Cela fait longtemps que je n'ai pas fait de gros pavé ici mais le sujet m'intéresse bien alors tant pis pour le
trop long pas lu.
L’initiative est une modalité fréquente en JdR. Elle est présente dans une organisation séquentielle d'une scène / action globale, avec un découpage sous forme de round – tour et donc fréquemment utilisée pour le combat.
Peu de systèmes utilisent les tours pour d’autres actions que le combat et quand c'est le cas, c’est bien souvent dans une logique d’unicité de système que de restitution d’une suite d’évènement.
Mais je crois que ces systèmes n'utilisent pas l'initiative pour une gestion par opposition (sans certitude aucune).
Une résolution détaillée tour à tour où chaque joueur en phase est fréquemment vue comme un héritage (plus ou moins archaïque) du wargame. Et comme cela a été évoqué par certains ici, l'initiative est vu comme quelque chose de lourd et de superflu.
Effectivement, les anciens wargames (car je ne sais pas comment c'est géré pour ceux récents) avaient une initiative - souvent totalement aléatoire du type plus gros d6 - pour organiser qui allait agir en premier. L'action étant souvent déplacement de ses unités suivi de l'attaque de ses unités. L'aspect passif de l'adversaire était alors atténué par un ensemble de règles comme par exemple les zones de contrôle (zone tout autour d'un pion arrêtant le mouvement des unités adverses y pénétrant).
Certains JdR on conservé ces principes de
jeux militaires soit dans une organisation stricte des
phases (comme le font certains wargames avec d'abord les tirs d'artillerie, puis les charges de cavalerie etc) comme par exemple Rêve de Dragon évoqué précédemment où l'on résout les tirs puis les lancer puis les attaques au corps à corps ; soit dans une logique d'alternance où un camp (ou un membre de) se déplace puis il attaque et ensuite l'autre camp (ou un membre de) se déplace et attaque ; soit dans des zones d'engagement qui bloquent le mouvement adverse ou permet des attaques d'opportunité ; soit dans la gestion pointue des déplacements avec des capacités de mouvements avec ou sans utilisation d'hexagones ; etc ...
Si à mes yeux certains de ces éléments de wargame ne sont pas forcément déplacés dans un usage rôliste voire sont appropriés (comme le fait que les déplacements s'arrêtent et les adversaires se retrouvent dans un statut
engagés en combat), certains induisent une résolution figée comme par exemple
pourquoi un archer tirerait forcément une flèche avant qu'une adversaire l'engage au corps à corps ? voire une résolution incohérente comme par exemple
pourquoi je dois dépenser 3 points d'actions (PA) pour m'approcher de mon adversaire au risque de ne pas avoir suffisamment de PA pour l'attaquer alors que mon adversaire ne dépense aucun point d'action en m'attendant ? et surtout
pourquoi dans certains systèmes celui qui a l'initiative peut parcourir 20 mètres sans que l'adversaire esquisse le moindre mouvement ?
Je vois aussi un paradoxe, plus les mécanismes de combat sont détaillés et organisés, plus ils se rapprochent de ceux du wargame, plus ils sont vus comme objectifs, neutres (parce que ne dépendant pas de l'arbitraire du MJ, de son doigt mouillé, j'écris cela par rapport à une discussion sur le Discord CasusNo sur le caractère « carré » de telle édition de D&D par rapport à une autre) et plus ils sont figés et moins ils sont dynamiques, moins ils sont chaotiques et moins ils restituent un combat tel qu'on le restitue dans d'autres fictions *.
Aussi, comme le souligne LG dans un de ses messages sur ce sujet,
l'initiative, c'est D'ABORD une mécanique pour gérer le tour de parole
Je suis particulièrement en accord avec ce D'ABORD en lettres majuscules car ce tour de parole induit des
choix qui comptent, dans l'idéal tel ordre d'action des PJ et PNJ va introduire une résolution différente d'un autre ordre d'action.
C'est une
initiative pré engagement, les protagonistes sont à distance respectable, ils vont entrer en conflit mais on ne sait pas comment, on ne sait pas qui va faire quoi.
Clairement pour moi, un positionnement de figurines ou de pions permet de visualiser grossièrement une situation de combat sans besoin de rentrer dans des descriptions longues et pas toujours claires (le lancier est à un dizaine de mètres sur ta droite) sous le bon principe qu'il vaut mieux un bon croquis qu'un long discours. Cela permet de résoudre tout aussi grossièrement les déplacements
simultanés des forces en présence pour réduire l'aspect téléportation de l'alternance des mouvements.
Contrairement à un joueur de wargames qui joue ses pions comme il l'entend, chaque joueur est autonome dans les décisions de son PJ ainsi que le MJ pour ses différents PNJ (enfin, il devrait ...).
Cette mécanique propre au JdR peut être organisée dans des phases strictes.
Ainsi, certains jeux proposent :
- un tour de parole ascendant : les moins rapides annoncent leurs actions de leur PJ en premier, les plus rapides peuvent ainsi décider leurs actions en fonction des persos les plus lents.
Puis,
- un tour de résolution descendant : les persos les plus rapides entreprennent leur action ce qui peut annuler / réduire les actions des persos les plus lents.
Cette procédure particulièrement longue n'est plus très à la mode aujourd'hui.
C'est pourtant pour moi celle qui donne le plus de sens au terme
Initiative et le plus de poids à cet avantage.
Dans le langage militaire, avoir l’initiative c’est être à l’attaque alors que l’adversaire est en position défensive.
Dans le langage courant prendre l’initiative c’est mener ou prendre en main ; ne pas avoir l'initiative c’est subir.
Cette initiative, cette vision supérieure du combat, je la restitue le plus souvent avec une résolution qui appelle aux trois aspects Aléa, Capacité du PJ et Décision (choix, arbitraire) mais parfois je n'utilise que la Décision.
- Quand une des factions a déjà l'initiative de par les circonstances (embuscade, attaque surprise ...), elle se matérialise dans les faits par des attaques à distance gratuites ou par un positionnement choisi des belligérants avantagés. Le tour de parole est alors celui des attaquants, qui peuvent selon les capacités tactiques (du personnage de préférence) et l'importance de l'avantage revenir ou non sur leurs choix etc ...
- Quand le faible nombre de protagonistes ou les circonstances de l'engagement font qu'elles s'ordonnancent sans réelle ingentivité des protagonistes.
Quand j'effectue une résolution d'initiative pré engagement à L5A-DS **, j'utilise la Compétence Combat (tactique) avec le Trait Perception, Intelligence ou Reflexe selon les circonstances de la rencontre (selon si voir, comprendre ou réagir vite est primordial) et si j'ai envie de pimenter (et par conséquent de passer plus de temps sur cette résolution) par des choix de prise de risque (augmentations) pour prendre un plus gros avantage.
Cette résolution peut être individuelle ou collective (effectuée par un chef dont on suit les ordres).
Concernant l
'initiative post engagement, les protagonistes sont face à face, ils sont engagés prêts à en découdre sans de réelle possibilité d'une autre alternative que le combat.
Les systèmes de jeu avec jets d'opposition ou ceux où seuls les joueurs lancent les dés s'affranchissent du jet d'initiative (post engagement).
Cela permet de réduire sensiblement la durée du tour de combat en s'affranchissant d'une phase de résolution d'un classique triptyque initiative - touché - dommages (et quand on cherche à réduire encore plus on supprime le jet de dommages).
Ces deux modalités de résolution s'éloignent d'une vision cinématographique (le terme est maladroit et sans doute pas adapté) pour simuler un ensemble de coups ou de passes d'arme. Dès lors qu'on s'en accommode, cela fonctionne très bien.
Mais dès lors qu'on reste dans la logique que l'initiative c’est avoir l’opportunité d’agir
avant que l’adversaire ne le fasse, qu'on visualise que quelqu'un chargeant avec une lance va forcément pouvoir frapper
avant que l'adversaire avec une épée courte ne puisse répliquer, on est dans une logique (un fonctionnement cérébral ?) de résolution séquentielle avec initiative.
Personnellement, je n'aime les systèmes où seul l'Aléa permet de déterminer qui frappe en premier compte tenu de l'importance de l'enjeu, aussi ceux où seul la Capacité rentre en compte sont pauvres à mes yeux.
J'aime bien quand Aléa et Capacité œuvrent dans la détermination de l'init avec comme pour Dany40 un poids plus important de la Capacité dans la résolution mais j'aime surtout avoir des Décisions.
J'aime pouvoir restituer une vision, une logique qui est que
Plus on est offensif, plus on a de chance d’avoir l’initiative mais
Plus on est offensif, plus on a de chance d’être touché.
J'aime quand le système a cette correspondance comme dans Cops évoqué par Talisker,.
Ainsi, à L5A-DS, plus je vais être sur la défense en augmentant mon ND pour être touché, plus je vais réduire mon initiative et mes possibilités de toucher l'adversaire.
Aussi, en effectuant un choix (équivalent à une posture comme dans Cops) au moment de l'initiative qui a une conséquence sur la phase suivante du touché, une dynamique se créée entre les différentes phases, initiative touché et dommages sont liées et non sont pas des procédures distinctes, cela réduit une certaine artificialité des phases.
* Le réalisme du combat en JdR c'est croire en la réalité d'une fiction et non la conformité à la réalité pour la bonne raison que la réalité d'un combat à l'arme blanche n'existe plus vraiment depuis plusieurs siècles.
En d'autres termes, il y a de grande chance que votre vision personnelle d'un combat réaliste soit sous le prisme d'un genre de film quelconque.
Et ce qui explique que X personnes se déchirent sur
en vrai ça se passe comme ça, à chacun ses référents à chacun sa
réalité, à chacun un mode de résolution différent.
** version personnelle de L5A 1ère édition
La démocratie, ce n’est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité.
Albert Camus