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Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : mar. août 13, 2013 12:25 pm
par Brand
Je suis pas sûr.
Voici comment c'est sensé marcher.
- séance N : tu joues normalement.
- début de séance N+1, récap : vous récapitulez ce qui s'est passé.
- début de séance N+1, valeurs : tu estimes que selon ce qui s'est passé durant la séance N, tes valeurs ont évolué, que ce soit parce qu'elles sont été renforcées, qu'elles se sont amoindries, ou parce que tu t'es aperçues qu'elles étaient plus ou moins importante que tu le pensais. Tu peux également décidé que ton personnage n'a pas évolué. Ce qu'il s'est passé autour de lui n'a pas eu d'influence sur lui et il n'a rien appris.
- début de séance N+1, XP : Le meneur te donne l'expérience, mais tu ne peux pas noter plus d'XP que tu as de valeurs qui ont ont évolué. En bien ou en mal par contre.
Pour l'optimisation, vu que les valeurs n'ont d'impact que sur le nombre maxi d'XP et ne donnent pas des XP directement, à mon avis, c'est pas très utile.
Tu peux tout à fait que tu vas dans le sens de tes valeurs pour les augmenter aussi (si tu n'es pas déjà à 4).
Un des taffs du meneur est, dans l'idéal, justement, de te confronter à tes valeurs (soit en te donnant des raisons de les augmenter, soit de les défendre, soit en faisant en sorte qu'elles fassent débat au sein du groupe, etc.).
Mais, enfin, encore une fois, tout ceci n'est qu'un détail. Il ne faut pas que vous hésitiez à faire les modifs qui vous semblent nécessaires. Je voulais juste vérifier qu'il ne s'agisse pas d'une incompréhension

Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : mar. août 13, 2013 1:27 pm
par Macbesse
Brand a écrit :
Voici comment c'est sensé marcher.
- séance N : tu joues normalement.
- début de séance N+1, récap : vous récapitulez ce qui s'est passé.
- début de séance N+1, valeurs : tu estimes que selon ce qui s'est passé durant la séance N, tes valeurs ont évolué, que ce soit parce qu'elles sont été renforcées, qu'elles se sont amoindries, ou parce que tu t'es aperçues qu'elles étaient plus ou moins importante que tu le pensais. Tu peux également décidé que ton personnage n'a pas évolué. Ce qu'il s'est passé autour de lui n'a pas eu d'influence sur lui et il n'a rien appris.
- début de séance N+1, XP : Le meneur te donne l'expérience, mais tu ne peux pas noter plus d'XP que tu as de valeurs qui ont ont évolué. En bien ou en mal par contre.
C'est bien comme cela que la règle avait été interprétée : s'il y a malentendu, il n'est pas ici.
Pour l'optimisation, vu que les valeurs n'ont d'impact que sur le nombre maxi d'XP et ne donnent pas des XP directement, à mon avis, c'est pas très utile.
Tu peux tout à fait que tu vas dans le sens de tes valeurs pour les augmenter aussi (si tu n'es pas déjà à 4).
Voilà : le problème se pose particulièrement pour les gens qui ont 4 - Dame Mayumi par exemple. Le MJ voulait éviter la tentation du yoyoting entre 3 et 4 (léger doute, puis retour, puis léger doute... dans un cycle).
Reprenons l'exemple : au cours de mon rituel, pour calmer l'esprit, j'aurais pu me contenter d'un effort pour une réussite partielle.
J'ai pris un risque qui aurait renforcé mon attachement à ma valeur si je n'avais déjà 4.
Dans une logique d'optimisation, pour libérer mon espace à XP, j'aurais dû aller contre ma valeur shinto (4) et ne pas prendre ce risque : on aurait eu une piste d'intrigue en moins.
L'événement n'était pas de nature à faire douter le personnage, du moins pas dans un premier temps, il n'y avait donc pas d'évolution possible des valeurs, ce qui, d'une certaine manière, me lésait alors que je développais un scénario.
La deuxième chose à prendre en compte est que le groupe est majoritairement composé de PJs Adultes. Les joueurs sont donc un peu plus revendicatifs sur les XPs que d'habitude et ne veulent pas courir le risque de n'en avoir aucun par séance (ou seulement 1) : j'ai calculé 20 séances au rythme de 1XP / séance pour que Jizo fasse un prêtre shinto convenable (rachat d'un revers, deux compétences à monter de Rien à Notions, ce qui coûte cher s'il maintient son Expertise, et je ne parle même pas de l'Achat du Privilège Béni par les Kamis car on peut s'en passer) et accomplisse son karma (ce qui est censé lui rapporter 1 XP).
Bref, les Adultes ont fait pression.
Ils avaient été déjà pris, lors de la création, entre deux feux : rester cohérent et choisir Adulte ou prendre Entre Deux Ages quitte à vieillir le personnage ? Ils s'étaient dit que les XP rattraperaient plus ou moins... et avaient un peu l'impression d'être un peu arnaqués.
En conséquence, le meneur s'est dit que ses joueurs allaient chercher à systématiquement libérer au moins deux slots, et ne voulait pas voir de comportements technorôlistes à sa table (déjà que Nobutaka Morikaze aurait dû être, en toute logique, Jeune, et avoir 9 ans dans sa première version...).
En outre, il trouvait un peu lourd, pour lui cette fois, d'avoir à passer par deux étapes pour distribuer les XPs.
La solution trouvée, discutée et négociée, est donc la suivante (je ne sais plus si je l'ai mise par écrit sur ce fil) :
- Changement significatif et cohérent de valeurs -> XP
- Avancée sur la voie du Karma / Ambition (un peu à la manière des Accomplissements de groupe) -> XP
(Cela évite aussi que les karmas et ambitions très généraux ou très lointains ne soient pas délaissés à la création au profit de karmas et ambitions réalisables rapidement et de maintenir cette diversité - cette dichotomie était une autre source de technorôlisme possible) [Sur ma proposition]
- Apport narratif -> XP
Un des taffs du meneur est, dans l'idéal, justement, de te confronter à tes valeurs (soit en te donnant des raisons de les augmenter, soit de les défendre, soit en faisant en sorte qu'elles fassent débat au sein du groupe, etc.).
C'est même l'un des outils qui permet, à mon sens, de mener
Tenga avec très peu de préparation (avec le karma et l'ambition). J'estime pour ma part que c'est vraiment essentiel et à placer au coeur des séances.
C'est un principe que j'ai pris beaucoup de plaisir à appliquer. Par exemple (sans avoir à utiliser la règle des XPs puisque je faisais des one shot), dans
Hiver Meurtrier et
Ame et Yuki, les valeurs m'ont été permis de structurer ma séance et la pimenter. Je dois à cette règle mon final sur
Hiver Meurtrier car j'ai pu confronter le PJ à un dilemme, à un conflit de valeurs qui était servi sur un plateau, inscrit sur la fiche.
C'est vraiment une bonne indication et je crois bien que tu l'écris noir sur blanc dans
Tenga.
Mais, enfin, encore une fois, tout ceci n'est qu'un détail. Il ne faut pas que vous hésitiez à faire les modifs qui vous semblent nécessaires. Je voulais juste vérifier qu'il ne s'agisse pas d'une incompréhension

Et cette disponibilité est tout à ton honneur. C'est vraiment très sympa de prendre le temps de poster pour simplement vérifier que tout est compris.
Comme tu le vois, le systèmé a été bricolé pour correspondre aux demandes du groupe, aux besoins de la campagne et pour éviter que certains joueurs ne soient tentés par une approche calculatrice - nous nous sommes pourtant assagis mais de vieux souvenirs poussent toujours celui qui prend le mastering à poser des verrous solides contre toute tentation.
En me relisant, je m'aperçois que mon post manque un peu de structure. Cela ne fat rien, c'est assez représentatif des hésitations d'une table de jeu.
Au terme du processus, je crois que l'esprit et les objectifs de la règle (pousser le MJ à éprouver les valeurs et pousser les PJs à évoluer dans leur personnalité et leur vision du monde et pas seulement dans leurs compétences) n'ont pas été altérés dans les modifications faites sur la règle des XP, et c'est ce qui est finalement le plus important.
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : lun. oct. 14, 2013 1:58 pm
par Macbesse
Un dimanche après-midi, dans un appartement parisien. Des livres de jeu de rôle, des feuilles de personnage et des pochettes s'entassent sur une table à manger.
- Alors... on a... Lacuna mais vous êtes tièdes, Impérium mais la configuration n'est pas idéale, Qin mais le MJ n'est pas très chaud... les Brigades Rouges mais il faut que ça mature un peu... enfin on peut se lancer, avec le risque que ça ne soit pas équilibré. Sinon, j'ai apporté Nobilis. le gros livre fait un bruit mat sur la table. Attention, la création de perso est un peu longue.
- J'ai un concept ! Nobilis de la Discorde, ça m'irait bien non ?
- Il y a un pré-tiré pour la Perfidie si tu veux.
- Je serais incapable d'assumer un politique...
- Et sinon, un Tenga ?
- Hum... on est pas non plus dans la bonne configuration.
- Laisse le MJ répondre.
- Ah... je n'ai rien préparé et il faut introduire Susumo dans le groupe...
- Mais je suis le groupe !
- Je vais voir ce que je peux faire...
Le relais des quatre kamis
Augure
Fumi est Kayaku sont restés en arrière. D'après Fumi, Kayaku avait une affaire importante importante à régler. Qu'à cela ne tienne, il ne leur sera pas difficile de les rattraper : cette portion du Nakasendô n'est pas pavée, juste balisée, et les porteurs sont à la peine.
La troupe reprend sa marche vers Osaka, le sanctuaire d'Hashiman et la tombe de la petite marchande de légumes pyromane, qui se tient parfaitement tranquille.
Les porteurs ne vont pas très vite et Dame Mayumi leur présente les risques encourus pour leurs famille pour le cas où ils ne reviendraient pas avant la première neige.
Même ainsi motivés, ils ne peuvent pas outrepasser leurs limites physiques et ils sont vite rattrapés par un jeune homme. Il salue avec déférence Nobukata Morikaze, qui semble épouser les mouvements du palanquin tant elle est frêle. Elle remarque que ce jeune homme au regard dur porte une urne funéraire. Elle appelle la protection de Bouddha sur leur périple.
Le jeune homme poursuit sa route, arrive au niveau de Dame Mayumi. Il a un mouvement de recul en croisant son regard, ses yeux fendus. Dame Mayumi lui souhaite un hiver clément. Il répond que le Bouddha nous a tous en sa garde et Dame Mayumi le fixe sans aménité.
Il essaye d'abord d'éviter Jizo, échange malgré tout quelques salutations et dépasse le groupe.
Les porteurs accélèrent. Ont-ils été encouragés par Dame Mayumi ? Pensent-ils l'arrivée proche ? Lointaine ? Les occupants des palanquins n'en ont aucune idée. Susumo, le jeune homme à l'urne, l'interprète comme un signe, ralentit.
Les porteurs ralentissent. Alors il s'arrête, jusqu'à être rattrapé.
La conversation s'engage avec Jizo, au sujet du sabre enveloppé de tissu que porte le jeune homme. C'était celui de son maître. enseignait au monastère d'Agano. Il a porté son urne de temples en temples en pèlerinage et il la ramène là-bas.
Les palanquins croisent un marchand et ses deux aides, très affairés et flanqués d'un cheval de bât. Ils marchent d'un bon pas et il est curieux qu'ils soient partis si tard. Ils ne doivent pas bien connaître la région. Aucune conversation n'est donc engagée. Dame Mayumi leur souhaite simplement un hiver clément. Et ils ont peur.
Nobukata Morikaze, qui s'est assoupie, sent cette peur immédiate, mais aussi une inquiétude plus profonde. Ils sont comme en effervescence.
Moins d'une heure plus tard, les pèlerins arrivent au relais. Il semble occupé et bien entretenu, mais il n'y a pas le moindre signe de vie, ni à l'intérieur, ni à l'extérieur.
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : lun. oct. 14, 2013 4:28 pm
par Macbesse
Devant l'âtre
Jizo hèle, entre. Les occupants ont déserté la relais. L'âtre est encore tiède, du feu du midi sans doute. Il n'y a plus aucun objet de valeur, les trappes ont été soulevées. La maison a comme été fouillée, mais sans marque de brutalité, et les objets personnels sont encore là. Jizo est perplexe.
Susumo a sorti le sabre de son maître et le porte au côté. Il s'est positionné pour défendre les dames. Il apprécie que Jizo lui fasse confiance.
Jizo demande de se tenir prêts à partir. Susumo confie l'urne de son maître à Nobutaka Morikaze et propose d'aller voir où sont partis les occupants du relais. Il dit bien connaître la nature.
Il repère facilement les traces de trois personnes, deux adultes et un enfant. Ils ne semblent pas avoir été spécialement dans l'urgence et ont l'air de savoir où ils vont. Ils cassent peu de brindilles sur leur chemin, ne s'arrêtent pas.
Nanti de ces informations, le groupe décide d'investir le relais.
Dame Mayumi se penche sur le foyer. Elle examine les marques dans le bois. Elles forment des boucles, amples mais comme pressées. Elle fait l'offrande du noeud qu'elle porte dans les cheveux à l'esprit, puis sort chercher Jizo, lui montre la bûche. Il comprend qu'il doit voir quelque-chose et se sent idiot. Elle l'aide un peu - mais juste un peu :
- Vous avez été marqué. Pensez à cela.
Jizo finit par comprendre qu'il doit chercher la marque laissé par les kamis dans le bois. Il ne voit rien de particulier. Une dizaine de minutes passe. Dame Mayumi passe le doigt sur les marques significatives. Le dessin semble avoir toujours été là, alors qu'il n'était pas visible auparavant. Jizo voit maintenant les boucles, mais ne comprend pas plus ce qu'elles peuvent bien signifier. Il demande à Dame Mayumi si le kami du foyer a laissé une trace. C'est un bon début... mais il peut s'agir aussi d'un kami dont la puissance s'étendrait jusqu'ici. Vient ensuite le temps de l'interprétation. Jizo cherche à comprendre à travers les traces ce qui a pu se passer depuis midi. Les traces sont effectivement un peu torturées, mais pour Dame Mayumi, l'événement n'a pas forcément eu lieu aujourd'hui. Le kami a été, est et sera. Le signe peut être passé, présent ou futur. Jizo blanchit. Nobukata Morikaze sourit et dit à Dame Mayumi qu'elle a perdu son élève, mais que l'écouter est très intéressant. Celle-ci essaye d'expliquer à Jizo qu'il peut s'agir de la volonté du kami, et que cette volonté ne dépend pas forcément de l'écoulement du temps. Nobukata Morikaze essaye d'être plus pédagogue : "pensez à un message". Jizo, plein de bonne volonté, s'abîme dans la contemplation de la bûche et perd toute notion de l'heure.
Dame Mayumi donne négligemment la clé à Nobukata Morikaze : un esprit puissant est sur les lieux, mais il est gêné pour exprimer son énergie. Elle n'est pas libérée en un faisceau joyeux mais se replie sur elle-même. Nobukata Morikaze ne l'avait pas senti et elle est un peu surprise. Dame Mayumi lui pose une première question qui lui tenait à coeur : voit-elle l'esprit des défunts ou tous les kamis ? Nobutaka Morikaze dit qu'elle pense voir les deux mais qu'elle n'est pas sûre de bien faire la différence. Dame Mayumi manifeste sa surprise. Elle explique sa propre perception, notamment lors du rite de réception du kami en soi, ou plutôt la sensation de l'énergie, l'irruption du flot vital qui déborde du kami, la lacune, la viscosité et la langueur au contact d'un défunt. Nobutaka Morikaze dit poliment que son interlocutrice est plus avancée qu'elle et qu'elle connaît les kamis de l'intérieur. Dame Mayumi, après un temps de réflexion, finit par conclure que la vision de Nobutaka Morikaze lui donne un accès plus immédiat à l'essence des kamis, tandis que la sienne privilégie l'énergie. Elle se promet de lui en parler plus avant. Pour le moment, elle est très occupée à lui demander ce qu'elle entendait quand elle a dit qu'elle comprenait Yaoya Oshishi.
Et Nobutaka Morikaze répond, la gorge nouée, qu'elle a déjà fait l'expérience de la possession. Dame Mayumi pousse un peu, lui demande si c'est à cette occasion qu'elle a développé son don, puis lui présente ses excuses pour avoir remué des souvenirs douloureux.
Jizo est toujours absorbé dans la contemplation de sa bûche et les quintes de toux de Dame Mayumi ne troublent pas sa concentration.
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : lun. oct. 14, 2013 9:19 pm
par Macbesse
Incarnations
Susumo était sorti méditer, l'esprit tourné vers l'urne de son maître. Il revient et plaisante avec les porteurs, puis les mobilise pour fouiller la maison en quête de nourriture. Dame Mayumi déclare qu'il fait trop froid à l'intérieur et qu'elle a besoin de prendre l'air. Susumo, étonné, demande si leur conversation la dérange mais elle ne l'entend pas et sort sans répondre.
Il entreprend une fouille méthodique du grenier et finit par y trouver une jarre de riz.
Pendant ce temps, Nobutaka Morikaze se médite près du feu et entame une conversation avec le kami du foyer, qu'elle remercie de son accueil chaleureux. Il est effectivement très accueillant mais pas très heureux. Il se plaint de la dégradation de sa situation et parle de quitter les lieux et de trouver une autre incarnation.
Dame Mayumi s'est installée au bord de la clairière. Par habitude, elle s'est installée sous un arbre mais tourne son attention vers la maison. Elle sent alors une présence puissante mais confuse, comme un brouillard. Il ne peut pas s'agir du kami du foyer. Il est néanmoins concentré sur la pièce la plus ancienne de la maison, qui doit bien avoir plus d'une centaine d'années. Il n'y est pas lié, pourtant, et Dame Mayumi si cette pièce n'est pas le siège d'un troisième kami. Le kami désire communiquer mais a des difficultés à se manifester. Il n'a d'ailleurs pas d'incarnation. Dame Mayumi entre dans la pièce où cuit désormais du riz, demande à un porteur de lui amener le baquet d'eau sous l'arbre. Tous sont attentifs mais aucun ne pose de question.
Avec ses feuilles séchées, elle asperge les alentours d'eau, puis bat la mesure. L'esprit se met en rythme et finit par réussir à communiquer. C'est la première fois. Il en est très content, d'autant plus qu'il a un problème. On lui a retiré son incarnation, une incarnation vide est venue sur elle, et il ne peut pas la régénérer. Et un autre esprit est venu. Il est faible, il commence à prendre possession de l'incarnation qui le gêne. Il n'a pas vraiment de prise sur lui et ne comprend pas ce qui se passe, et il ne sait pas quoi faire contre cette incarnation vide. Dame Mayumi propose d'abord de prendre possession de l'incarnation, ce qu'il refuse catégoriquement. Elle demande quelle était celle qu'il a perdue - un arbre. Elle argumente : l'incarnation est aussi en bois. Devant le refus renouvelé, elle propose de déplacer ce qui reste de son incarnation. Là encore, nouveau refus. Il propose la destruction de l'incarnation qui le gêne. Elle lui répond que deux autres esprits en pâtiront. Il ne comprend pas pourquoi l'esprit du foyer - avec qui il a de bonnes relations - en souffrirait, et elle tente de lui faire comprendre. Enfin, elle s'engage à trouver un compromis acceptable pour les trois parties et met fin à l'entretien.
En rentrant, Dame Mayumi ne fait guère attention à la bonne odeur de riz cuit et expose le problèmes en terme clairs et compréhensibles par tous - si ce n'est qu'elle tousse beaucoup pendant l'exposé. Un premier esprit, puissant, celui qui a laissé des marques dans le bois, avait comme manifestation physique un arbre, qui a été coupé - Susumo confirme avoir vu une souche pendant son exploration. Pour agrandir la maison, cet arbre a été coupé et l'esprit s'est retrouvé sans incarnation, ou presque. La maison a recouvert la souche - toujours vivante - et l'empêche de reprendre. Cela explique les boucles nerveuses dans les marques laissées sur le bois. Or, une partie de la maison est suffisamment ancienne pour servir d'incarnation à un esprit. Nobukata Morikaze comprend aussitôt les enjeux et complète : bientôt, le conflit deviendra possible entre les deux, puisqu'ils seront enfin de même nature. Jizo dit qu'il avait cru comprendre que le temps n'avait pas de prise sur les esprits et devient plus confus encore. Quant à Dame Mayumi, elle a un hochement de tête approbateur et ajoute que ce genre de conflit a toujours des conséquences pour les hommes - au moins pour les occupants, et sûrement pour des voyageurs. Le sachant, elle est investie d'une responsabilité et ne veut pas partir sans avoir pris les mesures nécessaires, mais le temps presse.
Un consensus s'installe bientôt : il faut abattre la partie qui recouvre la souche. Eventuellement, il sera possible de reconstruire suivant un plan en L. C'est la seule solution qui paraisse viable. Dame Mayumi veut s'assurer que cela ne gênera pas l'esprit de la maison. Elle fait organiser un deuxième repas dans la pièce ancienne et demande de la convivialité. Finalement, l'esprit réussit à se manifester. Il est assez hésitant, balbutiant, mais Dame Mayumi le met en confiance en lui expliquant comment tenir son rôle au mieux, comment retenir les âmes qui viennent, leur faire plaisir, "les protéger des flocons de Yuki Ona et des gouttes de Susano-wo". Le kami lui parle avec déférence et lui demande d'intercéder auprès des déesses pour qu'elles n'en prennent pas ombrage. A la fin de l'entretien, Dame Mayumi est certaine que le kami n'aura pas conscience des modifications de la partie récente de la maison. Elle les évoque en termes vagues, comme une amélioration, pour que son "énergie s'écoule de manière plus harmonieuse".
Elle couche ensuite par écrits ses instructions pour les occupants de la maison, fait valoir la bénédiction que représente la conjonction de trois kamis comme la menace qui pèse s'ils laissent le conflit s'envenimer, et montre que les menus travaux sont finalement un tout petit effort au regard des ennuis évités et des bénéfices que prodigueront les esprits au "relais des trois kamis".
Elle signe, s'engage, et remet le document à Susumo qui s'est proposé pour attendre les occupants.
Tout semble en ordre.
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : lun. oct. 14, 2013 9:39 pm
par Macbesse
Le quatrième kami
Le lendemain matin, Dame Mayumi presse à nouveau les porteurs. Susumo reste à méditer et attend les porteurs. Peu avant midi, il a la surprise de voir les palanquins... et leurs occupantes la surprise de voir le relais.
- Un des trois kams, peut-être un kamii qui sera puissant, nous a fait revenir, propose Morikaze
- ... mais nous sommes parties loin de leur influence
- Peut-être un quatrième kami ? propose Susumo
- La route, répondent en choeur les deux femmes.
Dame Mayumi cherche une borne et délimite un espace sacré autour d'elle avec du ruban rouge et le petit groupe retire la mousse, dégage les hautes herbes et gratte les moisissures. Le kami de la route, que ce rituel a mis dans les meilleures dispositions, ne tarde pas à se manifester. Il parle par signes, par animaux qui traversent, par souffles, par troubles de l'horizon, mais Dame Mayumi a suffisamment d'expérience pour le comprendre. Les instructions de Dame Mayumi seront bien transmises, mais pas appliquées. Il faut qu'elle reste. Dame Mayumi répond qu'elle a un engagement important envers Yuki-Ona, et qu'elle doit être rentrée avant la première neige. Le kami de la route comprend, et ne veut surtout pas être en froid avec la dame des neiges. Il peut faire revenir les âmes qui s'occupent du kami de la maison rapidement, puis favoriser son voyage. Dame Mayumi s'assure que des instructions orales suffiront et le kami en est sûr. Il pose cependant une condition supplémentaire : il faudra que ces âmes fassent prospérer le relais et - implicitement - entretiennent le segment de route qui y mène. L'accord est conclu.
Jizo propose à Dame Mayumi de rester pour participer aux travaux. Il pense au temple qu'il aura à reconstruire. Elle trouve que c'est une excellente idée.
A peine vingt minutes plus tard, les occupants du relais viennent, un peu hagards, à la rencontre d'une impressionnante miko et d'une frêle jeune femme, et voient leur maison marquée de signes étranges et le sol jonché de cailloux blancs, comme des augures. Ils écoutent, attentifs, entre la peur et l'inquiétude. Pourtant, à mesure qu'ils l'écoutent, l'espoir, qui semblait perdu - les voyageurs évitaient le relais, ce qu'ils ne comprenaient pas, ils s'y sentaient bien - renaît.
Fin du scénario
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : mar. nov. 12, 2013 12:57 pm
par Macbesse
Contes de pagode et de princesses
Début de séance : Aucun changement de valeur n'est constaté ; Jizo et Dame Mayumi se sont rapprochés de leur ambition et de leur karma
Les palanquins ont dépassé le la Biwa et s'approchent du point de jonction du Tokaido et du Nakasendo. C'est la dernière halte avant la Barrière et l'entrée sur le territoire impérial.
Kayaku et Fumi rattrapent le groupe. Kayaku a l'air changé. Nobuka Morikaze lui dit que son retard l'a fait gagner en profondeur, Dame Mayumi lui affirme qu'il a été marqué. Il lui raconte sur le ton de la confidence que la nuit passée, il s'est rendu dans la forêt, mais que la lumière était différente, comme si l'aube allait poindre derrière la colline, ou comme si elle émanait de la forêt elle-même. Il avait marché jusqu'à une pagode, à plusieurs étages. Pourtant, les arbres étaient encore plus hauts. Là, trois jeunes personnes semblaient l'attendre. Elles semblaient de bonne naissance par leur maintien, mais leur comportement n'avait rien de retenu. Il interrompt alors son récit pour attiser la curiosité de Dame Mayumi et demande où est passé Jizo, si elle l'a congédiée. Dame Mayumi lui répond qu'il est parti reconstruire une auberge, puis, devant sa stupeur, lui raconte l'épisode. Kayaku reste surpris qu'un ronin soit allé faire des travaux et pense qu'il en a profité pour s'enfuir. Il fait ensuite la connaissance de Susumo, lui dit très franchement qu'il pense qu'il est là pour parce qu'il est plus facile de passer la barrière mais que cela ne le gêne absolument pas.
Fumi se mêle enfin aux palanquins, après deux heures passées à marcher à l'arrière. Elle demande à monter sur le palanquin de Dame Mayumi et dévore son repas à côté d'elle. Dame Mayumi respecte son silence.
Au relais, Jizo arrive, en nage. Il a couru toute la journée pour les rattraper. Les travaux étaient bien commencés et l'aubergiste avait fait appel à des ouvriers pour l'aider. Il était donc inutile. Nobuka Morikaze profite que Dame Mayumi est au bain pour lui parler, lui parle par métaphores. Est-il parti par ce qu'il n'était pas utile ou par ce qu'il se sentait inutile? Jizo est interloqué mais parvient à comprendre que le rejet des autres n'est que le miroir de ce qu'il projette. Epuisé par cet effort intellectuel, il ne remarque que tardivement qu'il a approché Morikaze et commence à reprendre ses distances. Morikaze demande si c'est un ordre de Dame Mayumi. Il est peu désemparé car il croyait que c'était elle qui l'avait expressément demandé, via Fumi. Le malentendu est levé.
[Jizo rachète son revers - Disgrâce]
Après le dîner, Nobuka Morikaze joue de la flûte et médite - Susumo et Dame Mayumi en font de même. Dame Mayumi concentre son attention sur la jeune fille. Elle sent la présence de Yuki-Ona, comme si elle favorisait une sorte de lien empathique entre elles. Mais, sollicitée par Kayaku, déjà Morikaze s'arrête.
Kayaku raccompagne ces dames, demande à Dame Mayumi s'il peut poursuivre son récit dans la chambre, et, après l'avoir raccompagnée, commande du sake chaud, en présence de Morikaze.
Il reprend le récit au début. L'arrivée du sake vient l'interrompre au même moment. Il explique alors que les jeunes femmes, les trois princesses, jouaient, elles lançaient des invitations, et il y a répondu. Dame Mayumi demande des précisions et Kayaku prétend craindre la choquer. Invité à poursuivre, il fait un récit plus détaillé. Il pense que ces jeunes femmes voulaient se souvenir de la vie de mortelle. Pour cela, elles voulaient être satisfaites. Il se rapproche de Dame Mayumi. Alors, les jours ont passé, au cours desquels il s'est employé à satisfaire... il hésite un peu, prend du sake. Dame Mayumi se rapproche. Ils sont désormais très près l'un de l'autre. Il reprend : à satisfaire leurs sens, à satisfaire leurs désirs. Les siècles ont passé dans le plaisir. Pourtant, il avait la nostalgie de sa vie terrestre. Des défis (il a alors le mot malheureux de "trophées"), des personnes - et notamment vous, ma Dame. Il ne voulait plus se contenter de la satisfaction. Le jeu, la séduction lui manquaient. Dame Mayumi le questionne - et même la frustration ?, le provoque. Il demande s'il peut rester. Dame Mayumi dit son assentiment, mais ses gestes valent mise en garde. Alors qu'elle glisse sa main dans le kimono et commence à lui caresser le pénis, Kayaku s'aperçoit que la main est glacée. Dame Mayumi lui demande s'il accorde du crédit aux récits sur les sorcières des neiges, connues pour dévorer les hommes. Il déglutit mais parvient facilement à contenir la peur. En revanche, le contact froid casse son érection et il ne parvient pas à se revivifier. Il préfère s'arrêter. Dame Mayumi remonte sa caresse, termine sur le visage et Kayaku lui embrasse la paume de la main. Elle lui dit qu'elle sait qu'il n'est pas homme à renoncer. Il s'éclipse, un peu honteux, et lui souhaite bonne nuit.
Le lendemain matin, Nobuka Morikaze, la première levée, a la surprise de trouver Gempachi. Le Père Abbé a jugé bon de leur donner du renfort. Kayaku, qui a mal au crâne et un début de rhume, est d'une humeur massacrante et lui demande ce qu'il fout là. Les choses se passent mieux avec Susumo, très respectueux envers le maître des lanciers du monastère, alors que ce dernier est très familier et se moque bien de son prestige. Susumo se rend compte que le Monastère du Lotus à huit pétales où trône le Bouddha fait partie de ceux qu'il doit visiter pour honorer la mémoire de son maître.
Après un petit rituel dédié à l'esprit de la route, les palanquins se remettent en route. Kayaku marche aux côtés du palanquin de Dame Mayumi, qui lui déconseille de retourner à la pagode. De nombreux récits parlent de mortels qui sont restés longuement aux côtés de kamis et qui sont revenus dans l'espoir de revoir leurs proches, mais des centaines d'années s'étaient écoulées. Le kami peut aussi infliger des épreuves, pas forcément difficiles, mais mortelles. Dans d'autres récits encore, des esprits défunts attirent le mortel et il perd progressivement sa force vitale. Kayaku semble avoir les pensées ailleurs et chercher davantage à séduire la miko qu'à tirer profit de ses enseignements. Pendant ce temps, Nobuka Morikaze dort sur son palanquin, mais son esprit veille et ne perd pas une miette de la discussion.
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : ven. nov. 15, 2013 11:00 am
par Macbesse
Petit edit à la fin pour compléter le récit par des allusions aux légendes, aussi vagues que menaçantes, à la manière qu'affectionne Dame Mayumi.
Il continue de se passer des choses étranges, y compris suivant les standards de cette bande de freaks nippons.
Au fait, j'ai toujours des lecteurs ou je vous ai perdus en route ?
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : lun. févr. 17, 2014 1:56 pm
par Macbesse
Le long voyage de Dame Mayumi
Indication hors-jeu : ayant manqué deux séances, j'ai eu droit à un petit solo de deux bonnes heures de rattrapage. Je distillerai le contenu des deux séances dans le prochain CR, mais d'un point de vue tout à fait tronqué car je ne connais pas le tiers du quart des bêtises de mes petits camarades.
Depuis combien de temps n'ai-je rien entendu d'autre que la voix de cette petite sotte ? Ses préoccupations vaines, sa vie insignifiante et son amour d'une affligeante banalité l'exaltent. Le comble de l'horreur est de constater que les esprits étroits peuvent non seulement se contenter de ces bassesses aussi mais, bien pire, en être heureux et les confondre avec l'infini. Je sais par les plus menus détails le prix des raves, les goûts de ses amies, ses maladies infantiles, et les grains de beauté de son amant. Au moins suis-je sûre de le reconnaître alors que trente années se sont écoulées. Borgne, boîteux, couvert de cicatrice, il ne m'échappera pas et je serai libérée de mon engagement envers sa cruche incendiaire. On pourra me trouver dure mais j'ai eu le récit de ses interrogatoires par les autorités. Les enquêteurs lui ont proposé de mentir sur son âge aussi clairement qu'ils le pouvaient pour lui épargner le suprême châtiment. Oui, cette imbécile a fait plus que signer sa condamnation, elle l'a dictée. Que faire pour échapper à son insipide bavardage ? Mon corps ne répond pas. Ou si mal. Il est si loin de moi, si faible, si vide de toute énergie. Autour de moi, il n'y a que l'obscurité, quelques ombres et le bourdonnement du monde, confus indistinct, inintelligible. En moi, la compagnie la plus désagréable qui soit et la perspective de manquer la première neige.
Yuki-Ona, ma Dame, pourquoi infliger cette épreuve à ta servante sans l'en avertir ? Tu n'as rien requis. Je ne crois pas non plus t'avoir offensée ni révélé ce qui ne doit pas l'être.
L'assommant babil se fait lointain. Très lointain. Je vois la mer... la mer par deux cercles blancs, très ouvragés, la mer par les orbites d'un masque. Je vois le masque, distinctement, longtemps. Il me faut voir le paysage. Je me saisis du masque en pensée. Je ne parviens qu'à le faire trembler. Ce n'est pas moi qui le tiens. Il est rapproché de ma vision. Eloigné. Rapproché. La côte est déchirée. Une falaise domine des rochers et une courte bande sablonneuse. Je n'entends que la mer. Il n'y a ni oiseaux ni bêtes sauvages. Je me demande même s'il y a des poissons dans cette mer primordiale, mais ce silence est apaisant. Le ciel est gris, les nuages chargés de neige, prêts à crever, comme en une éternelle menace.
Le masque s'éloigne à nouveau, se rapproche, mais rien ne change. Je sais qui tient le masque. Je l'ai connue plus directe, et je le suis. Je lui demande ce que je dois faire. « Va, contemple et apprends » me répond-elle simplement. Je retrouve la vision complète. J'entends la flûte de Nobuka Morikaza, comme une prière dont je ne comprends ni l'objet ni le destinataire. Je l'entends comme si elle était à côté de moi, mais elle n'est pas à côté de moi, je le sais. La distance qui nous sépare est à la fois immense et nulle. J'en profite pour prendre de la hauteur. Je vois toute la côte, des forêts, des montagnes. Je monte encore et je vois de grandes îles, les îles formées de l'union d'Izanagi et d'Izanami. Je voudrais profiter encore de cette ascension, mais un violent grésil – atroce neige sans pouvoir de réflexion – me barre le chemin. Je me sens perdue, désorientée. Le message est limpide. Je descends. Aidée par le son de la flûte, je retrouve facilement la côte. Face à la falaise, je vois un peu plus loin un endroit indistinct doté d'une aura particulièrement puissante, mais je préfère écouter le chant du vent. En pensée, je trace un sanctuaire et chante une mélopée sur un rythme lent pour inviter l'esprit à me parler davantage. Il ne répond pas à mon appel. Je module des variations rapides, semblables à ses fluctuations, échoue. Je chante alors le cycle des saisons, tiens la note alors qu'autour de moi le monde semble s'accélérer, et le vent me parle. Il chante la création et je veux écouter sa chanson. Des cycles défilent, d'une longueur irrégulière. Le vent ne chante pas les années, mais des ascensions, des apogées, des déclins et des chutes. Aucune de ces phases n'a la même durée. Je m'imprègne de ces véritées premières qui m'échappent encore. Des premières formes humaines apparaissent sur la côte, légères et subtiles comme des formes animales auxquelles elles ressemblent beaucoup. Elles chassent, cueillent, et disparaissent. Bien plus tard, d'autres viennent, des pêcheurs cette fois. Leurs empreintes sont plus marquées, mais finissent aussi par s'évanouir. Entretemps surgissent les incarnations d'un esprit marin, fugaces, à peine quelques cycles, une simple curiosité à l'échelle du temps. Et de nouveau les hommes. Nombreux, brutalement et rapidement, ils investissent la côte autrefois paisibles. Le vent semble d'abord réticent à continuer son chant mais ne s'interrompt pas. Sa chanson est prête, après tout, et la côte toute entière se couvre d'étranges rochers géométriques et de cubes de couleur vive, et la falaise est cassée, détruite et d'autres grands rochers cubiques viennent surplomber ces autres rochers qui forment peut-être un port à en juger par les bateaux géants et sans voile qui croisent, apparitions fugitives, devant moi. Le vent dit que ce qui doit être conté le sera en son temps, qu'il s'est déjà égaré très loin. Je le remercie de toute mon âme, mais je suis curieuse. Je veux savoir pourquoi les cycles n'étaient pas tous de même longueur. Le vent se fait tempête. Il me soupçonne de vouloir changer la durée des cycles. Je me récrie. Il insiste et me chasse, m'envoie demander la chanson de Jimmu Tenno pour satisfaire sa curiosité. Je lui promet un pélerinage, car je sens que je l'ai blessé, mais aussi car je le suis profondément reconnaissante. tout fait sens désormais. Chacun des cycles de son récit correspondait au règne d'un empereur et je peux désormais agencer l'histoire des forces primordiales, l'histoire des kamis avec celle des soubresauts politiques du monde depuis le règne du Premier Empereur en une parfaite harmonie. Mon esprit gagne encore en acuité et je vais trouver Jimmu Tenno en son éternel palais et écouter sa chanson.
Sitôt achevée, je sens le masque se retirer de mon visage, une dernière image de la côte et de ses premiers habitants, et je vois les motifs qui l'ouvragent, complexes et réflexifs comme des flocons de neige...
Et j'entends à nouveau la litanie débilitante de Yaoya Oshihi et ses platitudes arrivent comme un monceau d'ordures sur cette vision céleste.
Heureusement, je sens une violente douleur à la poitrine. Bientôt, je perçois la lumière et les vibrations du monde et j'éclate d'une toux violente pour éprouver les contours de mon corps retrouvé, faisant du même coup taire la petite bavarde.
Un panneau de soie coulisse et j'entends Fumi me proposer une tasse de thé. Je comprends alors que le masque n'existe peut-être plus et que Yuki-Ona m'a projetée dans d'autres reflets avant que je puisse l'atteindre dans un passé lointain pour voir à la fois présent, passé et avenir en une seule et même vision, et cette révélation me saisit mais je parviens à articuler un oui.
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : ven. juil. 04, 2014 1:05 am
par Macbesse
J'ai du retard ! Il y a encore quatre séances après ces CR. J'ai forcément oublié des choses, ce n'est plus très frais.
Le silence des kamis
Deux palanquins pour une barrière
« La patronne s'est réveillée ! La patronne s'est réveillée ! ». La servante de l'auberge a tôt fait de rameuter tout le groupe dans la chambre de Dame Mayumi, qui s'enquiert du retard pris. Nobuka Morikaze entreprend de la rassurer. Un récit plus circonstancié est demandé. Les hommes se lancent alors dans des explications contradictoires, où apparaissent un grand palanquin fermé, puis deux, des obligations et des dettes contractées mais aussitôt niées, et une prière pour un malade qui aurait prêté un palanquin. Dame Mayumi ne saisit pas bien et se fait plus pressante. Kayaku s'en agace. Et puis, après tout, il lui a apporté des kakis. L'attention a beau être charmante, ça n'est pas la question. Fumi glisse que l'argent du voyage va manquer à cause des frais engagés pour les palanquins. Nobuka Morikaze décrète que Dame Mayumi est fatiguée et tous se saisissent de l'occasion pour vider les lieux, à l'exception de celle qui vient de lancer le signal de départ. Dame Mayumi commence par la remercier pour l'aide qu'elle lui a apporté. Le son de sa flûte lui a permis de ne pas se perdre. Elle fait le récit de son voyage. Nobuka Morikaze fait le rapprochement avec la carte que possédait un samouraï qu'ils ont croisé et qui a eu quelques ennuis. Les hommes échangent leurs considérations sur les propos tenus à l'intérieur. Gempachi et Jizo sont d'avis d'attendre la décision des patronnes. Kayaku répond quelque-chose comme « Il est là votre problème, vous les considérez comme des patronnes, pas comme des femmes ! ». Jizo est convoqué dans la chambre. Il avait pu longuement examiner la carte du samouraï et confirme que la côte décrite par Dame Mayumi est bien celle qui figurait dessus. Il faut donc y aller. Pourquoi ? Dame Mayumi ne le sait pas et répond par des dérobades.
Kayaku profite de la soirée pour sympathiser avec les artisans de Yawata et apprend que le rituel en l'honneur d'Hachiman marque le début d'une semaine de fête. Au dîner, il lie connaissance avec la serveuse d'un établissement de quartier. Elle a un peu de conversation et se révèle vite plus dégourdie que la moyenne. Elle s'appelle Hakone, se marie dans quelques mois et compte bien profiter de la vie. Elle accueille Kayaku dans son lit et il ne revient qu'au petit matin.
Pendant ce temps, Jizo affronte ses démons. Lui qui a toujours suscité la crainte et le rejet se met en devoir de localiser l'amant de Yaoya Oshishi, Il y parvient plutôt facilement et réalise qu'il ne suscite en réalité aucun rejet. Cette expérience lui confirme la véracité des enseignements de Morikaze.
Extinction des feux
C'est le jour de la fête d'Hachiman. Dame Mayumi a l'air d'aller mieux. Kayaku essaye de s'isoler avec elle mais Nobuka Morikaze entre dans la chambre. Les deux femmes se mettent d'accord sur le rituel. Morikaze jouera de la flûte afin de guider l'esprit de Yaoya Oshishi, Dame Mayumi. Kayaku se propose de leur présenter les artisans et l'amant, devenu un vieil homme. Une joyeuse compagnie s'est déjà amassée quand ils arrivent. L'arrivée de la miko impose le silence. Sans préambule, Dame Mayumi dit à l'homme que la défunte Yaoya Ochichi a éprouvé le désir de savoir s'il se souvenait de sa promesse. L'homme marque un temps d'arrêt mais dit s'en souvenir et commence à raconter son histoire, les yeux humides. Mayumi sent son hôte trépigner et lui dit de patienter encore un peu mais elle-même n'y tient plus, d'autant qu'elle connaît l'histoire par cœur. Elle se saisit de ses rubans pour commencer le rituel. Une foule de plus en plus importante se masse. Morikaze, prise au dépourvue par l'initiative de Mayumi, va chercher sa flûte. Dame Mayumi fait installer un grand baquet d'eau chaude au centre du sanctuaire improvisé. De son
heigushi, elle asperge l'amant de l'incendiaire. Elle se tourne vers la foule et dit très haut : « Voilà trente ans, une promesse a été prononcée sur une tombe, cette promesse, les kamis en ont été témoins. Ce qui a été dit il y a trente ans a engagé cet homme pour toute sa vie ». Alors, elle revient à l'homme et permet à Yaoya Oshishi de refléter son image dans le baquet. L'homme se met à pleurer à chaudes larmes. Dame Mayumi s'éloigne d'un pas et les laisse se parler. Il dit qu'il n'a rien oublié, qu'il a entretenu avec dévotion sa tombe pendant trente ans. Il dit encore d'autres choses mais Dame Mayumi est trop loin pour les entendre, à moins qu'elle y soit totalement indifférente ou qu'elle ait subi trop longtemps la conversation de l'incendiaire pour la supporter encore. Et puis l'image se dissipe. La flûte de Morikaze prend le relais et un long cortège se forme qui mène l'esprit de Yaoya Oshishi vers le cimetière.
Au sanctuaire déserté
Cheminant vers le sanctuaire d'Hachiman, Mayumi prévient Jizo qu'il est possible qu'il soit déçu. Dans ce genre de sanctuaires, affirme-t-elle, la présence des kamis est rare et le sens des rituels oubliés. Nobuka Morikaze fronce les sourcils mais doit bien en convenir devant l'absence totale d'âme du spectacle auquel elle assiste. Le peuple a l'air content mais ses activités tiennent davantage de la fête à la saucisse que du recueillement. Les chants sont oubliés ou incorrects. Dame Mayumi explique que c'est l'une des rares cérémonies où l'Empereur est nommément cité. Elle permet de resserrer le lien entre les kamis, l'Empereur et le peuple. Connaissant bien la chanson de Jimmu Tenno, le premier Empereur, et celle de ses successeurs, elle se fait fort de combler pour ses amis les trous afin qu'ils comprennent ce que la cérémonie devrait être. Jizo doit faire un gros effort pour suivre mais parvient à s'accrocher et affine sa vision du monde et du lien entre les kamis et les hommes. De leur côté, Gempachi et Kayaku font le tour de l'assemblée et repèrent deux gaijins qui se sont mis à l'écart pour observer le rituel. Dame Mayumi et Nobuka Morikaze font une prière de guérison pour honorer la promesse de Susumu au nom de laquelle le deuxième palanquin dans lequel a voyagé Mayumi a été prêté. Revenant à la cérémonie, elle se met à critiquer ouvertement l'incompétence des prêtres du sanctuaire et à multiplier les commentaires. Elle ressort de la cérémonie atterrée. Le kami n'est pas venu.
Le Pli
Morikaze et Gempachi proposent que le groupe passe la nuit au temple bouddhiste. Gempachi y livre un pli cacheté qu'il s'est retenu d'ouvrir pendant tout le trajet. Kayaku échappe à des moines qui tentent de le forcer à les aider. Dame Mayumi va s'écrouler de fatigue. Elle a dit trop de vérités premières et crache à nouveau du sang.
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : ven. juil. 04, 2014 11:17 am
par Macbesse
Révélations
Confidences et magistères
Au petit matin, Nobuka Morikaze commence par dire à Dame Mayumi combien ses éclairages sur la cérémonie en l'honneur d'Hanuman l'ont intéressée. Elle demande à Dame Mayumi de confirmer une chose qu'elle a dite et qu'elle a du mal à admettre : les prêtres shinto ne communiqueraient donc pour la plupart pas avec les kamis ? Dame Mayumi a un rire cristallin, à la fois moqueur et triste. La plupart se contentent même d'ânonner des prières sans en comprendre le sens. Les prêtres et les mikos sont choisis dans la clientèle, pas pour leurs affinités avec l'esprit. Nobuka Morikaze est horrifiée et estime que ce doit être difficile de suivre une voie sans avoir aucune disposition. Au contraire, répond Dame Mayumi, il n'y a rien de plus facile. C'est une existence de privilèges et de pouvoir. Ceux qui ont de vrais talents sont exclus ou partent d'eux-mêmes, ils exercent dans de petits sanctuaires ou errent par les montagnes. Nobuka n'y tient plus : mais – de ce que vous disiez – la cérémonie que nous avons vue relie le monde des hommes aux kamis, elle les synchronise. Alors, qui assure le lien entre les kamis et les hommes si ceux qui en sont capables ne sont pas dans ces sanctuaires importants ? Dame Mayumi soupire : « Oui, personne. » Nobuka passe alors à l'offensive et la presse de prendre ses responsabilités. Dame Mayumi esquive en pointant des défauts similaires chez les bouddhistes, que Nobuka affirme ne jamais avoir constaté. Dame Mayumi continue en insistant sur le rôle politique que se donnent la plupart des monastères.
L'Initiation
Nobuka Morikaze est partie prier. Elle joue de la flûte, comme si elle cherchait à se protéger d'elle-même, à s'exorciser. Sur ces entrefaites arrive Jizo, l'air profondément perturbé. Il méditait, près d'une offrande, sur ce que Dame Mayumi avait dit au temple, quand il a senti une présence, « comme un petit homme ». Il a pris l'offrande et il est parti. « Vous croyez que c'est euh... un signe ? » Dame Mayumi lui dit qu'il n'est pas donné à tous les hommes de voir un yokai et demande à son élève ce qu'il en conclue. « Que j'ai vraiment été très vigilant ». Dame Mayumi ne perd pas patience : avait-il déjà vu un yokai, du temps où la vigilance était son métier ? Jizo se gratte la tête et finit par répondre qu'il comprend. Il a changé. Il voit le monde différement maintenant. Il aimerait toutefois savoir si c'était un signe. Dame Mayumi lui dit qu'il faut chercher, qu'il doit retourner méditer. Elle le laisse un temps, écoute le chant maîtrisée de la flûte, se dit qu'il faudra qu'un jour Nobuka Morikaze lâche prise et s'ouvre au monde des hommes, puis va voir comment médite son disciple. Il s'est mis face à un bosquet. Son sabre est devant lui, entre le bosquet et lui, se dit Dame Mayumi. Elle s'approche de lui. Il sent une présence et l'air fraîchir. « Puis-je savoir pourquoi vous méditez face à votre sabre, il vous aide à vous concentrer ? » Jizo répond qu'il fait simplement partie de lui. Dame Mayumi lui explique qu'il gêne son contact avec les kamis, que les sabres tranchent les liens, alors qu'il doit en nouer. « Je voudrais que vous fassiez une expérience. Essayez de méditer sans votre sabre. » Jizo accepte, retourne dans la chambre. Par la porte ouvert, Nobuka Morikaze le voit tourner en rond, comme en proie à un dilemme. Elle intervient et il lui fait part de son épreuve. Elle lui demande qui donc pourrait venir s'en prendre à son sabre s'il se contenter de le laisser. Il reconnaît que le danger est minime, mais il pensera tout le temps. « Mais bon, c'est vrai, je peux le laisser ». « Alors vous échouerez dans l'épreuve que vous a imposée Dame Mayumi, car le sabre sera toujours présent, dans votre esprit ». Elle lui demande alors si cette méditation est importante à ses yeux. C'est vraiment le cas. Il ne saisit pas vraiment l'intérêt de la démarche, mais Dame Mayumi lui a demandé et il lui fait confiance. Nobuka s'engage à le tenir sous bonne garde.
Entretemps, Dame Mayumi a sanctuarisé l'espace où est apparu le yokai avec des rubans rouges et des omamushis. Elle ordonne à Jizo de se constituer un faisceau de petites branches séchées. En dispersant de l'eau avec, il pourra plus facilement se lier aux kamis. Au moment de le nouer, il opte, après un long temps de réflexion, pour une mèche de ses cheveux et va chercher son sabre. Dame Mayumi le regarde partir vers l'auberge sans intervenir. Nobuka Morikaze lui demande d'abord qui il est, lui demande s'il a terminé. La réponse est négative et elle manifeste son refus de rendre à Jizo son sabre et lui propose une paire de ciseaux. Jizo prend conscience de l'erreur qu'il s'apprêtait à commettre. Dame Mayumi fait remarquer que les cheveux sont de bons liens et touchhe machinalement ses cheveux blanc neige. Elle l'emmène puiser de l'eau à la source et écrit une prière pour le kami. Après un tour complet du bassin, elle est brusquement engloutie, acceptée.
Jizo médite enfin, son heigushi à la main, mais il a de grandes difficultés à adopter un mouvement de va et vient convenable, comme s'il s'en servait pour porter une attaque. Dame Mayumi commence à l'accompagner avec ses grelots et lui imprime un rythme. Le geste se fait plus approprié, mais la vision de Jizo reste superficielle. Dame Mayumi commence à chanter, la chanson du vent, la chanson de l'ordre céleste à laquelle elle l'a initié, et il sent que le bosquet n'est plus un bosquet, s'y enfonce. La forêt est immense et sauvage, comme aux premiers jours du monde, puissante et vénérable. Jizo a la sensation de flotter. Il sait que le temps et l'espace s'écoulent désormais différemment. Il s'enfonce dans la forêt, cherche et trouve la clairière qu'il a repérée, celle où il veut bâtir un sanctuaire à Inari. Le voyage semble interminable mais il la trouve sans difficulté. Elle est nimbée de lumière, sereine et silencieuse. Dans le silence, il entend comme un cœur qui bat. Il a la sensation que cette clairière sera le lieu de sa rédemption, ou de sa perte. Il cherche l'endroit où construire son autel, se laissant guider par ses sensations. Près des rochers, il lui semble que la pulsation est plus forte. Ils forment comme des cheminées, alors il s'enfonce dans un boyau et débouche sur une immense caverne. Au centre d'un rocher plat dort un renard de fort belle taille. Une kitsune ? Non, il a l'air bien plus puissant. « Inari ? ». Alors que le mot traverse son esprit, le renard dresse l'oreille dans son sommeil. Jizo l'appelle, à haute voix cette fois. Inari se réveille, et l'écoute. Jizo le salue et s'incline en signe de respect. Il promet de réparer sa faute, mais il a l'air de penser que construire un temple suffira à la racheter. Subtilement, Inari l'amène à penser qu'il faudra davantage, que ce ne sera qu'un premier pas, mais qu'il lui en donnera les moyens et lui enseignera. Et Jizo promet.
Alors, Inari disparaît. La caverne perd son aura, les trouées rétrécissent. Jizo s'engage dans l'une d'elle, étouffe, se fraie un chemin jusqu'à la surface à la force de ses bras, ou de sa volonté peut-être. Il est seul, il sait que c'est ici qu'il bâtira un sanctuaire, et il se sent bien. La vision s'estompe. Le visage de Dame Mayumi apparaît.
Jizo reste encore un peu interdit, puis lui demande si elle a vu. « Non, j'ai seulement senti, vous, vous avez vu » répond-elle. Elle est fière de lui. Jizo va chercher son sabre. Nobuka lui demande à nouveau qui il. Il réfléchit un moment et, d'une voix que Nobuka ne lui connaît pas, répond : « J'ai été celui qu'on appelait Jizo ». Elle lui demande s'il a terminé de méditer et lui rend son sabre.
[A partir de ce moment là, je n'étais pas là, donc ça va être très synthétique (et potentiellement erroné)]
Association de malfaiteurs
Jizo éprouve l'envie de changer d'air et va vider un verre à l'auberge. Kayaku l'attend. « Vous avez entendu ce qu'a dit Fumi. On a plus d'or. » Jizo argue que Dame Mayumi va mieux et que la question ne se pose plus vu qu'elle affirme pouvoir marcher. Seulement, le train de vie va devoir être changé. Jizo hausse les épaules et retourne au temple. Resté seul, Kakayu conclue « Alors, on va s'en procurer ». Il sort une arquebuse courte, assez facilement dissimulable et va faire un casse chez un prêteur sur gages. Le prêteur sur gages ne demande pas son reste et Kayaku récupère de quoi fondre une dizaine de lingots. Il va trouver Nobuka Morikaze au temple, dit qu'il a de la poudre d'or et qu'il peut résoudre les problèmes de financement. Morikaze s'en trouve ravie et propose de faire des médaillons avec la poussière d'or pour les vendre au temple. Jizo, les voit se diriger hors du temple et décide de les accompagner pour assurer la protection de Morikaze en l'absence de Gempachi.
Kayaku se rend chez un fondeur et le persuade de l'aider. Les artisans se mettent à l'oeuvre et fondent des médaillons, répliques de celui que porte Kayaku. Morikaze admire le travail des deux hommes et ressent une spiritualité se dégager de leur art. Elle s'approche d'un des médaillons et le bénit. Elle demande à le garder car elle veut l'offrir à Gempachi.
Morikaze se rend ensuite au temple et propose au père supérieur de racheter les médaillons. Le temple ne fait aucune difficulté. Le père supérieur prend une petite commission. Nobuka Morikaze offre le médaillon à Gempachi et dit qu'il « l'aidera ». Gempachi sent bien que ce médaillon a quelque-chose de spirituel et voudrait refuser mais il tient trop à elle pour le faire. Kayaku est un peu déçu d'avoir la majeure partie de la somme sous forme d'une lettre de créance et met à profit le numéraire pour acheter de quoi faire de la poudre. Il prépare un feu d'artifice qu'il confie à Hakone et passe une nouvelle nuit avec elle.
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : sam. juil. 05, 2014 1:28 pm
par Macbesse
Pour ceux qui seraient intéressés et qui trouveraient que les masses de texte que j'ai envoyées sont imbitables sur forum, j'ai le CR au format .odt, deux colonnes. Bientôt, je vais même y mettre des illustrations. On ne se moque pas de vous.
Bref, si ça vous intéresse, manifestez vous.
Je peux aussi rajouter des indications techniques.
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : sam. juil. 05, 2014 7:05 pm
par Macbesse
Je mets à jour... cette séance est une sorte de round d'observation. La partie suivante décape.
Le Trésor de l'Hydre
Chemins de traverse
Gempachi n'est pas très heureux de la tournure que prennent les événements. Sur la base de prétendues visions divines et pour suivre un objectif obscur, la miko leur fait faire un détour. Les cols risquent d'être fermés et le retour à la maison compromis. Sa seule consolation est la mauvaise santé de la miko, qui pourrait mettre un terme prématuré à toutes ces sottises. Les conversations deviennent confuses. Mayumi prend Kayaku à part, lui parle de sa rencontre avec les artisans, lui dit qu'elle a cru comprendre qu'il était du métier. Kayaku, qui a l'air un peu fatigué, est heureux de savoir qu'il s'intéresse à ce qu'elle fait. Elle tente de deviner sa spécialité mais n'y parvient pas, dit qu'elle doit faire un pèlerinage et qu'elle aurait besoin de cerfs-volants pour offrir à un kami. Kayaku sort un long filament gris et l'allume. Il fait plein d'étincelles colorées et Dame Mayumi trouve cela très beau. Gempachi pense qu'il est en train de mettre le feu mais se ravise, même s'il n'est pas très rassuré. « Voilà, c'est ça que je fais » conclue Kayaku. « C'est un art subtil et une offrande princière » lui répond-elle. S'il veut bien en mettre à disposition, il s'agit de présents tout à fait dignes du kami qu'elle veut honorer. « Mais c'est interdit, pas un mot hors d'ici » lui dit Kayaku, avec un doigt sur la bouche. Dame Mayumi se dit touchée par la confiance que Kayaku lui témoigne. Elle profite alors que l'attention s'est reportée vers eux pour proposer un itinéraire impliquant de passer par la côte pour élucider sa vision avant de revenir à Yawata pour célébrer une cérémonie en l'honneur d'Hachiman qui effacera « l'injure faite à l'Empereur ».
Gempachi la rappelle à ses devoirs vis-à-vis de Yuki-Ona, auxquels elle semblait beaucoup tenir, et essaye de lui démontrer qu'elle ne pourra pas remplir ses trois objectifs, qu'elle risque au moins de fâcher un kami. Dame Mayumi a l'air on ne peut plus confiante. Yuki-Ona lui a montré qu'elle retenait la neige et c'est elle qui l'a sommée de se rendre sur la côte. Les cols seront encore ouverts. D'autre part, les serviteurs et les affaires peuvent être laissés à Yawata le temps de faire le crochet. Quant à la cérémonie, elle a de toute façon besoin d'une autorisation des autorités pour la célébrer. Le temps qu'il revienne, elles auront pris leur décision. Ne recevant aucun soutien de la part de ses compagnons, Gempachi, de guerre lasse, parie à 10 koku contre 1 que les cols seront fermés au retour. Dame Mayumi trouve le procédé peu à son goût et propose de remplacer les kokus par des services, un sourire carnassier aux lèvres. Nobuka Morikaze quitte la table. Fumi vient apaiser le conflit en faisant sonner deux fois un mon sur la table, pour signifier qu'elle parie sur la miko à 2 contre 1. Susumu pose tout ce qu'il a sur la table, soit tout de même deux bu et demi, et mise sur la miko. Jizo parierait bien mais il n'a plus rien. Quant à Kayaku, il est parti sans expliquer pourquoi après avoir glissé que Mayumi n'avait pas besoin d'autorisation pour faire une cérémonie et qu'il suffirait que des gens y assistent. Fumi sourit et enregistre les paris. Radouci, Gempachi annonce qu'il va chercher des chevaux et rejoint Morikaze.
Dame Mayumi rédige une lettre pour les autorités du sanctuaire. Elle reste assez évasive sur le kami qu'elle va honorer et présente sa cérémonie comme une occasion de clôturer le fête des artisans. Nobuka Morikaze fait alors son retour. Elle annonce que Gempachi est en train de faire harnacher les chevaux, relit la lettre et la trouve bonne. Dame Mayumi lui confie que leur dernière conversation lui a inspiré cette initiative. Kayaku fait enfin son apparition. Non seulement il accepte le projet de Mayumi sans rechigner, mais il dit avoir fait en sorte que la nouvelle de la tenue d'une nouvelle cérémonie se réponde. Il a tout de même l'air inquiet, à cause du vent, dit-il. Gempachi annonce que les chevaux sont prêts au départ. Mayumi répond qu'elle doit prier. Elle fait un rituel en l'honneur du vent et lui demande de rester paisible jusqu'au lendemain. La flamme d'une bougie est soufflée. Mayumi l'interprète comme un bon augure. Kayaku est presque rassuré.
La compagnie prend la route puis, au lieu d'aller au nord vers la Barrière, que beaucoup semblent vouloir éviter, prend des chemins de traverse. Susumu n'a aucune difficulté à s'orienter, et Mayumi lui fournit de temps en temps quelques indications supplémentaires. Le pas est de mise, personne n'ayant vraiment l'expérience des chevaux, même pas Gempachi qui a pris la tête de l'expédition. Il lui permet toutefois, par sa prudence, de progresser régulièrement et sans heurts. Fumi et Morikaze voyagent en croupe. Mayumi a tenu à voyager en selle et ne semble pas éprouver de difficultés particulières. Après avoir traversé des pleines et avoir fait halte dans un hameau sordide, les cavaliers entrent dans une vaste forêt. Une petite rivière y court et ils ne trouvent pas de passeurs. Gempachi repère un gué mais il est difficile. Un trou d'eau peut faire perdre pied aux chevaux. Il commence à installer une corde pour faciliter le passage. Pendant ce temps, Dame Mayumi fait une offrande aux kamis de la rivière pour qu'ils favorisent leur passage. La traversée se révèle moins difficile que prévu. Le trou, songe Gempachi qui accompagne chaque passage, semble s'être résorbé, comme comblé par quelque-chose de vaseux. La traversée de Morikaze est particulièrement facile et elle se sent comme portée par l'eau. Dame Mayumi sent que des mains lui agrippent les jambes pour la soutenir. Son cheval semble marcher sur un terrain parfaitement plat. Gempachi constate que son aide est inutile. Plutôt que de reconnaître les mérites de la miko, il bougonne qu'elle a dérangé les kamis pour rien au vu de la facilité de la traversée.
Sur l'autre rive, Kayaku prépare un feu mais il s'arrête de temps en temps pour observer la traversée des femmes, quasi-nues. Il leur propose de venir se réchauffer autour et commence à les détailler. Nobuka Morikaze est très mince, voire maigre, et d'une constitution frêle, le genre de femmes qu'il lui vient l'envie de protéger. Dame Mayumi a un corps beaucoup plus en rondeurs et très travaillé, d'un blanc de neige qui exclut définitivement l'hypothèse du maquillage. Dame Mayumi se sait observée et redresse sa poitrine, qu'elle sait ferme et engageante. Après s'être fait la réflexion que le froid conserve, Kayaku s'aperçoit que les tétons pointent et a un début d'érection. Sa contemplation est interrompue par Gempachi qui vient éteindre le feu à coups de pied. Le ton monte entre les deux hommes. Gempachi lui reproche de ne prendre aucune précaution alors que les gaijins sont peut-être sur la même piste qu'eux. Kayaku finit par céder, fâché. Les femmes sont parties se rhabiller dans les herbes. Gempachi a lui aussi eu le temps de remarquer quelque-chose. Nobuka Morikaze a une vilaine cicatrice dans le dos, et c'est à n'en point douter un coup de lance qui lui a perforé le poumon, le genre de blessure dont on ne se relève pas. Il n'en dit mot. Il remarque aussi que Mayumi n'a pas un corps marqué par l'ascèse comme il s'y serait attendu, encore moins un corps de mourante. Il se dit qu'elle n'a pas toujours voyagé en palanquin et continue sûrement à entretenir son corps de manière raisonnée. Il regarde aussi les hommes et les trouve suffisamment athlétiques, chacun à leur manière, pour mener à bien ce qu'ils ont à faire. Il a beau dire qu'il n'accorde aucun crédit aux dires de Mayumi, il a le sentiment diffus d'une mission à remplir et, surtout, la présence des gaijins et l'épisode de la carte du samouraï l'ont mis en alerte.
Quelques heures plus tard, la côte est en vue et le groupe fait halte. Nobuka Morikaze a senti une présence sur une pierre. Un signe est gravé, presque invisible. Elle demande du sake à Gempachi, qui lui tend, non sans stupeur, et fait une libation à la pierre. Le signe apparaît beaucoup plus distinctement. Il s'agit d'une sorte de demi-lune d'où émergent deux rangées de huit traits parallèles. Dame Mayumi vient l'examiner et ne trouve pas de lien avec sa vision.
Susumu, pendant ce temps, examine la piste et trouve des traces de sabot particulièrement grandes, comme celles que laissent les chevaux gaijin. Il pense que les gaijin ont deux jours d'avance mais il part en éclaireur pour vérifier que le chemin est sûr. Une heure plus tard, il revient et confirme qu'ils ne risquent rien. Les gaijin sont partis après avoir fait halte dans une clairière, dans laquelle ils pourront eux-mêmes installer leur campement sans risquer de les voir revenir, du moins cette nuit. Les gaijin ont effacé une partie de leurs traces. On aurait pu penser qu'ils ne sont que deux mais ils sont en réalité plus d'une douzaine.
Les inquiétudes de Gempachi ont été renforcées et il essaye de soutirer des informations à Mayumi à propos des gaijin, mais elle dit très franchement qu'elle n'a vu que la partie spirituelle. Sur ce plan, la rencontre avec les avatars d'un esprit très puissant est d'ailleurs à prévoir une fois sur place. Gempachi soupire. Mayumi ajoute que les gaijin relèvent davantage de sa compétence et il n'en est que plus las. Susumu essaye aussi de comprendre ce qui a bien pu pousser la miko, qui semble ne rien prévoir, dans cette direction. Elle lui fait alors le récit de sa vision, qu'il écoute émerveillé. La fin du chant de vent, quand apparaissent les murs cyclopéens sur la côte, le trouble. Il ne sait pas s'il doit les considérer comme bons ou mauvais. Dame Mayumi pense qu'ils sont plutôt mauvais signe, comme si le monde se dirigeait inexorablement vers la rupture du lien avec les kamis. Elle conclue que c'est une perspective de long terme, qui ne se révélera que dans de nombreux cycles. Elle ne doit pas les dissuader d'agir maintenant, sans compter qu'il s'agit peut-être d'une forme d'avertissement. La conversation terminée, il repart explorer les environs. Avec Gempachi, il convient qu'il doit commencer à partir à sa recherche s'il n'est pas rentré d'ici deux heures.
Nobuka Morikaze annonce qu'elle a trouvé une autre marque, la même. Cette fois, Dame Mayumi prend vraiment le temps de l'examiner. Elle dit que l'esprit qui l'a tracé est étranger mais qu'elle ressent qu'il s'agit d'un nombre, peut-être huit, comme les deux rangées de traits verticaux.
Les deux femmes expriment leur dégoût pour cette marque étrangère et elles effacent sa marque spirituelle sur la pierre.
Pendant ce temps, Susumu s'enfonce profondément dans la forêt. Il rejoint une statue de sanglier d'un style qu'il ne reconnaît pas, sûrement une divinité gardienne. Une marque a été tracée sur sa truffe et Susumu trouve sa présence blasphématoire. Les traces des chevaux gaijon continuent bien dans cette direction, comme si les marques servaient à l'orientation alors qu'elles sont difficilement visibles depuis le chemin. Il va pour rentrer au camp, se sait en retard, d'autant plus que la nuit tombe. Il croise une apparition flottante, une impression bleue, un genre de méduse qui vogue vers lui et il court de toutes ses forces pour la distancer. Gempachi, de son côté, s'inquiète et part à sa recherche. A un quart d'heure de marche du camp, il reçoit une pomme de pin sur le torse, puis une deuxième. Leur trajectoire est rasante. Il appelle Susumu, lui dit d'arrêter de faire le con. Susumu sort d'un bosquet et lui raconte ses aventures. A la mention de la méduse, Gempachi se dit que la miko fait vraiment de gros dégâts sur des hommes qu'il pensait sains d'esprit. Ils rentrent au camp. Là, l'histoire de Susumu est écoutée avec intérêt. Dame Mayumi veut aller voir la méduse sur le champ. Gempachi lui oppose un non ferme et la conversation s'arrête là.
Kayaku, toujours bougon depuis l'épisode du feu, prépare sa couche et laisse ostensiblement une place à côté de lui, en sus de celle qu'il réserve à son singe. Gempachi vient exprès s'y installer et commence à jouer avec le singe. Quand Kayaku parvient enfin à les déloger, Gempachi constate que Dame Mayumi, Jizo et Susumu sont partis dans la forêt. Kayaku se moque de lui mais déchante vite. Fumi vient s'installer à côté de lui. Nobuka Morikaze s'est déjà endormie.
Susumu guide Mayumi et Jizo vers le lieu de la rencontre. La méduse s'approche mais ne semble pas hostile. Dame Mayumi recommande à Jizo d'ouvrir son esprit. Elle engage la discussion et apprend la présence d'une colonie entière qui bientôt les rejoigne. Plus d'une trentaine de méduses flottent dans l'air et émettent des signaux colorés. Elles sont visiblement perdues et n'ont pas vu la marée depuis longtemps. Il est donc difficile d'en obtenir des renseignements convenablement datés mais la présence de gaijins est confirmée et il semble qu'il faille plutôt en compter une quinzaine. Les méduses ont eu un contact avec eux et « se sont bien payé leur tronche », au sens propre du terme. Mayumi convient d'un assaut commun en cas de retour des gaijin dans la forêt. De son côté, Jizo tente d'entrer en contact avec les méduses. Il parvient à les entendre mais sa propre voix est brouillée, comme déformée par un mur d'eau. Alors se manifeste une présence inattendue. Il s'agit de Nobuka Morikaze. Jizo croyait qu'elle dormait au camp mais son esprit est pourtant là qui flotte près des méduses. Jizo constate que Mayumi ne s'est pas aperçu de sa présence, à moins qu'elle ne fasse semblant. Morikaze lui propose de lui servir d'interprète et Jizo commence lui aussi à s'entretenir avec les méduses. Ils apprennent que les marques étaient là depuis longtemps, bien avant le passage des gaijin. Petit à petit, les sujets de discussion se raréfient et Dame Mayumi donne le signal du départ. Son esprit resté seul avec les méduses, Nobuka Morikaze convient qu'elles les guideront le long des marques.
De retour au campement, Gempachi et Mayumi ont une conversation animée. Susumu et Jizo ont l'air profondément marqués par l'expérience et confirment les propos de la miko. Gempachi enrage d'autant plus et conclue à une mauvaise influence, après avoir fait l'hypothèse d'une consommation d'hallucinogènes. Kayaku ronfle. Nobuka Morikaze est réveillée et prend Jizo à part. Il ne comprend toujours pas comment elle était là. Morikaze ne répond pas à cette question et le met en garde. Il a eu un contact avec des esprits bénéfiques en présence de deux personnes aptes à contrôler la situation, mais le monde des esprits est très dangereux et il doit s'aviser de ne pas le faire seul. Il est à une étape de sa vie où il quitte une voie pour entrer dans une autre et il est encore fragile. Jizo la remercie et se demande en son for intérieur pourquoi Dame Mayumi ne lui a rien dit de tel.
Cette dernière s'éloigne encore une fois le temps de méditer. Elle perçoit les signes d'une vive agitation, peut-être à Yawata, une impression de chaleur et de joie, puis à la vision d'une eau noire et d'un calme angoissant qui ne peut toutefois pas étouffer un sentiment d'espoir.
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : sam. juil. 05, 2014 8:30 pm
par Macbesse
Comme une odeur de poudre
Juste avant de se réveiller, Kayaku rêve à l'odeur de la poudre. Il espère que ce n'est pas un mauvais présage pour le feu d'artifice. Une nouvelle fois sevré, il est toujours de méchante humeur et ne parle pas de sa nuit.
La petite compagnie dépasse bientôt la statue de sanglier. Nobuka Morikaze a un frisson d'horreur en voyant la marque blasphématoire. Dame Mayumi, qui est dégoûtée par toute l'énergie corrompue qui s'écoule de la statue, s'aperçoit de cette réaction. Elle fait remarquer à Morikaze que les gaijin auront sûrement un prêtre chrétien avec eux. Morikaze dit qu'elle est prête à l'affronter. Son corps s'affaissera peut-être mais il ne faudra pas penser qu'elle est morte. Il faudra l'emporter et le protéger. Dame Mayumi demande à Gempachi de faire halte pour qu'elles prennent le temps de nettoyer cette horreur. Gempachi lui répond qu'elle ne peut pas s'occuper de tous les esprits, qu'il y en a des milliers et qu'ils vivent très bien sans elle. Susumu intervient et fait remarquer qu'il sera toujours temps de revenir plus tard. Gempachi se saisit de l'argument et met en avant le blasphème bien plus grand que les gaijin s'apprête à commettre. Ces arguments font fléchir Dame Mayumi. Pendant le trajet, Gempachi entend de temps en temps Nobuka Morikaze lui donner des indications sur le chemin mais il n'en tient aucun compte et il s'en tient à la piste des chevaux gaijin. En fin de matinée, ils débouchent enfin sur un promontoire. Mayumi reconnaît la côte et désigne l'endroit où se situe, selon elle, l'incarnation. Elle dit aussi voir de la fumée et des oiseaux tourner. Susumu confirme et conclue que le sang a coulé cette nuit, ou plutôt au petit matin. Jizo et Gempachi hochent la tête d'un air approbateur. Kayaku est surpris et se tourne vers Dame Mayumi, qui lui répond qu'elle pensait être engagée dans une quête spirituelle et pas dans un conflit armé. Peut-être s'agit-il bien d'empêcher un blasphème ? Elle a alors un éclair de compréhension et se tourne vers Gempachi pour lui dire que les gaijin sont peut-être à la recherche d'un des trois objets sacrés du Trésor Impérial, peut-être l'Epée, mais le Bouclier n'est pas non plus à exclure. Gempachi hausse les yeux au ciel. Dame Mayumi dit qu'elle n'en est pas encore tout à fait sûre, mais la puissante présence qu'elle a sentie quand elle écoutait le chant du vent pourrait y correspondre, et le signe sur la pierre va peut-être dans ce sens. Bien que Gempachi ait officiellement rejeté l'hypothèse, il prend désormais en compte la possibilité d'un débarquement, que ce soit en soutien ou pour récupérer l'objet. En outre, l'idée d'utiliser les grenades de Kayaku dans la grotte est abandonnée.
Susumu part à nouveau en éclaireur et repère rapidement le village. Il a été dévasté. L'odeur de la poudre et de la mort est partout. Il y a des morts de tous âges et de tous sexes dans la rue et dans les maisons. Il repère les gaijin. La moitié d'entre eux est armée d'arquebuses et il y a un homme en noir qui semble donner des ordres. Ils s'engouffrent dans une grotte. D'après les inscriptions sur le portail, elle est dédiée à Susanoo.
Pendant ce temps, Nobuka Morikaze s'est endormie à cheval. Elle tient toujours fermement Gempachi par la taille. Aussi ne s'inquiète-t-il pas. A son réveil, elle décrit précisément le village, la position de Susumu et les gaijin. Au retour de l'éclaireur, les deux récits concordent et Gempachi est un peu mal à l'aise.
Susumu pense que les gaijins sont tous entrés dans la grotte et qu'ils en ont pour longtemps. Quand il mentionne Susanoo, Dame Mayumi confirme que les gaijins sont à la recherche de l'Epée ou du Bouclier, plutôt de l'Epée, à cause du dragon à huit têtes et à huit queues dans lequel Susanoo l'a trouvée.
Gempachi les presse de descendre au village, où ils cherchent des survivants. Ils ne trouvent que des cadavres soigneusement achevés. Ils sont plus de soixante, ce qui correspond aux deux tiers de la population possible du village d'après Jizo, expert en la matière. Susumu a l'idée de chercher un puits, et Morikaze s'endort à nouveau. Dans les galeries souterraines, trois femmes épuisées, affamées et terrorisées par le massacre de leurs proches ont alors une conversation avec un esprit qui dit venir à leur secours mais convient ne pas être celui qu'elles ont appelé. C'est la plus âgée qui parle. Elle est prêtresse de Susanoo et s'appelle Sadako. Elle questionne cet esprit pour savoir d'où il vient et lui dit qu'elle trouve son apparence humaine étrange. Les deux jeunes filles, d'une douzaine d'années, Aki et Kaori, ne disent rien. L'esprit parvient finalement à les apaiser et elles accueillent favorablement Jizo qui est venu à leur rencontre. Tous finissent par descendre dans le puits car une galerie mène directement au cœur du sanctuaire de Susanoo où sont entrés les gaijins. Ils auront eu à passer par un chemin beaucoup plus long et difficile. Les femmes ajoutent que la jeune miko, Tomoe, est entrée dans le sanctuaire pour y célébrer un rituel peu avant l'arrivée des gaijins.
Jour de colère
La galerie débouche sur une plate-forme. A leur arrivée, ils entendent une litanie, un appel à Celui d'En-Dessous, et puis elle cesse. La vue est imprenable. La grotte est vaste, soutenue par d'impressionnantes formations calcaires, et se termine par un lac d'eau noire éclairé par un puits de lumière. La majorité des gaijin, soit une bonne dizaine, est dans l'eau. Ils en sortent joyeusement des cailloux. Quatre sont restés sur la berge pour surveiller les armes sur la berge, tandis que le prêtre et son acolyte ont franchi le lac et semblent être au cœur du sanctuaire, devant ce qui semble être des peintures murales. Non loin du bord, une vieille prêtresse gît sans connaissance.
Les hommes conviennent d'un plan simple. Ils avanceront discrètement. Susumu, Jizo et Gempachi abattront chacun un homme tandis que Kayaku jettera les arquebuses à l'eau. Le quatrième homme sera abattu par le plus rapide d'entre eux. Une fois cela fait, ils n'auront qu'à se mettre en ligne pour tuer ceux qui tenteront de sortir. Mayumi et Morikaze assureront la sécurité des femmes et s'assureront que tout se passe bien sur le plan spirituel. Les hommes se fondent facilement dans l'obscurité et arrivent à portée de leur cible quand un puissant gong retentit, comme venant du plafond de la caverne. Gempachi maudit intérieurement la miko mais profite de l'inattention de son adversaire qui a levé le nez pour lui planter sa lance dans le cœur en criant « Pour Susano ! ». Il le déporte sur le côté pour éviter que le sang ne souille le bassin. Jizo n'est pas troublé par le gong et tranche son adversaire en deux, puis le pousse sur le côté pour éviter que le sang ne souille le bassin. Il enchaîne sur le quatrième homme, qui a l'air mieux habillé que les autres, et l'assomme d'un violent coup sur la tempe. Susumu voit dans le gong une intervention divine. Son adversaire lève la tête et lui offre une gorge qu'il s'empresse de trancher. Il demande l'aide de Susano [Achat définitif : Béni par les kamis ; dépense d'un point de karma] et parvient miraculeusement à faire gicler le sang vers l'intérieur de la grotte pour éviter que le sang ne souille le bassin. Kayaku atteint les arquebuses et les disperse vers l'intérieur de la caverne, non pour éviter qu'elle ne souillent le bassin mais parce qu'il serait dommage de perdre un si beau travail. Sur la plate-forme, Dame Mayumi a délimité un espace avec des rubans. Elle a une main sur la paroi humide, une main crispée sur le marteau avec lequel elle a frappé le gong. Plus tard, elle dira qu'elle a senti des secousses et la colère de Susano se diriger vers la grotte. Elle dira qu'elle est intervenue avant qu'il ne leur arrive le pire. Pour l'instant, son visage est déformé par la souffrance et elle dit à haute voix « Tes ennemis sont dans l'eau ! ». Ensuite, elle hurle « Sortez de là !! ». A ce moment là, Gempachi s'approche de l'eau pour menacer les gaijin de sa lance et sent que le ciel devient sombre, puis noir. Il n'a rien entendu mais il fait vite demi-tour. Puis plus personne ne voit ni n'entend plus rien. Le tonnerre est trop assourdissant, les éclairs trop aveuglants. La terre tremble, la caverne tremble, des rochers tombent. Nobuka Morikaze ne pense plus à rien, ou plutôt elle pense au vide, à un non-lieu, elle pense qu'elle n'est pas là. Les hommes courent éperdument vers la plate-forme. Dame Mayumi s'effondre. Et puis le silence revient. L'eau est noire, on ne voit plus un gaijin hors ceux qui étaient sur les berges.
Re: [CR] Tenga - La Montagne révoltée
Publié : dim. juil. 06, 2014 12:33 pm
par Macbesse
Conclusion de la séance et du scénario. J'ai fait de petites modifications dans les précédents posts.
Les yeux dans le miroir
Gempachi dit qu'il faut partir et demande à Dame Mayumi si elle peut marcher. Elle répond qu'elle peut mais elle descend vers le lac au lieu de se diriger vers la sortie. Jizo la suit, puis Kayaku. Morikaze et les trois femmes sont toujours en prières. Dame Mayumi sent que le sol tremble quand elle arrive près du lac. Ce n'est pas hostile, l'esprit manifeste sa présence. Par contre, les tremblements se font plus forts quand Jizo et Kayaku s'approchent. Mayumi leur demande de rester en arrière. Elle se prosterne devant le lac et commence à parler à Susanoo. Elle n'est pas tout à fait sûre de sa bienveillance et craint une réaction violente, louvoie, reste évasive, et finit avoir la réponse à la question qu'elle n'ose poser. Des trois Symboles, c'est le Bouclier, le Miroir, qui est au fond du lac. Mayumi est un peu surprise que ce soit Susanoo qui ait la garde de l'objet qui servit à délivrer sa sœur Amaterasu de la caverne dans laquelle elle était enfermée mais n'en dit mot. Le kami est, mais peut-on attendre autre chose de Susanoo, en colère car le peuple Jomon qui devait veiller sur lui se meurt. Il conviendrait de réunir ceux qui ont essaimé dans l'archipel pour qu'à nouveau le Bouclier soit en sécurité. Dame Mayumi ne veut surtout pas s'engager dans une quête de cette ampleur et lui tient un autre langage. Le lien entre les kamis et les hommes se délite. Susanoo, que cet état de fait irrite, déclare que les hommes adorent des idoles, que la plupart des Symboles impériaux présentés aux hommes sont des faux. Dame Mayumi lui demande s'il souhaite que le Miroir soit porté au grand sanctuaire d'Ise, mais Susanoo semble peu enthousiaste, comme s'il hésitait, ce qui est rare pour un kami d'ordinaire si tranché. Mayumi n'a pas très envie d'insister sur ce point, d'autant qu'elle a des engagements contraignants. Elle préfère aussi consulter ses compagnons et Yuki-Ona avant de se lancer dans un périple hasardeux, même si Ise n'est pas très éloignée, et l'urgence semble être passée. Elle demande à voir le bouclier. Susanoo lui accorde cette faveur. Dame Mayumi se lève et disparaît dans l'eau noire. Elle finit par s'approcher du disque de bronze et se sent bien à ses côtés, ou plutôt elle se sentirait bien s'il n'y avait cette paire d'yeux jaunes qui se reflétait dedans, des yeux fendus qui ne sont pas les siens.
En pleine contemplation, elle pense à Jizo et demande à Susanoo s'il peut le voir aussi mais Susanoo répond brusquement qu'il n'est pas prêt. La vision se dissipe et Mayumi ressent le froid et l'humidité, s'aperçoit qu'elle n'a pas pied et cherche de l'air. C'est la main de Kayaku qui la sort de l'eau.
Le sol ne tremble plus. Dame Mayumi recrache de l'eau et dit que Susanoo est parti. Kayaku lui demande pourquoi elle s'est jetée à l'eau et ajoute, en son for intérieur, avec ses vêtements. Mayumi répond qu'elle a vu le Miroir de l'Empereur, celui qui apporte la Sagesse. Non, elle n'a pas songé un instant au risque, quel risque d'ailleurs ? Gempachi profite de la confusion pour ramasser plusieurs kilos de cailloux et les glisser dans ses larges manches. Susumu et Kayaku rassemblent les arquebuses et Mayumi est confiée à Jizo. Elle est un peu gênée par le poids de ses vêtements, trempés mais semble plus vigoureuse que jamais et Jizo n'a finalement pas grand-chose à faire, bien heureusement car il doit transporter le gaijin. La Gempachi se charge de la vieille prêtresse du sanctuaire. Elle est vivante et reprend peu à peu connaissance.
Le soir venu, Mayumi raconte sa vision et parle du Miroir. La révélation que le Miroir conservé à Ise est un faux fait l'effet d'un coup de tonnerre sur l'assemblée. Gempachi est particulièrement sceptique et son doute ne fait que croître quand Dame Mayumi affirme que cela fait donc deux Symboles perdus pour les hommes. Elle pensait d'ailleurs trouver l'Epée. Dame Mayumi serait donc en train d'affirmer que l'Epée est un faux, que les prêtres seraient au courant et l'exposeraient tout de même ? C'est effectivement une réplique, forgée il y a environ trois-quatre siècles, et c'est un fait connu, enfin, connu de ceux qui doivent savoir. C'est une vieille lune, et ce qui est vraiment nouveau, c'est de savoir que le Miroir est aussi une réplique, et que l'original est ici. Gempachi insiste, il croyait les trois symboles impériaux sous bonne garde au Palais impérial. Pas du tout, réplique Mayumi. Seule l'Amulette est au Palais Impérial. Elle est d'ailleurs authentique. La réplique de l'Epée Kusanagi, que Susanoo a trouvée dans le corps de l'hydre, le dragon à huit têtes et huit queues, est à Atsuta-jingu. Elle est vénérable et peut être aussi considérée comme sacrée. La réplique du Miroir est au sanctuaire d'Ise. Gempachi n'en croit toujours pas ses oreilles et Dame Mayumi répond qu'il n'aura qu'à se renseigner sur le Dit des Heike s'il ne la croit pas. La perte de l'Epée y est racontée en détails. Gempachi ne l'a pas écoutée et préconise de prévenir les gens du sanctuaire du kami. A partir de ce moment là, Dame Mayumi devient très imprécise. Ce ne serait pas la volonté du kami, et puis elle ne les connaîtrait pas assez. Gempachi – mais il est le seul dans ce cas – a de plus en plus la conviction que Mayumi ment sur toute la ligne, sans pouvoir en apporter la preuve décisive. Mais alors, que voudrait Susanoo ? Il souhaiterait voir l'idole remplacée par le Miroir, mais n'aurait pas été clair dans sa volonté. La contradiction dans le discours est flagrante et Mayumi doit expliquer que l'idée est venue d'elle. Elle finit par lâcher qu'il a mentionné le peuple Jomon, gardien de son sanctuaire. La vieille prêtresse, qui ne perd rien de la conversation, se raidit en entendant ce nom. Il faudrait le rassembler, mais c'est un travail long et difficile et elle a préféré ne pas s'engager, et ne pas les engager sans les consulter.
Nobuka Morikaze ne lâche pas un mot de toute la conversation. Une fois que les débats sont terminés, elle prend Dame Mayumi à part et dit sur le ton le plus sec possible :
« Je vais vous dire ce que j'ai dit à votre élève. Le monde des esprits est dangereux. Faites attention aux risques que vous prenez et que vous faites prendre aux autres. »
Dame Mayumi ne comprend pas à quoi elle fait allusion et lui demande de s'expliquer. Morikaze trouve la manœuvre osée de la part de quelqu'un qui a délibérément appelé Susanoo. Mayumi lui réplique qu'il était déjà présent et que sa colère allait s'abattre de toute façon. Elle n'a fait que la canaliser, et Morikaze doit apprendre qu'en certaines circonstances, c'est ne rien faire de ses dons qui fait courir des risques autres. Le ton monte encore et la jeune fille réfute la prémisse. L'esprit était certes présent mais son attention n'était pas focalisée sur la grotte, il aurait été possible de laisser leurs compagnons finir le travail. C'est justement en prenant contact que Mayumi lui a montré le chemin, ce qu'elle nie. En effet, la vieille miko avait appelée Celui d'En-Dessous – Celui, pas le Seigneur, réplique Morikaze – argument rejeté car c'est un de ses avatars. Susanoo se rapprochait, elle a senti sa colère monter avant d'installer ses rubans... il serait vain d'énumérer les arguments et contre-arguments. Les deux femmes sont convaincues de détenir la vérité sur l'événement et leur dispute n'est interrompue que par l'arrivée de Kayaku. Dame Mayumi lui sourit et s'excuse car elle doit parler à la prêtresse de Susanoo. Nobuka Morikaze a le visage fermé, se met en position du lotus et sort sa flûte. Kayaku essaye de lui parler mais se heurte à un mur. Il se dit qu'elle est encore bien gamine.
Pendant ce temps, Gempachi a discuté avec la prêtresse de Susanoo et lui a proposé de disposer du prisonnier. Attaché à un arbre, il n'a pas réagit aux projets de torture énoncés à haute voix par Jizo et ils en ont conclu qu'il ne parlait pas japonais. La prêtresse s'est dite très reconnaissante de cette attention. Susumu est revenu de la grotte avec les chevaux des gaijins. Il a trouvé des livres. Il voudrait garder le prisonnier et la tension monte vite avec la prêtresse. Dame Mayumi arrive sur ces entrefaites et signale qu'une parole a été donnée, qu'il faut respecter. Elle engage la conversation sur le peuple Jomon. La vieille miko ne sait pas où sont les autres. Ils n'ont pas de contacts avec l'extérieur, ne voient jamais d'étrangers. Au cas où elle mentirait Dame Mayumi dit qu'il serait utile de savoir où sont les autres pour qu'ils puissent protéger le Miroir de Susanoo. La vieille miko dit qu'elle ignorait que le sanctuaire qu'elle avait sous sa garde conservait ce Trésor et répète qu'elle ne sait pas où sont les autres. L'isolement et le secret les protégeaient, ils n'avaient aucune raison de le rompre.
Dame Mayumi constate qu'elle n'est toujours pas fatiguée quand elle va se coucher. Elle craignait de s'effondrer à nouveau en crachant du sang, mais sa pneumonie chronique ne se manifeste pas. Au lieu de cela, elle se sent bien dans son corps, rajeunie, épanouie. Elle remercie Yuki-Ona de sa générosité et s'endort.
Pendant la nuit, Susumu, Morikaze et Mayumi font le même rêve. Ils voient des yeux, jaunes et fendus, danser dans le ciel. Comme elle n'a rien raconté à ce sujet, seule Mayumi comprend que par ce rêve, Celui d'En-Dessous lui montre qu'il la connaît et l'accepte.
Ecoute le chant du vent
A l'aube, Dame Mayumi commence déjà ses ablutions rituelles. Devant le feu, les conversations vont bon train et elle doit isoler ses compagnons pour leur indiquer la suite des opérations. Elle compte faire un pèlerinage au Kami-Kaze sur la corniche. Elle l'a promis et ce sera pour eux une occasion d'écouter le chant du vent, la chanson de Jimmu-Tenno. Nobuka Morikaze se déride et la remercie chaleureusement. Kayaku fournit les offrandes, comme convenu à Yawata. Susumu est très heureux et s'imagine déjà embrassant tout l'archipel d'un regard à travers le temps. Gempachi essaye de trouver une excuse pour échapper à ses devoirs mais Morikaze est là pour le rappeler à l'ordre. Jizo, enfin, commence déjà à prier car Mayumi lui a annoncé qu'il serait officierait avec elle et serait placé à côté d'elle dans le sanctuaire, qu'ils délimiteront ensemble. Par politesse, Dame Mayumi propose à la vieille miko d'assister, mais elle refuse catégoriquement.
Bientôt, le cortège se met lentement en route. Dame Mayumi prie à haute voix le Kami-Kaze. Jizo et Morikaze l'accompagnent. Kayaku distribue des filaments gris qui sentent la poudre aux pèlerins.
Au sommet de la corniche, Dame Mayumi et Jizo délimitent un sanctuaire et se tournent face à la mer. Il y a du vent, mais Kayaku allume sans mal les filaments qui se mettent à produire des étincelles très vives. Accompagnée par Jizo, Dame Mayumi se met à chanter, suivant un rythme lent, très lent. Gempachi s'apprête à sommeiller mais Morikaze veille au grain. [Utilisation du Point de Confiance]. Il lui semble bientôt, aussi fou que cela puisse paraître, que le chant de la miko répond au souffle du vent, comme si le souffle du vent avait des rythmes secrets qu'il n'avait jusqu'à présent jamais perçus, comme si la miko était en train de moduler un contre-champ, et puis il prend conscience que le vent est en train de parler à Dame Mayumi, qu'il est en train de lui faire fête, de lui dire qu'il est heureux d'enfin la revoir, et il est autant surpris d'entendre le vent que de le voir considérer la miko comme un interlocuteur valable. Il sent aussi la présence des autres ; ils sont là et perçoivent aussi le chant du vent. Dame Mayumi présente Jizo, elle dit qu'elle est heureuse de faire ce pèlerinage et de le revoir, qu'il lui a manqué, qu'elle a compris ce que représentaient les cycles et qu'elle lui est reconnaissante pour tout ce qu'il lui a enseigné. Elle a amené d'autres pèlerins pour lui rendre hommage et aimerait que le vent chante pour eux la chanson de Jimmu Tenno. Les chandelles magiques de Kayaku semblent ne pas vouloir s'arrêter de se consumer, la scène est lumineuse. Le vent accepte de chanter, mais un seul cycle, pour ne pas perturber les jeunes esprits. Il revient aux origines du monde et s'écoule de son souffle la perfection du récit. Il raconte la querelle entre Susanoo et sa sœur, ses offenses, et comment Amaterasu s'enferma dans une caverne et engendra la Nuit perpétuelle, et comment Susanoo fut banni du Ciel et se réfugia en Izumo. Il raconte comment Susanoo fit la connaissance de Kushinada et de ses vieux parents, et comment Kushinada, la huitième fille avait échappé au destin de ses sœurs dévorées par le dragon à huit têtes Yamata no-Orochi. Il raconte comment Susanno berna le dragon en perçant la palissade du village de huit trous donnant sur huit tonneaux de saké, comment le dragon but les huit tonneaux et comment Susanoo profita de sa faiblesse pour lui trancher ses huit têtes. Il raconte comment Susanoo trouva dans le corps de Yamato no-Orochi l'épée Kusanagi, comment il l'offrit à sa sœur Amaterasu et comment ils se réconcilièrent. Il raconte comment Susanoo épousa Kushinada et fonda la dynastie d'Izume, et comment Amaterasu offrit Kusanagi à son petit-fils Ninigi, avec le Miroir et l'Amulette. Le vent a fini sa chanson. Il se retire. Dame Mayumi le remercie et le salue. Tous restent longuement recueillis. Les chandelles finissent enfin de se consumer. Gempachi va au bord de la falaise, verse un bouchon de saké et l'offre au kami. Ensuite, il s'en sert un, et il a l'impression d'avoir bu toute une bouteille. Il se sent bien. Cela faisait longtemps que cela ne lui était pas arrivé. Il est tiré de ses pensées par Susumu, qui réclame son coup de saké pour encaisser ce qu'il a vu.