaway )

Re: Inspi historique

Publié : mar. avr. 04, 2017 3:36 pm
par Qui Revient de Loin
Bin, ça serait drôle pour toutes les approches discrètes que le mago du groupe fasse la lecture à haute voix pour lancer ses sorts ;p

Re: Inspi historique

Publié : mar. avr. 04, 2017 3:36 pm
par killerklown
Orlov a écrit : mar. avr. 04, 2017 3:28 pm (sauf à imaginer ce que pourrait donner une lecture à haute voix du Nécronomicon :runaway )
-1D20 SAN pour tout le monde dans la pièce toutes les 10 minutes

Re: Inspi historique

Publié : mar. avr. 04, 2017 3:38 pm
par Dithral
Qui Revient de Loin a écrit : mar. avr. 04, 2017 3:36 pm Bin, ça serait drôle pour toutes les approches discrètes que le mago du groupe fasse la lecture à haute voix pour lancer ses sorts ;p
Ou qu'il crée des parchemins pour un paladin qui ne sait pas lire.

Re: Inspi historique

Publié : mar. avr. 04, 2017 3:50 pm
par WeirdWolf
Orlov a écrit:
Les prédicateurs n'hésitaient pas à déterrer des morts, à discuter avec des crânes pour faire le show

Le magicien du groupe fait la même chose et il est lapidé sur place pour nécromancie. Mais un clerc même pas ordonné ça passe nickel, les paysans lui donnent la pièce après la représentation
Pareil pour le guerrier: il défend sa vie contre un brigand vaguement chevalier il est bon pour l'ordalie pieds et poings liés dans le lac, mais un palouf qui pille, tue, viole et parfois mange ses adversaires ça passe aussi, du moment qu'il beugle "deus aix" ou "allahu akbar"

Et après, on s'étonne que les gens considèrent que finalement, Sauron n'est pas un si mauvais gars 8|

Re: Inspi historique

Publié : mer. avr. 05, 2017 1:23 am
par Lord Foxhole
Orlov a écrit : mar. avr. 04, 2017 3:28 pm Mais bon, là on est plus dans la discussion d'historiens que dans l'inspi historique (sauf à imaginer ce que pourrait donner une lecture à haute voix du Nécronomicon :runaway )
Poussons la logique jusqu'au bout : à la base, le Kitab al Azif aurait été écrit au 8e siècle par le poète Abdul al-Hazred...
Était-il commun chez les Arabes de l'époque de lire ce genre de texte à haute voix ?

Re: Inspi historique

Publié : mer. avr. 05, 2017 2:11 am
par Orlov
C'était plus que commun. Le Coran était ainsi conçu pour être mémorisé et déclamé, d'où son organisation quelque peu baroque dans laquelle le seul ordre logique est celui de l'apprentissage (hormis la fatiyah qui ouvre et conclut la récitation, les sourates sont organisées selon l'ordre décroissant de versets).
Le Kitab al-Azif devait ressembler à un chapelet de vers et de bouts rimés jetés sur le papier sans aucune logique. D'ailleurs, on ne le dit pas assez, mais la traduction en grec devait probablement être du mot à mot (c'est comme ça qu'on a souvent traduit de l'arabe au Moyen-Age, on décalquait mot à mot en respectant l'organisation de la phrase de la langue d'origine, la glose marginale explicitant éventuellement le sens).
Tybalt me contredira peut être, mais il me semble que l'oeuvre d'Hérodote était aussi faite pour être déclamée et l'immense auteur athénien reprend même les clichés homériques pour raconter les batailles.

Re: Inspi historique

Publié : mer. avr. 05, 2017 9:43 am
par Lotin
Hey !J’ai quelques pistes sur le sujet. Quelques trucs comme ça, des généralités (et principalement concentrées sur le monde occidental chrétien du Moyen-Âge. Je mets en spoiler car c’est un peu long parfois peut-être.
Spoiler:
Quand on s’attaque à ce genre de sujet, il faut essayer de se départir au maximum de l’application d’un point de vue actuel/contemporain à des actes anciens (en plus, souvent pris hors de leur contexte). Faut aussi avoir en tête que le MA reste une période assez longue, suffisamment pour assister à des changements de modes de pensées. Mine de rien (ou gisement épuisé comme on dit).

Quelques pistes historiographiques... Les travaux académiques sur la mort au moyen-âge ont explosé assez récemment, en gros depuis le milieu des années 70. Jusque-là, la plupart pensait qu’il suffisait de se concentrer sur les textes pour connaitre les pratiques funéraires médiévales mais l’émergence de l’archéologie de sauvetage a introduit de nouvelles problématiques et façons d’aborder le sujet. C’est notamment l’analyse anthropologique qui en a bénéficié montrant au passage leur apport dans la caractérisation, par exemple, des fluctuations démographiques, des réseaux de parenté, l’état sanitaire des paléopopulations. Cela a permis aussi d’intégrer le biologique dans son environnement socio-culturel. On n’étudie plus les pratiques funéraires au travers de l’objet (des sépultures (en tant qu’objet), des mobiliers accompagnant le mort par exemple) mais aussi par l’anthropologie physique (étude du squelette, évolution de la sép après le dépôt, phénomènes taphonomiques, spatialisation, etc.). En parallèle, les études des espaces funéraires sont intégrées à leur contexte historique et géographique (et pour le MA ça a son importance). Cette confrontation des données issues des études historiques (les textes), archéologiques (les faits), des représentations artistiques (de l’image), etc. souligne aussi qu’il y a souvent une dichotomie importante entre la théorie et la pratique. Il ne faut donc pas se contenter des textes mais aussi intégrer le contexte historique et les faits observables.
L’avantage est qu’il existe maintenant une tétrachiée de références bibliographiques traitant du sujet.

Tristan a écrit : lun. avr. 03, 2017 4:38 pm Qui a peur des zombies ? Tout le monde, et ça ne date pas d'hier :

http://www.lemonde.fr/big-browser/artic ... 32693.html
Ce genre d’études introduit plusieurs biais qu’il faut avoir en tête. D’abord les collections anthropo étudiées en ce moment en Grande-Bretagne sont souvent issues de vieilles fouilles (non pas qu’elles ont été mal réalisées mais avec des méthodes d’un autre temps), problèmes de contexte. Un autre biais important est la focalisation faite sur ces sépultures exceptionnelles (en termes statistiques et de représentativité) qui leur donne un éclairage particulier et les font ressortir d’un lot plus global de sépultures normales. On parle des 1 % sans s’intéresser aux 99 % d’à côté. Attention je ne dis pas que ça n’existe pas, mais plutôt que c’est extrêmement marginal comme pratique. Pour un cimetière où sera avéré des pratiques un peu étranges (attribuables à une peur des morts (et pas de la mort)) il y en a 1000 « normaux » à côté.
Lord Foxhole a écrit : lun. avr. 03, 2017 6:32 pm
Tristan a écrit : lun. avr. 03, 2017 4:38 pm Qui a peur des zombies ? Tout le monde, et ça ne date pas d'hier
Je pense que ce sont des très vieilles pratiques, qui ne doivent pas remonter au Moyen Age mais encore bien plus loin...
Il me semble que cela a existé dès les temps préhistoriques, et que ça s'est perpétué pratiquement jusqu'à présent.
Certains m'avait fait remarquer que, dans nos cimetières occidentaux, on enfermaient les morts dans des boites bien solides, enterrées profondément et qu'on plaçait des grosses pierres tombales bien lourdes par-dessus. De là à dire qu'on a peur de voir la personne enterrée essayer de ressortir...
Mouais… beaucoup de réserves là-dessus. En fait l’emploi de cercueil en dur est au final pas nécessairement la norme ou le cas le plus représenté. Tu as beaucoup de monde enterré dans un simple linceul, voir sans rien d’autre (le respect du corps intervient assez tard en fait au MA). Le creusement (et l’aménagement dans certains cas de ce dernier) peut suffire. J’ai quelques fouilles de nécropoles/cimetières à mon actif et l’utilisation de cercueil est plus la norme pour la période antique (et wisigothique/mérovingienne) qu’après (même si durant l'antiquité se côtoient parfois plusieurs façons de gérer le mort (inhumation et crémation par exemple). Par exemple, sur un gros cimetière (du XIe au XIVe) en plein cœur d’une grande métropole française, nous n’avons que très très peu de cercueils (ça se compte sur les doigts d’une main pour plusieurs centaines d’inhumations). Je ne parle même pas des sépultures de catastrophe (liées à des épisodes de peste par exemple ou tu balances les corps (tête bêche pour gagner de la place) comme ça dans une même fosse. L’usage de pierre tombale est assez récent et très limité au début (on parle toujours du MA). Sur le détail des pierres utilisées pour combler une inhumation, si on ne plaque pas un modèle de pensée contemporanéiste empreint de la peur de la mort, c’est parfois juste une astuce technique. Ca permet par exemple de gagner du temps, tu auras moins de pelletées à balancer au fond du trou et surtout, il faut avoir en tête que la terre que tu as sortie en creusant ton inhumation n’occupera pas le même volume une fois remise dans le trou. Faîtes l’expérience, creusez un trou d’un mètre cube, remettez la terre dedans, repassez plusieurs jours après, vous observerez un tassement, un petit cratère par « sous-tirage » (même s’il ne s’agit pas de ce phénomène précis) comme s’il manquait un peu de volume. Du coup, avec tes caillasses tu compenses (mais ça reste rare de trouver des blocs dans le comblement supérieur d’une sépulture). Les sépultures ne sont pas toujours profondes.
La normalisation et l’institutionnalisation (amorcées dès les carolingiens) de la pratique funéraire a pris un certain temps au final.
Pour ce qui de pratiques funéraires liées à la peur des morts pratiquées durant la Préhistoire (et je parle bien de Préhistoire, pas de Protohistoire hein), j’émets de très forts doutes (pour l’Europe du moins) pour plusieurs raisons. Tout d’abord car l’éventail des pratiques courant sur plusieurs millénaires sur un espace géographique immense permet d’avoir un éventail très large des pratiques, avec tout et n’importe quoi. Pour certains groupes néolithiques, la maison pouvait abriter la sépulture d’un individu dans son sol, ils vivaient avec leur mort. Des silos de stockage (un gros trou piriforme fermé par un système quelconque) pouvait être recycler en sépulture (individuelle, plurielles, collective, de groupe avec réouverture de la sépulture pour y introduire de nouveaux habitants après nettoyage du corps précédent, avec morts d’accompagnement (un récent article évoque la possibilité d’un individu inhumé au centre d’un silo et accompagné de ce qui pourrait être des esclaves), etc… De simples inhumations dans des structures monumentales (individuelle, plurielle, de groupe, collective, etc.), ou dans des structures simples (une simple couverture de cailloux au fond d’un trou), des corps traités en plusieurs étapes avec réduction et prélèvement de parties, des crémations, des dépôts en grotte, des dépôts primaires et secondaires, réutilisation des os, etc. On connaît des groupes PPNA/PPNB (des groupes prénéolithiques sans céramique, une phase où la sédentarisation* se consolide accompagné des prémices de la domestication animale et végétale) qui utilisent les crânes des défunts en les « maquillant » avec de l’argile, des coquillages pour les yeux, comme décoration dans leurs jolies petites maisons de pierres. Bien entendu, le cas du traitement des morts des populations plus anciennes (avant le mésolithique** (qui introduit les premières nécropoles comme (Téviec et Hoedic) par chez nous par exemple)) est différent car les données sont, logiquement, beaucoup plus rares (déjà que pour le mésolithique c’est pas la fête). A noter que l’étude des traitements funéraires est l’une des façons d’aborder la question de la hiérarchisation de la population. Bien entendu, on ne sait presque rien (avec certitude) de l’univers mental de ces populations et de leurs relations spirituelles et comportementales avec la mort. A partir du moment où on enterre ses morts on peut en déduire une forme de respect mais si la sépulture n’est pas signalée (par un dispositif quelconque) ou s’il n’y a pas de mobilier d’accompagnement y-a-t ’il volonté de souvenir ? N’est-ce pas juste une précaution sanitaire ?

* la sédentarisation n’étant pas le seul argument pour déterminer qu’un groupe est entré dans une économie néolithique. C’est beaucoup plus complexe que ça, et il existe des groupes néolithiques nomades comme des groupes de chasseurs/cueilleurs/collecteurs quasi sédentaires.
** il existe un cas de têtes découvertes plantées sur des bouts de bois dans le nord de l’Europe, une possible illustration de la relation qu’avaient les mésolithiques avec les néolithiques.
Orlov a écrit : lun. avr. 03, 2017 9:21 pm Le rapport aux cadavre de l'homme médiéval et fort différent du nôtre. Les prédicateurs n'hésitaient pas à déterrer des morts, à discuter avec des crânes pour faire le show. Ils demandaient par exemple au crâne où il était et le crâne répondait qu'il était en enfer parce qu'il avait été un mauvais chrétien, etc. ... L'idéal de la mort chrétienne s'est imposé au Moyen-Age, mais cet idéal concernait bien d'avantage les rites et les sacrements que l'enterrement et la conservation du corps qui étaient tantôt conservé, tantôt enterré, tantôt abandonné ...
Pendant longtemps, les cimetières du Ma n’ont pas été des lieux destinés à l’usage exclusif des défunts, leur espace n’était pas spécialement sacralisé, ou du moins différemment. Ainsi, il est très fréquent d’avoir des occupations des cimetières par les vivants (en contemporanéité totale avec l’utilisation des lieux comme zone de repos des morts), et de manière parfois étonnante, des marchés, des fêtes (joyeuses hein), des zones artisanales, des zones de stockage (oui à l’époque on n’hésitait pas trop par exemple à se creuser des silos de stockage en plein dans un cimetière, les notions d’hygiène étaient un brin différentes), etc. Les cimetières sont des lieux d’asile, certains y habitent, certains artistes y officient. Ce n’est qu’à la fin du XVIIe, donc assez tardivement, que va naître une certaine gêne vis-à-vis des morts. Il ne s’agit pas tant d’une peur des morts que de la mort en elle-même.
Lord Foxhole a écrit : lun. avr. 03, 2017 10:52 pm L’église est toujours au milieu du village, et le cimetière est autour... Les morts encerclent l'église, pour être plus proche de Dieu.
Et comme on ne les enterre pas trop profond, il arrive fréquemment que leurs ossements remontent à la surface.
Donc, oui, les gens sont habitués à la mort, dès leur plus jeune âge... C'est naturel pour eux.
Par contre là, enfin en cela qu’il ne faut pas en faire une généralité. La position du cimetière a bien évolué durant le MA. Dans les premiers temps (du MA), l’héritage antique est bien prégnant et le cimetière est strictement séparé de la cité et des vivants. Ce qui va perdurer un bon moment avec l’établissement de cimetières hors les murs (parfois même pas la porte à côté), puis on va construire des abbayes sur les lieux. C’est plus tardivement que des cimetières vont être associés à la ville. Et c’est même trompeur car c’est parfois l’établissement d’une communauté qui va se cristalliser autour d’une abbaye (et non pas toujours l’inverse, mais voir le sujet sur les inspis architecturales où je m’épanche lourdement là-dessus). Et pour rajouter à ce bordel, l’emplacement des morts lui-même n’est pas fixé, il va changer même si toujours au sein de l’espace consacré (mais il n’est pas rare d’avoir des sépultures dans le bâtiment religieux par exemple). Le problème récurrent des cimetières en milieu urbain est le manque de place, donc on nettoie de temps en temps, on peut constituer des ossuaires (en prélevant les os des pauvres), etc. Il y a vraiment un basculement des mentalités et des attitudes face à la mort autour des Xe-XIe siècles et encore un basculement autour du XVe. D’ailleurs sur les attitudes face à la mort, lire les travaux de P. Ariès (puis de ses héritiers).
Si en plus on ajoute une autre couche à tout ça, celle, au hasard de la représentation de la mort, les choses deviennent vite compliquées. L’émergence de l’idée du purgatoire découle directement de l’influence de l’art par exemple. CE dernier est presque totalement absent de tous les types de représentations entre le VIIe et le XIIIe siècle.
Orlov a écrit : mar. avr. 04, 2017 2:16 pm Mouais .. autant le rapport à la mort évolue peu durant le Moyen Age, autant le rapport à l'écrit que tu décris est plutôt celui du Haut Moyen-Age.
Ben pourtant si, il change énormément. D’une mort acceptée sans dramatisation excessive, d’un phénomène vécu collectivement à l’individualisation du phénomène, à l’intégration de la vision eschatologique, de l’idée du jugement (vers le XIIe), la personnalisation des sépultures qui revient courant XIIe, la vision « romantique » introduite dès le XVe, le souvenir du défunt qui se développe, la dramatisation de la mort (les services religieux arrivent relativement tard), la politisation de la mort, l'idéal de la souffrance qui finit par presque s'imposer, etc.

Re: Inspi historique

Publié : mer. avr. 05, 2017 10:58 am
par Orlov
Lotin a écrit : mer. avr. 05, 2017 9:43 am Hey !J’ai quelques pistes sur le sujet. Quelques trucs comme ça, des généralités (et principalement concentrées sur le monde occidental chrétien du Moyen-Âge. Je mets en spoiler car c’est un peu long parfois peut-être.
Spoiler:
Quand on s’attaque à ce genre de sujet, il faut essayer de se départir au maximum de l’application d’un point de vue actuel/contemporain à des actes anciens (en plus, souvent pris hors de leur contexte). Faut aussi avoir en tête que le MA reste une période assez longue, suffisamment pour assister à des changements de modes de pensées. Mine de rien (ou gisement épuisé comme on dit).

Quelques pistes historiographiques... Les travaux académiques sur la mort au moyen-âge ont explosé assez récemment, en gros depuis le milieu des années 70. Jusque-là, la plupart pensait qu’il suffisait de se concentrer sur les textes pour connaitre les pratiques funéraires médiévales mais l’émergence de l’archéologie de sauvetage a introduit de nouvelles problématiques et façons d’aborder le sujet. C’est notamment l’analyse anthropologique qui en a bénéficié montrant au passage leur apport dans la caractérisation, par exemple, des fluctuations démographiques, des réseaux de parenté, l’état sanitaire des paléopopulations. Cela a permis aussi d’intégrer le biologique dans son environnement socio-culturel. On n’étudie plus les pratiques funéraires au travers de l’objet (des sépultures (en tant qu’objet), des mobiliers accompagnant le mort par exemple) mais aussi par l’anthropologie physique (étude du squelette, évolution de la sép après le dépôt, phénomènes taphonomiques, spatialisation, etc.). En parallèle, les études des espaces funéraires sont intégrées à leur contexte historique et géographique (et pour le MA ça a son importance). Cette confrontation des données issues des études historiques (les textes), archéologiques (les faits), des représentations artistiques (de l’image), etc. souligne aussi qu’il y a souvent une dichotomie importante entre la théorie et la pratique. Il ne faut donc pas se contenter des textes mais aussi intégrer le contexte historique et les faits observables.
L’avantage est qu’il existe maintenant une tétrachiée de références bibliographiques traitant du sujet.

Tristan a écrit : lun. avr. 03, 2017 4:38 pm Qui a peur des zombies ? Tout le monde, et ça ne date pas d'hier :

http://www.lemonde.fr/big-browser/artic ... 32693.html
Ce genre d’études introduit plusieurs biais qu’il faut avoir en tête. D’abord les collections anthropo étudiées en ce moment en Grande-Bretagne sont souvent issues de vieilles fouilles (non pas qu’elles ont été mal réalisées mais avec des méthodes d’un autre temps), problèmes de contexte. Un autre biais important est la focalisation faite sur ces sépultures exceptionnelles (en termes statistiques et de représentativité) qui leur donne un éclairage particulier et les font ressortir d’un lot plus global de sépultures normales. On parle des 1 % sans s’intéresser aux 99 % d’à côté. Attention je ne dis pas que ça n’existe pas, mais plutôt que c’est extrêmement marginal comme pratique. Pour un cimetière où sera avéré des pratiques un peu étranges (attribuables à une peur des morts (et pas de la mort)) il y en a 1000 « normaux » à côté.
Lord Foxhole a écrit : lun. avr. 03, 2017 6:32 pm
Tristan a écrit : lun. avr. 03, 2017 4:38 pm Qui a peur des zombies ? Tout le monde, et ça ne date pas d'hier
Je pense que ce sont des très vieilles pratiques, qui ne doivent pas remonter au Moyen Age mais encore bien plus loin...
Il me semble que cela a existé dès les temps préhistoriques, et que ça s'est perpétué pratiquement jusqu'à présent.
Certains m'avait fait remarquer que, dans nos cimetières occidentaux, on enfermaient les morts dans des boites bien solides, enterrées profondément et qu'on plaçait des grosses pierres tombales bien lourdes par-dessus. De là à dire qu'on a peur de voir la personne enterrée essayer de ressortir...
Mouais… beaucoup de réserves là-dessus. En fait l’emploi de cercueil en dur est au final pas nécessairement la norme ou le cas le plus représenté. Tu as beaucoup de monde enterré dans un simple linceul, voir sans rien d’autre (le respect du corps intervient assez tard en fait au MA). Le creusement (et l’aménagement dans certains cas de ce dernier) peut suffire. J’ai quelques fouilles de nécropoles/cimetières à mon actif et l’utilisation de cercueil est plus la norme pour la période antique (et wisigothique/mérovingienne) qu’après (même si durant l'antiquité se côtoient parfois plusieurs façons de gérer le mort (inhumation et crémation par exemple). Par exemple, sur un gros cimetière (du XIe au XIVe) en plein cœur d’une grande métropole française, nous n’avons que très très peu de cercueils (ça se compte sur les doigts d’une main pour plusieurs centaines d’inhumations). Je ne parle même pas des sépultures de catastrophe (liées à des épisodes de peste par exemple ou tu balances les corps (tête bêche pour gagner de la place) comme ça dans une même fosse. L’usage de pierre tombale est assez récent et très limité au début (on parle toujours du MA). Sur le détail des pierres utilisées pour combler une inhumation, si on ne plaque pas un modèle de pensée contemporanéiste empreint de la peur de la mort, c’est parfois juste une astuce technique. Ca permet par exemple de gagner du temps, tu auras moins de pelletées à balancer au fond du trou et surtout, il faut avoir en tête que la terre que tu as sortie en creusant ton inhumation n’occupera pas le même volume une fois remise dans le trou. Faîtes l’expérience, creusez un trou d’un mètre cube, remettez la terre dedans, repassez plusieurs jours après, vous observerez un tassement, un petit cratère par « sous-tirage » (même s’il ne s’agit pas de ce phénomène précis) comme s’il manquait un peu de volume. Du coup, avec tes caillasses tu compenses (mais ça reste rare de trouver des blocs dans le comblement supérieur d’une sépulture). Les sépultures ne sont pas toujours profondes.
La normalisation et l’institutionnalisation (amorcées dès les carolingiens) de la pratique funéraire a pris un certain temps au final.
Pour ce qui de pratiques funéraires liées à la peur des morts pratiquées durant la Préhistoire (et je parle bien de Préhistoire, pas de Protohistoire hein), j’émets de très forts doutes (pour l’Europe du moins) pour plusieurs raisons. Tout d’abord car l’éventail des pratiques courant sur plusieurs millénaires sur un espace géographique immense permet d’avoir un éventail très large des pratiques, avec tout et n’importe quoi. Pour certains groupes néolithiques, la maison pouvait abriter la sépulture d’un individu dans son sol, ils vivaient avec leur mort. Des silos de stockage (un gros trou piriforme fermé par un système quelconque) pouvait être recycler en sépulture (individuelle, plurielles, collective, de groupe avec réouverture de la sépulture pour y introduire de nouveaux habitants après nettoyage du corps précédent, avec morts d’accompagnement (un récent article évoque la possibilité d’un individu inhumé au centre d’un silo et accompagné de ce qui pourrait être des esclaves), etc… De simples inhumations dans des structures monumentales (individuelle, plurielle, de groupe, collective, etc.), ou dans des structures simples (une simple couverture de cailloux au fond d’un trou), des corps traités en plusieurs étapes avec réduction et prélèvement de parties, des crémations, des dépôts en grotte, des dépôts primaires et secondaires, réutilisation des os, etc. On connaît des groupes PPNA/PPNB (des groupes prénéolithiques sans céramique, une phase où la sédentarisation* se consolide accompagné des prémices de la domestication animale et végétale) qui utilisent les crânes des défunts en les « maquillant » avec de l’argile, des coquillages pour les yeux, comme décoration dans leurs jolies petites maisons de pierres. Bien entendu, le cas du traitement des morts des populations plus anciennes (avant le mésolithique** (qui introduit les premières nécropoles comme (Téviec et Hoedic) par chez nous par exemple)) est différent car les données sont, logiquement, beaucoup plus rares (déjà que pour le mésolithique c’est pas la fête). A noter que l’étude des traitements funéraires est l’une des façons d’aborder la question de la hiérarchisation de la population. Bien entendu, on ne sait presque rien (avec certitude) de l’univers mental de ces populations et de leurs relations spirituelles et comportementales avec la mort. A partir du moment où on enterre ses morts on peut en déduire une forme de respect mais si la sépulture n’est pas signalée (par un dispositif quelconque) ou s’il n’y a pas de mobilier d’accompagnement y-a-t ’il volonté de souvenir ? N’est-ce pas juste une précaution sanitaire ?

* la sédentarisation n’étant pas le seul argument pour déterminer qu’un groupe est entré dans une économie néolithique. C’est beaucoup plus complexe que ça, et il existe des groupes néolithiques nomades comme des groupes de chasseurs/cueilleurs/collecteurs quasi sédentaires.
** il existe un cas de têtes découvertes plantées sur des bouts de bois dans le nord de l’Europe, une possible illustration de la relation qu’avaient les mésolithiques avec les néolithiques.
Orlov a écrit : lun. avr. 03, 2017 9:21 pm Le rapport aux cadavre de l'homme médiéval et fort différent du nôtre. Les prédicateurs n'hésitaient pas à déterrer des morts, à discuter avec des crânes pour faire le show. Ils demandaient par exemple au crâne où il était et le crâne répondait qu'il était en enfer parce qu'il avait été un mauvais chrétien, etc. ... L'idéal de la mort chrétienne s'est imposé au Moyen-Age, mais cet idéal concernait bien d'avantage les rites et les sacrements que l'enterrement et la conservation du corps qui étaient tantôt conservé, tantôt enterré, tantôt abandonné ...
Pendant longtemps, les cimetières du Ma n’ont pas été des lieux destinés à l’usage exclusif des défunts, leur espace n’était pas spécialement sacralisé, ou du moins différemment. Ainsi, il est très fréquent d’avoir des occupations des cimetières par les vivants (en contemporanéité totale avec l’utilisation des lieux comme zone de repos des morts), et de manière parfois étonnante, des marchés, des fêtes (joyeuses hein), des zones artisanales, des zones de stockage (oui à l’époque on n’hésitait pas trop par exemple à se creuser des silos de stockage en plein dans un cimetière, les notions d’hygiène étaient un brin différentes), etc. Les cimetières sont des lieux d’asile, certains y habitent, certains artistes y officient. Ce n’est qu’à la fin du XVIIe, donc assez tardivement, que va naître une certaine gêne vis-à-vis des morts. Il ne s’agit pas tant d’une peur des morts que de la mort en elle-même.
Lord Foxhole a écrit : lun. avr. 03, 2017 10:52 pm L’église est toujours au milieu du village, et le cimetière est autour... Les morts encerclent l'église, pour être plus proche de Dieu.
Et comme on ne les enterre pas trop profond, il arrive fréquemment que leurs ossements remontent à la surface.
Donc, oui, les gens sont habitués à la mort, dès leur plus jeune âge... C'est naturel pour eux.
Par contre là, enfin en cela qu’il ne faut pas en faire une généralité. La position du cimetière a bien évolué durant le MA. Dans les premiers temps (du MA), l’héritage antique est bien prégnant et le cimetière est strictement séparé de la cité et des vivants. Ce qui va perdurer un bon moment avec l’établissement de cimetières hors les murs (parfois même pas la porte à côté), puis on va construire des abbayes sur les lieux. C’est plus tardivement que des cimetières vont être associés à la ville. Et c’est même trompeur car c’est parfois l’établissement d’une communauté qui va se cristalliser autour d’une abbaye (et non pas toujours l’inverse, mais voir le sujet sur les inspis architecturales où je m’épanche lourdement là-dessus). Et pour rajouter à ce bordel, l’emplacement des morts lui-même n’est pas fixé, il va changer même si toujours au sein de l’espace consacré (mais il n’est pas rare d’avoir des sépultures dans le bâtiment religieux par exemple). Le problème récurrent des cimetières en milieu urbain est le manque de place, donc on nettoie de temps en temps, on peut constituer des ossuaires (en prélevant les os des pauvres), etc. Il y a vraiment un basculement des mentalités et des attitudes face à la mort autour des Xe-XIe siècles et encore un basculement autour du XVe. D’ailleurs sur les attitudes face à la mort, lire les travaux de P. Ariès (puis de ses héritiers).
Si en plus on ajoute une autre couche à tout ça, celle, au hasard de la représentation de la mort, les choses deviennent vite compliquées. L’émergence de l’idée du purgatoire découle directement de l’influence de l’art par exemple. CE dernier est presque totalement absent de tous les types de représentations entre le VIIe et le XIIIe siècle.
Orlov a écrit : mar. avr. 04, 2017 2:16 pm Mouais .. autant le rapport à la mort évolue peu durant le Moyen Age, autant le rapport à l'écrit que tu décris est plutôt celui du Haut Moyen-Age.
Ben pourtant si, il change énormément. D’une mort acceptée sans dramatisation excessive, d’un phénomène vécu collectivement à l’individualisation du phénomène, à l’intégration de la vision eschatologique, de l’idée du jugement (vers le XIIe), la personnalisation des sépultures qui revient courant XIIe, la vision « romantique » introduite dès le XVe, le souvenir du défunt qui se développe, la dramatisation de la mort (les services religieux arrivent relativement tard), la politisation de la mort, l'idéal de la souffrance qui finit par presque s'imposer, etc.
Tu devrais arrêter de mettre en spoiler tes passionnantes interventions. :yes:
En tous les cas, pour ce qui concerne l'évolution du rapport à la mort, my bad, j'ai été très schématique (et c'était à comprendre par rapport à ce que je voulais dire sur la lecture). En plus j'ai lu cet hiver le très utile livre de Danièle Alexandre-Bidon qui dit exactement ce que tu dis.
D'ailleurs lors de notre dernière partie de Brigandyne version Guerre de Cent Ans, il y a une grosse baston dans le cimetière des innocents entre garçons bouchers et sergents du Prévôts. Bagarre au milieu des chiens, des enfants et des reclus.

Re: Inspi historique

Publié : mer. avr. 05, 2017 11:04 am
par Ravortel
Il est passionnant le Lotin !
Tu peux t'épancher encore, vas-y...

Re: Inspi historique

Publié : mer. avr. 05, 2017 11:50 am
par Lotin
Orlov a écrit : mer. avr. 05, 2017 10:58 am Tu devrais arrêter de mettre en spoiler tes passionnantes interventions. :yes:
En tous les cas, pour ce qui concerne l'évolution du rapport à la mort, my bad, j'ai été très schématique (et c'était à comprendre par rapport à ce que je voulais dire sur la lecture). En plus j'ai lu cet hiver le très utile livre de Danièle Alexandre-Bidon qui dit exactement ce que tu dis.
D'ailleurs lors de notre dernière partie de Brigandyne version Guerre de Cent Ans, il y a une grosse baston dans le cimetière des innocents entre garçons bouchers et sergents du Prévôts. Bagarre au milieu des chiens, des enfants et des reclus.
Ouais, j'avais mis en spoiler pour limiter le scrolling sans fin.
Je me doutais que c'était un raccourci. Alexandre-Bidon, c'est une bonne référence sur le sujet en plus (mais il y en a tellement, d'ailleurs pile là maintenant je bosse sur la normalisation d'une biblio sur le sujet et c'est sans fin tellement les titres sont nombreux).
Imaginer un cimetière médiéval plein de gens (et d'activités) est tellement inhabituel par rapport à la conception que nous en avons que ça peut suffire à introduire une impression d'exotisme extrême :yes: (un peu le but de ce sujet d'ailleurs :D ) !