Bonne lecture à toutes et tous !

1.) Quoi que c'est ?
Jouer des parties de Jeu de Rôle aux éditions Lapin Marteau avec du @Brand et plein d'autres personnes dedans.

2.) Vous en avez entendu parler où pour la première fois ?
Probablement ici, même si ce guide avait bénéficié d’une large publicité ailleurs (JDR MAG, CB, Di6DENT, FIX etc.)
3.) Achat compulsif, impulsif ou réfléchi ?
Compulsif : le but était évidemment de constituer une série complète de cette collection du Lapin Marteau (commencée avec Mener des Parties de Jeu de Rôle, mais pas encore lu pour celui-ci).
4.) Vous pensiez trouver quoi ?
Un livre pour améliorer sincèrement mes façons de jouer, par rapport aux tables et jeux où je suis actuellement purement joueur. Donc sur mes attentes et la façon dont je m’étais projeté par rapport à ce livre, plutôt des conseils sur son roleplay et comment camper son personnage, ainsi que les interactions pendant les parties avec les PJ et les PNJ. Pour reprendre les termes de @Vorghyrn , une sorte de manuel de l’Actor’s Studio appliqué au JDR, notamment inspiré par les Actual Plays, et plutôt destiné à un public déjà expérimenté.
Accessoirement, j’étais aussi curieux intellectuellement de la réussite de l’exercice car comme le livre le dit lui-même, on trouve certes profusion de sources pour accompagner les MJ, mais celles-ci sont bien plus éparses ou sommaires quand il s’agit de focaliser sur les joueurs.
5.) Vous avez trouvé quoi ?
Pratiquement pas ceci, première cause du malentendu entre ce livre et moi... Sur de nombreux aspects, j’ai lu un livre où le titre Préparer des Parties de Jeu de Rôle aurait été plus approprié que Jouer des Parties de Jeu de Rôle, puisque de nombreux éléments comme le Contrat Social ou le comportement autour de la table reviennent, de façon parfois répétitives malgré la diversité des articles.
Avant d’aller dans le détail de ce constat sévère, j’ai pris le temps de lire attentivement les critiques, notamment de @Nébal @Vorghyrn @batronoban, afin de les recroiser puisque mon avis est bien plus négatif, et que vous pourrez donc reconsulter avec intérêt :
• https://www.le-thiase.fr/theorie-rolist ... teau-2017/
• http://nebalestuncon.over-blog.com/2018 ... -role.html
• http://autrecoteecran.blogspot.com/2019 ... -role.html
• https://www.legrog.org/jeux/documentati ... de-role-fr
Comme la critique sur le Thiase, je vais aussi profiter de cette entrée en matière pour évacuer d’emblée le choix retenu du « féminin neutre ». Là encore, je vais profiter de renvoyer vers le long et bien construit argumentaire que @Brand avait produit pour développer ce choix éditorial de Lapin Martin : http://www.lapinmarteau.com/cest-lhisto ... e-joueuse/. En ce qui me concerne, je vais dire aussi diplomatiquement que Le Thiase que ce n’est pas mon goût. Sur un livre de cette épaisseur, et qui demande de se poser à plusieurs reprises par rapport au propos parfois dense, ce choix peut en effet ne pas faciliter la lecture sur comment on réagit par rapport à ce type de syntaxe.
Puisqu’il s’agit d’une somme d’articles, procédons maintenant au cas par cas. Déjà, je me suis très moyennement retrouvé dans le découpage imposé entre Les bases et Les techniques avancées : il y a des articles et sujets dans cette 2ème partie qui m’ont semblé beaucoup moins travaillés que certains autres dans la 1ère partie… Je rejoins donc la critique de @Nébal où le plan me semble brinquebalant et n’aide pas à la cohérence de l’ouvrage, et à sa progression dedans.
Le livre débute par une interview croisée avec @Le Grümph , qui se veut drôle (cf. son titre) et qui tombe à plat : non seulement elle ne raconte rien parce qu’elle s’éparpille dans tous les sens, mais comme elle est ratée, elle a tendance à faire tomber d’emblée le livre des mains alors qu’on vient à peine de le débuter. L’exercice avec ce format, et la volonté de traiter un sujet complexe sous un angle un peu humoristique, était particulièrement casse-gueule, et cette première entrée en matière s’y casse en effet la gueule. Vu le résultat obtenu, je pense que c’était une erreur de la mettre en introduction, et qu’il eût mieux fallu la repousser en fin d’ouvrage – comme digestif plutôt qu’apéro. Passons.
Les deux articles suivants, Créer un Personnage et Développer un Personnage au fil du jeu vont de pair et sont d’ailleurs rédigés par la même personne, Coralie. Même si je n’y ai rien trouvé pour révolutionner ma pratique, force est de reconnaître qu’ils sont exhaustifs et qu’ils interrogent des choses qui méritent de s’y attarder : écrire un background à trou plutôt que 15 pages complètes, s’intéresser à tous les aspects qui composent les règles de création de personnage – Coralie cite ainsi les Nature et Attitude dans Vampire qui sont souvent négligés… Comme on peut le lire ici, les auteur(e)s de Jouer des Parties de Jeu de Rôle citent tous abondamment et à escient des références de jeu. Malheureusement, et c’est une des autres grosses faiblesses du livre à mon sens, les jeux cités viennent davantage alimenter des notes classieuses en bas de page pour préciser toutes leurs références (à l’image d’un ouvrage universitaire), que d’alimenter la réflexion. Plutôt que des références jetées en pagaille, j’aurais personnellement mille fois préféré qu’un ou deux jeux soient retenus et décortiqués pour appuyer sur leurs innovations ou idées bien ficelées par rapport aux sujets traités… Bref, il me manque ici le SAV Casus NO où quand un titre est cité sur un mécanisme bien troussé, on trouve en général un développement sur comment cela fonctionne et ce qu’il y a à en retenir. Après, les deux articles de Coralie restent de la bonne matière, on sent juste que le second qui est très complémentaire du premier finit par un peu s’épuiser en redite (le background) ou en s’attardant sur des points parfois assez mineurs…
L’article suivant, Interpréter un personnage de Romain d’Huissier devait être mon morceau de choix pour sortir de mon auberge avec mes personnages qui, au fil des jeux, finissent parfois par se ressembler dans leurs tics d’interprétation. Peine perdue sur un article que j’ai trouvé vraiment raté : une fois les banalités d’usage données, on s’arrête en route pour se perdre dans des considérations diverses et sans fil directeur : un truc aussi accessoire que faut-il jouer à la première ou à la troisième personne, qui vient se coller sur de la réutilisation d’analyse sociologique (les modèles de personnalité) ? Bref, c’est très brouillon mais peut-être que le thème était trop ambitieux et aurait mérité d’être mieux cadré, surtout au regard de la pagination réduite. Dans tous les cas, la fiche récapitulative indigente de l’article vient confirmer l’impression de vacuité de l’ensemble...
Je suis vite passé sur Aider son personnage à gagner : le b.a.-ba de l’exploration de donjons de @mornelarme , qui fait plus office pour moi d’aide de jeu récréative. Pas forcément sûr de vouloir la mettre en l’état dans les mains des joueurs, sous peine de faire une pré-campagne avant de démarrer la campagne
Comme l’article de Romain, j’attendais beaucoup de Garder la balle en l'air de @Cédric Ferrand. Il s’annonçait en effet très prometteur sur son démarrage : comparer le JDR avec le Théâtre d’Improvisation, et injecter les bonnes pratiques de ce dernier dans le JDR. J’espérais donc y trouver qu’on puvait retirer des techniques issues du théâtre d'improvisation pour être le bon joueur qui maintient l’animation avec les uns et les autres à sa table. Malheureusement là aussi, plutôt que d’explorer cette pratique cousine (très) éloignée du JDR, Cédric se limite (problème de pagination ou de cahier des charges à nouveau ?) à juste retransposer dans le JDR les règles de bonne conduite du théâtre d’improvisation – qui ont certes le mérite d’être bien mieux codifiées que dans notre loisir. Mais un article complet pour rappeler d’être à l’heure ou de ne pas tricher m’a fait, à ce stade de lecture, la même déconvenue amère par rapport à mes attentes. Très gros bof, d’autant que ces règles se retrouveront par ailleurs en substance dans les autres sujets abordés
C’est d’ailleurs l’objet central du chapitre suivant. Jouer ensemble d’Emmanuel Gharbi a au moins le mérite d’avoir un titre explicite : on va parler spécifiquement des règles de bonne conduite. Pour être honnête, il résume correctement toute la littérature qu’on peut trouver sur le Contrat Social, la Carte X etc. La fiche de Synthèse est par ailleurs blindée de questions si vous voulez intégrer ces aspects à fond. Mais tout ceci reste convenu (on ne trouvera pas de réflexion en la matière quand on est familier de ces notions), et comme je le disais renforce l’impression de tourner en rond sur les sujets en question.
On se prend à espérer que la dichotomie entre la première partie, les Bases, qui s’achève ici et Techniques Avancées, qui débute, va permettre enfin de relancer le souffle de l’ouvrage.
Cette seconde partie est inaugurée par Coopérer et rivaliser de Julien Pouard, et on se fracasse sur le même écueil. Car dès lors qu’on aborde la problématique de jouer sur des rivalités, voire des conflits ouverts entre joueurs, on retombe à nouveau dans les recommandations de s’accorder entre chacun pour éviter les malentendus. Pour être juste, l’article se complète cependant pour aussi construire et alimenter les antagonismes, mais là encore cela recoupe très largement ce qu’on a pu déjà lire dans tout ce qui avait trait à la construction des backgrounds.
A l’instar de la première partie Les Bases, on retrouve ensuite deux articles de Coralie (et maintenant Jérôme). Le premier, Se renouveler, est dense et sérieux comme l’ont pu l’être les deux articles de la première partie. Les propositions sont en tout cas multiples et variées, et méritent de servir d’anti-sèche en partie pour justement varier. Le second, Créer du jeu pour les autres, est un peu le cul entre deux chaises entre redites de ce que Coralie a déjà pu écrire auparavant, et conseils de bienséance ou bienveillance qui continuent encore dans ce que les autres auteurs ont déjà pu aborder… Même si ce n’est pas forcément abordé sous un même angle (il s’agit ici davantage d’être moteur pendant la partie, et non pas en amont de la partie), ça m’a beaucoup renvoyé aux formations de gestion d’équipes en entreprise, et m’a donc très moyennement passionné…
Exploiter la distinction entre joueur et personnage de @Guylène est aussi trop court pour les 14 pages données et les thèmes très glissants de transfert émotionnel que cela peut occasionner. Je pense que cette partie, évoquée de façon éparses ailleurs quand on parle de bleed, aurait mérité un pan entier de l’ouvrage, et non pas un seul (petit) article dédié. L'article avait toute sa place dans le recueil mais fait lui-même un peu coup dans l’eau aussi.
S’approprier un jeu de Raphaël Bombayl , m’a renvoyé vers l’article de @mornelarme sur les Donjons. Il s’agit en effet de conseils un peu triviaux et désordonnés. Là encore, c’est dommage qu’il n’ait pas été plus approfondi, surtout pour un article logé dans Techniques Avancées. Il se contente en effet de faire un inventaire un peu bateau et linéaire, quand cela ouvrait à mon sens des réflexions sur le matériel à se constituer en tant que joueurs, et ne pas laisser tout cet œuvre côté MJ.
On termine donc ici la seconde partie de l’ouvrage avec comme grosse déception de n’avoir rien lu de bien avancé sur les sujets traités (à part la partie de Coralie et Brand ?). On change donc ensuite de partie et on passe sur Varier les plaisirs
Dépasser ces clichés de Selene Tonon veut (courageusement) aborder la question de jouer des personnages différents, par leur genre, leur orientation sexuelle ou leur ethnie. Malheureusement, l’article se limite surtout aux deux premiers aspects (la partie sur l’ethnie est limitée à une page alors que de mon point de vue le sujet est encore plus vaste…) ; et il donne le sentiment de surtout s'arrêter à un manifeste pour la défense des droits et la représentativité des communautés LGBT, que de vraie réflexion sur comment introduire ceci intelligemment dans un contexte ludique. Encore une fois, cela manque d’exemple sur des personnages ou des narrations emblématiques, et par conséquent ça se limite bien trop à des prescriptions.
Je ne pensais pas trouver un intérêt sur les deux articles suivants : Faire d’un incapable un héros de Sandy Julien et Jouer des génies d’Olivier Caïra, qui m’ont semblé aussi anecdotiques. Les deux sont pourtant bien écrits. Sur le premier, et malgré les développements de Sandy, cela me conforte dans mon idée que c’est mission impossible. Je pense que personne ne retire de plaisir d’avoir un personnage à la traîne du groupe, ou qui rate tous ses tests : les quelques minutes de franche rigolade que ça peut générer ne compensent que rarement les heures de frustration en contrepartie. En revanche, l’article en contrepoint d’Olivier me promettait une chute similaire sur l’expérience de jeu très isolée que cela peut supporter. A l’arrivée, je l’ai trouvé au contraire très rafraîchissant, voire inspirant. Peut-être à mon goût le sujet le plus réussi de cette partie, voire de l’ensemble, car j’ai réussi à être bousculé dans mes certitudes et voir les choses d’une autre manière, ce que j’attendais en fin de compte de l’ensemble de ce livre.
Se laisser surprendre est écrit à trois mains : Coralie et Jérôme, et Peggy Chassenet. Et très franchement, je ne vois pas trop ce que Peggy a pu apporter ici, tant ce chapitre qui arrive en toute fin d’ouvrage semble répéter des parties déjà largement traitées par Coralie (et partiellement Jérôme) : les sujets déjà développés autour du background, le chapitre Se Renouveller, sans oublier à nouveau toutes les précautions de communication déjà vues et revues. L’article se perd donc entre des propositions oiseuses (faire jouer l’aléatoire pour finalement acter que ce n’est pas une super idée) ou le trop allusif (la partie sur le Sexe à mettre en confrontation avec l’aide de jeu de @Macbesse que je relevais dans ma critique un peu plus haut de Di6dent 15).
S’entraîner d’Arnaud Poirier aurait pu être le point d’orgue attendu, car il s’inspire comme Cédric du Théâtre d’Improvisation. On se prend donc à espérer, puisqu’on est dans la troisième section du livre, d’enfin entrer dans les techniques attendues du théâtre d’improvisation. Le contrat semble rempli puisqu’Arnaud Poirier reprend les exercices propres au Théâtre d’Improvisation. Mais celles-ci sont importées brutes de décoffrage pour nous en présenter l’esprit, et proposer de les introduire telles quelles dans des parties de JDR, ce qui n’a aucun sens (je souligne). Il n’y a donc aucun travail de l’auteur pour les adapter et proposer justement des axes novateurs, mais adaptés à une partie de JDR nomdidiou !
En guise de Conclusions, on en trouvera deux et franchement, même si je comprends le cri du cœur de Selene (Ne pas être cette Joueuse-là), je pense qu’on aurait pu arrêter les frais ici. En plus d’être maladroit et redondant, j’ai du mal à voir ce texte comme une conclusion puisqu’il comporte sa fiche de synthèse comme les autres articles… Bref, je me suis surtout intéressé à celle des tauliers – Coralie et Jérôme – qui a l’avantage d’être plus bienveillante (ouf !) et ouvre plein de pistes que je trouve dommage qu’elles n’aient justement pas été exploitées dans ce fameux Jouer des parties de Jeu de Rôle (notamment pourquoi n’avoir pas mis davantage en lumière dans un article les forums et les discords, et les aides que les Joueurs peuvent y trouver ?).
6.) Allez vous vous en servir ?
Une fois n’est pas coutume, comme j’en ai tartiné des tonnes sur la partie précédente, je vais synthétiser ici mon ressenti. Au-delà de la qualité appréciée ou non de chaque article, et où chacun pourra se faire un avis très différent, j’avoue avoir été surpris, et donc déçu, par la démarche éditoriale suivie. J’ai en effet lu un ouvrage complet mais avec des conseils assez basiques, parfois hors sujet. Comme j’ai pu le lire dans d’autres critiques avec des yeux expérimentés comme les miens, on trouve dans ce livre ce qu’on aurait aimé lire quand on a débuté. Seulement voilà, quel débutant va se plonger dans ce livre épais et austère de 368 pages ?
On trouvera cependant toujours matière pour se poser et s’interroger, et ce ne serait pas honnête de dire que je n'en retire rien, au contraire ! Cependant, Jouer des Parties de Jeu de Rôle se concentre essentiellement sur le développement des personnages pour donner de la matière aux MJ, ou éventuellement aux autres PJ ; et sur son attitude et ses attentes par rapport au reste de la table (donc très axé sur le Contrat Social). Pourquoi pas, mais je suis très surpris que l’ouvrage se soit limité si drastiquement sur ces éléments, et n’ait pas développé d’autres directions alors que l’univers Joueur est par essence beaucoup plus circonscrit que celui du MJ.
Pour finir de répondre à la question, c’est donc un livre que je vais utiliser finalement par rapport à la somme de lecture que cela représente. En fait, cela m’a plus donné envie de me replonger dans les articles PJ Only publiés dans Casus Belli, et me faire mon compendium perso par rapport à mes attentes de joueur.
7.) En conseilleriez vous l'achat ??
Question compliquée. Même si je ressors peu convaincu de ce tome, il serait dommage de passer à côté de la collection Sortir de l’Auberge de Lapin Marteau, et de négliger ce tome par rapport aux autres. Il mérite donc le coup d’œil pour s’en faire son propre avis, défavorable comme le mien, ou bien plus favorable !