Re: [CR] Millevaux et autres jeux Outsider
Publié : mer. janv. 15, 2025 8:59 am
INVITATION À LA COUR FÉERIQUE
Les Sentes s'aventurent dans le bois de Faerie, au cœur du multivers. Voici le fragile témoignage de ce que nos âmes immortelles y vécurent.
(temps de lecture : 9 min)

La troupe du Cabaret des Sirènes incarnait des courtisanes de la Cour Féerique. Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Joué les 5 & 6 octobre 2010 à La Ville Albertine, Ambon, Mor Bihan
Le jeu : Les Sentes, le GN des drames forestiers dans une réalité sorcière
Univers : la forêt de Millevaux
Albums photo du GN :
photos par Enora du Cabaret des Sirènes, libre de droits
photos par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Le contexte :
Les Sentes est un GN qui commence à avoir de la bouteille. Inventé en 2018, il a depuis connu de nombreuses éditions, certaines très fidèles à la proposition post-apocalyptique forestière de départ, d'autres franchement éloignés tels Le Conservatoire Occulte (ésotérisme contemporain, en intérieur) ou Le Pardon des Anaon (GN de village fantastique qui reprend surtout la mécanique des rituels).
Invitation à la cour féerique est aussi une édition très à part à sa façon. Elle capitalise beaucoup sur des nouveaux peuples (les féeriques, les corax, les horlas) et proposant un cadre med-fan assez détaché de l'idée de départ avec tout un multivers, des religions...
C'était en quelque sorte une version améliorée de Valerrance, la première itération med-fan des Sentes, puisqu'il en reprenait le principe des alliances (des regroupements de communautés pour former une grosse confrontation tripartite) et aussi l'enjeu final de fermeture de portail. Tout en réparant ce dernier : sur Valerrance, les actions des trois alliances avaient un impact sur la fermeture du portail, mais dans les faits nous avons eu beaucoup de mal à nous coordonner. Sur Invitation à la cour féerique, rien ni personne ne pouvait empêcher la fermeture, tout ce qu'on faisait dans ce sens était du pur play to lose et au final il y avait surtout un choix individuel de rester en Faerie ou de la quitter à la fin du jeu.

La cour féerique sait recevoir. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
L'ambiance féerique au rendez-vous
On peut remercier tout le monde pour l'effort réalisé sur les costumes. J'ai le sentiment que l'immersion dans l'ambiance magique était là.

Deux corax en pleine conspiration. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Mon moment waow personnel a été quand la pâtisserie féerique nous a été ouverte. Carl et Marina ont bossé de fou sur cette édition pour que ça soit inoubliable. Çà n'est pas évident de faire de la pâtisserie végane inventive et le défi a été à mes yeux totalement relevé.

La pâtisserie féerique photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
L'immersion était présente tout le temps, même au moment des repas où d'habitude je constate un relâchement (il faut dire que depuis deux sessions nous proposons un espace hors-jeu au sein de la zone de repas, ça permet de limiter le phénomène).
L'immersion fut si intense qu'il a plu des cordes toute la soirée
Ce qui a un peu émoussé les ardeurs et le jeu du samedi s'est terminé vers 23H faute de personnes motivées.
Quelqu'un dans ses retours a évoqué une ambiance à la Alice au pays des merveilles et cela évoque tout à fait des un des effets recherchés, notamment lors du tribunal des banni.e.s, qui a beaucoup à voir avec l'absurde procès du vol de tartes dans Alice au pays des merveilles.

La cour féerique siège, en attendant de présider au tribunal des banni.e.s qui aura lieu dans la soirée. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Le Cabaret des Sirènes
Un mot sur la collaboration avec la troupe associative du Cabaret des Sirènes. Faire participer ces GNistes / danseuses / artistes était un des grands enjeux d'Invitation à la cour féerique.
L'entretien que j'avais fait avec elles éclaire beaucoup sur leur démarche mais en gros la promesse a été tenue.
C'est toujours très gratifiant d'avoir un supplément artistique sur un GN et pour ma part j'ai aussi beaucoup apprécié leur démarche de play to lose
, que ce soit au niveau de la mise en valeur des autres PJ mais aussi des temps forts collectifs, notamment la danse nuptiale.

Une fée du Cabaret des Sirènes (à droite) a toujours à cœur de faire entrer les convives dans la danse. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Une répartition inégale au sein des communautés
Petite surprise de l'édition : trois des six communautés n'ont été honorées que d'un PJ : la communauté horla et les deux communautés humanes.
L'exotisme et la nouveauté a donc recueilli l'intérêt puisque les PJ se sont concentrés sur les deux communautés féeriques et la communauté corax, ce qui a bien sûr beaucoup influencé la nature des tensions.
C'est un problème sans en être un. Je tiens à ce que les jouaires soient libres de choisir leurs personnages et je ne cherche pas à valider. De surcroît, c'était une édition à l'économie : très peu de calibrage (pas de discord, pas de listing partagé de personnages, pas de pré-calibrage des liens relationnels) et donc je n'avais pas d'aperçu sur la répartition des rôles.
Ceci dit, bien que le résultat m'ait satisfait, dans le sens où les gens ont joué ce qui les intéressait, si je dois un jour réorganiser ce GN, je tenterai de réguler les effectifs de chaque communauté pour avoir un résultat différent.

À seulement deux humanes, explorer Faerie ne va pas être évident. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Une édition sous le signe du lâcher prise
Après un Vinland qui avait été intense en organisation et en calibration, j'ai ressenti le besoin de me rapprocher de l'esprit initial des Sentes : un GN plus à l'os, avec très peu de préparation et de calibration initiale.
Le défi a été de faire tenir le calibrage des liens relationnels dans un atelier d'une heure au début du GN. Et étonnamment... ça a fonctionné !

Un orga on ne peut plus reposé. (en vrai sur cette photo je suis censé être mort) photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
J'ai un peu improvisé le fonctionnement de l'atelier sur place. En gros, ça s'est fait en plusieurs rondes :
1ère ronde : les missions de vie sensibles
Les personnes qui avaient des missions de vie sensibles (liens romantiques ou violents) levaient la main et des volontaires se désignaient pour se lier à elles.
2ème ronde : la moitié des missions de vie restantes
On tourne en rond au hasard et on attrape les mains de deux personnes, avec qui on doit faire un lien.
3ème ronde : les missions de vie encore non attribuées
Les personnes qui n'ont pas complété de lien lèvent les mains et d'autres se dévouent pour compléter (on évite d'avoir plus de quatre liens de missions de vie)
On recommence pour les destins.
On devait aussi recommencer pour les goupils mais personne n'en avait joué.

La ronde de l'atelier calibration. photo par Enora du Cabaret des Sirènes, libre de droits
Les temps forts peu respectés
Cette édition a été marquée par un respect très approximatif des temps forts collectifs.
Ainsi, le temps fort de chasse amoureuse de l'après-midi a été fusionné avec le temps fort de cérémonie des mains liées sous la forme d'une danse nuptiale. Quand j'ai vu que cela arrivait, j'ai laissé faire parce que je sentais que le collectif était dans cette énergie et j'ai pas voulu casser l'immersion en recadrant sur le programme.
C'est une bonne chose parce que le soir à l'heure initialement prévue pour la cérémonie des mains liées, il a plu à seaux donc avoir tout fait l'après-midi nous a sauvés. Par contre, cela a empêché à ces romances de se construire de façon naturelle puisqu'en une danse hasardeuse, les mariages étaient scellés. Certains couples ont ensuite pu prolonger cette romance de façon intéressante mais pour d'autres, ça a été beaucoup plus malaisant du fait que la romance avait été décrétée un peu au pif et donc difficile à roleplay sincèrement. Je pense que les couples qui avaient une romance pré-calibrée lors de l'atelier liens relationnels s'en sont mieux sortis.

Lors de la danse nuptiale, les couples ou les trouples se font et se défont photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Le temps fort de minuit (en gros le traditionnel climax violent qu'on met quasiment toujours en fin de soirée) n'a pas été joué à cause du mauvais temps. Tout le monde était allé se coucher.
Les temps forts du dimanche de 10H (méditation de cent ans) et de 11H (métamorphoses) n'a pas non plus été joué car au vu du jeu de samedi on a plutôt improvisé le retour d'Obéron (que j'ai incarné en remplacement de mon perso inutilement décédé juste avant) et j'ai pris pas mal de plaisir à le faire.
Les PJ n'ont pas trop apprécié ma façon trop absurde de rendre la justice et ont utilisé le « Je ne crois pas en toi » pour me transformer en espèce de gobelin stupide que j'ai eu encore plus de plaisir à incarner (j'espère que je n'ai pas été trop relou).

Farces ou friandises ? photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
La conclusion de tout ça c'est qu'en fait c'est pas du tout grave de pas respecter les temps forts. Le jeu est mouvant et on s'adapte à la volée au chaos des événements (cf mon article La dérive) mais aussi au niveau d'énergie et à la charge cognitive du collectif.
Pour le dire plus simplement, le respect du programme a peu d'importance du moment que tout le monde a du jeu (et il y a beaucoup à faire par ailleurs).
Même constat au niveau des liens relationnels. Il a été constaté dans les retours écrits que les liens relationnels n'étaient pas tous joués. Sur le même registre, je considère que ce n'est pas grave du moment que tout le monde a la quantité de jeu qui lui convient.
Cette carence au niveau du jeu des liens a été imputée au fait qu'ils étaient établis lors d'un atelier et non en amont du GN par internet. Mais en vrai, cette carence est aussi observable sur les éditons où les liens sont précalibrés. Même les jouaires expérimenteys échouent régulièrement à jouer tous leurs liens, tout simplement parce que le système propose exprès plus de matériel qu'il n'est possible de jouer : je préfère la frustration à l'ennui.

Si des liens relationnels ont bel et bien été joués, d'autres ont sombré dans l'oubli. photo par Enora du Cabaret des Sirènes, libre de droits
Des difficultés à recruter
Les éditions des Sentes organisées à La Ville Albertine ont souffert de l'habituel plafond de verre qui nous empêche de dépasser les 30 places payantes. (en vrai, nous étions seulement à 24 places payantes)
Le site de jeu et l'équipe de La Ville Albertine sont à mes yeux exceptionnels mais ils ont également un coût. Déjà celui du débroussaillage des sentiers de forêt qui est incompressible, et aussi au niveau de la cuisine parce que Carl et Marina font l'impossible pour nous offrir un repas végane, parce qu'il faut nourrir les bénévoles (pas moins de 14 sur cette édition), et aussi parce qu'on propose quatre repas, ce qui représente plus de convivialité et permet que tout le monde mange végane sur la durée de l'événement.
Ajoutons à cela la volonté de faire appel au Cabaret des Sirènes qui ont légitimement droit à un défraiement et nous avons obtenu une PAF tarif plein à 70 €.
A mi-parcours, un photographe bénévole (Arnaud Lanoix Brauer) a accepté de faire le reportage photo, ce qui nous a permis de proposer plus de tarifs solidaires (n'ayant plus besoin de réserver un budget à un photographe pro).
Mais toujours est-il que du fait du tarif (parmi plein d'autres facteurs), nous n'avons pas dépassé 24 places payantes.

Un satyre tiraillé entre son vœu de mettre fin à son bannissement et ses questions existentielles. photo par Enora du Cabaret des Sirènes, libre de droits
C'est dommageable parce que Les Sentes a largement la capacité d'accueillir plus de jouaires. L'édition Vestige avait ainsi réuni une soixantaine de jouaires. Mais aussi parce que ça ne permet pas à La Ville Albertine de se pérenniser.
Je n'ai toujours pas la solution, mais je vais possiblement plancher sur une réduction des coûts. C'est regrettable parce qu'en gros c'est compliqué d'organiser des GN à l'équilibre dans un cadre associatif / non lucratif et c'est encore plus compliqué de se professionnaliser. Pour ma part, je n'ai pu me rémunérer que deux fois sur toutes les sessions des Sentes que j'ai (co)organisées et c'est bien sûr un problème.
Mais pour finir sur une note positive, il reste plein d'étoiles dans les yeux et dans la tête, et beaucoup de gratitude pour les bénévoles et les jouaires qui ont tenté l'expérience pour la première fois (il y en eut beaucoup sur cette édition) ou qui sont fidèles aux Sentes depuis un moment.

La voix de Faerie n'est pas prête de s'éteindre. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Les Sentes s'aventurent dans le bois de Faerie, au cœur du multivers. Voici le fragile témoignage de ce que nos âmes immortelles y vécurent.
(temps de lecture : 9 min)

La troupe du Cabaret des Sirènes incarnait des courtisanes de la Cour Féerique. Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Joué les 5 & 6 octobre 2010 à La Ville Albertine, Ambon, Mor Bihan
Le jeu : Les Sentes, le GN des drames forestiers dans une réalité sorcière
Univers : la forêt de Millevaux
Albums photo du GN :
photos par Enora du Cabaret des Sirènes, libre de droits
photos par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Le contexte :
Les Sentes est un GN qui commence à avoir de la bouteille. Inventé en 2018, il a depuis connu de nombreuses éditions, certaines très fidèles à la proposition post-apocalyptique forestière de départ, d'autres franchement éloignés tels Le Conservatoire Occulte (ésotérisme contemporain, en intérieur) ou Le Pardon des Anaon (GN de village fantastique qui reprend surtout la mécanique des rituels).
Invitation à la cour féerique est aussi une édition très à part à sa façon. Elle capitalise beaucoup sur des nouveaux peuples (les féeriques, les corax, les horlas) et proposant un cadre med-fan assez détaché de l'idée de départ avec tout un multivers, des religions...
C'était en quelque sorte une version améliorée de Valerrance, la première itération med-fan des Sentes, puisqu'il en reprenait le principe des alliances (des regroupements de communautés pour former une grosse confrontation tripartite) et aussi l'enjeu final de fermeture de portail. Tout en réparant ce dernier : sur Valerrance, les actions des trois alliances avaient un impact sur la fermeture du portail, mais dans les faits nous avons eu beaucoup de mal à nous coordonner. Sur Invitation à la cour féerique, rien ni personne ne pouvait empêcher la fermeture, tout ce qu'on faisait dans ce sens était du pur play to lose et au final il y avait surtout un choix individuel de rester en Faerie ou de la quitter à la fin du jeu.

La cour féerique sait recevoir. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
L'ambiance féerique au rendez-vous
On peut remercier tout le monde pour l'effort réalisé sur les costumes. J'ai le sentiment que l'immersion dans l'ambiance magique était là.

Deux corax en pleine conspiration. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Mon moment waow personnel a été quand la pâtisserie féerique nous a été ouverte. Carl et Marina ont bossé de fou sur cette édition pour que ça soit inoubliable. Çà n'est pas évident de faire de la pâtisserie végane inventive et le défi a été à mes yeux totalement relevé.

La pâtisserie féerique photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
L'immersion était présente tout le temps, même au moment des repas où d'habitude je constate un relâchement (il faut dire que depuis deux sessions nous proposons un espace hors-jeu au sein de la zone de repas, ça permet de limiter le phénomène).
L'immersion fut si intense qu'il a plu des cordes toute la soirée

Ce qui a un peu émoussé les ardeurs et le jeu du samedi s'est terminé vers 23H faute de personnes motivées.
Quelqu'un dans ses retours a évoqué une ambiance à la Alice au pays des merveilles et cela évoque tout à fait des un des effets recherchés, notamment lors du tribunal des banni.e.s, qui a beaucoup à voir avec l'absurde procès du vol de tartes dans Alice au pays des merveilles.

La cour féerique siège, en attendant de présider au tribunal des banni.e.s qui aura lieu dans la soirée. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Le Cabaret des Sirènes
Un mot sur la collaboration avec la troupe associative du Cabaret des Sirènes. Faire participer ces GNistes / danseuses / artistes était un des grands enjeux d'Invitation à la cour féerique.
L'entretien que j'avais fait avec elles éclaire beaucoup sur leur démarche mais en gros la promesse a été tenue.
C'est toujours très gratifiant d'avoir un supplément artistique sur un GN et pour ma part j'ai aussi beaucoup apprécié leur démarche de play to lose
, que ce soit au niveau de la mise en valeur des autres PJ mais aussi des temps forts collectifs, notamment la danse nuptiale.

Une fée du Cabaret des Sirènes (à droite) a toujours à cœur de faire entrer les convives dans la danse. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Une répartition inégale au sein des communautés
Petite surprise de l'édition : trois des six communautés n'ont été honorées que d'un PJ : la communauté horla et les deux communautés humanes.
L'exotisme et la nouveauté a donc recueilli l'intérêt puisque les PJ se sont concentrés sur les deux communautés féeriques et la communauté corax, ce qui a bien sûr beaucoup influencé la nature des tensions.
C'est un problème sans en être un. Je tiens à ce que les jouaires soient libres de choisir leurs personnages et je ne cherche pas à valider. De surcroît, c'était une édition à l'économie : très peu de calibrage (pas de discord, pas de listing partagé de personnages, pas de pré-calibrage des liens relationnels) et donc je n'avais pas d'aperçu sur la répartition des rôles.
Ceci dit, bien que le résultat m'ait satisfait, dans le sens où les gens ont joué ce qui les intéressait, si je dois un jour réorganiser ce GN, je tenterai de réguler les effectifs de chaque communauté pour avoir un résultat différent.

À seulement deux humanes, explorer Faerie ne va pas être évident. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Une édition sous le signe du lâcher prise
Après un Vinland qui avait été intense en organisation et en calibration, j'ai ressenti le besoin de me rapprocher de l'esprit initial des Sentes : un GN plus à l'os, avec très peu de préparation et de calibration initiale.
Le défi a été de faire tenir le calibrage des liens relationnels dans un atelier d'une heure au début du GN. Et étonnamment... ça a fonctionné !

Un orga on ne peut plus reposé. (en vrai sur cette photo je suis censé être mort) photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
J'ai un peu improvisé le fonctionnement de l'atelier sur place. En gros, ça s'est fait en plusieurs rondes :
1ère ronde : les missions de vie sensibles
Les personnes qui avaient des missions de vie sensibles (liens romantiques ou violents) levaient la main et des volontaires se désignaient pour se lier à elles.
2ème ronde : la moitié des missions de vie restantes
On tourne en rond au hasard et on attrape les mains de deux personnes, avec qui on doit faire un lien.
3ème ronde : les missions de vie encore non attribuées
Les personnes qui n'ont pas complété de lien lèvent les mains et d'autres se dévouent pour compléter (on évite d'avoir plus de quatre liens de missions de vie)
On recommence pour les destins.
On devait aussi recommencer pour les goupils mais personne n'en avait joué.

La ronde de l'atelier calibration. photo par Enora du Cabaret des Sirènes, libre de droits
Les temps forts peu respectés
Cette édition a été marquée par un respect très approximatif des temps forts collectifs.
Ainsi, le temps fort de chasse amoureuse de l'après-midi a été fusionné avec le temps fort de cérémonie des mains liées sous la forme d'une danse nuptiale. Quand j'ai vu que cela arrivait, j'ai laissé faire parce que je sentais que le collectif était dans cette énergie et j'ai pas voulu casser l'immersion en recadrant sur le programme.
C'est une bonne chose parce que le soir à l'heure initialement prévue pour la cérémonie des mains liées, il a plu à seaux donc avoir tout fait l'après-midi nous a sauvés. Par contre, cela a empêché à ces romances de se construire de façon naturelle puisqu'en une danse hasardeuse, les mariages étaient scellés. Certains couples ont ensuite pu prolonger cette romance de façon intéressante mais pour d'autres, ça a été beaucoup plus malaisant du fait que la romance avait été décrétée un peu au pif et donc difficile à roleplay sincèrement. Je pense que les couples qui avaient une romance pré-calibrée lors de l'atelier liens relationnels s'en sont mieux sortis.

Lors de la danse nuptiale, les couples ou les trouples se font et se défont photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
Le temps fort de minuit (en gros le traditionnel climax violent qu'on met quasiment toujours en fin de soirée) n'a pas été joué à cause du mauvais temps. Tout le monde était allé se coucher.
Les temps forts du dimanche de 10H (méditation de cent ans) et de 11H (métamorphoses) n'a pas non plus été joué car au vu du jeu de samedi on a plutôt improvisé le retour d'Obéron (que j'ai incarné en remplacement de mon perso inutilement décédé juste avant) et j'ai pris pas mal de plaisir à le faire.
Les PJ n'ont pas trop apprécié ma façon trop absurde de rendre la justice et ont utilisé le « Je ne crois pas en toi » pour me transformer en espèce de gobelin stupide que j'ai eu encore plus de plaisir à incarner (j'espère que je n'ai pas été trop relou).

Farces ou friandises ? photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by
La conclusion de tout ça c'est qu'en fait c'est pas du tout grave de pas respecter les temps forts. Le jeu est mouvant et on s'adapte à la volée au chaos des événements (cf mon article La dérive) mais aussi au niveau d'énergie et à la charge cognitive du collectif.
Pour le dire plus simplement, le respect du programme a peu d'importance du moment que tout le monde a du jeu (et il y a beaucoup à faire par ailleurs).
Même constat au niveau des liens relationnels. Il a été constaté dans les retours écrits que les liens relationnels n'étaient pas tous joués. Sur le même registre, je considère que ce n'est pas grave du moment que tout le monde a la quantité de jeu qui lui convient.
Cette carence au niveau du jeu des liens a été imputée au fait qu'ils étaient établis lors d'un atelier et non en amont du GN par internet. Mais en vrai, cette carence est aussi observable sur les éditons où les liens sont précalibrés. Même les jouaires expérimenteys échouent régulièrement à jouer tous leurs liens, tout simplement parce que le système propose exprès plus de matériel qu'il n'est possible de jouer : je préfère la frustration à l'ennui.

Si des liens relationnels ont bel et bien été joués, d'autres ont sombré dans l'oubli. photo par Enora du Cabaret des Sirènes, libre de droits
Des difficultés à recruter
Les éditions des Sentes organisées à La Ville Albertine ont souffert de l'habituel plafond de verre qui nous empêche de dépasser les 30 places payantes. (en vrai, nous étions seulement à 24 places payantes)
Le site de jeu et l'équipe de La Ville Albertine sont à mes yeux exceptionnels mais ils ont également un coût. Déjà celui du débroussaillage des sentiers de forêt qui est incompressible, et aussi au niveau de la cuisine parce que Carl et Marina font l'impossible pour nous offrir un repas végane, parce qu'il faut nourrir les bénévoles (pas moins de 14 sur cette édition), et aussi parce qu'on propose quatre repas, ce qui représente plus de convivialité et permet que tout le monde mange végane sur la durée de l'événement.
Ajoutons à cela la volonté de faire appel au Cabaret des Sirènes qui ont légitimement droit à un défraiement et nous avons obtenu une PAF tarif plein à 70 €.
A mi-parcours, un photographe bénévole (Arnaud Lanoix Brauer) a accepté de faire le reportage photo, ce qui nous a permis de proposer plus de tarifs solidaires (n'ayant plus besoin de réserver un budget à un photographe pro).
Mais toujours est-il que du fait du tarif (parmi plein d'autres facteurs), nous n'avons pas dépassé 24 places payantes.

Un satyre tiraillé entre son vœu de mettre fin à son bannissement et ses questions existentielles. photo par Enora du Cabaret des Sirènes, libre de droits
C'est dommageable parce que Les Sentes a largement la capacité d'accueillir plus de jouaires. L'édition Vestige avait ainsi réuni une soixantaine de jouaires. Mais aussi parce que ça ne permet pas à La Ville Albertine de se pérenniser.
Je n'ai toujours pas la solution, mais je vais possiblement plancher sur une réduction des coûts. C'est regrettable parce qu'en gros c'est compliqué d'organiser des GN à l'équilibre dans un cadre associatif / non lucratif et c'est encore plus compliqué de se professionnaliser. Pour ma part, je n'ai pu me rémunérer que deux fois sur toutes les sessions des Sentes que j'ai (co)organisées et c'est bien sûr un problème.
Mais pour finir sur une note positive, il reste plein d'étoiles dans les yeux et dans la tête, et beaucoup de gratitude pour les bénévoles et les jouaires qui ont tenté l'expérience pour la première fois (il y en eut beaucoup sur cette édition) ou qui sont fidèles aux Sentes depuis un moment.

La voix de Faerie n'est pas prête de s'éteindre. photo par Arnaud Lanoix Brauer, cc-by