[CR] Des nouvelles d'Itras By
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 5 : La fin d’une histoire d’amour pas vraiment commencée
Sur le palier de sa magnifique voisine, Amandine demande à rentrer dans son appartement pour discuter (et échapper aux gardes gris). L’appartement de la femme magnifique est l’une des choses les plus belles qu’a jamais vu Amandine : aux murs, des cascades d’or ; par terre, la plus douce des prairies ; une musique angélique résonne constamment à ses oreilles. C’est presque trop, et Amandine serait presque saisie d’une nausée semblable à un trop-plein de bonbons à la liqueur si elle restait trop longtemps ici.
« J’ai reçu une invitation pour une soirée ce soir, explique Amandine, au manoir Oppheimer ; j’y suis conviée pour croquer la soirée afin de produire un tableau pour monsieur Oppheimer. Malheureusement, je n’ai rien à me mettre de respectable, et je voulais savoir si vous pouviez me prêter une tenue qui irait pour cette soirée ? En retour, vous pourriez peut-être m’accompagner ?
– Oh, ce serait vraiment un honneur ! Oui, j’ai très certainement une robe pour vous, nous faisons presque la même taille après tout. »
À ces mots purs et cristallins, Amandine se rend compte pendant une fraction de seconde qu’elle serait incapable de décrire les traits de son interlocutrice, qui lui ouvre sa garde-robe, jonchée des robes plus magnifiques les unes que les autres, et qui correspondent toutes exactement au style de l’artiste.
Des coups à la porte retentissent qui brisent ce moment parfait ; Amandine se cache derrière les robes et demande à sa voisine de la protéger de la garde. La femme magnifique se dirige vers la porte et semble discuter avec les gardes ; cependant Amandine n’entend rien, car sa tête semble remplie de gazouillis d’oiseaux et autres chants de la nature. Elle a la tête qui tourne de tant de sensations. Au bout d’un moment – quelques minutes, quelques heures, quelques jours – le placard s’ouvre. « Ne t’inquiète pas, chère amie, tout est arrangé », susurre la femme magnifique.
Rassurée, Amandine choisit une robe d’un vert émeraude assorti à ses yeux. Alors qu’elle se dit qu’elle ne sait pas du tout comment s’enfile cette robe, elle entend une voix ébréchée et éméchée, celle d’Alfred le lanceur de couteaux, provenant du palier inférieur. Elle l’interrompt alors qu’il gravait un cœur sur sa porte.
« Amandine, j’en peux plus, j’fais que penser à toi !
– Oui, mais pas maintenant. Il y a des moments pour penser à soi, et des moments pour penser à moi. La semaine dernière, c’était un moment pour passer à moi, c’était rigolo avec les couteaux, mais maintenant c’est un moment pour penser à toi, et puis on verra ce qu’il en est la semaine prochaine. Là, j’ai pas le temps, je vais enfiler une robe et ça va me prendre trois heures. En plus ta veste pue !
– Jeune fille, vous êtes dure avec la veste, et avec le garçon, les dérange Cléanthe arrivé entre-temps. Je me permets d’intervenir car cette histoire d’amour est très belle mais il me semble que vous gâchez quelque chose. Ne pensez-vous pas que l’investissement de ce jeune homme dans une veste, et puis son amour qu’il vous crie d’un air qui sait prendre le ton et l’odeur de l’amour transi ne mériterait pas un tête à tête dans votre chambre ?
– Ce n’est pas le moment, rétorque Amandine. Je suis en compagnie d’une personne respectable que je ne peux pas faire attendre… Tenez-vous compagnie tous les deux pendant que je fais mes petites affaires ; je vous prête mon appartement si vous voulez.
– Rooh non, Amandine, j’mange pas d’ce pain-là moi !
– Enfin, il n’est pas l’heure de passer à table : nous parlons d’amour et nous allons patienter, le temps que votre compagne reprenne ses esprits.
– Je ne suis pas sa compagne. On en a déjà parlé, dit Amandine à Alfred qui vient d’éclater en sanglots.
– Et tous mes poèmes, c’était du flan ?
– Quand tu les graves sur mon corps et que ça fait des cicatrices pendant trois semaines, oui !
– J’trouvais qu’c’était romantique, moi ! »
Cléanthe, sans écouter Amandine, sort un petit carnet sur lequel il écrit à la mine de plomb : « Graver des poèmes sur son corps, excellente idée ». Amandine lui laisse entrevoir son épaule sur laquelle figure une cicatrice en forme de demi « A ».
« Elle m’a jamais laissée finir ! sanglote Alfred.
– Il a voulu graver « Alfred » sur ma peau, vous trouvez ça normal, vous ?
– Tout dépend de la qualité du poème, non ? »
Amandine, excédée, pousse les deux hommes dans son appartement. Cléanthe tire Alfred par la manche et le fait s’asseoir, en lui demandant de lui raconter à quel point il est malheureux et comment cet amour le détruit. Tout en buvant verre après verre, Alfred lui raconte ses malheurs, qui remontent à son enfance, lorsque son père, maréchal-ferrant, le laissait seul à jouer parmi les fers à cheval et les couteaux. Ensuite ce fut le cirque et la vie de bohème, chaque soir des nouvelles sensations, les rencontres fantastiques et les autres, comme celle d’Amandine qui l’a laissé tomber, sans doute parce que ses couteaux ne sont pas assez aiguisés, pas assez longs, pas assez brillants.
Scène 6 : Le cœur du lanceur de couteaux
À force d’errer, l’Étranger arrive en bas d’un immeuble, de la fenêtre duquel jaillit soudain une bouteille qui se brise à ses pieds. De la fenêtre sort une chanson, ce qui fait naïvement sourire l’Étranger ; alors qu’il lève les yeux vers cette fenêtre, il aperçoit, à l’étage du dessus, la silhouette fugace d’une femme ; son cœur s’arrête un instant, car il lui semble bien que cette femme est celle qu’il a croisée un jour à la gare, lors de son arrivée dans la Cité. Il monte les étages, les yeux pétillants, et arrivé au troisième étage quelqu’un le saisit soudain par le col et l’enjoint à danser. Il le fait entrer dans un appartement complètement en désordre, où se trouve un autre homme, fort élégant, qui tape la mesure dans ses mains. L’Étranger leur demande s’ils connaissent la femme du dessus ; Cléanthe pense qu’il parle d’Amandine et lui répond qu’elle est la compagne d’Alfred.
« Qu’est-ce qu’une compagne ? demande l’Étranger.
– Une compagne, c’est une femme qu’vous ment !
– C’est pas bien gentil tout ça.
– Nan, c’est dégueulasse de jouer avec mes sentiments ! Presser mon cœur comme s’il s’agissait d’une palette, tout ça pour en extraire les plus belles couleurs !
– Il ne vaut mieux pas en avoir, alors. »
Pendant que Cléanthe explique à l’Étranger , avec un succès limité, ce qu’est une cigarette et pourquoi les fumer, Alfred attrape un couteau, se découpe la poitrine et dépose ensuite son cœur dans une bouteille vide. « T’as raison mon gars ! » dit-il à l’Étranger. « Sans cœur, ça s’passera beaucoup mieux ! J’ressens plus rien ! J’suis comme Amandine ! Maintenant elle va vouloir de moi ! Oui, c’était ça la solution ! »
Avant qu’il ne puisse sortir, l’Étranger s’approche de lui, prend le cœur d’Alfred et le lui tend. « Je ne sais pas qui vous êtes, mais vous ne devriez pas laisser trainer ça », lui dit-il avant d’enfoncer son poing dans son thorax, malgré ses protestations. Lorsque l’Étranger retire sa main, plus aucune blessure n’est apparente et le cœur d’Alfred rebat comme avant. Alfred s’écroule en larmes aux pieds de l’Étranger.
« Pourquoi t’as fait ça ? J’ressens dix fois plus, maintenant !
– Dites-moi, l’Étranger, vous êtes un peu un trouble-fête tout de même… Vous auriez pu le laisser aller au bout de son acte.
– Je sais pas, j’ai eu l’impression que c’est ce qu’il fallait faire… Ah, c’est vraiment dégueulasse », tousse-t-il à nouveau en écrasant sa cigarette par terre.
Plus haut dans l’immeuble, Amandine passe un charmant moment avec la femme passionnante, dont la conversation est passionnante et les blagues à mourir de rire. Elle pourrait dire n’importe quoi, ce serait merveilleux ; Amandine ne voit pas les heures passer. Elle qui a toujours détesté les robes avec corset, celle-ci semble faite pour elle… Et puis elle se rappelle que dans son appartement, il y a à la fois Alfred et son dernier tableau, et surtout l’invitation pour la soirée Oppheimer.
Elle descend l’escalier avec légèreté et entre chez elle.
« Vous voyez, mon cher Alfred, elle est revenue ! s’exclame Cléanthe.
– Ah, Amandine, excuse-moi ! Tout c’que j’t’ai dit, j’le pensais pas !
– Je vous connais, non ? demande l’Étranger à Amandine.
– Oui, oui… Vous aussi, vous allez me courir après tout le temps ? On peut pas être libre dans sa vie ? On est obligé de s’engager systématiquement dès qu’on couche avec un mec ? C’est pas possible ça, de se faire poursuivre jusqu’à son domicile par toutes les personnes avec qui on partage un moment… C’est incroyable, ça !
– Mais oui, je me souviens de cet immeuble, continue l’Étranger qui semble ignorer Amandine (et le fait qu’ils ont couché ensemble). C’est pour ça ! »
Il repousse gentiment les gens qui l’entourent et grimpe les escaliers, Cléanthe sur ses talons.
Sur le palier de sa magnifique voisine, Amandine demande à rentrer dans son appartement pour discuter (et échapper aux gardes gris). L’appartement de la femme magnifique est l’une des choses les plus belles qu’a jamais vu Amandine : aux murs, des cascades d’or ; par terre, la plus douce des prairies ; une musique angélique résonne constamment à ses oreilles. C’est presque trop, et Amandine serait presque saisie d’une nausée semblable à un trop-plein de bonbons à la liqueur si elle restait trop longtemps ici.
« J’ai reçu une invitation pour une soirée ce soir, explique Amandine, au manoir Oppheimer ; j’y suis conviée pour croquer la soirée afin de produire un tableau pour monsieur Oppheimer. Malheureusement, je n’ai rien à me mettre de respectable, et je voulais savoir si vous pouviez me prêter une tenue qui irait pour cette soirée ? En retour, vous pourriez peut-être m’accompagner ?
– Oh, ce serait vraiment un honneur ! Oui, j’ai très certainement une robe pour vous, nous faisons presque la même taille après tout. »
À ces mots purs et cristallins, Amandine se rend compte pendant une fraction de seconde qu’elle serait incapable de décrire les traits de son interlocutrice, qui lui ouvre sa garde-robe, jonchée des robes plus magnifiques les unes que les autres, et qui correspondent toutes exactement au style de l’artiste.
Des coups à la porte retentissent qui brisent ce moment parfait ; Amandine se cache derrière les robes et demande à sa voisine de la protéger de la garde. La femme magnifique se dirige vers la porte et semble discuter avec les gardes ; cependant Amandine n’entend rien, car sa tête semble remplie de gazouillis d’oiseaux et autres chants de la nature. Elle a la tête qui tourne de tant de sensations. Au bout d’un moment – quelques minutes, quelques heures, quelques jours – le placard s’ouvre. « Ne t’inquiète pas, chère amie, tout est arrangé », susurre la femme magnifique.
Rassurée, Amandine choisit une robe d’un vert émeraude assorti à ses yeux. Alors qu’elle se dit qu’elle ne sait pas du tout comment s’enfile cette robe, elle entend une voix ébréchée et éméchée, celle d’Alfred le lanceur de couteaux, provenant du palier inférieur. Elle l’interrompt alors qu’il gravait un cœur sur sa porte.
« Amandine, j’en peux plus, j’fais que penser à toi !
– Oui, mais pas maintenant. Il y a des moments pour penser à soi, et des moments pour penser à moi. La semaine dernière, c’était un moment pour passer à moi, c’était rigolo avec les couteaux, mais maintenant c’est un moment pour penser à toi, et puis on verra ce qu’il en est la semaine prochaine. Là, j’ai pas le temps, je vais enfiler une robe et ça va me prendre trois heures. En plus ta veste pue !
– Jeune fille, vous êtes dure avec la veste, et avec le garçon, les dérange Cléanthe arrivé entre-temps. Je me permets d’intervenir car cette histoire d’amour est très belle mais il me semble que vous gâchez quelque chose. Ne pensez-vous pas que l’investissement de ce jeune homme dans une veste, et puis son amour qu’il vous crie d’un air qui sait prendre le ton et l’odeur de l’amour transi ne mériterait pas un tête à tête dans votre chambre ?
– Ce n’est pas le moment, rétorque Amandine. Je suis en compagnie d’une personne respectable que je ne peux pas faire attendre… Tenez-vous compagnie tous les deux pendant que je fais mes petites affaires ; je vous prête mon appartement si vous voulez.
– Rooh non, Amandine, j’mange pas d’ce pain-là moi !
– Enfin, il n’est pas l’heure de passer à table : nous parlons d’amour et nous allons patienter, le temps que votre compagne reprenne ses esprits.
– Je ne suis pas sa compagne. On en a déjà parlé, dit Amandine à Alfred qui vient d’éclater en sanglots.
– Et tous mes poèmes, c’était du flan ?
– Quand tu les graves sur mon corps et que ça fait des cicatrices pendant trois semaines, oui !
– J’trouvais qu’c’était romantique, moi ! »
Cléanthe, sans écouter Amandine, sort un petit carnet sur lequel il écrit à la mine de plomb : « Graver des poèmes sur son corps, excellente idée ». Amandine lui laisse entrevoir son épaule sur laquelle figure une cicatrice en forme de demi « A ».
« Elle m’a jamais laissée finir ! sanglote Alfred.
– Il a voulu graver « Alfred » sur ma peau, vous trouvez ça normal, vous ?
– Tout dépend de la qualité du poème, non ? »
Amandine, excédée, pousse les deux hommes dans son appartement. Cléanthe tire Alfred par la manche et le fait s’asseoir, en lui demandant de lui raconter à quel point il est malheureux et comment cet amour le détruit. Tout en buvant verre après verre, Alfred lui raconte ses malheurs, qui remontent à son enfance, lorsque son père, maréchal-ferrant, le laissait seul à jouer parmi les fers à cheval et les couteaux. Ensuite ce fut le cirque et la vie de bohème, chaque soir des nouvelles sensations, les rencontres fantastiques et les autres, comme celle d’Amandine qui l’a laissé tomber, sans doute parce que ses couteaux ne sont pas assez aiguisés, pas assez longs, pas assez brillants.
Scène 6 : Le cœur du lanceur de couteaux
À force d’errer, l’Étranger arrive en bas d’un immeuble, de la fenêtre duquel jaillit soudain une bouteille qui se brise à ses pieds. De la fenêtre sort une chanson, ce qui fait naïvement sourire l’Étranger ; alors qu’il lève les yeux vers cette fenêtre, il aperçoit, à l’étage du dessus, la silhouette fugace d’une femme ; son cœur s’arrête un instant, car il lui semble bien que cette femme est celle qu’il a croisée un jour à la gare, lors de son arrivée dans la Cité. Il monte les étages, les yeux pétillants, et arrivé au troisième étage quelqu’un le saisit soudain par le col et l’enjoint à danser. Il le fait entrer dans un appartement complètement en désordre, où se trouve un autre homme, fort élégant, qui tape la mesure dans ses mains. L’Étranger leur demande s’ils connaissent la femme du dessus ; Cléanthe pense qu’il parle d’Amandine et lui répond qu’elle est la compagne d’Alfred.
« Qu’est-ce qu’une compagne ? demande l’Étranger.
– Une compagne, c’est une femme qu’vous ment !
– C’est pas bien gentil tout ça.
– Nan, c’est dégueulasse de jouer avec mes sentiments ! Presser mon cœur comme s’il s’agissait d’une palette, tout ça pour en extraire les plus belles couleurs !
– Il ne vaut mieux pas en avoir, alors. »
Pendant que Cléanthe explique à l’Étranger , avec un succès limité, ce qu’est une cigarette et pourquoi les fumer, Alfred attrape un couteau, se découpe la poitrine et dépose ensuite son cœur dans une bouteille vide. « T’as raison mon gars ! » dit-il à l’Étranger. « Sans cœur, ça s’passera beaucoup mieux ! J’ressens plus rien ! J’suis comme Amandine ! Maintenant elle va vouloir de moi ! Oui, c’était ça la solution ! »
Avant qu’il ne puisse sortir, l’Étranger s’approche de lui, prend le cœur d’Alfred et le lui tend. « Je ne sais pas qui vous êtes, mais vous ne devriez pas laisser trainer ça », lui dit-il avant d’enfoncer son poing dans son thorax, malgré ses protestations. Lorsque l’Étranger retire sa main, plus aucune blessure n’est apparente et le cœur d’Alfred rebat comme avant. Alfred s’écroule en larmes aux pieds de l’Étranger.
« Pourquoi t’as fait ça ? J’ressens dix fois plus, maintenant !
– Dites-moi, l’Étranger, vous êtes un peu un trouble-fête tout de même… Vous auriez pu le laisser aller au bout de son acte.
– Je sais pas, j’ai eu l’impression que c’est ce qu’il fallait faire… Ah, c’est vraiment dégueulasse », tousse-t-il à nouveau en écrasant sa cigarette par terre.
Plus haut dans l’immeuble, Amandine passe un charmant moment avec la femme passionnante, dont la conversation est passionnante et les blagues à mourir de rire. Elle pourrait dire n’importe quoi, ce serait merveilleux ; Amandine ne voit pas les heures passer. Elle qui a toujours détesté les robes avec corset, celle-ci semble faite pour elle… Et puis elle se rappelle que dans son appartement, il y a à la fois Alfred et son dernier tableau, et surtout l’invitation pour la soirée Oppheimer.
Elle descend l’escalier avec légèreté et entre chez elle.
« Vous voyez, mon cher Alfred, elle est revenue ! s’exclame Cléanthe.
– Ah, Amandine, excuse-moi ! Tout c’que j’t’ai dit, j’le pensais pas !
– Je vous connais, non ? demande l’Étranger à Amandine.
– Oui, oui… Vous aussi, vous allez me courir après tout le temps ? On peut pas être libre dans sa vie ? On est obligé de s’engager systématiquement dès qu’on couche avec un mec ? C’est pas possible ça, de se faire poursuivre jusqu’à son domicile par toutes les personnes avec qui on partage un moment… C’est incroyable, ça !
– Mais oui, je me souviens de cet immeuble, continue l’Étranger qui semble ignorer Amandine (et le fait qu’ils ont couché ensemble). C’est pour ça ! »
Il repousse gentiment les gens qui l’entourent et grimpe les escaliers, Cléanthe sur ses talons.
J'écris des mini-JdR par dizaines !
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Scène 7 : D’une rencontre qui n’aurait pas du se produire si vite
[Je décide à ce moment de tirer une carte « Chance », première carte tirée après 1h08 de jeu, une situation commune pour ce jeu léger en système. Je tire : « Un peu de recul. Jouez le reste de la scène comme si elle était observée de haut et/ou de loin par quelqu’un d’autre. »]
Une personne est sur son balcon avec une longue-vue et observe ce qu’il se passe dans l’immeuble. L’Étranger monte les escaliers et tourne la poignée de l’appartement de la femme magnifique, qui a l’air intriguée par son arrivée. Elle s’adresse à lui, mais on ne peut entendre, à cette distance, ce qu’ils se disent ; on voit en revanche une aura dorée se mettre à entourer l’épiderme de l’Étranger. Cléanthe entre à sa suite avant de reculer brusquement après avoir fait un bref salut de la tête à la femme, qui lui adresse son plus beau sourire.
L’Étranger, toujours nimbé de lumière, semble mal à l’aise ; une protubérance dans son dos le gêne. La femme s’approche de lui, elle avance timidement les mains vers son dos en cherchant son assentiment. L’Étranger semble ailleurs, perdu. Cléanthe observe la scène depuis l’entrebâillement de la porte. Plus bas, Amandine a mis dehors Alfred à coups de pied au cul ; elle est rentrée chez elle en furie, sans plus aucune élégance, avant de remonter bruyamment les marches et de se planter derrière Cléanthe. Au même moment, la femme touche l’Étranger, et une sorte de maelstrom de couleurs explose dans tous les sens. Lorsqu’elles s’éteignent, comme à la fin d’un feu d’artifice, l’appartement dans lequel se trouve les personnages apparaît dans son état le plus crasseux. La femme a disparu, et l’Étranger, hagard, ne luit plus. La personne d’en face range son télescope, alors qu’on aperçoit Alfred en bas de l’immeuble, hurlant des noms d’oiseaux à l’égard d’Amandine assez fort pour qu’on l’entende de loin. Il finit par s’en aller d’un air déçu lorsqu’il se rend compte que ses invectives n’ont aucun effet.
L’Étranger se tourne vers Cléanthe et le regarde avec un air halluciné.
« Où est-elle ? Où est-elle ?
– Je n’en sais fichtre rien.
– Bah oui, elle est où là ? renchérit Amandine. Ils sont où, les bijoux que j’allais mettre ce soir ? »
Elle baisse les yeux et se rend compte qu’elle porte une robe avec un corset des plus mal fichus et inconfortables, sans compter qu’elle ne semble pas avoir été lavé depuis fort longtemps.
« Ma chère, si vous avez abandonné ce pauvre Alfred pour une robe mal fagotée, laissez-moi vous dire que vous avez fait un bien mauvais choix !
– Où est-elle ? Où est-elle ? Où sommes-nous ?
– Vous êtes dans un appartement d’une banlieue pauvre, où devait se dérouler un magnifique drame amoureux, et où s’est terminé, encore une fois, un de ces vaudevilles grotesques dont les pauvres ont le secret.
– Mais qui êtes-vous ? Je ne comprends rien…
– On va reprendre depuis le début. Moi, je me suis déjà présenté plusieurs fois, alors que vous n’avez toujours pas dit votre nom, monsieur…
– Il s’appelle l’Étranger, voilà, répond Amandine. Il n’a pas de nom, je sais pas si c’est un style… Moi ça m’a plu, je ne vais pas le cacher.
– Ah, parce qu’avec lui aussi, donc ?
– Mais est-ce que vous l’avez vue ? reprend l’Étranger.
– La femme magnifique ? Oui, ça va être dur d’en trouver une maintenant, lui répond Cléanthe.
– Quel gâchis, soupir Amandine, c’était si beau ici… Comme être au milieu d’une clairière dans une forêt paisible, et au bord de la mer à la fois, un peu comme dans mes tableaux… Je vous les ai montrés ? Venez, je vous montre. »
Tous trois descendent chez Amandine, qui leur montre le tableau qu’elle a préparé pour Jeff l’Usurier à grands renforts de détails techniques.
« Et cette figure, elle représente quelque chose en particulier ? » demande Cléanthe en montrant le maître d’école accoudé à un ponton, dans un coin du tableau, détail dont ne se rappelait pas Amandine. L’Étranger se penche vers le tableau et en gratte un endroit.
« Vous vous êtes trompée, regardez ! Les ailes de l’Ange, là… Ils sont pas comme ça… »
Amandine lui tape les mains. « Mais c’est quoi ces manières ? Vous venez d’où pour gratter les tableaux des gens ? Je vais devoir tout retoucher ! Bravo, bravo ! Il reconnaît plus qu’on a couché ensemble, il m’ignore, il va voir la femme magnifique, il la fait disparaître, il gratte mon tableau… Ah, vous avez des manières, vous !
– Parce que cet étranger, vous le connaissez mais vous l’appelez l’Étranger quand même ? demande Cléanthe.
– Eh bien je trouvais que ça lui donnait un style…
– Ah d’accord, c’est pour faire valoir vos amants que vous les nommez de manière mystérieuse ? Est-ce que ça vous permet, continue Cléanthe d’un air sérieux et pénétré, d’avoir une vie plus palpitante ?
– Alors, les surnoms, ça peut apporter du piquant, mais c’est vraiment la multiplication des expériences que je vous recommande.
– Mais je ne comprends rien… Elle est où, maintenant ? reprend l’Étranger.
– Eh bien, dit Amandine, on devait aller à une soirée ensemble… Elle s’est absentée temporairement, ça lui arrive, je ne vous le cache pas. Sa vie est encore plus étrange que la mienne. Allons à la soirée, elle y sera peut-être ! Cela dit, vous n’êtes pas invité, vous.
– Mais dans quel genre de soirée allez-vous, nippée comme cela ? objecte Cléanthe.
– Au manoir Oppheimer, mais j’avais prévu une autre robe…
– Ah oui, je vois très bien, dit Cléanthe en sortant l’invitation de sa poche.
– Et elle y sera ?
– Je peux vous inviter, propose Cléanthe, mais il est hors de question que vous y alliez dans cette tenue. J’ai sans doute une solution pour vous ; je peux vous présenter un mien tailleur, si je lui met une rouste correcte à la savate, il sera en mesure de vous fournir les habits pour ce soir. En échange, vous m’aiderez à accomplir un petit projet personnel, ajoute-t-il d’un air rieur. Quelque chose de léger, rien que vous n’ayez déjà pratiqué dans votre vie de dépravée.
– Ce que vous dites, c’est mal, objecte l’Étranger.
– Le pugilat est tout à fait toléré chez les tailleurs !
– Non, c’est ce que vous voulez faire après qui est mal. La pauvre fille n’a rien demandé, elle est innocente !
– Il s’agit juste d’un petit kidnapping, mais si vous ne voulez pas venir, dites-le moi tout de suite !
– Mais de quoi parlez-vous, enfin ?
– Ils veulent faire mal à une jeune fille… Pourquoi ? C’est mal de faire mal !
– Attendez, un kidnapping n’a jamais tué personne !
– Mais ils vont la découper en morceaux, après ?
– Mais non, voyons ! Ce n’est pas vrai ! »
[Épiphanie demande à tirer une carte « Chance ». Il tire : « Un rêve. Quelqu’un s’éveille d’un rêve. Qui est-ce ? La scène précédente était-elle réelle ou partie du rêve » ?]
Scène 8 : Un bourre pif en guise de pourboire
L’Étranger s’éveille sur une moquette verte. Face à lui, un homme avec un sérieux problème de peau semble être K.O., allongé au sol. Il ouvre son poing, des plumes sont à l’intérieur. Le rideau se tire : Amandine sort, vêtue d’une robe impeccable.
« Chère amie, je dois dire que vous n’êtes certes pas magnifique, mais vous êtes tout à fait charmante, sourit Cléanthe.
– Eh bien, il faut travailler dur pour vous arracher un compliment !
– C’est que, vous comprenez, c’est comme si j’avais eu les yeux et le cœur brûlé… mais je travaille sur moi-même.
– Vous sonnez comme Alfred…
– Il y a une certaine ressemblance entre ce garçon et moi-même… J’avoue qu’une ceinture de couteaux serait extrêmement seyante sous cette veste en peau de gorille…
– Ah non, par pitié ! Et n’allez jamais graver quelque chose sur le corps d’une femme. C’est très malpoli. »
Cléanthe sort son carnet et raye sa note précédente, alors que l’Étranger se plante devant lui.
« Vous êtes revenu à vous ?
– Où sommes-nous ? Qui êtes-vous ?
– Mais enfin, c’est fini, tout de même ? C’est moi, Amandine !
– Monsieur, s’avance Cléanthe, je vous dois des excuses. J’ai été un peu vif dans mon pugilat avec le tailleur, et cela a occasionné quelques dommages collatéraux, dont je vous prie d’accepter les désagréments. Une cigarette ?
– C’est quoi, une cigarette ?
– Ça se met dans le nez.
– Pourquoi faire ?
– Vous allez voir, dit Cléanthe en l’allumant.
– Mais c’est horrible ! À quoi ça sert ?
– On y trouve un agrément, parfois.
– Quand même, la poulie chinoise, c’est pas fait par n’importe qui… » ronchonne Amandine dans sa barbe.
Le tailleur se relève en se frottant la mâchoire.
« Ah ! monsieur, s’exclame-t-il à l’adresse de l’Étranger, franchement, je n’avais pas reçu une dérouillée comme ça depuis longtemps. Prenez ce que vous voulez dans la boutique, c’est pour moi.
– Mais je ne veux rien…
– Mais si, dit Cléanthe, il va prendre ce magnifique poncho en peau de lama et ces chaussures fabriquées dans un couvent, dont chaque pièce a été bénie trois fois, ce qui explique le prix indécent qu’elles coûtent habituellement. Profitez-en, mon ami, c’est une occasion.
– Monsieur Brumaire a raison, comme d’habitude : les babouches façonnées par le couvent de la Très Sainte Lumière d’Itras sont un choix extraordinaire, et je pense qu’elles vous iront très bien.
– Non merci, proteste l’Étranger, je suis très bien comme je suis.
– Écoutez, s’agace le vendeur, vous allez prendre ces chaussures.
– Si vous voulez, je les prends.
– Mettez-les, maintenant.
– Non, je…
– ALLEZ, METTEZ-LES !
– Monsieur, insiste Cléanthe à l’adresse de l’Étranger, votre comportement est à la limite de l’incorrection. Vous venez tout de même de lui mettre une dérouillée, la moindre des choses serait de mettre les chaussures maintenant.
– TU VAS METTRE CES CHAUSSURES, OUI ? Hurle le tailleur en sortant un revolver de son veston et le pointant sur l’Étranger.
– Je n’aime pas le ton que vous prenez avec moi, il est très désagréable.
– Monsieur me pète la gueule, je lui offre des chaussures, et en plus il veut pas les mettre ?! Monsieur Brumaire, vous avez des amis… bien particuliers ! Je ne sais pas ce qui me retient de…
– Ça, mon cher, acquiesce Cléanthe, je vous donne bien raison. Mais ne profitez pas de la situation pour prendre une revanche que vous ne méritez pas. Vous n’aurez pas de pourboire.
– Excusez-moi, marmonne le tailleur d’un air penaud, je me suis laissé emporter. Allez monsieur, mettez ces chaussures et n’en parlons plus.
– Euh… non. Mais ce n’est pas grave : je vais les poser et tout se passera bien.
– Bon eh bien ! s’exclame Cléanthe, je les prend, monsieur me les offre, et voilà. Ça ira très bien avec ma veste en peau de gorille, et comme ça nous ne serons pas obligés de les laisser là. N’est-ce pas, cher ami ? »
Le tailleur s’éponge le front, il est tout blanc. En balbutiant, il congédie ses clients. « 25 ans de boutique, jamais on ne m’a refusé un cadeau… »
[Je décide à ce moment de tirer une carte « Chance », première carte tirée après 1h08 de jeu, une situation commune pour ce jeu léger en système. Je tire : « Un peu de recul. Jouez le reste de la scène comme si elle était observée de haut et/ou de loin par quelqu’un d’autre. »]
Une personne est sur son balcon avec une longue-vue et observe ce qu’il se passe dans l’immeuble. L’Étranger monte les escaliers et tourne la poignée de l’appartement de la femme magnifique, qui a l’air intriguée par son arrivée. Elle s’adresse à lui, mais on ne peut entendre, à cette distance, ce qu’ils se disent ; on voit en revanche une aura dorée se mettre à entourer l’épiderme de l’Étranger. Cléanthe entre à sa suite avant de reculer brusquement après avoir fait un bref salut de la tête à la femme, qui lui adresse son plus beau sourire.
L’Étranger, toujours nimbé de lumière, semble mal à l’aise ; une protubérance dans son dos le gêne. La femme s’approche de lui, elle avance timidement les mains vers son dos en cherchant son assentiment. L’Étranger semble ailleurs, perdu. Cléanthe observe la scène depuis l’entrebâillement de la porte. Plus bas, Amandine a mis dehors Alfred à coups de pied au cul ; elle est rentrée chez elle en furie, sans plus aucune élégance, avant de remonter bruyamment les marches et de se planter derrière Cléanthe. Au même moment, la femme touche l’Étranger, et une sorte de maelstrom de couleurs explose dans tous les sens. Lorsqu’elles s’éteignent, comme à la fin d’un feu d’artifice, l’appartement dans lequel se trouve les personnages apparaît dans son état le plus crasseux. La femme a disparu, et l’Étranger, hagard, ne luit plus. La personne d’en face range son télescope, alors qu’on aperçoit Alfred en bas de l’immeuble, hurlant des noms d’oiseaux à l’égard d’Amandine assez fort pour qu’on l’entende de loin. Il finit par s’en aller d’un air déçu lorsqu’il se rend compte que ses invectives n’ont aucun effet.
L’Étranger se tourne vers Cléanthe et le regarde avec un air halluciné.
« Où est-elle ? Où est-elle ?
– Je n’en sais fichtre rien.
– Bah oui, elle est où là ? renchérit Amandine. Ils sont où, les bijoux que j’allais mettre ce soir ? »
Elle baisse les yeux et se rend compte qu’elle porte une robe avec un corset des plus mal fichus et inconfortables, sans compter qu’elle ne semble pas avoir été lavé depuis fort longtemps.
« Ma chère, si vous avez abandonné ce pauvre Alfred pour une robe mal fagotée, laissez-moi vous dire que vous avez fait un bien mauvais choix !
– Où est-elle ? Où est-elle ? Où sommes-nous ?
– Vous êtes dans un appartement d’une banlieue pauvre, où devait se dérouler un magnifique drame amoureux, et où s’est terminé, encore une fois, un de ces vaudevilles grotesques dont les pauvres ont le secret.
– Mais qui êtes-vous ? Je ne comprends rien…
– On va reprendre depuis le début. Moi, je me suis déjà présenté plusieurs fois, alors que vous n’avez toujours pas dit votre nom, monsieur…
– Il s’appelle l’Étranger, voilà, répond Amandine. Il n’a pas de nom, je sais pas si c’est un style… Moi ça m’a plu, je ne vais pas le cacher.
– Ah, parce qu’avec lui aussi, donc ?
– Mais est-ce que vous l’avez vue ? reprend l’Étranger.
– La femme magnifique ? Oui, ça va être dur d’en trouver une maintenant, lui répond Cléanthe.
– Quel gâchis, soupir Amandine, c’était si beau ici… Comme être au milieu d’une clairière dans une forêt paisible, et au bord de la mer à la fois, un peu comme dans mes tableaux… Je vous les ai montrés ? Venez, je vous montre. »
Tous trois descendent chez Amandine, qui leur montre le tableau qu’elle a préparé pour Jeff l’Usurier à grands renforts de détails techniques.
« Et cette figure, elle représente quelque chose en particulier ? » demande Cléanthe en montrant le maître d’école accoudé à un ponton, dans un coin du tableau, détail dont ne se rappelait pas Amandine. L’Étranger se penche vers le tableau et en gratte un endroit.
« Vous vous êtes trompée, regardez ! Les ailes de l’Ange, là… Ils sont pas comme ça… »
Amandine lui tape les mains. « Mais c’est quoi ces manières ? Vous venez d’où pour gratter les tableaux des gens ? Je vais devoir tout retoucher ! Bravo, bravo ! Il reconnaît plus qu’on a couché ensemble, il m’ignore, il va voir la femme magnifique, il la fait disparaître, il gratte mon tableau… Ah, vous avez des manières, vous !
– Parce que cet étranger, vous le connaissez mais vous l’appelez l’Étranger quand même ? demande Cléanthe.
– Eh bien je trouvais que ça lui donnait un style…
– Ah d’accord, c’est pour faire valoir vos amants que vous les nommez de manière mystérieuse ? Est-ce que ça vous permet, continue Cléanthe d’un air sérieux et pénétré, d’avoir une vie plus palpitante ?
– Alors, les surnoms, ça peut apporter du piquant, mais c’est vraiment la multiplication des expériences que je vous recommande.
– Mais je ne comprends rien… Elle est où, maintenant ? reprend l’Étranger.
– Eh bien, dit Amandine, on devait aller à une soirée ensemble… Elle s’est absentée temporairement, ça lui arrive, je ne vous le cache pas. Sa vie est encore plus étrange que la mienne. Allons à la soirée, elle y sera peut-être ! Cela dit, vous n’êtes pas invité, vous.
– Mais dans quel genre de soirée allez-vous, nippée comme cela ? objecte Cléanthe.
– Au manoir Oppheimer, mais j’avais prévu une autre robe…
– Ah oui, je vois très bien, dit Cléanthe en sortant l’invitation de sa poche.
– Et elle y sera ?
– Je peux vous inviter, propose Cléanthe, mais il est hors de question que vous y alliez dans cette tenue. J’ai sans doute une solution pour vous ; je peux vous présenter un mien tailleur, si je lui met une rouste correcte à la savate, il sera en mesure de vous fournir les habits pour ce soir. En échange, vous m’aiderez à accomplir un petit projet personnel, ajoute-t-il d’un air rieur. Quelque chose de léger, rien que vous n’ayez déjà pratiqué dans votre vie de dépravée.
– Ce que vous dites, c’est mal, objecte l’Étranger.
– Le pugilat est tout à fait toléré chez les tailleurs !
– Non, c’est ce que vous voulez faire après qui est mal. La pauvre fille n’a rien demandé, elle est innocente !
– Il s’agit juste d’un petit kidnapping, mais si vous ne voulez pas venir, dites-le moi tout de suite !
– Mais de quoi parlez-vous, enfin ?
– Ils veulent faire mal à une jeune fille… Pourquoi ? C’est mal de faire mal !
– Attendez, un kidnapping n’a jamais tué personne !
– Mais ils vont la découper en morceaux, après ?
– Mais non, voyons ! Ce n’est pas vrai ! »
[Épiphanie demande à tirer une carte « Chance ». Il tire : « Un rêve. Quelqu’un s’éveille d’un rêve. Qui est-ce ? La scène précédente était-elle réelle ou partie du rêve » ?]
Scène 8 : Un bourre pif en guise de pourboire
L’Étranger s’éveille sur une moquette verte. Face à lui, un homme avec un sérieux problème de peau semble être K.O., allongé au sol. Il ouvre son poing, des plumes sont à l’intérieur. Le rideau se tire : Amandine sort, vêtue d’une robe impeccable.
« Chère amie, je dois dire que vous n’êtes certes pas magnifique, mais vous êtes tout à fait charmante, sourit Cléanthe.
– Eh bien, il faut travailler dur pour vous arracher un compliment !
– C’est que, vous comprenez, c’est comme si j’avais eu les yeux et le cœur brûlé… mais je travaille sur moi-même.
– Vous sonnez comme Alfred…
– Il y a une certaine ressemblance entre ce garçon et moi-même… J’avoue qu’une ceinture de couteaux serait extrêmement seyante sous cette veste en peau de gorille…
– Ah non, par pitié ! Et n’allez jamais graver quelque chose sur le corps d’une femme. C’est très malpoli. »
Cléanthe sort son carnet et raye sa note précédente, alors que l’Étranger se plante devant lui.
« Vous êtes revenu à vous ?
– Où sommes-nous ? Qui êtes-vous ?
– Mais enfin, c’est fini, tout de même ? C’est moi, Amandine !
– Monsieur, s’avance Cléanthe, je vous dois des excuses. J’ai été un peu vif dans mon pugilat avec le tailleur, et cela a occasionné quelques dommages collatéraux, dont je vous prie d’accepter les désagréments. Une cigarette ?
– C’est quoi, une cigarette ?
– Ça se met dans le nez.
– Pourquoi faire ?
– Vous allez voir, dit Cléanthe en l’allumant.
– Mais c’est horrible ! À quoi ça sert ?
– On y trouve un agrément, parfois.
– Quand même, la poulie chinoise, c’est pas fait par n’importe qui… » ronchonne Amandine dans sa barbe.
Le tailleur se relève en se frottant la mâchoire.
« Ah ! monsieur, s’exclame-t-il à l’adresse de l’Étranger, franchement, je n’avais pas reçu une dérouillée comme ça depuis longtemps. Prenez ce que vous voulez dans la boutique, c’est pour moi.
– Mais je ne veux rien…
– Mais si, dit Cléanthe, il va prendre ce magnifique poncho en peau de lama et ces chaussures fabriquées dans un couvent, dont chaque pièce a été bénie trois fois, ce qui explique le prix indécent qu’elles coûtent habituellement. Profitez-en, mon ami, c’est une occasion.
– Monsieur Brumaire a raison, comme d’habitude : les babouches façonnées par le couvent de la Très Sainte Lumière d’Itras sont un choix extraordinaire, et je pense qu’elles vous iront très bien.
– Non merci, proteste l’Étranger, je suis très bien comme je suis.
– Écoutez, s’agace le vendeur, vous allez prendre ces chaussures.
– Si vous voulez, je les prends.
– Mettez-les, maintenant.
– Non, je…
– ALLEZ, METTEZ-LES !
– Monsieur, insiste Cléanthe à l’adresse de l’Étranger, votre comportement est à la limite de l’incorrection. Vous venez tout de même de lui mettre une dérouillée, la moindre des choses serait de mettre les chaussures maintenant.
– TU VAS METTRE CES CHAUSSURES, OUI ? Hurle le tailleur en sortant un revolver de son veston et le pointant sur l’Étranger.
– Je n’aime pas le ton que vous prenez avec moi, il est très désagréable.
– Monsieur me pète la gueule, je lui offre des chaussures, et en plus il veut pas les mettre ?! Monsieur Brumaire, vous avez des amis… bien particuliers ! Je ne sais pas ce qui me retient de…
– Ça, mon cher, acquiesce Cléanthe, je vous donne bien raison. Mais ne profitez pas de la situation pour prendre une revanche que vous ne méritez pas. Vous n’aurez pas de pourboire.
– Excusez-moi, marmonne le tailleur d’un air penaud, je me suis laissé emporter. Allez monsieur, mettez ces chaussures et n’en parlons plus.
– Euh… non. Mais ce n’est pas grave : je vais les poser et tout se passera bien.
– Bon eh bien ! s’exclame Cléanthe, je les prend, monsieur me les offre, et voilà. Ça ira très bien avec ma veste en peau de gorille, et comme ça nous ne serons pas obligés de les laisser là. N’est-ce pas, cher ami ? »
Le tailleur s’éponge le front, il est tout blanc. En balbutiant, il congédie ses clients. « 25 ans de boutique, jamais on ne m’a refusé un cadeau… »
J'écris des mini-JdR par dizaines !
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 9 : Soirée-Kidnapping
Une fois dehors, Cléanthe leur propose de se mettre en route : il y a une femme à kidnapper, après tout. Amandine accepte de l’aider pour le kidnapping, mais pas pour la suite ; malgré les admonestations de l’Étranger, Cléanthe continue de clamer qu’il n’y a pas de « suite ». Sur ces entrefaites, Chesterfield les rejoint, surprise de trouver Amandine en compagnie de l’homme qu’elle avait croisé ce matin. L’Étranger, bien sûr, ne la reconnaît pas : Amandine lui explique qu’il a des problèmes de mémoire depuis qu’il s’est pris un coup sur la tête. « Mon pauvre ami », soupire Chesterfield en posant sa main sur la poitrine de l’Étranger, « vous ne vous souvenez de rien ? Vous qui étiez si gentil…
– Si, je me souviens ! dit l’Étranger. Elle marchait dans la foule… elle était belle… elle était magnifique… et j’ai senti qu’elle avait quelque chose de spécial… »
La troupe continue d’avancer pendant que Chesterfield, tenant la main de l’Étranger, lui rappelle que Jeff l’Usurier lui a confié un boulot : retrouver un certain Cléanthe Brumaire. L’Étranger sent la peur dans les mots de Chesterfield, tout comme monsieur Brumaire, d’ailleurs, qui est devenu tout blanc. Cléanthe balbutie, et Amandine lui sauve la mise en le présentant comme Alexandre Brumaire, frère du précédent. « Alexandre Brumaire » propose à Chesterfield de transmettre un message à son « frère » ; secrètement, Cléanthe est ravi d’être enfin en danger. L’Étranger proteste : cet homme est bien Cléanthe Brumaire, il le lui a dit tout à l’heure… Chesterfield fait les gros yeux et prévient : « J’espère que vous ne me mentez pas. Je suis bonne poire, mais faut pas pousser.
– Je n’oserai pas vous mentir, vous êtes une charmante personne, répond Cléanthe en lui faisant un baisemain.
– Mensonge… mensonge… mensonge… mensonge… » répète l’Étranger, amenant Cléanthe à balbutier de plus en plus.
[Je demande à Épiphanie de tirer une carte « Résolution ». Mass lit « Non, mais… Le personnage échoue, mais une autre chose positive arrive à la place, sans rapport avec ce qu’il tentait de faire. »]
Cléanthe s’embrouille et regarde l’Étranger d’un air mauvais : son mensonge ne prend pas. Chesterfield s’apprête à protester lorsqu’une foule rentre soudain dans la rue : une foule de festival, composée de musiciens, de cracheurs de feu, de jongleurs… dans la bousculade, Chesterfield, poussée par la foule, perd de vue le reste du groupe. Cléanthe est furieux : non content d’avoir gâché son mensonge, l’Étranger lui avait caché qu’il travaillait pour Jeff l’Usurier (que l’Étranger dit ne pas connaître : si Jeff l’Usurier n’est pas gentil, il est impossible qu’il travaille pour lui).
La soirée de fête est presque gâchée par tous ces événements, mais les trois continuent tout de même de marcher jusqu’au manoir Oppheimer. Sur le chemin, Cléanthe demande à Amandine, dont « les croûtes ne cassent pas trois pattes à un canard », de lui indiquer au moment opportun la personne qu’il conviendra de kidnapper. « On peut changer l’avenir ? » leur demande l’Étranger. « Parce que si oui, j’aimerais éviter que cette personne se fasse couper en morceaux… ». Cléanthe commence à protester à nouveau, et comprend tout à coup que l’Étranger a raison sur le sort de la victime et qu’il n’y avait pas pensé jusque là. Peut-être y a-t-il cependant une bonne solution…
Le dialogue s’engage sur la femme magnifique que Cléanthe est supposé kidnapper : Amandine, avec son sens de l’esthétique, pourrait lui signaler une femme adéquate pendant la soirée… À ces mots, l’Étranger se remet à parler de la femme qu’il a croisé un jour, et comprend qu’elle est la voisine d’Amandine : il demande à être amené immédiatement à leur immeuble. Les deux autres lui proposent d’y aller après la fête.
Devant le manoir Oppheimer (que Cléanthe connaît bien pour y être souvent allé du temps où le père était encore en vie), toutes les lumières sont allumées et plusieurs voitures sont garées. Des gens mieux habillés les uns que les autres arrivent au perron par deux ; Cléanthe et Amandine avancent par deux alors que l’Étranger va seul, ce qui lui récolte des regards lourds de sous-entendus de la part des autres invités, malgré son irradiante beauté. Devant la porte, un homme en perruque vérifie le nom des invités dans un épais volume, en train d’écouter une femme vitupérer devant lui : « Mais puisque je vous dis que je suis invitée, avec un type étrange ! Enfin, il s’appelle “l’Étranger” ! »
Scène 10 : Où Géraldine remplace Chesterfield
Géraldine reconnaît la petite troupe et, tout en pestant contre Amandine, leur explique qu’elle remplace Chesterfield, qui a eu un empêchement, au bras de l’Étranger. Celui-ci fait un sourire et un clin d’œil à Géraldine, avant de rentrer avec les autres dans le manoir. « Tu me refais un clin d’œil comme ça », prévient-elle à l’envers de l’Étranger en le menaçant de son couteau, « et la prochaine fois que tu cligneras de l’œil, tu verras plus rien. Parce que t’en auras plus qu’un, d’œil ». L’Étranger, sans se laisser démonter, pose un doigt sur ses lèvres et lui demande pourquoi elle est si méchante. Géraldine est furieuse : elle veut savoir où est Cléanthe, elle n’est pas là pour flirter avec un type qui la confond avec sa sœur jumelle.
« C’est quoi, des jumelles ? demande l’Étranger.
– Alors les jumelles, répond Amandine, c’est comme les cigarettes : si t’en mets une dans la bouche, c’est sympa, si t’en mets une dans la bouche et une dans le nez, c’est impossible. »
L’Étranger se met à masser Géraldine pour la libérer de sa tension ; malgré les coups qu’il se prend, il ne se départit pas de son sourire niais. Cléanthe et Amandine se tiennent loin de l’escarmouche et décident plutôt de s’orienter vers le buffet, pour en dévorer les crevettes tant qu’elles sont encore fraiches ; à peu près au même moment où ils se perdent dans la foule, l’Étranger explique à Géraldine que Cléanthe était avec eux, ce qui la fait fulminer plus encore.
« Tu vas m’aider à le retrouver immédiatement, si tu tiens à tes testicules.
– C’est quoi des testicules ?
– T’inquiète pas mon gars, si t’en perds un tu comprendras.
– C’est une menace ?
– Oh non mon gars, c’est une promesse. »
L’Étranger, sans vraiment l’écouter, lui propose de danser. Géraldine, noire de colère, lui réplique qu’elle n’a qu’une jambe, mais ça ne semble pas le déranger : il l’attrape par le bras et la fait valser de manière divine sans écouter ses protestations.
[Je demande à Mass de tirer une carte « Résolution ». Guylène lit « Oui, sauf si… Le personnage réussit, sauf si un autre PJ sacrifie quelque chose pour vous en empêcher ». Guylène décide que l’Étranger arrive à faire danser Géraldine, sauf si Cléanthe décide d’aller prendre une coupe de champagne et de se faire voir par cette dernière.]
Cléanthe ne cesse de parler à Amandine de la femme qu’il doit kidnapper : il lui demande si, à son avis, parvenir à faire un kidnapping tout en étant recherché par quelqu’un qui lui veut du mal avec un petit couteau était plus excitant. Il décide que c’est une bonne idée : vidant d’un trait sa coupe de champagne, il traverse la salle et brise le tango de l’Étranger et Géraldine, qui était anormalement calme depuis quelques minutes. Elle repousse son partenaire à la vue de Cléanthe et se dirige à grands pas vers lui, tandis qu’Amandine prend sa place dans les bras de l’Étranger. Cléanthe jette un coup d’œil à la foule : aucune femme magnifique là-dedans, seulement des héritières qui se sont maquillées pour le paraître mais ne trompent personne. « Oui », lance Cléanthe à Géraldine, « je suis Cléanthe Brumaire, et je suis ici pour… ». Il attrape la première femme à sa portée et la prend sous son bras pour tenter de s’enfuir avec.
À cet instant, une cloche résonne et un serviteur s’avance sur scène. « Mesdames et messieurs, s’il vous plaît, veuillez vous retirer dans le salon bleu. Nous allons à présent commencer les narrations. » Un mouvement de foule s’engage, qui permettrait à Cléanthe de s’enfuir ; il décide de rompre à toutes les règles de bienséance et de quitter la soirée au lieu d’obéir et de se rendre au salon.
[Mass demande à Épiphanie de tirer une carte « Résolution ». Je lis « Non, parce que… Un ou plusieurs facteur(s) imprévu(s) vous empêchent d’arriver à vos fins ».]
Alors que Cléanthe atteint la porte d’entrée du manoir, cette même porte s’ouvre à la volée et laisse entrer Alfred, complètement ivre. « Eh, mon pote ! » hurle Alfred en prenant Cléanthe – et la femme qu’il transporte – dans ses bras. Le temps que Cléanthe se ressaisisse, Géraldine lui pointe son couteau dans le dos. « Tu vas poser cette femme », susurre-t-elle entre ses dents, « dégager cet homme, et me suivre tranquillement, sans faire d’esclandre ». C’est le moment que choisit l’Étranger pour l’embrasser.
[Épiphanie demande à Mass de tirer une carte « Résolution ». Épiphanie lit « Oui, malgré que… Un ou plusieurs facteur(s) imprévu(s) vous barrent la route, mais vous réussissez malgré tout ».]
Alors que l’Étranger tire Géraldine vers lui pour l’embrasser langoureusement, le majordome planté à côté de la porte d’entrée lui tape sur l’épaule pour lui rappeler que c’est l’heure des narrations. L’Étranger ne sait pas ce qu’est une narration et continue donc son baiser. « Tu vois », lance Amandine à Alfred, « il embrasse quand même sacrément mieux que toi ». Géraldine est surprise et finit par repousser gentiment l’Étranger. « Non, je ne peux pas », murmure-t-elle. « Je… Ma sœur est amoureuse de toi.
– Et alors, où est le problème ? »
Une fois dehors, Cléanthe leur propose de se mettre en route : il y a une femme à kidnapper, après tout. Amandine accepte de l’aider pour le kidnapping, mais pas pour la suite ; malgré les admonestations de l’Étranger, Cléanthe continue de clamer qu’il n’y a pas de « suite ». Sur ces entrefaites, Chesterfield les rejoint, surprise de trouver Amandine en compagnie de l’homme qu’elle avait croisé ce matin. L’Étranger, bien sûr, ne la reconnaît pas : Amandine lui explique qu’il a des problèmes de mémoire depuis qu’il s’est pris un coup sur la tête. « Mon pauvre ami », soupire Chesterfield en posant sa main sur la poitrine de l’Étranger, « vous ne vous souvenez de rien ? Vous qui étiez si gentil…
– Si, je me souviens ! dit l’Étranger. Elle marchait dans la foule… elle était belle… elle était magnifique… et j’ai senti qu’elle avait quelque chose de spécial… »
La troupe continue d’avancer pendant que Chesterfield, tenant la main de l’Étranger, lui rappelle que Jeff l’Usurier lui a confié un boulot : retrouver un certain Cléanthe Brumaire. L’Étranger sent la peur dans les mots de Chesterfield, tout comme monsieur Brumaire, d’ailleurs, qui est devenu tout blanc. Cléanthe balbutie, et Amandine lui sauve la mise en le présentant comme Alexandre Brumaire, frère du précédent. « Alexandre Brumaire » propose à Chesterfield de transmettre un message à son « frère » ; secrètement, Cléanthe est ravi d’être enfin en danger. L’Étranger proteste : cet homme est bien Cléanthe Brumaire, il le lui a dit tout à l’heure… Chesterfield fait les gros yeux et prévient : « J’espère que vous ne me mentez pas. Je suis bonne poire, mais faut pas pousser.
– Je n’oserai pas vous mentir, vous êtes une charmante personne, répond Cléanthe en lui faisant un baisemain.
– Mensonge… mensonge… mensonge… mensonge… » répète l’Étranger, amenant Cléanthe à balbutier de plus en plus.
[Je demande à Épiphanie de tirer une carte « Résolution ». Mass lit « Non, mais… Le personnage échoue, mais une autre chose positive arrive à la place, sans rapport avec ce qu’il tentait de faire. »]
Cléanthe s’embrouille et regarde l’Étranger d’un air mauvais : son mensonge ne prend pas. Chesterfield s’apprête à protester lorsqu’une foule rentre soudain dans la rue : une foule de festival, composée de musiciens, de cracheurs de feu, de jongleurs… dans la bousculade, Chesterfield, poussée par la foule, perd de vue le reste du groupe. Cléanthe est furieux : non content d’avoir gâché son mensonge, l’Étranger lui avait caché qu’il travaillait pour Jeff l’Usurier (que l’Étranger dit ne pas connaître : si Jeff l’Usurier n’est pas gentil, il est impossible qu’il travaille pour lui).
La soirée de fête est presque gâchée par tous ces événements, mais les trois continuent tout de même de marcher jusqu’au manoir Oppheimer. Sur le chemin, Cléanthe demande à Amandine, dont « les croûtes ne cassent pas trois pattes à un canard », de lui indiquer au moment opportun la personne qu’il conviendra de kidnapper. « On peut changer l’avenir ? » leur demande l’Étranger. « Parce que si oui, j’aimerais éviter que cette personne se fasse couper en morceaux… ». Cléanthe commence à protester à nouveau, et comprend tout à coup que l’Étranger a raison sur le sort de la victime et qu’il n’y avait pas pensé jusque là. Peut-être y a-t-il cependant une bonne solution…
Le dialogue s’engage sur la femme magnifique que Cléanthe est supposé kidnapper : Amandine, avec son sens de l’esthétique, pourrait lui signaler une femme adéquate pendant la soirée… À ces mots, l’Étranger se remet à parler de la femme qu’il a croisé un jour, et comprend qu’elle est la voisine d’Amandine : il demande à être amené immédiatement à leur immeuble. Les deux autres lui proposent d’y aller après la fête.
Devant le manoir Oppheimer (que Cléanthe connaît bien pour y être souvent allé du temps où le père était encore en vie), toutes les lumières sont allumées et plusieurs voitures sont garées. Des gens mieux habillés les uns que les autres arrivent au perron par deux ; Cléanthe et Amandine avancent par deux alors que l’Étranger va seul, ce qui lui récolte des regards lourds de sous-entendus de la part des autres invités, malgré son irradiante beauté. Devant la porte, un homme en perruque vérifie le nom des invités dans un épais volume, en train d’écouter une femme vitupérer devant lui : « Mais puisque je vous dis que je suis invitée, avec un type étrange ! Enfin, il s’appelle “l’Étranger” ! »
Scène 10 : Où Géraldine remplace Chesterfield
Géraldine reconnaît la petite troupe et, tout en pestant contre Amandine, leur explique qu’elle remplace Chesterfield, qui a eu un empêchement, au bras de l’Étranger. Celui-ci fait un sourire et un clin d’œil à Géraldine, avant de rentrer avec les autres dans le manoir. « Tu me refais un clin d’œil comme ça », prévient-elle à l’envers de l’Étranger en le menaçant de son couteau, « et la prochaine fois que tu cligneras de l’œil, tu verras plus rien. Parce que t’en auras plus qu’un, d’œil ». L’Étranger, sans se laisser démonter, pose un doigt sur ses lèvres et lui demande pourquoi elle est si méchante. Géraldine est furieuse : elle veut savoir où est Cléanthe, elle n’est pas là pour flirter avec un type qui la confond avec sa sœur jumelle.
« C’est quoi, des jumelles ? demande l’Étranger.
– Alors les jumelles, répond Amandine, c’est comme les cigarettes : si t’en mets une dans la bouche, c’est sympa, si t’en mets une dans la bouche et une dans le nez, c’est impossible. »
L’Étranger se met à masser Géraldine pour la libérer de sa tension ; malgré les coups qu’il se prend, il ne se départit pas de son sourire niais. Cléanthe et Amandine se tiennent loin de l’escarmouche et décident plutôt de s’orienter vers le buffet, pour en dévorer les crevettes tant qu’elles sont encore fraiches ; à peu près au même moment où ils se perdent dans la foule, l’Étranger explique à Géraldine que Cléanthe était avec eux, ce qui la fait fulminer plus encore.
« Tu vas m’aider à le retrouver immédiatement, si tu tiens à tes testicules.
– C’est quoi des testicules ?
– T’inquiète pas mon gars, si t’en perds un tu comprendras.
– C’est une menace ?
– Oh non mon gars, c’est une promesse. »
L’Étranger, sans vraiment l’écouter, lui propose de danser. Géraldine, noire de colère, lui réplique qu’elle n’a qu’une jambe, mais ça ne semble pas le déranger : il l’attrape par le bras et la fait valser de manière divine sans écouter ses protestations.
[Je demande à Mass de tirer une carte « Résolution ». Guylène lit « Oui, sauf si… Le personnage réussit, sauf si un autre PJ sacrifie quelque chose pour vous en empêcher ». Guylène décide que l’Étranger arrive à faire danser Géraldine, sauf si Cléanthe décide d’aller prendre une coupe de champagne et de se faire voir par cette dernière.]
Cléanthe ne cesse de parler à Amandine de la femme qu’il doit kidnapper : il lui demande si, à son avis, parvenir à faire un kidnapping tout en étant recherché par quelqu’un qui lui veut du mal avec un petit couteau était plus excitant. Il décide que c’est une bonne idée : vidant d’un trait sa coupe de champagne, il traverse la salle et brise le tango de l’Étranger et Géraldine, qui était anormalement calme depuis quelques minutes. Elle repousse son partenaire à la vue de Cléanthe et se dirige à grands pas vers lui, tandis qu’Amandine prend sa place dans les bras de l’Étranger. Cléanthe jette un coup d’œil à la foule : aucune femme magnifique là-dedans, seulement des héritières qui se sont maquillées pour le paraître mais ne trompent personne. « Oui », lance Cléanthe à Géraldine, « je suis Cléanthe Brumaire, et je suis ici pour… ». Il attrape la première femme à sa portée et la prend sous son bras pour tenter de s’enfuir avec.
À cet instant, une cloche résonne et un serviteur s’avance sur scène. « Mesdames et messieurs, s’il vous plaît, veuillez vous retirer dans le salon bleu. Nous allons à présent commencer les narrations. » Un mouvement de foule s’engage, qui permettrait à Cléanthe de s’enfuir ; il décide de rompre à toutes les règles de bienséance et de quitter la soirée au lieu d’obéir et de se rendre au salon.
[Mass demande à Épiphanie de tirer une carte « Résolution ». Je lis « Non, parce que… Un ou plusieurs facteur(s) imprévu(s) vous empêchent d’arriver à vos fins ».]
Alors que Cléanthe atteint la porte d’entrée du manoir, cette même porte s’ouvre à la volée et laisse entrer Alfred, complètement ivre. « Eh, mon pote ! » hurle Alfred en prenant Cléanthe – et la femme qu’il transporte – dans ses bras. Le temps que Cléanthe se ressaisisse, Géraldine lui pointe son couteau dans le dos. « Tu vas poser cette femme », susurre-t-elle entre ses dents, « dégager cet homme, et me suivre tranquillement, sans faire d’esclandre ». C’est le moment que choisit l’Étranger pour l’embrasser.
[Épiphanie demande à Mass de tirer une carte « Résolution ». Épiphanie lit « Oui, malgré que… Un ou plusieurs facteur(s) imprévu(s) vous barrent la route, mais vous réussissez malgré tout ».]
Alors que l’Étranger tire Géraldine vers lui pour l’embrasser langoureusement, le majordome planté à côté de la porte d’entrée lui tape sur l’épaule pour lui rappeler que c’est l’heure des narrations. L’Étranger ne sait pas ce qu’est une narration et continue donc son baiser. « Tu vois », lance Amandine à Alfred, « il embrasse quand même sacrément mieux que toi ». Géraldine est surprise et finit par repousser gentiment l’Étranger. « Non, je ne peux pas », murmure-t-elle. « Je… Ma sœur est amoureuse de toi.
– Et alors, où est le problème ? »
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 12 : Les orphelins d’Itras ne nous méritent pas
Cléanthe, Amandine et Alfred décident pendant ce temps d’aller assister aux narrations : de toute façon, le serviteur a barré la porte d’entrée avec de lourdes chaines en fer, ainsi que les fenêtres. « Il vaudrait mieux qu’on assiste nous aussi à la narration », marmonne Géraldine, « pour… pour… pour retrouver Cléanthe, oui, voilà. » L’Étranger, sans l’écouter, l’entraîne vers les toilettes.
Une fois dans le salon bleu, Amandine reconnaît la salle de théâtre qu’elle a vu en rêve. Les serviteurs distribuent des pyjamas aux invités et leur montrent dans quels lits ils doivent s’installer deux par deux, ainsi qu’un numéro, le 36. Elle et Cléanthe s’installent au lit pendant qu’Alfred est emmené ailleurs, et écoutent d’une oreille distraite les personnes qui parlent sur scène. Tout le monde l’applaudit une fois son discours fini, et le couple laisse la place à deux autres hommes qui commencent à raconter une histoire pour endormir les enfants situés au premier rang, des orphelins au visage noir de suie habillés en haillons. Le premier homme raconte la première partie du conte, et c’est sa moitié qui la conclut alors que quelques orphelins s’endorment. Quand ils ont fini, l’assistance applaudit, ce qui tire immédiatement les orphelins de leur sommeil ; la scène se répète plusieurs fois au cours de la soirée car les invités ne peuvent s’empêcher d’applaudir à la fin d’une bonne histoire, comme il est poli de le faire.
Lorsqu’arrive le numéro 36, Cléanthe et Amandine sortent de leur lit et montent sur scène. Amandine commence l’histoire : « Il était une fois l’histoire de la souris boule de suie. La souris boule de suie vivait dans un petit trou qu’elle avait aménagé dans un mur qui donnait directement sur les réserves d’un grand restaurant. C’était une petite souris qui habitait dans un mur qui avait été fait près de la cheminée, si bien qu’elle était constamment couverte de suite, et c’est pour cela que tous ses amis l’avaient appelée “la souris boule de suie”.
– Non, j’suis pas d’accord ! proteste l’un des enfants en levant la main. Moi, j’veux que la souris elle s’appelle Henriette !
– Non, c’est nul ! renchérit un autre. Henriette, c’est nul !
– Les enfants, qui raconte l’histoire ? demande Amandine.
– C’est toi… répondent-ils en cœur d’un air dépité.
– Alors écoutez calmement. La souris boule de suie avait donc pour habitude de sortir tous les soirs, une fois le service fini, et d’aller chercher des petits morceaux à grignoter : du fromage, des légumes, un peu de fenouil par-ci par-là…
– Moi j’aime pas l’fenouil !
– Moi non plus, ça fait faire pipi !
– Eh bien, la petite boule de suie, elle, adorait ça. Seulement, tous les jours, alors qu’elle allait faire son petit tour pour manger, elle laissait des traces noires derrière elle, et elle savait qu’un jour, les humains allaient finir par remarquer les traces, remonter jusqu’à son trou, et l’attraper… En effet…
– Madame, madame !
– Mais dis-donc, tonne Cléanthe, qui tu es, toi, pour interrompre tout le temps les histoires ? Qui t’a donc élevé ?
– C’est les dames de l’orphelinat… J’voulais juste dire qu’elle racontait pas très bien et j’préfère que c’est toi qui raconte.
– Ah ! Ah ah ! » Cléanthe part d’un faux rire. « Re… raconter une… histoire ? de… de souris ? »
Les lits de l’assistance grincent alors que tout le monde se redresse pour l’écouter parler.
« C’est l’histoire d’une souris, c’est ça ? Une souris qui s’appelle boule de suie ?
– Non, elle s’appelle Henriette !
– Donne-moi ton nom, toi.
– J’m’appelle Henri, moi.
– C’est bien, Henri : elle s’appellera Henriette, comme ta maman je suppose ? Enfin bref. Henriette, comme tous les matins, s’en allait traîner dans la maison en mettant d’affreuses taches de suie partout, car Henriette était une petit souris très pauvre et très malheureuse, et elle ne savait pas ce qu’était mettre les patins dans une maison. Terrible ! Enfin bref. Henriette se promène et traine, et comme tous les pauvres, elle finit par arriver au garde-manger, bien entendu, puisque c’est là qu’ils vont tous, n’est-ce pas les enfants ?
– Ouiiiiiii ! Les souris ça mange tout !
– Monsieur, monsieur ! Moi, une fois, à l’orphelinat, une fois, moi, y en a une, elle m’a mangé l’orteil, après j’avais le pied tout noir pendant une semaine !
– Comment t’appelles-tu, jeune homme ?
– Moi j’m’appelle Luc, mais tout le monde m’appelle “Tais-toi” !
– D’accord. Luc, tu sais ce que c’est que la démocratie ?
– Non, je sais pas…
– C’est très bien. La démocratie, c’est quand tout le monde parle. Et là, on n’est pas en démocratie, c’est moi qui raconte une histoire. Donc maintenant, tais-toi. »
Scène 13 : Où Géraldine devient Chesterfield… et vice et versa
Dans les toilettes, une fois que l’Étranger a donné du bonheur avec Géraldine, il partage une cigarette avec elle. Pour être exact, il se la met dans le nez, ce qui la fait pouffer. « T’es vraiment pas banal, toi. Écoute, j’préfère qu’on dise rien à ma sœur pour le moment. Elle pourrait le prendre mal que j’ai couché avec quelqu’un dont elle est amoureuse, surtout que c’est pas la première fois. Tu comprends, on veut plus les mêmes choses depuis la tempête.
– D’accord, si tu me promets d’être moins méchante, répond-il en lui caressant la joue.
– Avec toi, je veux bien, mais je peux pas me permettre…
– Tssk, tssk, tu en es capable », roucoule l’Étranger.
Soudain, Géraldine se sent mal, et vomit dans les toilettes. Tordue en deux par terre, elle se saisit le ventre à deux mains. « Arrête ça ! J’suis pas la gentille ! » L’Étranger rentre la main dans son ventre, et en retire une boule sanguinolente et noirâtre, qu’il avale d’un coup. Une aura dorée l’entoure.
Son amante se relève et semble très étonnée de se retrouver ici. « Mais… L’Étranger ? Où est-ce qu’on est ? Au manoir ? Oh mon dieu. Qu’est-ce que tu as fait à ma sœur ? Tu… tu nous as échangées ?
– Non, j’ai enlevé ce qu’il y avait de mal en toi…
– Oh non… Tu te rends pas compte ! C’est vraiment pas bien, ce que tu as fait ! Il y en a une qui est méchante, et une qui est gentille ! »
Chesterfield est toute blanche, et met quelques instants avant de se rendre compte qu’ils se trouvent dans les toilettes… et qu’elle ne porte pas de vêtements. « Mais qu’est-ce que tu as fait avec ma sœur, au juste ? »
Sur scène, Cléanthe est totalement dépassé par les orphelins qui se moquent de lui. « Le monsieur il sait pas raconter les histoires ! Ta veste elle pue, en plus ! » Quelques bourgeois de la salle sont choqués : décidemment, les Brumaire, ce n’est plus ce que c’était. Le majordome coupe court au désastre : « J’appelle à présent sur scène monsieur Étrange et Géraldine ! ». Amandine va les chercher aux toilettes, alors que Chesterfield est en train de réprimander légèrement l’Étranger pour son mauvais comportement. « C’est très mal ce que tu as fait là ! Je t’en veux beaucoup !
– Oui, coupe Amandine, allez raconter une histoire sordide à une bande de gamins imbuvables, je vous regarde ! »
Cléanthe, Amandine et Alfred décident pendant ce temps d’aller assister aux narrations : de toute façon, le serviteur a barré la porte d’entrée avec de lourdes chaines en fer, ainsi que les fenêtres. « Il vaudrait mieux qu’on assiste nous aussi à la narration », marmonne Géraldine, « pour… pour… pour retrouver Cléanthe, oui, voilà. » L’Étranger, sans l’écouter, l’entraîne vers les toilettes.
Une fois dans le salon bleu, Amandine reconnaît la salle de théâtre qu’elle a vu en rêve. Les serviteurs distribuent des pyjamas aux invités et leur montrent dans quels lits ils doivent s’installer deux par deux, ainsi qu’un numéro, le 36. Elle et Cléanthe s’installent au lit pendant qu’Alfred est emmené ailleurs, et écoutent d’une oreille distraite les personnes qui parlent sur scène. Tout le monde l’applaudit une fois son discours fini, et le couple laisse la place à deux autres hommes qui commencent à raconter une histoire pour endormir les enfants situés au premier rang, des orphelins au visage noir de suie habillés en haillons. Le premier homme raconte la première partie du conte, et c’est sa moitié qui la conclut alors que quelques orphelins s’endorment. Quand ils ont fini, l’assistance applaudit, ce qui tire immédiatement les orphelins de leur sommeil ; la scène se répète plusieurs fois au cours de la soirée car les invités ne peuvent s’empêcher d’applaudir à la fin d’une bonne histoire, comme il est poli de le faire.
Lorsqu’arrive le numéro 36, Cléanthe et Amandine sortent de leur lit et montent sur scène. Amandine commence l’histoire : « Il était une fois l’histoire de la souris boule de suie. La souris boule de suie vivait dans un petit trou qu’elle avait aménagé dans un mur qui donnait directement sur les réserves d’un grand restaurant. C’était une petite souris qui habitait dans un mur qui avait été fait près de la cheminée, si bien qu’elle était constamment couverte de suite, et c’est pour cela que tous ses amis l’avaient appelée “la souris boule de suie”.
– Non, j’suis pas d’accord ! proteste l’un des enfants en levant la main. Moi, j’veux que la souris elle s’appelle Henriette !
– Non, c’est nul ! renchérit un autre. Henriette, c’est nul !
– Les enfants, qui raconte l’histoire ? demande Amandine.
– C’est toi… répondent-ils en cœur d’un air dépité.
– Alors écoutez calmement. La souris boule de suie avait donc pour habitude de sortir tous les soirs, une fois le service fini, et d’aller chercher des petits morceaux à grignoter : du fromage, des légumes, un peu de fenouil par-ci par-là…
– Moi j’aime pas l’fenouil !
– Moi non plus, ça fait faire pipi !
– Eh bien, la petite boule de suie, elle, adorait ça. Seulement, tous les jours, alors qu’elle allait faire son petit tour pour manger, elle laissait des traces noires derrière elle, et elle savait qu’un jour, les humains allaient finir par remarquer les traces, remonter jusqu’à son trou, et l’attraper… En effet…
– Madame, madame !
– Mais dis-donc, tonne Cléanthe, qui tu es, toi, pour interrompre tout le temps les histoires ? Qui t’a donc élevé ?
– C’est les dames de l’orphelinat… J’voulais juste dire qu’elle racontait pas très bien et j’préfère que c’est toi qui raconte.
– Ah ! Ah ah ! » Cléanthe part d’un faux rire. « Re… raconter une… histoire ? de… de souris ? »
Les lits de l’assistance grincent alors que tout le monde se redresse pour l’écouter parler.
« C’est l’histoire d’une souris, c’est ça ? Une souris qui s’appelle boule de suie ?
– Non, elle s’appelle Henriette !
– Donne-moi ton nom, toi.
– J’m’appelle Henri, moi.
– C’est bien, Henri : elle s’appellera Henriette, comme ta maman je suppose ? Enfin bref. Henriette, comme tous les matins, s’en allait traîner dans la maison en mettant d’affreuses taches de suie partout, car Henriette était une petit souris très pauvre et très malheureuse, et elle ne savait pas ce qu’était mettre les patins dans une maison. Terrible ! Enfin bref. Henriette se promène et traine, et comme tous les pauvres, elle finit par arriver au garde-manger, bien entendu, puisque c’est là qu’ils vont tous, n’est-ce pas les enfants ?
– Ouiiiiiii ! Les souris ça mange tout !
– Monsieur, monsieur ! Moi, une fois, à l’orphelinat, une fois, moi, y en a une, elle m’a mangé l’orteil, après j’avais le pied tout noir pendant une semaine !
– Comment t’appelles-tu, jeune homme ?
– Moi j’m’appelle Luc, mais tout le monde m’appelle “Tais-toi” !
– D’accord. Luc, tu sais ce que c’est que la démocratie ?
– Non, je sais pas…
– C’est très bien. La démocratie, c’est quand tout le monde parle. Et là, on n’est pas en démocratie, c’est moi qui raconte une histoire. Donc maintenant, tais-toi. »
Scène 13 : Où Géraldine devient Chesterfield… et vice et versa
Dans les toilettes, une fois que l’Étranger a donné du bonheur avec Géraldine, il partage une cigarette avec elle. Pour être exact, il se la met dans le nez, ce qui la fait pouffer. « T’es vraiment pas banal, toi. Écoute, j’préfère qu’on dise rien à ma sœur pour le moment. Elle pourrait le prendre mal que j’ai couché avec quelqu’un dont elle est amoureuse, surtout que c’est pas la première fois. Tu comprends, on veut plus les mêmes choses depuis la tempête.
– D’accord, si tu me promets d’être moins méchante, répond-il en lui caressant la joue.
– Avec toi, je veux bien, mais je peux pas me permettre…
– Tssk, tssk, tu en es capable », roucoule l’Étranger.
Soudain, Géraldine se sent mal, et vomit dans les toilettes. Tordue en deux par terre, elle se saisit le ventre à deux mains. « Arrête ça ! J’suis pas la gentille ! » L’Étranger rentre la main dans son ventre, et en retire une boule sanguinolente et noirâtre, qu’il avale d’un coup. Une aura dorée l’entoure.
Son amante se relève et semble très étonnée de se retrouver ici. « Mais… L’Étranger ? Où est-ce qu’on est ? Au manoir ? Oh mon dieu. Qu’est-ce que tu as fait à ma sœur ? Tu… tu nous as échangées ?
– Non, j’ai enlevé ce qu’il y avait de mal en toi…
– Oh non… Tu te rends pas compte ! C’est vraiment pas bien, ce que tu as fait ! Il y en a une qui est méchante, et une qui est gentille ! »
Chesterfield est toute blanche, et met quelques instants avant de se rendre compte qu’ils se trouvent dans les toilettes… et qu’elle ne porte pas de vêtements. « Mais qu’est-ce que tu as fait avec ma sœur, au juste ? »
Sur scène, Cléanthe est totalement dépassé par les orphelins qui se moquent de lui. « Le monsieur il sait pas raconter les histoires ! Ta veste elle pue, en plus ! » Quelques bourgeois de la salle sont choqués : décidemment, les Brumaire, ce n’est plus ce que c’était. Le majordome coupe court au désastre : « J’appelle à présent sur scène monsieur Étrange et Géraldine ! ». Amandine va les chercher aux toilettes, alors que Chesterfield est en train de réprimander légèrement l’Étranger pour son mauvais comportement. « C’est très mal ce que tu as fait là ! Je t’en veux beaucoup !
– Oui, coupe Amandine, allez raconter une histoire sordide à une bande de gamins imbuvables, je vous regarde ! »
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 14 : L’enlèvement d’une femme charmante et consentante est un enlèvement quand même.
Chesterfield et l’Étranger montent sur scène. Ce dernier commence : « Il était une fois… plein d’enfants orphelins. Et ils grandirent, et tout le monde pensait qu’ils allaient devenir de méchants garnements, et qu’ils allaient faire le mal. Mais pas du tout. Car ils virent là-bas le bien. Et ils décidèrent tous ensemble de suivre ce qui était bon pour eux, d’aimer les uns et les autres ; et c’est comme ça qu’ils prirent le pouvoir dans cette ville, et ils en firent une ville magnifique où régnait la paix et la joie, et où plus aucun enfant ne serait malheureux.
– C’est tout ?
– Les enfants, enchaîne Chesterfield, je vais vous raconter une histoire, moi. Il était une fois une princesse dans un château… »
L’histoire de Chesterfield est si compliquée que les orphelins s’endorment les uns après les autres, ainsi qu’une partie de l’assistance. Le majordome, en chuchotant, demande à tout le monde de quitter la salle ; les gens s’étirent, enlèvent leurs pyjamas et quittent le salon un à un. Cléanthe recroise son collègue sectateur : « Mon cher », lui dit celui-ci, votre histoire était pour le moins… Je n’avais jamais rien entendu de tel ». Amandine se penche vers Cléanthe et lui montre la femme la plus laide de l’assemblée : « Tu vois celle-là ? Elle est magnifique, son bec de lièvre est du dernier cri. Tu peux y aller les yeux fermés ». Cléanthe préfère accrocher Amandine à son bras, qui feint l’horreur : « Oh non, ne m’emportez pas, mon mari, le gardien du zoo, m’attend ! ». Les deux s’enfuient en direction de la porte, suivis par l’Étranger et Chesterfield, qui lui explique en quoi consiste une relation exclusive.
« Avec tout ça, nous n’avons toujours pas retrouvé monsieur Brumaire…
– Si, nous le suivons. C’est lui qui rentre dans la voiture, là, regardez… »
Tous montent en voiture, alors que Chesterfield gronde Cléanthe pour son mensonge de tout à l’heure. Celui-ci est plutôt en train de réfléchir à ce qu’il vient de faire : on lui demande de kidnapper une femme magnifique, il enlève légèrement une femme charmante… Tout bien considéré, c’est presque pareil.
« Monsieur Brumaire, continue Chesterfield, vous devez beaucoup d’argent à monsieur Jeff l’Usurier. Je vous préviens, si vous ne le rendez pas, je suis autorisée à vous faire très très mal, même si ça ne me ferait pas plaisir.
– Attention, je suis un kidnappeur maintenant, je suis potentiellement dangereux. Je pourrais vous kidnapper comme je l’ai fait avec cette demoiselle…
– Monsieur Brumaire, vous m’êtes sympathique, je vais vous confier quelque chose : Jeff accepte aussi le troc. Il me semble d’ailleurs qu’Amandine y a eu recours.
– Tout à fait, le tableau que je vous ai montré plus tôt dans la journée est pour lui.
– Eh bien j’aurais peut-être quelque chose à troquer avec Jeff… J’ai justement une place toute neuve à l’intérieur de la secte des adorateurs de Nindra à lui fournir.
– Eh bien, écoutez, je vais lui transmettre la demande et je vous dirai sa décision.
– Nous pourrions peut-être discuter de cela autour d’un dîner la semaine prochaine ? lui demande Chesterfield avec un petit air qu’il ne lui connaît pas.
– Mademoiselle, je suis déjà en plein kidnapping avec cette demoiselle que voici, et il me semble malvenu tout de suite à une invitation si directe. Mais ce n’est pas l’envie qui manque. Je vous laisse ma carte. »
Chesterfield rosit et met sa carte dans son corsage, avant de descendre de la voiture après avoir jeté un dernier regard à l’Étranger…
L’Étranger est déçu : la femme magnifique n’était pas à la soirée Oppheimer. Néanmoins, ses problèmes de mémoire semblent s’améliorer puisqu’il reconnaît Cléanthe et Amandine (sans se souvenir, néanmoins, avoir couché avec cette dernière). Il a l’air si perdu que Cléanthe lui propose de le ramener chez lui : il dormira dans sa chambre d’amis.
Au moment de quitter la voiture, sa conductrice adresse un conseil à l’Étranger : « Crois-en ma vieille expérience : les femmes magnifiques, ça va, ça vient ».
La soirée se termine donc alors que les trois partagent un verre de champagne chez Cléanthe, le verre qu’il n’avait pas pu boire tout à l’heure. Le champagne est délicieux – il est toujours meilleur quand il est acheté à crédit – et la maison est bien vide de mobilier…
Un peu plus loin, Alfred est en train de finir une bouteille en se scarifiant, assis sur un banc. Quelqu’un s’assied à côté de lui, pose son chapeau sur ses genoux et une main sur le bras d’Alfred : « Alors mon petit ? on a des soucis avec ses petites amoureuses ? Raconte tout au maître d’école… ».
Chesterfield et l’Étranger montent sur scène. Ce dernier commence : « Il était une fois… plein d’enfants orphelins. Et ils grandirent, et tout le monde pensait qu’ils allaient devenir de méchants garnements, et qu’ils allaient faire le mal. Mais pas du tout. Car ils virent là-bas le bien. Et ils décidèrent tous ensemble de suivre ce qui était bon pour eux, d’aimer les uns et les autres ; et c’est comme ça qu’ils prirent le pouvoir dans cette ville, et ils en firent une ville magnifique où régnait la paix et la joie, et où plus aucun enfant ne serait malheureux.
– C’est tout ?
– Les enfants, enchaîne Chesterfield, je vais vous raconter une histoire, moi. Il était une fois une princesse dans un château… »
L’histoire de Chesterfield est si compliquée que les orphelins s’endorment les uns après les autres, ainsi qu’une partie de l’assistance. Le majordome, en chuchotant, demande à tout le monde de quitter la salle ; les gens s’étirent, enlèvent leurs pyjamas et quittent le salon un à un. Cléanthe recroise son collègue sectateur : « Mon cher », lui dit celui-ci, votre histoire était pour le moins… Je n’avais jamais rien entendu de tel ». Amandine se penche vers Cléanthe et lui montre la femme la plus laide de l’assemblée : « Tu vois celle-là ? Elle est magnifique, son bec de lièvre est du dernier cri. Tu peux y aller les yeux fermés ». Cléanthe préfère accrocher Amandine à son bras, qui feint l’horreur : « Oh non, ne m’emportez pas, mon mari, le gardien du zoo, m’attend ! ». Les deux s’enfuient en direction de la porte, suivis par l’Étranger et Chesterfield, qui lui explique en quoi consiste une relation exclusive.
« Avec tout ça, nous n’avons toujours pas retrouvé monsieur Brumaire…
– Si, nous le suivons. C’est lui qui rentre dans la voiture, là, regardez… »
Tous montent en voiture, alors que Chesterfield gronde Cléanthe pour son mensonge de tout à l’heure. Celui-ci est plutôt en train de réfléchir à ce qu’il vient de faire : on lui demande de kidnapper une femme magnifique, il enlève légèrement une femme charmante… Tout bien considéré, c’est presque pareil.
« Monsieur Brumaire, continue Chesterfield, vous devez beaucoup d’argent à monsieur Jeff l’Usurier. Je vous préviens, si vous ne le rendez pas, je suis autorisée à vous faire très très mal, même si ça ne me ferait pas plaisir.
– Attention, je suis un kidnappeur maintenant, je suis potentiellement dangereux. Je pourrais vous kidnapper comme je l’ai fait avec cette demoiselle…
– Monsieur Brumaire, vous m’êtes sympathique, je vais vous confier quelque chose : Jeff accepte aussi le troc. Il me semble d’ailleurs qu’Amandine y a eu recours.
– Tout à fait, le tableau que je vous ai montré plus tôt dans la journée est pour lui.
– Eh bien j’aurais peut-être quelque chose à troquer avec Jeff… J’ai justement une place toute neuve à l’intérieur de la secte des adorateurs de Nindra à lui fournir.
– Eh bien, écoutez, je vais lui transmettre la demande et je vous dirai sa décision.
– Nous pourrions peut-être discuter de cela autour d’un dîner la semaine prochaine ? lui demande Chesterfield avec un petit air qu’il ne lui connaît pas.
– Mademoiselle, je suis déjà en plein kidnapping avec cette demoiselle que voici, et il me semble malvenu tout de suite à une invitation si directe. Mais ce n’est pas l’envie qui manque. Je vous laisse ma carte. »
Chesterfield rosit et met sa carte dans son corsage, avant de descendre de la voiture après avoir jeté un dernier regard à l’Étranger…
L’Étranger est déçu : la femme magnifique n’était pas à la soirée Oppheimer. Néanmoins, ses problèmes de mémoire semblent s’améliorer puisqu’il reconnaît Cléanthe et Amandine (sans se souvenir, néanmoins, avoir couché avec cette dernière). Il a l’air si perdu que Cléanthe lui propose de le ramener chez lui : il dormira dans sa chambre d’amis.
Au moment de quitter la voiture, sa conductrice adresse un conseil à l’Étranger : « Crois-en ma vieille expérience : les femmes magnifiques, ça va, ça vient ».
La soirée se termine donc alors que les trois partagent un verre de champagne chez Cléanthe, le verre qu’il n’avait pas pu boire tout à l’heure. Le champagne est délicieux – il est toujours meilleur quand il est acheté à crédit – et la maison est bien vide de mobilier…
Un peu plus loin, Alfred est en train de finir une bouteille en se scarifiant, assis sur un banc. Quelqu’un s’assied à côté de lui, pose son chapeau sur ses genoux et une main sur le bras d’Alfred : « Alors mon petit ? on a des soucis avec ses petites amoureuses ? Raconte tout au maître d’école… ».
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
C'est parti pour l'Acte 3 ! Pour rappel, il y a toujours un CR d'avance sur le blog d'Ozen, qui fête d'ailleurs ses un an aujourd'hui !
Acte III : la très précieuse révélation de sœur Eusébie
Dramatis Personæ
Monsieur Crane (joué par Pierre), explorateur qui s’est perdu, d’où vient-il ? il ne s’en souvient plus…
courte description : de taille moyenne et d’allure très passe-partout (brun, assez maigre), un peu dégingandé, il arbore en permanence l’air d’un homme dépassé par les évènements, mais qui tente de se donner une contenance. Après tout, son environnement immédiat n’est pas vraiment hostile, seulement incroyablement déroutant… n’est-ce pas? (face à l’étrangeté, il a le tic de se masser la main droite…).
Qualités dramatiques : halluciné (la logique d’Itras lui échappe, et il en est conscient) / curieux (sur Itras en particulier) / bravache désespéré
Aimant à intrigue : membre du club des explorateurs d’Itras (qu’il rencontre à la “part du diable” / est lié à “la tempête”); (soeur Oselie) / enquête sur la secte des adorateurs de Nindra / cherche une sortie à la ville.
L’Étranger (Joué par Mass), Bel et Naïf étranger
Qualités dramatiques : Beau et énigmatique, naïf, toujours là pour faire plaisir à quiconque
Aimants à Intrigues : La femme magnifique, n’a pas de lien avec la ville.
Il faut bien le dire, on ne sait pas grand chose de lui sinon qu’il erre en ville, très beau, dans son grand pardessus, tentant de rendre heureux ceux qu’il croise. Par ailleurs, il vit chez Miss Wellington, 85 ans, la présidente de la ligue de vertu qui a bien voulu accepter de le loger à son arrivée en ville. Certains l’ont vu se promener tout à fait nu dans la demeure.
Cléanthe Brumaire (Joué par Ozen), Homme riche qui essaie de trouver un sens à la vanité de son existence.
Description : Un petit homme très sage, fin de quarantaine, ni beau, ni laid mais bien entretenu, l’air mélancolique. Un costume parfaitement entretenu, chaque jour une fleur différente à la boutonnière, une grosse chevalière (avec une pierre bleue) à l’index droit. Fume de longues et fines cigarettes avec un air légèrement efféminé, tics nerveux.
Qualités dramatiques : Notable bien installé dans la bonne société / Curieux, pour tuer l’ennui / Plus une connaissance est improbable, plus il est susceptible de savoir / Joueur (presque) professionnel.
Aimants à intrigues : Terriblement endetté (Jeff l’Usurier) / A la recherche de la femme magnifique / Convoite un pouvoir supérieur (Le Maître d’école)
Personnages connus : une femme, qu’il a épousé et qu’il a oublié quelque part dans sa grande maison / quelques souteneurs choisis dans la rue des Nymphes.
Quelques temps plus tard…
Scène 1 : Une macération d’oeil de chimpanzé patron!
Monsieur Crane est au bar de la part du Diable, en plein milieu de Church Hill, où il rencontre fréquemment ses amis et collègues explorateurs. Il a justement rendez-vous avec l’une d’entre elles, sœur Eusébie (nonne au couvent de la Très Sainte Lumière d’Itras), qui a un peu de retard. Monsieur Crane feuillette en l’attendant le dernier numéro de la revue de l’office de tourisme de la ville, qui parle notamment du festival de la nuit de Murlon, cette fête où le bateau de Murlon revient au port d’Itras By, comme tous les ans depuis des siècles. Son œil s’arrête sur la page bande dessinée sur laquelle se trouve trois strips. Dans le premier, sans titre et muet, on voit une sœur en pleine discussion avec le vendeur d’un magasin de cigares ; dans la deuxième case, un singe sort du plafond et attrape une boite de cigares ; dans la troisième case, il cavale à travers les rues de la cité ; dans la quatrième case, une dizaine de nonnes (dont Eusébie) fument des cigares d’un air béat. Le deuxième strip s’intitule « Les aventures de Cléanthe Brumaire » : on y voit Cléanthe sur une scène de théâtre, vêtu d’un costume en poil de gorilles, en train de gesticuler devant un parterre d’enfants pas franchement convaincus par l’histoire qu’il leur raconte. Le troisième strip, une histoire d’aventure qui s’appelle « l’éveil », est assez étrange : sur la première case, un homme en pardessus dans une ruelle sombre traverse d’un air inquiet les rues de la ville ; dans la deuxième case, il frappe à une porte ; dans la troisième case, il descend avec un autre protagoniste les marches d’un escalier obscur, une torche à la main ; dans la dernière case, les deux hommes se tiennent par les épaules et l’un dit à l’autre : « Patience, frère ; le dieu machine s’éveillera bientôt ».
Sœur Eusébie finit par arriver et commande l’alcool de la semaine de la part du Diable, de la macération d’œil de chimpanzé. Monsieur Crane, tout en s’épongeant le front et en desserrant sa cravate, commande une limonade. Il demande à sœur Eusébie plus d’informations sur la nuit de Murlon : elle lui explique que cette coutume ancestrale remonte à la nuit où Murlon est arrivé à la cité d’Itras, alors que celle-ci était encore toute jeune. Ainsi qu’il est expliqué dans les premiers versets du livre saint de la Très Sainte Lumière d’Itras, Itras fut étonnée de l’arrivée de Murlon, car elle ne se rappelait pas avoir créé cet homme ou ce bateau. Murlon proposa à Itras de lui amener des choses inconnues de ce monde, et en paiement, tant que la cité existait, ses habitants devraient célébrer une grande fête en son honneur à chaque fin d’été. Ainsi, chaque année les gens se pressent au port pour voir quelles merveilles le bateau de Murlon a ramenées cette fois-ci, et quelles nouvelles modifications il a suivi. Un grand carnaval s’ensuit généralement.
Les boissons arrivent alors que le serveur se faufile avec difficulté entre les tables bondées. Il pose devant Eusébie deux petites timbales d’argent remplies d’une mixture bleue, et devant monsieur Crane un verre empli d’un liquide en train de buller comme un chaudron sous le feu. Le tout leur coûte quatre proverbes, et Eusébie propose de partager. Elle commence : « Par une nuit d’été, attention où on met les pieds, et dans les souterrains, attention au tour de reins ». Monsieur Crane enchaîne : « Bien mal acquis ne profite jamais, et à sagesse du gorille, tu obtiendras des jonquilles ». Le serveur hausse les sourcils au premier proverbe de monsieur Crane : il ne rime pas, on dirait bien un proverbe contrefait…
Les boissons sont bonnes, et une fois qu’elles sont bues, Eusébie passe aux choses sérieuses. Elle voudrait monter une expédition dans les souterrains de la ville, car selon elle, la 24e parabole de sa bible indiquerait qu’Itras y aurait laissé une relique à son départ de la ville. Monsieur Crane avertit la nonne que dans les souterrains pullulent les adorateurs de Nindra : ce qu’ils n’ont pas par le nombre, ils le compensent par la férocité. On parle de sacrifices humains, de sacrifices de jeunes filles en pleines soirées mondaines… mais Eusébie n’a pas froid aux yeux : ce n’est pas parce qu’elle porte l’habit de nonne qu’elle ne s’est pas déjà frottée aux choses de ce monde. Le problème, c’est qu’Eusébie n’a pas d’autres compagnons – ce n’est pas bien grave, dans des souterrains étroits – et surtout pas de fonds. Personne n’a encore sponsorisé le projet comme de rigueur. Monsieur Crane suggère un patronat de la société des explorateurs, ou bien l’aide d’un certain Cléanthe Brumaire, dont il s’est rappelé le nom à l’instant… Sœur Eusébie repousse aussitôt les verres et se lève : « Très bien, allons donc voir cet ami qui m’est déjà fort sympathique.
– Par contre, je dois vous prévenir, continue monsieur Crane : il a… de loin… brièvement… fréquenté les adorateurs de Nindra.
– Quoi ?!
– C’est pour la science, ma chère, il faut savoir rester ouverts…
– Bon, je suis prête à être magnanime, cela fait après tout partie des enseignements d’Itras. Si ce jeune homme est prêt à se confesser, je lui octroierai une absolution, et il n’y aura pas de problème.
– Très bien, dans ce cas retrouvons-nous ici même pour déjeuner, qu’en pensez-vous ?
– Ah, parfait, en plus le menu du jour ce sont des pattes de héron frites, cela m’a l’air excellent ! », répond Eusébie à monsieur Crane, qui s’éponge le front de plus belle.
Scène 2 : Le don de soi… littéral
L’Étranger, au lit avec Miss Wellington, vient de finir de lui donner du bonheur.
« Ah, mon petit, tu m’as encore une fois emplie de contentement. Dis-moi, j’aurais un petit service à te demander…
– Je suis toujours là pour rendre service, vous le savez bien.
– Voilà, j’ai récemment égaré un livre d’art qui m’est très cher, il appartenait à mon défunt mari (paix à son âme). C’est une collection d’estampes à laquelle je tiens beaucoup… Il était rangé dans la bibliothèque de la Ligue, mais je ne pense pas qu’un membre l’ait pris, nous sommes une ligue de vertu après tout.
– Et si quelqu’un l’avait pris pour son propre plaisir ? Tout appartient à tout le monde, non?
– Oui, mais certaines choses appartiennent plus à tout le monde que d’autres. Dans cette collection d’estampes, Olaf, mon défunt mari, a servi de modèle, et savoir que mon cher Olaf n’est plus près de moi, cela m’emplit de tristesse.
– Oh, je déteste la tristesse ! »
Miss Wellington conseille à l’Étranger d’aller chercher chez les gens riches de la ville : qui dit « gens riches » dit « collection d’art », et qui dit « collection d’art » dit peut-être « estampes ». L’Étranger semble avoir une idée et se rhabille pour partir comme si Miss Wellington n’existait plus. « Eh, et mon bécot ! » proteste celle-ci. L’Étranger l’embrasse et elle s’endort en ronflant aussitôt. Il quitte les locaux de la ligue et se prépare à rendre visite au seul homme riche qu’il connaît.
Acte III : la très précieuse révélation de sœur Eusébie
Dramatis Personæ
Monsieur Crane (joué par Pierre), explorateur qui s’est perdu, d’où vient-il ? il ne s’en souvient plus…
courte description : de taille moyenne et d’allure très passe-partout (brun, assez maigre), un peu dégingandé, il arbore en permanence l’air d’un homme dépassé par les évènements, mais qui tente de se donner une contenance. Après tout, son environnement immédiat n’est pas vraiment hostile, seulement incroyablement déroutant… n’est-ce pas? (face à l’étrangeté, il a le tic de se masser la main droite…).
Qualités dramatiques : halluciné (la logique d’Itras lui échappe, et il en est conscient) / curieux (sur Itras en particulier) / bravache désespéré
Aimant à intrigue : membre du club des explorateurs d’Itras (qu’il rencontre à la “part du diable” / est lié à “la tempête”); (soeur Oselie) / enquête sur la secte des adorateurs de Nindra / cherche une sortie à la ville.
L’Étranger (Joué par Mass), Bel et Naïf étranger
Qualités dramatiques : Beau et énigmatique, naïf, toujours là pour faire plaisir à quiconque
Aimants à Intrigues : La femme magnifique, n’a pas de lien avec la ville.
Il faut bien le dire, on ne sait pas grand chose de lui sinon qu’il erre en ville, très beau, dans son grand pardessus, tentant de rendre heureux ceux qu’il croise. Par ailleurs, il vit chez Miss Wellington, 85 ans, la présidente de la ligue de vertu qui a bien voulu accepter de le loger à son arrivée en ville. Certains l’ont vu se promener tout à fait nu dans la demeure.
Cléanthe Brumaire (Joué par Ozen), Homme riche qui essaie de trouver un sens à la vanité de son existence.
Description : Un petit homme très sage, fin de quarantaine, ni beau, ni laid mais bien entretenu, l’air mélancolique. Un costume parfaitement entretenu, chaque jour une fleur différente à la boutonnière, une grosse chevalière (avec une pierre bleue) à l’index droit. Fume de longues et fines cigarettes avec un air légèrement efféminé, tics nerveux.
Qualités dramatiques : Notable bien installé dans la bonne société / Curieux, pour tuer l’ennui / Plus une connaissance est improbable, plus il est susceptible de savoir / Joueur (presque) professionnel.
Aimants à intrigues : Terriblement endetté (Jeff l’Usurier) / A la recherche de la femme magnifique / Convoite un pouvoir supérieur (Le Maître d’école)
Personnages connus : une femme, qu’il a épousé et qu’il a oublié quelque part dans sa grande maison / quelques souteneurs choisis dans la rue des Nymphes.
Quelques temps plus tard…
Scène 1 : Une macération d’oeil de chimpanzé patron!
Monsieur Crane est au bar de la part du Diable, en plein milieu de Church Hill, où il rencontre fréquemment ses amis et collègues explorateurs. Il a justement rendez-vous avec l’une d’entre elles, sœur Eusébie (nonne au couvent de la Très Sainte Lumière d’Itras), qui a un peu de retard. Monsieur Crane feuillette en l’attendant le dernier numéro de la revue de l’office de tourisme de la ville, qui parle notamment du festival de la nuit de Murlon, cette fête où le bateau de Murlon revient au port d’Itras By, comme tous les ans depuis des siècles. Son œil s’arrête sur la page bande dessinée sur laquelle se trouve trois strips. Dans le premier, sans titre et muet, on voit une sœur en pleine discussion avec le vendeur d’un magasin de cigares ; dans la deuxième case, un singe sort du plafond et attrape une boite de cigares ; dans la troisième case, il cavale à travers les rues de la cité ; dans la quatrième case, une dizaine de nonnes (dont Eusébie) fument des cigares d’un air béat. Le deuxième strip s’intitule « Les aventures de Cléanthe Brumaire » : on y voit Cléanthe sur une scène de théâtre, vêtu d’un costume en poil de gorilles, en train de gesticuler devant un parterre d’enfants pas franchement convaincus par l’histoire qu’il leur raconte. Le troisième strip, une histoire d’aventure qui s’appelle « l’éveil », est assez étrange : sur la première case, un homme en pardessus dans une ruelle sombre traverse d’un air inquiet les rues de la ville ; dans la deuxième case, il frappe à une porte ; dans la troisième case, il descend avec un autre protagoniste les marches d’un escalier obscur, une torche à la main ; dans la dernière case, les deux hommes se tiennent par les épaules et l’un dit à l’autre : « Patience, frère ; le dieu machine s’éveillera bientôt ».
Sœur Eusébie finit par arriver et commande l’alcool de la semaine de la part du Diable, de la macération d’œil de chimpanzé. Monsieur Crane, tout en s’épongeant le front et en desserrant sa cravate, commande une limonade. Il demande à sœur Eusébie plus d’informations sur la nuit de Murlon : elle lui explique que cette coutume ancestrale remonte à la nuit où Murlon est arrivé à la cité d’Itras, alors que celle-ci était encore toute jeune. Ainsi qu’il est expliqué dans les premiers versets du livre saint de la Très Sainte Lumière d’Itras, Itras fut étonnée de l’arrivée de Murlon, car elle ne se rappelait pas avoir créé cet homme ou ce bateau. Murlon proposa à Itras de lui amener des choses inconnues de ce monde, et en paiement, tant que la cité existait, ses habitants devraient célébrer une grande fête en son honneur à chaque fin d’été. Ainsi, chaque année les gens se pressent au port pour voir quelles merveilles le bateau de Murlon a ramenées cette fois-ci, et quelles nouvelles modifications il a suivi. Un grand carnaval s’ensuit généralement.
Les boissons arrivent alors que le serveur se faufile avec difficulté entre les tables bondées. Il pose devant Eusébie deux petites timbales d’argent remplies d’une mixture bleue, et devant monsieur Crane un verre empli d’un liquide en train de buller comme un chaudron sous le feu. Le tout leur coûte quatre proverbes, et Eusébie propose de partager. Elle commence : « Par une nuit d’été, attention où on met les pieds, et dans les souterrains, attention au tour de reins ». Monsieur Crane enchaîne : « Bien mal acquis ne profite jamais, et à sagesse du gorille, tu obtiendras des jonquilles ». Le serveur hausse les sourcils au premier proverbe de monsieur Crane : il ne rime pas, on dirait bien un proverbe contrefait…
Les boissons sont bonnes, et une fois qu’elles sont bues, Eusébie passe aux choses sérieuses. Elle voudrait monter une expédition dans les souterrains de la ville, car selon elle, la 24e parabole de sa bible indiquerait qu’Itras y aurait laissé une relique à son départ de la ville. Monsieur Crane avertit la nonne que dans les souterrains pullulent les adorateurs de Nindra : ce qu’ils n’ont pas par le nombre, ils le compensent par la férocité. On parle de sacrifices humains, de sacrifices de jeunes filles en pleines soirées mondaines… mais Eusébie n’a pas froid aux yeux : ce n’est pas parce qu’elle porte l’habit de nonne qu’elle ne s’est pas déjà frottée aux choses de ce monde. Le problème, c’est qu’Eusébie n’a pas d’autres compagnons – ce n’est pas bien grave, dans des souterrains étroits – et surtout pas de fonds. Personne n’a encore sponsorisé le projet comme de rigueur. Monsieur Crane suggère un patronat de la société des explorateurs, ou bien l’aide d’un certain Cléanthe Brumaire, dont il s’est rappelé le nom à l’instant… Sœur Eusébie repousse aussitôt les verres et se lève : « Très bien, allons donc voir cet ami qui m’est déjà fort sympathique.
– Par contre, je dois vous prévenir, continue monsieur Crane : il a… de loin… brièvement… fréquenté les adorateurs de Nindra.
– Quoi ?!
– C’est pour la science, ma chère, il faut savoir rester ouverts…
– Bon, je suis prête à être magnanime, cela fait après tout partie des enseignements d’Itras. Si ce jeune homme est prêt à se confesser, je lui octroierai une absolution, et il n’y aura pas de problème.
– Très bien, dans ce cas retrouvons-nous ici même pour déjeuner, qu’en pensez-vous ?
– Ah, parfait, en plus le menu du jour ce sont des pattes de héron frites, cela m’a l’air excellent ! », répond Eusébie à monsieur Crane, qui s’éponge le front de plus belle.
Scène 2 : Le don de soi… littéral
L’Étranger, au lit avec Miss Wellington, vient de finir de lui donner du bonheur.
« Ah, mon petit, tu m’as encore une fois emplie de contentement. Dis-moi, j’aurais un petit service à te demander…
– Je suis toujours là pour rendre service, vous le savez bien.
– Voilà, j’ai récemment égaré un livre d’art qui m’est très cher, il appartenait à mon défunt mari (paix à son âme). C’est une collection d’estampes à laquelle je tiens beaucoup… Il était rangé dans la bibliothèque de la Ligue, mais je ne pense pas qu’un membre l’ait pris, nous sommes une ligue de vertu après tout.
– Et si quelqu’un l’avait pris pour son propre plaisir ? Tout appartient à tout le monde, non?
– Oui, mais certaines choses appartiennent plus à tout le monde que d’autres. Dans cette collection d’estampes, Olaf, mon défunt mari, a servi de modèle, et savoir que mon cher Olaf n’est plus près de moi, cela m’emplit de tristesse.
– Oh, je déteste la tristesse ! »
Miss Wellington conseille à l’Étranger d’aller chercher chez les gens riches de la ville : qui dit « gens riches » dit « collection d’art », et qui dit « collection d’art » dit peut-être « estampes ». L’Étranger semble avoir une idée et se rhabille pour partir comme si Miss Wellington n’existait plus. « Eh, et mon bécot ! » proteste celle-ci. L’Étranger l’embrasse et elle s’endort en ronflant aussitôt. Il quitte les locaux de la ligue et se prépare à rendre visite au seul homme riche qu’il connaît.
J'écris des mini-JdR par dizaines !
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 3 : Plaisir d’emprunter, joie de rembourser !
Cléanthe s’éveille dans un bureau, celui de Jeff l’Usurier.
« Bonjour Cléanthe, j’ai pris la liberté de vous faire mander car il me semble que vous n’êtes guère enclin à me rendre visite, ces derniers temps.
– Non, mais des activités m’ont occupé… J’ai dû kidnapper une personne récemment, et puis d’autres choses m’ont occupé, et j’ai oublié votre anniversaire…
– Oui. J’ai reçu votre… carte de vœux. J’ai réfléchi. Je suis d’accord. Je suis prêt à effacer votre dette ; j’ai quelque chose pour vous en échange. »
Un serviteur met plusieurs minutes à s’avancer jusque Cléanthe et à lui présenter, sur un plateau d’argent, une bouteille qui semble vide.
« Une bouteille vide ? demande Cléanthe.
– Non, répond Jeff. Une bouteille qui contient une âme.
– Mais pour quoi faire ?
– L’âme est souillée. Elle ne m’intéresse plus. Je veux que vous alliez la jeter.
– Mais pourquoi vouloir effacer ma dette en échange d’une âme ? Ce brave homme (Cléanthe désigne le serviteur tremblotant) pourrait tout aussi bien continuer sa route sur ses petits patins et glisser jusqu’à la poubelle…
– « Pourquoi ? » n’est pas une question acceptable. La question acceptable est « Où ? ».
– Oui, où pourrait-il continuer à glisser ?
– Dans le plus profond des puits. Prenez l’âme.
– Mais, euh… Reparlons de cette histoire de dette… Moi ça ne me gênait pas trop, ces menaces de mort, et ces assassins qui boitent, les jumelles lancées à mes trousses… On s’en accommode, vous savez ?
– Bien, contre-proposition : la dette reste en place. Mais j’ai un nouveau travail pour vous. Prenez cette bouteille. Votre… tâche… est de la jeter dans le plus profond des puits. Si vous ne le faites pas, je vous tue.
– Des menaces ? » frissonne Cléanthe, qui s’empare aussitôt de la bouteille à deux doigts avant de la ranger dans la poche de son veston où trône une pivoine.
« Vous avez deux jours, continue Jeff.
– Ah, un délai en plus, très bien ! Dans le plus profond des puits ? On n’a bien sûr aucune idée d’où il se trouve ?
– Profondément, sans doute. En addition, votre dette tient toujours.
– Elle est colossale, bien entendu ?
– Énorme. Gigantesque.
– Dans ce cas, vous ne verrez pas de problèmes à y ajouter un petit quelque chose ?
– Précision ?
– Disons que je cherche un groupe de musique susceptible de chanter la sérénade sous les fenêtres d’une femme, mais que je n’ai pas la moindre idée d’où commencer pour ne pas passer pour un vieux barbon.
– J’ai un contact. »
Jeff frappe dans ses mains, rappelant le serviteur à lui. Au bout d’interminables minutes, il tend à Cléanthe une petite carte sur son plateau d’argent. Alors que Cléanthe avance la main pour prendre la carte, Jeff ajoute : « Attention. La carte contre un service ». Un simple nom y est inscrit : Jonas StJones. « Le service sera demandé plus tard », termine Jeff.
Scène 4 : La collection d’estampes de Cléanthe Brumaire
Cléanthe se lève et quitte le bureau de Jeff : en passant la porte, il tombe sur son lit, tiré de son sommeil par des coups à la porte. « Allez ouvrir ! » commence-t-il, avant de se souvenir qu’il n’a plus actuellement de valets chez lui. Il enfile ses pantoufles, rajuste la pivoine dans sa veste de pyjama, pose la bouteille qui était rangée dans sa poche sur une tablette, et s’approche de la porte.
« Monsieur Brumaire ?
– Non, c’est son serviteur, répond Cléanthe en contrefaisant sa voix.
– Vous pouvez m’ouvrir, monsieur Brumaire ? C’est l’Étranger ! »
Cléanthe fait semblant de s’éloigner puis de revenir, avant d’ouvrir la porte. Une montagne de prospectus se déverse à ses pieds : cela fait plusieurs jours qu’il reçoit des offres pour des cours du soir. Les prospectus disent tous la même chose : « Cléanthe, vous voulez tout savoir ? Vous voulez la connaissance ? Vous avez besoin de leçons ? Venez aux cours du soir du maître d’école ».
Cléanthe propose un cognac et une cigarette à l’Étranger, qui décline l’offre. Cléanthe se sert néanmoins un verre et se glisse une cigarette dans la bouche, ce qui ne manque pas d’étonner son interlocuteur [Voir Le ton et l’odeur de l’amour].
« Voilà, dit l’Étranger, vous m’avez bien dit que vous étiez situé parmi les plus hauts dans la hiérarchie de cette ville ? J’ai besoin que vous me fassiez rentrer dans les endroits où il y a des œuvres d’art.
– Vous êtes au bon endroit, il y en a justement une ici, de collection privée.
– Ah oui ? Vous avez une estampe avec Olaf ?
– J’ai quelques estampes, mais avec Olaf, je ne saurais dire… Je ne connais pas bien ma collection, vous savez. L’important c’est d’acheter, pas de regarder ce qu’on a. Mais si vous souhaitez la consulter, n’hésitez pas…
– C’est que Miss Wellington m’a demandé de récupérer un jeu d’estampes très important… Elle avait l’air très malheureuse… »
Cléanthe se lève pour montrer sa collection à l’Étranger, alors que de nouveaux coups résonnent à la porte. Il imite une fois de plus son serviteur pour répondre à Monsieur Crane. Ce dernier annonce avoir besoin de fonds pour l’exploration des égouts : Cléanthe lui ouvre la porte et lui propose un cognac et une cigarette.
« Je vous présente l’Étranger, un visiteur de notre ville.
– Ah mais je vous reconnais ! On s’est déjà croisés chez Miss Wellington, je crois. Je ne vous avais pas remis avec des vêtements.
– Oui, je ne connais pas bien cette ville et elle m’a proposé de me protéger, je ne sais pas bien de quoi d’ailleurs…
– De la chaleur sans doute ? Vous étiez nu la dernière fois que je vous ai croisé, après tout… »
Cléanthe propose à ses invités de visiter sa collection d’art pour détendre l’atmosphère. Monsieur Crane vide son verre d’un trait avant de quitter le salon : au fond, il aperçoit des choses qui semblent grouiller. Il desserre sa cravate et se masse nerveusement la main droite.
Il y a de grandes reliures dans le salon attenant ; Cléanthe en étale une sur la table, on peut y lire « PICASSO » et « GUERNICA » sur toute sa longueur. Toutes les reliures sont à l’avenant : Cléanthe commente à l’envi chacune des gravures, totalement ignoré par l’Étranger. Ce dernier avoue ne pas bien savoir ce qu’il cherche : il n’a jamais vu Olaf, et ne sait pas sur quelle gravure il peut se trouver. De son côté, monsieur Crane est surpris : Cléanthe n’a-t-il pas d’oiseau moqueur pour s’occuper de sa collection ?
« Oh vous savez, on n’est jamais mieux servi que par soi-même… Surtout quand on n’a pas de quoi payer des gens, ajoute Cléanthe à mi-voix.
– C’est quoi “payer des gens” ? demande l’Étranger.
– Eh bien c’est quand certaines personnes viennent vous voir, vous demandent comme service de les payer, et sont prêtes à faire tout un tas de choses en échange… »
Monsieur Crane continue de tourner les pages, et il s’arrête soudain devant l’une des reliures : il lui semble y voir un personnage qui lui ressemble de manière frappante. La gravure représente une foule dans une ville à la fois similaire et différente de la cité d’Itras; le personnage est en arrière-plan, dans un coin, en vive discussion avec un homme bedonnant, sans doute un médecin.
« Vous avez vu Olaf ? demande l’Étranger, plein d’espoir.
– Non, j’ai cru me voir dans l’image…
– Ne vous inquiétez pas, rassure Cléanthe en allant pour taper dans le dos de l’Étranger (avant de se raviser à cause de cette étrange protubérance dans son dos). Nous finirons par le trouver.
– Vous savez, dit monsieur Crane, j’ai entendu dire qu’on pouvait trouver en ville des rats de bibliothèque ; ces rongeurs peuvent retrouver n’importe quelle information dans le labyrinthe des rayons. Ils demandent simplement un livre en échange. Je vais aller vous chercher ça tout de suite.
– Monsieur Crâne, avant de partir, ne voulez-vous pas me dire la raison de votre venue ? Je dois avouer que je ne me souviens plus où nous nous sommes croisés… »
Monsieur Crane se revoit en train d’observer, l’air apeuré, une réunion des adorateurs de Nindra dans laquelle Cléanthe avait arraché le cœur d’une jeune vierge.
« Oui oui, c’était il y a quelques années, à une réception sans doute…
– Ah oui, tout à fait. Alors qu’étiez-vous venu me demander, puisque c’est la journée où les gens me demandent des choses ? »
Monsieur Crane expose à Cléanthe la mission d’Eusébie. Cléanthe avait été plutôt déçu de ses expéditions précédentes dans les égouts de la ville (à l’exception d’une course-poursuite avec un alligator), néanmoins il est prêt à proposer un échange à monsieur Crane : son immense fortune et sa présence contre la participation de monsieur Crane à une société distinguée et nombreuse, qui se réunit régulièrement, aux intérêts sains, mais dont Cléanthe ne souhaite plus faire partie.
« Ces gens-là, ils ont des collections d’art ? demande l’Étranger ?
– Oui, mais je crains qu’ils ne goûtent guère votre compagnie. Ils sont de nature fragile, vous côtoyer ne leur ferait que peu de bien. Mais monsieur Crane pourra leur demander de votre part, qu’en pensez-vous ? Voilà là un marché où tout le monde sera content, il n’y a guère que Jeff l’Usurier qui peut prétendre en proposer de pareils.
– Nous sommes tous d’accord alors, c’est parfait ! se réjouit monsieur Crane. Allons donc déjeuner à la part du Diable pour fêter cela.
Cléanthe s’éveille dans un bureau, celui de Jeff l’Usurier.
« Bonjour Cléanthe, j’ai pris la liberté de vous faire mander car il me semble que vous n’êtes guère enclin à me rendre visite, ces derniers temps.
– Non, mais des activités m’ont occupé… J’ai dû kidnapper une personne récemment, et puis d’autres choses m’ont occupé, et j’ai oublié votre anniversaire…
– Oui. J’ai reçu votre… carte de vœux. J’ai réfléchi. Je suis d’accord. Je suis prêt à effacer votre dette ; j’ai quelque chose pour vous en échange. »
Un serviteur met plusieurs minutes à s’avancer jusque Cléanthe et à lui présenter, sur un plateau d’argent, une bouteille qui semble vide.
« Une bouteille vide ? demande Cléanthe.
– Non, répond Jeff. Une bouteille qui contient une âme.
– Mais pour quoi faire ?
– L’âme est souillée. Elle ne m’intéresse plus. Je veux que vous alliez la jeter.
– Mais pourquoi vouloir effacer ma dette en échange d’une âme ? Ce brave homme (Cléanthe désigne le serviteur tremblotant) pourrait tout aussi bien continuer sa route sur ses petits patins et glisser jusqu’à la poubelle…
– « Pourquoi ? » n’est pas une question acceptable. La question acceptable est « Où ? ».
– Oui, où pourrait-il continuer à glisser ?
– Dans le plus profond des puits. Prenez l’âme.
– Mais, euh… Reparlons de cette histoire de dette… Moi ça ne me gênait pas trop, ces menaces de mort, et ces assassins qui boitent, les jumelles lancées à mes trousses… On s’en accommode, vous savez ?
– Bien, contre-proposition : la dette reste en place. Mais j’ai un nouveau travail pour vous. Prenez cette bouteille. Votre… tâche… est de la jeter dans le plus profond des puits. Si vous ne le faites pas, je vous tue.
– Des menaces ? » frissonne Cléanthe, qui s’empare aussitôt de la bouteille à deux doigts avant de la ranger dans la poche de son veston où trône une pivoine.
« Vous avez deux jours, continue Jeff.
– Ah, un délai en plus, très bien ! Dans le plus profond des puits ? On n’a bien sûr aucune idée d’où il se trouve ?
– Profondément, sans doute. En addition, votre dette tient toujours.
– Elle est colossale, bien entendu ?
– Énorme. Gigantesque.
– Dans ce cas, vous ne verrez pas de problèmes à y ajouter un petit quelque chose ?
– Précision ?
– Disons que je cherche un groupe de musique susceptible de chanter la sérénade sous les fenêtres d’une femme, mais que je n’ai pas la moindre idée d’où commencer pour ne pas passer pour un vieux barbon.
– J’ai un contact. »
Jeff frappe dans ses mains, rappelant le serviteur à lui. Au bout d’interminables minutes, il tend à Cléanthe une petite carte sur son plateau d’argent. Alors que Cléanthe avance la main pour prendre la carte, Jeff ajoute : « Attention. La carte contre un service ». Un simple nom y est inscrit : Jonas StJones. « Le service sera demandé plus tard », termine Jeff.
Scène 4 : La collection d’estampes de Cléanthe Brumaire
Cléanthe se lève et quitte le bureau de Jeff : en passant la porte, il tombe sur son lit, tiré de son sommeil par des coups à la porte. « Allez ouvrir ! » commence-t-il, avant de se souvenir qu’il n’a plus actuellement de valets chez lui. Il enfile ses pantoufles, rajuste la pivoine dans sa veste de pyjama, pose la bouteille qui était rangée dans sa poche sur une tablette, et s’approche de la porte.
« Monsieur Brumaire ?
– Non, c’est son serviteur, répond Cléanthe en contrefaisant sa voix.
– Vous pouvez m’ouvrir, monsieur Brumaire ? C’est l’Étranger ! »
Cléanthe fait semblant de s’éloigner puis de revenir, avant d’ouvrir la porte. Une montagne de prospectus se déverse à ses pieds : cela fait plusieurs jours qu’il reçoit des offres pour des cours du soir. Les prospectus disent tous la même chose : « Cléanthe, vous voulez tout savoir ? Vous voulez la connaissance ? Vous avez besoin de leçons ? Venez aux cours du soir du maître d’école ».
Cléanthe propose un cognac et une cigarette à l’Étranger, qui décline l’offre. Cléanthe se sert néanmoins un verre et se glisse une cigarette dans la bouche, ce qui ne manque pas d’étonner son interlocuteur [Voir Le ton et l’odeur de l’amour].
« Voilà, dit l’Étranger, vous m’avez bien dit que vous étiez situé parmi les plus hauts dans la hiérarchie de cette ville ? J’ai besoin que vous me fassiez rentrer dans les endroits où il y a des œuvres d’art.
– Vous êtes au bon endroit, il y en a justement une ici, de collection privée.
– Ah oui ? Vous avez une estampe avec Olaf ?
– J’ai quelques estampes, mais avec Olaf, je ne saurais dire… Je ne connais pas bien ma collection, vous savez. L’important c’est d’acheter, pas de regarder ce qu’on a. Mais si vous souhaitez la consulter, n’hésitez pas…
– C’est que Miss Wellington m’a demandé de récupérer un jeu d’estampes très important… Elle avait l’air très malheureuse… »
Cléanthe se lève pour montrer sa collection à l’Étranger, alors que de nouveaux coups résonnent à la porte. Il imite une fois de plus son serviteur pour répondre à Monsieur Crane. Ce dernier annonce avoir besoin de fonds pour l’exploration des égouts : Cléanthe lui ouvre la porte et lui propose un cognac et une cigarette.
« Je vous présente l’Étranger, un visiteur de notre ville.
– Ah mais je vous reconnais ! On s’est déjà croisés chez Miss Wellington, je crois. Je ne vous avais pas remis avec des vêtements.
– Oui, je ne connais pas bien cette ville et elle m’a proposé de me protéger, je ne sais pas bien de quoi d’ailleurs…
– De la chaleur sans doute ? Vous étiez nu la dernière fois que je vous ai croisé, après tout… »
Cléanthe propose à ses invités de visiter sa collection d’art pour détendre l’atmosphère. Monsieur Crane vide son verre d’un trait avant de quitter le salon : au fond, il aperçoit des choses qui semblent grouiller. Il desserre sa cravate et se masse nerveusement la main droite.
Il y a de grandes reliures dans le salon attenant ; Cléanthe en étale une sur la table, on peut y lire « PICASSO » et « GUERNICA » sur toute sa longueur. Toutes les reliures sont à l’avenant : Cléanthe commente à l’envi chacune des gravures, totalement ignoré par l’Étranger. Ce dernier avoue ne pas bien savoir ce qu’il cherche : il n’a jamais vu Olaf, et ne sait pas sur quelle gravure il peut se trouver. De son côté, monsieur Crane est surpris : Cléanthe n’a-t-il pas d’oiseau moqueur pour s’occuper de sa collection ?
« Oh vous savez, on n’est jamais mieux servi que par soi-même… Surtout quand on n’a pas de quoi payer des gens, ajoute Cléanthe à mi-voix.
– C’est quoi “payer des gens” ? demande l’Étranger.
– Eh bien c’est quand certaines personnes viennent vous voir, vous demandent comme service de les payer, et sont prêtes à faire tout un tas de choses en échange… »
Monsieur Crane continue de tourner les pages, et il s’arrête soudain devant l’une des reliures : il lui semble y voir un personnage qui lui ressemble de manière frappante. La gravure représente une foule dans une ville à la fois similaire et différente de la cité d’Itras; le personnage est en arrière-plan, dans un coin, en vive discussion avec un homme bedonnant, sans doute un médecin.
« Vous avez vu Olaf ? demande l’Étranger, plein d’espoir.
– Non, j’ai cru me voir dans l’image…
– Ne vous inquiétez pas, rassure Cléanthe en allant pour taper dans le dos de l’Étranger (avant de se raviser à cause de cette étrange protubérance dans son dos). Nous finirons par le trouver.
– Vous savez, dit monsieur Crane, j’ai entendu dire qu’on pouvait trouver en ville des rats de bibliothèque ; ces rongeurs peuvent retrouver n’importe quelle information dans le labyrinthe des rayons. Ils demandent simplement un livre en échange. Je vais aller vous chercher ça tout de suite.
– Monsieur Crâne, avant de partir, ne voulez-vous pas me dire la raison de votre venue ? Je dois avouer que je ne me souviens plus où nous nous sommes croisés… »
Monsieur Crane se revoit en train d’observer, l’air apeuré, une réunion des adorateurs de Nindra dans laquelle Cléanthe avait arraché le cœur d’une jeune vierge.
« Oui oui, c’était il y a quelques années, à une réception sans doute…
– Ah oui, tout à fait. Alors qu’étiez-vous venu me demander, puisque c’est la journée où les gens me demandent des choses ? »
Monsieur Crane expose à Cléanthe la mission d’Eusébie. Cléanthe avait été plutôt déçu de ses expéditions précédentes dans les égouts de la ville (à l’exception d’une course-poursuite avec un alligator), néanmoins il est prêt à proposer un échange à monsieur Crane : son immense fortune et sa présence contre la participation de monsieur Crane à une société distinguée et nombreuse, qui se réunit régulièrement, aux intérêts sains, mais dont Cléanthe ne souhaite plus faire partie.
« Ces gens-là, ils ont des collections d’art ? demande l’Étranger ?
– Oui, mais je crains qu’ils ne goûtent guère votre compagnie. Ils sont de nature fragile, vous côtoyer ne leur ferait que peu de bien. Mais monsieur Crane pourra leur demander de votre part, qu’en pensez-vous ? Voilà là un marché où tout le monde sera content, il n’y a guère que Jeff l’Usurier qui peut prétendre en proposer de pareils.
– Nous sommes tous d’accord alors, c’est parfait ! se réjouit monsieur Crane. Allons donc déjeuner à la part du Diable pour fêter cela.
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 5 : Bibliothèque municipale, département des rats
Monsieur Crane se rend immédiatement à la première bouquinerie du coin, pour acheter le livre le plus gros possible, un recueil de mauvaises poésies ; il se rend ensuite à la bibliothèque avec son livre sous le bras, en quête d’un rat qui pourra lui apporter quelques réponses.
Le département des rats de bibliothèques est le seul endroit du bâtiment où l’on tolère le bruit : bien obligé avec ces grignotages permanents. Il y a déjà une longue queue devant l’aile de la bibliothèque ; le dernier de la file indique à monsieur Crane qu’il doit prendre un numéro. Monsieur Crane décroche le numéro 62, alors qu’un écriteau lui indique que c’est le tour du numéro 3. Monsieur Crane n’est pas d’humeur à patienter toute la journée, et décide d’appliquer la vieille tradition du duel de lancer d’encyclopédies, qui permet à tout lecteur de gagner des rangs dans une queue. Il monte sur un pupitre (en montant deux marches puis en descendant une, comme le veut la tradition) puis annonce sa requête à l’assemblée : « Je suis certes, comme vous, un amoureux de la connaissance, mais aujourd’hui je suis pressé ! Je vais donc énoncer les insultes rituelles au numéro 4, pour échanger sa place avec la mienne s’il l’ose ! ». La détentrice du numéro 4, une petite femme courte sur pattes (c’est-à-dire qu’elle a une taille normale mais des jambes d’une dizaine de centimètres de haut) se retourne et, fendant la foule, elle se dirige vers monsieur Crane. Les autres personnes de la queue forment un cercle et commencent à parier entre eux sur le vainqueur du combat. Des mains se tendent et fournissent des livres aux adversaires, qui commencent à se tourner autour pour se jauger (monsieur Crane attrape un livre sur les métaux lourds).
[Je demande à Pierre de tirer une carte « Résolution ». Mass lit « Oui, et… Vous réussissez et votre succès a un effet positif pour un ou une ami.e ».]
Le lancer de monsieur Crane est parfait ; l’encyclopédie s’envole et écrase trois personnes de la file d’attente au passage, qui doivent être évacuées par des ambulanciers [sur le coup, je ne me rends pas compte que cela ne correspond pas au résultat de la carte, et ce n’est pas bien grave après tout !]. On l’amène immédiatement devant un rat, à qui il offre son recueil de poésie contre des informations sur un livre d’estampe contenant un portrait inspiré d’Olaf. Après avoir mâchouillé le livre pendant un certain temps, le rat lâche un petit renvoi et se dirige vers l’arrière de sa cage ; il libère une machine à écrire miniature en appuyant sur un bouton. Il tapote sur ses touches, et apporte entre ses dents le résultat à monsieur Crane, qui a besoin d’une loupe pour déchiffrer le message : « Les estampes osées se trouvent dans les souterrains ». Monsieur Crane salue le rat selon la formule rituelle ; les derniers mots meurent sur ses lèvres alors qu’il prend conscience de l’énormité de ce qu’il vient de vivre. Il quitte la bibliothèque en s’essuyant le front avec son mouchoir.
Scène 6 : D’un manque dans les cœurs et d’une affaire vite faite aux toilettes il y a quelque temps
Après avoir passé une heure à s’habiller, Cléanthe, accompagné de l’Étranger, se rend à la part du Diable.
« Cher monsieur l’Étranger, depuis la dernière fois que nous nous sommes vus, avez-vous eu le plaisir de recroiser mademoiselle Beaulieu ?
– Absolument pas. Je suis content que vous m’ayez envoyé chez Miss Wellington après la soirée ; elle m’a dit qu’elle prenait soin de moi depuis longtemps, ce dont je ne me rappelle pas, mais peu importe. Elle voulait que je la rende heureuse, ce que j’ai fait sans souci.
– Votre problème de mémoire s’arrange donc, tant mieux.
– Depuis que je vous ai rencontré dans cet appartement crasseux, je n’ai eu aucun problème. Avant cela, c’est plus flou en revanche. Ah, si ! Je revois cette femme merveilleuse, dans les brumes… les brumes qui traversent une foule… Il faudrait que je la voie !
– Oui, vous avez eu une aventure avec cette femme dans les toilettes de monsieur Oppheimer.
– Avec cette… ? Dans les… ? Quand ?
– Oui, la boiteuse !
– Ah non, pas elle ! Elle, c’était pour lui faire plaisir, mais je n’ai pas compris, elle s’est transformée en sa sœur, qui était fâchée, alors que je suis là pour donner du bonheur, rien de plus. Non, je parle de cette femme merveilleuse, dont je n’ai qu’une vision floue…
– Je vois, du genre « éthérée, couronne de cheveux blonds, très grande »…
– C’est ça ! Elle semblait voler dans la foule… »
La fumée de cigarette de Cléanthe forme un petit tourbillon mélancolique.
« Nous allons être en retard, discutons en chemin de ces femmes qui ont marqué nos vies. Vous savez, j’ai eu de la chance de passer un peu de temps avec la femme dont vous parlez… C’était étrange… Je ne sais pas si je dois vous amener à elle, ni même si elle habite toujours au même endroit.
– Il faut que vous me la présentiez ! Je sens que nos destins sont liés…
– Vous savez ce qui arrive quand on rencontre cette femme ? On en perd le goût du monde. Après, tout est fade… Quand la vie n’a plus de saveur, quand on se réveille tous les matins en se disant qu’on a connu la chose la plus importante de sa vie et que tout ce qui suit sera une succession de moments tous plus médiocres les uns que les autres, c’est épouvantable…
– Ne soyez pas fâché, monsieur Brumaire, lui répond l’Étranger en le regardant en coin, mais je ne comprends absolument pas de quoi vous parlez. Mais je sens que vous n’êtes pas bien. Y aurait-il un moyen de vous rendre heureux ?
– Non ! Je ne veux pas que vous me donniez du plaisir ! C’est tentant, mais sans façon, merci bien. Je veux jouir de ma mélancolie encore un peu.
– Ah, c’est étrange… Je pensais que les humains voulaient être heureux ?
– Non, non, nous aimons beaucoup être malheureux… Le malheur fait aussi partie du sel de la vie… La déception, l’échec, le goût de l’amertume… »
Cléanthe, déprimé quelques minutes auparavant, reprend alors de l’éclat et termine leur promenade d’un air satisfait. L’Étranger, semblant avoir découvert de nouvelles choses sur la ville qui l’entoure, regarde tout d’un air extasié.
Monsieur Crane se rend immédiatement à la première bouquinerie du coin, pour acheter le livre le plus gros possible, un recueil de mauvaises poésies ; il se rend ensuite à la bibliothèque avec son livre sous le bras, en quête d’un rat qui pourra lui apporter quelques réponses.
Le département des rats de bibliothèques est le seul endroit du bâtiment où l’on tolère le bruit : bien obligé avec ces grignotages permanents. Il y a déjà une longue queue devant l’aile de la bibliothèque ; le dernier de la file indique à monsieur Crane qu’il doit prendre un numéro. Monsieur Crane décroche le numéro 62, alors qu’un écriteau lui indique que c’est le tour du numéro 3. Monsieur Crane n’est pas d’humeur à patienter toute la journée, et décide d’appliquer la vieille tradition du duel de lancer d’encyclopédies, qui permet à tout lecteur de gagner des rangs dans une queue. Il monte sur un pupitre (en montant deux marches puis en descendant une, comme le veut la tradition) puis annonce sa requête à l’assemblée : « Je suis certes, comme vous, un amoureux de la connaissance, mais aujourd’hui je suis pressé ! Je vais donc énoncer les insultes rituelles au numéro 4, pour échanger sa place avec la mienne s’il l’ose ! ». La détentrice du numéro 4, une petite femme courte sur pattes (c’est-à-dire qu’elle a une taille normale mais des jambes d’une dizaine de centimètres de haut) se retourne et, fendant la foule, elle se dirige vers monsieur Crane. Les autres personnes de la queue forment un cercle et commencent à parier entre eux sur le vainqueur du combat. Des mains se tendent et fournissent des livres aux adversaires, qui commencent à se tourner autour pour se jauger (monsieur Crane attrape un livre sur les métaux lourds).
[Je demande à Pierre de tirer une carte « Résolution ». Mass lit « Oui, et… Vous réussissez et votre succès a un effet positif pour un ou une ami.e ».]
Le lancer de monsieur Crane est parfait ; l’encyclopédie s’envole et écrase trois personnes de la file d’attente au passage, qui doivent être évacuées par des ambulanciers [sur le coup, je ne me rends pas compte que cela ne correspond pas au résultat de la carte, et ce n’est pas bien grave après tout !]. On l’amène immédiatement devant un rat, à qui il offre son recueil de poésie contre des informations sur un livre d’estampe contenant un portrait inspiré d’Olaf. Après avoir mâchouillé le livre pendant un certain temps, le rat lâche un petit renvoi et se dirige vers l’arrière de sa cage ; il libère une machine à écrire miniature en appuyant sur un bouton. Il tapote sur ses touches, et apporte entre ses dents le résultat à monsieur Crane, qui a besoin d’une loupe pour déchiffrer le message : « Les estampes osées se trouvent dans les souterrains ». Monsieur Crane salue le rat selon la formule rituelle ; les derniers mots meurent sur ses lèvres alors qu’il prend conscience de l’énormité de ce qu’il vient de vivre. Il quitte la bibliothèque en s’essuyant le front avec son mouchoir.
Scène 6 : D’un manque dans les cœurs et d’une affaire vite faite aux toilettes il y a quelque temps
Après avoir passé une heure à s’habiller, Cléanthe, accompagné de l’Étranger, se rend à la part du Diable.
« Cher monsieur l’Étranger, depuis la dernière fois que nous nous sommes vus, avez-vous eu le plaisir de recroiser mademoiselle Beaulieu ?
– Absolument pas. Je suis content que vous m’ayez envoyé chez Miss Wellington après la soirée ; elle m’a dit qu’elle prenait soin de moi depuis longtemps, ce dont je ne me rappelle pas, mais peu importe. Elle voulait que je la rende heureuse, ce que j’ai fait sans souci.
– Votre problème de mémoire s’arrange donc, tant mieux.
– Depuis que je vous ai rencontré dans cet appartement crasseux, je n’ai eu aucun problème. Avant cela, c’est plus flou en revanche. Ah, si ! Je revois cette femme merveilleuse, dans les brumes… les brumes qui traversent une foule… Il faudrait que je la voie !
– Oui, vous avez eu une aventure avec cette femme dans les toilettes de monsieur Oppheimer.
– Avec cette… ? Dans les… ? Quand ?
– Oui, la boiteuse !
– Ah non, pas elle ! Elle, c’était pour lui faire plaisir, mais je n’ai pas compris, elle s’est transformée en sa sœur, qui était fâchée, alors que je suis là pour donner du bonheur, rien de plus. Non, je parle de cette femme merveilleuse, dont je n’ai qu’une vision floue…
– Je vois, du genre « éthérée, couronne de cheveux blonds, très grande »…
– C’est ça ! Elle semblait voler dans la foule… »
La fumée de cigarette de Cléanthe forme un petit tourbillon mélancolique.
« Nous allons être en retard, discutons en chemin de ces femmes qui ont marqué nos vies. Vous savez, j’ai eu de la chance de passer un peu de temps avec la femme dont vous parlez… C’était étrange… Je ne sais pas si je dois vous amener à elle, ni même si elle habite toujours au même endroit.
– Il faut que vous me la présentiez ! Je sens que nos destins sont liés…
– Vous savez ce qui arrive quand on rencontre cette femme ? On en perd le goût du monde. Après, tout est fade… Quand la vie n’a plus de saveur, quand on se réveille tous les matins en se disant qu’on a connu la chose la plus importante de sa vie et que tout ce qui suit sera une succession de moments tous plus médiocres les uns que les autres, c’est épouvantable…
– Ne soyez pas fâché, monsieur Brumaire, lui répond l’Étranger en le regardant en coin, mais je ne comprends absolument pas de quoi vous parlez. Mais je sens que vous n’êtes pas bien. Y aurait-il un moyen de vous rendre heureux ?
– Non ! Je ne veux pas que vous me donniez du plaisir ! C’est tentant, mais sans façon, merci bien. Je veux jouir de ma mélancolie encore un peu.
– Ah, c’est étrange… Je pensais que les humains voulaient être heureux ?
– Non, non, nous aimons beaucoup être malheureux… Le malheur fait aussi partie du sel de la vie… La déception, l’échec, le goût de l’amertume… »
Cléanthe, déprimé quelques minutes auparavant, reprend alors de l’éclat et termine leur promenade d’un air satisfait. L’Étranger, semblant avoir découvert de nouvelles choses sur la ville qui l’entoure, regarde tout d’un air extasié.
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 7 : D’un événement qui annonce l’épiphanie souterraine
La part du Diable est encore plus bondée que ce matin ; il leur faut jouer des coudes pour rentrer, et l’entrainement de Cléanthe chez son tailleur est mis à bon emploi. L’Étranger, lui, n’a pas besoin de taper sur les gens : tout le monde s’écarte, sans s’en rendre compte, à son approche. Ils aperçoivent monsieur Crane assis au fond de la salle, à côté d’une nonne et d’une dizaine de marins sur une banquette faite pour quatre. L’Étranger trouve une place sans problèmes, tandis que Cléanthe retourne un des marins contre la table, qui lui cède sa place.
« Mais enfin, monsieur Brumaire, ce n’est pas très gentil ! proteste l’Étranger.
– Vous voyez, cher ami, c’est la preuve par l’exemple de ce que j’avançais dans la rue. Les gens aiment bien être malheureux. Allez file, garnement. »
L’Étranger se propose de laisser sa place, mais Cléanthe ne se laisse pas démonter et chasse l’importun.
« Soyez compréhensif, dit monsieur Crane, d’ailleurs vous n’avez tapé personne pour vous asseoir !
– C’est vrai, que diable, renchérit Cléanthe, ce n’est pas parce que vous êtes étranger que vous devez mépriser les coutumes de cette ville.
– Si tu veux, mon gars, propose un marin à côté d’eux, je peux te montrer comment on fait. Tu veux qu’on se tape, un peu ?
– Je ne saurais comment faire, proteste l’Étranger.
– Regarde, c’est facile : tu prends mon bras, comme ça, et tu le soulèves… et ta main, là… tu replies les doigts… et tu… tu… tu me la poses sur le visage… »
Le marin, de plus en plus troublé, se caresse la joue avec la main de l’Étranger. Les autres marins se regardent d’un air gêné. Gros Joe le marin et l’Étranger s’embrassent, et Joe s’écroule sur la table en ronflant. Cléanthe regarde la scène avec ahurissement : il a beau être étranger, la méthode de cet être semble fonctionner. Peut-être y aurait-il des enseignements à tirer de cela… Il note sur son petit carnet, juste après « séduire Amandine Beaulieu pour être très malheureux du rejet qu’elle m’opposera », « accepter que l’Étranger me donne du plaisir ».
Monsieur Crane dissipe la confusion en introduisant Eusébie au reste du groupe. Elle serre la main de Cléanthe vigoureusement, et cette poignée de mains tourne vite à celui qui broiera les phalanges de l’autre en premier. Eusébie se tourne ensuite vers l’Étranger pour le saluer, mais devient soudain toute blanche et se signe frénétiquement.
« Mais vous… vous êtes… vous êtes un… mais…
– Il serait difficile de ne pas remarquer qu’il n’est pas d’ici, observe Cléanthe d’un air bonhomme. »
L’Étranger tente de prendre la main de la nonne, mais celle-ci la retire, arguant qu’elle n’en est pas digne.
« Vous êtes de toute évidence un envoyé d’Itras, une nonne sent ces choses-là… Je ne suis pas assez pure pour vous toucher…
– Jamais entendu parler, mais ma mémoire me joue des tours, depuis que… depuis que… Itras ! Vous voulez dire que c’est cette femme magnifique qui traversait la brume ?
– Oh non, rit Eusébie, Itras nous a quittés il y a bien longtemps !
– Dommage, elle était si belle… Vous ne l’avez pas vue ? Vous ne savez pas où elle habite ?
– Itras ? Vous savez, elle habite dans nos cœurs… Si vous la cherchez, je suis sûre que vous la trouverez au fond de vous. »
Le serveur arrive sur ces entrefaites, se frayant un passage dans la foule à l’aide de ses échasses. Pendant qu’il prend les commandes, les marins voisins de table du groupe griffonnent sur leurs serviettes en les regardant.
Scène 8 : Derniers préparatifs avant de patauger
La conversation se tourne à nouveau vers le financement par Cléanthe de l’expédition. Monsieur Crane en profite pour informer l’Étranger de ce que le rat de bibliothèque lui a dit : l’Étranger décide donc de se joindre à l’exploration des sous-sols. Tout en mangeant ses pattes de héron frites, Eusébie présente à Cléanthe l’équipement nécessaire : une centaine de mètres de cordes, des bottes, des lampes, un cartographe… Cléanthe balaye tout cela d’un revers de main : « Vous savez, on dit beaucoup de choses sur les égouts, mais ça n’est pas si terrible. Il y a plein de gens qui les parcourent en souliers vernis. Je crois que… ». Il raye chaque item en trouvant un argument justifiant son inutilité.
« Si je puis me permettre, bégaie la nonne, il y a une différence entre les égouts où les gens vont passer leur dimanche, et les souterrains que nous allons explorer, moins accessibles au péquin moyen…
– Un gentilhomme est tout à fait à même de fréquenter les égouts avec une tenue blanche et d’en sortir sans traces, allons. »
Eusébie jette un regard inquiet à monsieur Crane, qui le lui retourne, mais les deux n’osent rien dire.
« J’ai vu une bouche d’égout devant la part du Diable, continue Cléanthe, cela me semble être le bon endroit pour commencer nos explorations. Qu’est-ce qu’on va chercher, d’ailleurs ?
– Je pensais rentrer par l’entrée habituelle… commence Eusébie avant de se reprendre. Je me suis permise une interprétation un peu libre de notre bible, et je pense qu’il y a des reliques d’Itras quelque part dans les souterrains. Tout n’est pas indiqué, mais je suis sûre que nos âmes nous guideront vers ce trésor. »
La part du Diable est encore plus bondée que ce matin ; il leur faut jouer des coudes pour rentrer, et l’entrainement de Cléanthe chez son tailleur est mis à bon emploi. L’Étranger, lui, n’a pas besoin de taper sur les gens : tout le monde s’écarte, sans s’en rendre compte, à son approche. Ils aperçoivent monsieur Crane assis au fond de la salle, à côté d’une nonne et d’une dizaine de marins sur une banquette faite pour quatre. L’Étranger trouve une place sans problèmes, tandis que Cléanthe retourne un des marins contre la table, qui lui cède sa place.
« Mais enfin, monsieur Brumaire, ce n’est pas très gentil ! proteste l’Étranger.
– Vous voyez, cher ami, c’est la preuve par l’exemple de ce que j’avançais dans la rue. Les gens aiment bien être malheureux. Allez file, garnement. »
L’Étranger se propose de laisser sa place, mais Cléanthe ne se laisse pas démonter et chasse l’importun.
« Soyez compréhensif, dit monsieur Crane, d’ailleurs vous n’avez tapé personne pour vous asseoir !
– C’est vrai, que diable, renchérit Cléanthe, ce n’est pas parce que vous êtes étranger que vous devez mépriser les coutumes de cette ville.
– Si tu veux, mon gars, propose un marin à côté d’eux, je peux te montrer comment on fait. Tu veux qu’on se tape, un peu ?
– Je ne saurais comment faire, proteste l’Étranger.
– Regarde, c’est facile : tu prends mon bras, comme ça, et tu le soulèves… et ta main, là… tu replies les doigts… et tu… tu… tu me la poses sur le visage… »
Le marin, de plus en plus troublé, se caresse la joue avec la main de l’Étranger. Les autres marins se regardent d’un air gêné. Gros Joe le marin et l’Étranger s’embrassent, et Joe s’écroule sur la table en ronflant. Cléanthe regarde la scène avec ahurissement : il a beau être étranger, la méthode de cet être semble fonctionner. Peut-être y aurait-il des enseignements à tirer de cela… Il note sur son petit carnet, juste après « séduire Amandine Beaulieu pour être très malheureux du rejet qu’elle m’opposera », « accepter que l’Étranger me donne du plaisir ».
Monsieur Crane dissipe la confusion en introduisant Eusébie au reste du groupe. Elle serre la main de Cléanthe vigoureusement, et cette poignée de mains tourne vite à celui qui broiera les phalanges de l’autre en premier. Eusébie se tourne ensuite vers l’Étranger pour le saluer, mais devient soudain toute blanche et se signe frénétiquement.
« Mais vous… vous êtes… vous êtes un… mais…
– Il serait difficile de ne pas remarquer qu’il n’est pas d’ici, observe Cléanthe d’un air bonhomme. »
L’Étranger tente de prendre la main de la nonne, mais celle-ci la retire, arguant qu’elle n’en est pas digne.
« Vous êtes de toute évidence un envoyé d’Itras, une nonne sent ces choses-là… Je ne suis pas assez pure pour vous toucher…
– Jamais entendu parler, mais ma mémoire me joue des tours, depuis que… depuis que… Itras ! Vous voulez dire que c’est cette femme magnifique qui traversait la brume ?
– Oh non, rit Eusébie, Itras nous a quittés il y a bien longtemps !
– Dommage, elle était si belle… Vous ne l’avez pas vue ? Vous ne savez pas où elle habite ?
– Itras ? Vous savez, elle habite dans nos cœurs… Si vous la cherchez, je suis sûre que vous la trouverez au fond de vous. »
Le serveur arrive sur ces entrefaites, se frayant un passage dans la foule à l’aide de ses échasses. Pendant qu’il prend les commandes, les marins voisins de table du groupe griffonnent sur leurs serviettes en les regardant.
Scène 8 : Derniers préparatifs avant de patauger
La conversation se tourne à nouveau vers le financement par Cléanthe de l’expédition. Monsieur Crane en profite pour informer l’Étranger de ce que le rat de bibliothèque lui a dit : l’Étranger décide donc de se joindre à l’exploration des sous-sols. Tout en mangeant ses pattes de héron frites, Eusébie présente à Cléanthe l’équipement nécessaire : une centaine de mètres de cordes, des bottes, des lampes, un cartographe… Cléanthe balaye tout cela d’un revers de main : « Vous savez, on dit beaucoup de choses sur les égouts, mais ça n’est pas si terrible. Il y a plein de gens qui les parcourent en souliers vernis. Je crois que… ». Il raye chaque item en trouvant un argument justifiant son inutilité.
« Si je puis me permettre, bégaie la nonne, il y a une différence entre les égouts où les gens vont passer leur dimanche, et les souterrains que nous allons explorer, moins accessibles au péquin moyen…
– Un gentilhomme est tout à fait à même de fréquenter les égouts avec une tenue blanche et d’en sortir sans traces, allons. »
Eusébie jette un regard inquiet à monsieur Crane, qui le lui retourne, mais les deux n’osent rien dire.
« J’ai vu une bouche d’égout devant la part du Diable, continue Cléanthe, cela me semble être le bon endroit pour commencer nos explorations. Qu’est-ce qu’on va chercher, d’ailleurs ?
– Je pensais rentrer par l’entrée habituelle… commence Eusébie avant de se reprendre. Je me suis permise une interprétation un peu libre de notre bible, et je pense qu’il y a des reliques d’Itras quelque part dans les souterrains. Tout n’est pas indiqué, mais je suis sûre que nos âmes nous guideront vers ce trésor. »
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 9 : Le jour des fous, où le roi devint mendiant et le mendiant roi.
[Ozen demande à tirer une carte « Chance ». Il tire : « Changement de rôle. Changez de place avec le MJ : vous décrivez le décor et les PNJ, il contrôle votre personnage jusqu’à la fin de la scène ». Dans les dialogues qui suivent, c’est donc moi qui m’exprime pour Cléanthe, et Ozen qui s’occupe du reste.]
Au début, Cléanthe avait probablement raison. C’est après une heure dans les égouts que ça s’est gâté, lorsque la margelle s’est réduite à une misère, les briques ont commencé à se décrépir, et les rats à se faire plus présents… Une odeur très forte s’est fait sentir, puis des siphons et des tourbillons sont apparus dans l’eau saumâtre avec un bruit de succion terrible. Cléanthe avance avec la plus grande parcimonie, cachant mal sa moue de dégoût.
« Vous êtes sûr qu’on va trouver l’estampe d’Olaf ici ? demande l’Étranger, dubitatif.
– Malheureusement, répond Eusébie, aussi dégoûtée que les autres, en partant de l’entrée de monsieur Cléanthe, mes indications nous emmènent vers ce cloaque, qui… »
Scène 10 : Les égouts, c’est sale, et les gens qui vivent dedans sont pas très propres
Un gros tas de matière organique, indistinct et putride, passe alors à côté du groupe.
« Enfin, proteste Cléanthe, je ne fais que financer l’expédition ! J’attendais de vous que vous choisissiez l’entrée la plus adéquate ; si vous avez choisi celle-là, c’est donc par-là qu’il faut aller.
– Mais monsieur Brumaire, c’est vous qui l’aviez suggéré…
– Ce n’était qu’une suggestion, justement ! Vous ne faites pas tout ce que votre mère supérieure vous dit de faire, si ?
– Si.
– Eh bien, il faudrait peut-être commencer à penser par vous-même !
– Excusez-moi, interrompt monsieur Crane, je crois que ce tas de matière organique vient de nous regarder. »
Un bruit à mi-chemin entre la flatulence et le grondement bestial leur répond.
« Monsieur Crane, demande Eusébie, vous ne voulez pas passer devant ? Vous êtes le plus expérimenté d’entre nous, après tout.
– Tr… très bien… j… je crois que dans ces moments-là, l… le plus sage, c’est encore d… de demander son ch… chemin aux autochtones… Excusez-moi, mon bon ami ? Pourriez-vous nous accorder un moment ?
– On ne peut pas prendre un bain tranquille ? ronchonne le tas.
– J… Je suis navré de vous déranger, mais n… nous sommes un peu égarés, nous cherchons l’accès aux souterrains les plus proches…
– Et avez-vous vu l’estampe d’Olaf ?
– J’ai bien peur, interrompt Cléanthe, que notre ami ici présent n’ait que des connaissances limitées en histoire de l’art.
– Mais je ne vous permets pas, monsieur ! J’ai fait mes études comme tout le monde ! En tout cas, si vous savez nager, traversez cette petite étendue d’eau et vous trouverez sans problème la petite porte cochère à une centaine de mètres d’ici. Elle vous conduira à une galerie d’art ma foi assez fameuse, qui contient les plus bons artistes des bas-fonds d’Itras. Sur sa droite, il y a la salle de réunion des adorateurs de Nindra, et sur sa gauche… Là, je ne sais pas trop où ça mène.
– Oui, nous passerons par la droite, je connais vaguement le chemin, répond Cléanthe. Mais mon jeune ami, auriez-vous par hasard un sac hermétique à votre disposition ? »
[Ozen demande à tirer une carte « Chance ». Il tire : « Changement de rôle. Changez de place avec le MJ : vous décrivez le décor et les PNJ, il contrôle votre personnage jusqu’à la fin de la scène ». Dans les dialogues qui suivent, c’est donc moi qui m’exprime pour Cléanthe, et Ozen qui s’occupe du reste.]
Au début, Cléanthe avait probablement raison. C’est après une heure dans les égouts que ça s’est gâté, lorsque la margelle s’est réduite à une misère, les briques ont commencé à se décrépir, et les rats à se faire plus présents… Une odeur très forte s’est fait sentir, puis des siphons et des tourbillons sont apparus dans l’eau saumâtre avec un bruit de succion terrible. Cléanthe avance avec la plus grande parcimonie, cachant mal sa moue de dégoût.
« Vous êtes sûr qu’on va trouver l’estampe d’Olaf ici ? demande l’Étranger, dubitatif.
– Malheureusement, répond Eusébie, aussi dégoûtée que les autres, en partant de l’entrée de monsieur Cléanthe, mes indications nous emmènent vers ce cloaque, qui… »
Scène 10 : Les égouts, c’est sale, et les gens qui vivent dedans sont pas très propres
Un gros tas de matière organique, indistinct et putride, passe alors à côté du groupe.
« Enfin, proteste Cléanthe, je ne fais que financer l’expédition ! J’attendais de vous que vous choisissiez l’entrée la plus adéquate ; si vous avez choisi celle-là, c’est donc par-là qu’il faut aller.
– Mais monsieur Brumaire, c’est vous qui l’aviez suggéré…
– Ce n’était qu’une suggestion, justement ! Vous ne faites pas tout ce que votre mère supérieure vous dit de faire, si ?
– Si.
– Eh bien, il faudrait peut-être commencer à penser par vous-même !
– Excusez-moi, interrompt monsieur Crane, je crois que ce tas de matière organique vient de nous regarder. »
Un bruit à mi-chemin entre la flatulence et le grondement bestial leur répond.
« Monsieur Crane, demande Eusébie, vous ne voulez pas passer devant ? Vous êtes le plus expérimenté d’entre nous, après tout.
– Tr… très bien… j… je crois que dans ces moments-là, l… le plus sage, c’est encore d… de demander son ch… chemin aux autochtones… Excusez-moi, mon bon ami ? Pourriez-vous nous accorder un moment ?
– On ne peut pas prendre un bain tranquille ? ronchonne le tas.
– J… Je suis navré de vous déranger, mais n… nous sommes un peu égarés, nous cherchons l’accès aux souterrains les plus proches…
– Et avez-vous vu l’estampe d’Olaf ?
– J’ai bien peur, interrompt Cléanthe, que notre ami ici présent n’ait que des connaissances limitées en histoire de l’art.
– Mais je ne vous permets pas, monsieur ! J’ai fait mes études comme tout le monde ! En tout cas, si vous savez nager, traversez cette petite étendue d’eau et vous trouverez sans problème la petite porte cochère à une centaine de mètres d’ici. Elle vous conduira à une galerie d’art ma foi assez fameuse, qui contient les plus bons artistes des bas-fonds d’Itras. Sur sa droite, il y a la salle de réunion des adorateurs de Nindra, et sur sa gauche… Là, je ne sais pas trop où ça mène.
– Oui, nous passerons par la droite, je connais vaguement le chemin, répond Cléanthe. Mais mon jeune ami, auriez-vous par hasard un sac hermétique à votre disposition ? »
J'écris des mini-JdR par dizaines !
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 11 : Les 72 positions autorisées et celles qu’on ne vous apprend pas à l’école
Quelque chose bouge dans la vase, un membre ou un pseudopode, puis une sorte d’outre est projetée de l’eau et retombe aux pieds de Cléanthe, éclaboussant le bas de son costume et ses chaussures. Réprimant une moue de dégoût, Cléanthe se déshabille avec précaution, plie ses vêtements jusqu’à ce qu’ils ne soient plus que des petits carrés de tissu, et les glisse dans l’outre. Il pénètre dans l’égout, suivi par l’Étranger qui, étrangement, n’a pas besoin de nager et marche sans problème sur la fange. Monsieur Crane entre à son tour ; quant à Eusébie, elle demande à son collègue s’il a pied, car elle ne sait pas nager (ce qui surprend Cléanthe, qui revoit les immenses réceptacles à eau bénite de son enfance). L’Étranger prend la nonne dans ses bras pour l’amener à bon port.
[Je demande à tirer une carte « Résolution ». Ozen lit « Oui, mais… Vous réussissez, mais quelque chose qui n’a rien à voir se passe mal, pour vous ou quelqu’un à qui vous tenez. Décrivez votre succès ainsi que ce qui se passe mal, et pour qui ».]
Lorsqu’il arrive de l’autre côté de l’égout, la fiole tombe de la poche de Cléanthe et commence à dériver dans le courant, jusqu’à frapper le pied de l’Étranger, qui la ramasse et la compare à celle qu’il avait dans sa poche. Les deux sont identiques, et il ne sait plus laquelle est à qui. Cléanthe, agacé, en prend une au hasard en prétendant que c’est la sienne.
[Je reprends mon rôle de MJ.]
Derrière la porte grillagée qui se présente au groupe, on aperçoit une galerie d’art, qui regroupe à la fois des tableaux, des sculptures et divers livres posés sur des lutrins. Un petit bureau leur barre néanmoins la route, devant laquelle est assise une masse de cheveux blancs qui semble assoupie. L’Étranger dépose la nonne tétanisée (qui refuse avec force remerciements sa proposition de lui donner du bonheur) et s’approche de la masse androgyne pour la réveiller. Une voix cassée s’en échappe.
« – Oui ?
– Excusez-moi, madame… monsieur… Avez-vous l’estampe d’Olaf ?
– Oui.
– Puis-je la voir ?
– Oui. »
L’Étranger s’apprête à passer la porte, lorsque la masse l’en empêche :
« Stop ! Quel tarif ? Plein ou réduit ?
– Réduit, cher monsieur, explique Cléanthe. Tarif enfant pour le monsieur qui vous a posé la question, tarif enfant pour la bonne sœur qui sourit derrière lui, tarif explorateur pour monsieur… et moi, j’ai ma carte.
– Hmm. Pour vous, c’est gratuit. Cette carte vous donne également droit à la visite gratuite du phare, ainsi qu’à la bibliothèque de l’université. Pour les autres… douze cinquante.
– Laissez, c’est pour moi, dit Cléanthe en sortant un jeu de cartes. »
Il claque un deux, trois, quatre, cinq de pique, un six, sept, huit de cœur, un neuf, dix, onze de carreaux, un douze de trèfle, et une dame et un roi de cœur : « Belote, rebelote, et dix de der pour le pourboire.
– Bien aimable. »
La masse se lève et tire son bureau sur le côté de la galerie, jusqu’à disparaître complètement dans une anfractuosité du mur.
La galerie n’abrite que des œuvres érotiques et pornographiques, de peintures figuratives représentant des satyres et des nymphes jusqu’aux œuvres abstraites où des traits et des points de couleurs vives se livrent à des actes très osés. Il y a également des sculptures, et des livres, dont plusieurs recueils d’estampes : Les 72 positions autorisées et celles qu’on ne vous apprend pas à l’école, Les hommes ont un sexe, les femmes ont un sexe et Les estampes osées. Pendant que Cléanthe est en admiration devant une gravure intitulée « Satyres s’attirent, satyres se tirent », L’Étranger tourne les pages des Estampes osées, qui contiennent des dessins de sexe entre humains, entre humains et animaux, entre humains et plantes, entre plantes, entre minéraux… Et au détour d’une page, il voit le dessin d’un homme nu, entre deux âges, allongé sur un rocher et en train de se masturber (une estampe finalement assez tiède par rapport au reste du livre). Ce qui est troublant, par contre, c’est que son visage ressemble très fortement à celui de Miss Wellington.
En se rendant compte du contenu de la galerie, Eusébie devient cramoisie et refuse d’entrer, ce qui est problématique car la sortie de la galerie se situe de l’autre côté du tunnel. Cléanthe lui propose de lui cacher les yeux le temps qu’elle traverse la galerie, ce qu’elle accepte bon gré mal gré.
« N’oubliez pas qu’Itras vous regarde, mon enfant !
– Mais j’espère bien, ma sœur. »
L’Étranger décide de partir avec les trois recueils d’estampe, pour être sûr de ne pas se tromper. Il se dirige vers la sortie, qui se trouve à l’opposé du tunnel-galerie.
[Je demande à Mass de tirer une carte « Résolution ». Pierre lit « Oui, mais… Vous réussissez, mais vous perdez quelque chose de précieux dans le même temps ».]
La masse de cheveux interrompt soudain l’Étranger : « Si vous voulez emporter ces trois livres, ça vous coûtera le bonheur d’un souvenir ». Tout le bonheur de sa relation avec Miss Wellington se trouve soudain absorbé, et quand il regarde l’estampe d’Olaf, il ressent à présent un certain désagrément, une émotion qu’il ne parvient pas à décrire et qu’il n’avait jamais ressenti auparavant…
Scène 12 : D’une rouerie de Cléanthe qui se retourne contre Monsieur Crane qui le prend, finalement, plutôt bien
Les quatre larrons arrivent au croisement, et Eusébie demande quel chemin prendre, car elle n’a guère envie de se retrouver face aux adorateurs de Nindra.
« Mais je ne suis plus un adorateur de Nindra ! lance Cléanthe à la cantonade qui ne lui avait rien demandé.
– Ah bon, depuis quand ? demande monsieur Crane.
– Depuis que vous avez décidé de me remplacer ! En rémunération de cette mission, je vous ai promis l’introduction à un groupe bien sous tous rapports de gens importants de la ville qui ont des conversations spirituelles… C’était cela dont je parlais, c’était entendu… Vous avez topé, mon vieux.
– Mais enfin, on n’échange pas une place dans une secte comme ça !
– Vous en êtes sûr ? Vous avez topé, il va falloir assumer. Vérifiez dans votre agenda, il doit y avoir les dates des prochains sacrifices humains. Moi je ne suis plus concerné par cette affaire. »
Monsieur Crane sort son agenda d’une main tremblante : les horaires y sont effectivement inscrites, bien qu’il n’y ait pas de séance de sacrifice prévue aujourd’hui.
« Vous savez, monsieur Crâne, admoneste l’Étranger, c’est très très mal ce que vous faites. Il ne faut pas découper les gens en morceaux.
– Monsieur Crane, tout de même… gronde Eusébie. Vous auriez pu me le dire… Bon, écoutez, je veux bien passer à droite, mais si vous faites partie des adorateurs, il va falloir vous confesser. Sans absolution, je cesserai de vous accompagner. Faisons cela rapidement, dans cette alcôve. »
Elle tire monsieur Crane par la manche et le fait asseoir sans attendre sa réponse.
« Par la Très Sainte Lumière d’Itras qui nous baigne tous dans sa pureté, je reçois ici dans ce confessionnal, ô sainte déesse, un pécheur qui vient confier tous ses péchés. Accepte de les laver loin de lui de tes doux cheveux blonds. Je t’écoute, mon fils.
– Je… je suis un ad… un adorateur de Nindra… Je suppose…
– C’est très mal. As-tu déjà sacrifié des gens ?
– Je… ne crois pas, non… Je ne sais pas, cela m’a peut-être été transmis aussi…
– Soit tu sais, soit tu ne sais pas ! Ce ne sont pas le genre de choses qu’on ignore. Regarde tes mains, mon fils, et dis-moi si elles sont pures, si elles sont propres.
– Je viens de patauger dans un égout, alors… commence monsieur Crane en regardant ses mains. Mais elles ne sont pas souillées par le sang.
– C’est bien mon fils, dans ce cas cela signifie que tu as sacrifié par pensée seulement et non par action. Ton salut est encore envisageable. Itras, dans sa grande mansuétude, est prête à te pardonner, mais pour cela, il te faudra lui verser une obole. Un sacrifice en pensée, cela demande… ». Eusébie cherche dans son missel. « Fornication… mensonge… mégalomanie… complot politique… sacrifice humain involontaire… Ah, voici ! Sacrifice humain volontaire par pensée. Il te faudra ingérer trois créatures créées par les blanches mains d’Itras, afin que leur lumière t’irradie de l’intérieur. Tiens, tu as de la chance, voici un nid d’araignées. »
Monsieur Crane est ennuyé : s’il est un adorateur de Nindra, il ne peut pas manger les enfants de cette dernière. Il choisit plutôt quelques asticots qui trainent par terre, et les ingère avec difficulté, tout en se massant la main jusqu’à ce qu’elle soit couverte de plaques rouges.
Eusébie se relève, totalement apaisée, et accepte de poursuivre son chemin. Monsieur Crane mène la marche, d’un air décidé, et mène le groupe à travers le temple des adorateurs de Nindra.
Quelque chose bouge dans la vase, un membre ou un pseudopode, puis une sorte d’outre est projetée de l’eau et retombe aux pieds de Cléanthe, éclaboussant le bas de son costume et ses chaussures. Réprimant une moue de dégoût, Cléanthe se déshabille avec précaution, plie ses vêtements jusqu’à ce qu’ils ne soient plus que des petits carrés de tissu, et les glisse dans l’outre. Il pénètre dans l’égout, suivi par l’Étranger qui, étrangement, n’a pas besoin de nager et marche sans problème sur la fange. Monsieur Crane entre à son tour ; quant à Eusébie, elle demande à son collègue s’il a pied, car elle ne sait pas nager (ce qui surprend Cléanthe, qui revoit les immenses réceptacles à eau bénite de son enfance). L’Étranger prend la nonne dans ses bras pour l’amener à bon port.
[Je demande à tirer une carte « Résolution ». Ozen lit « Oui, mais… Vous réussissez, mais quelque chose qui n’a rien à voir se passe mal, pour vous ou quelqu’un à qui vous tenez. Décrivez votre succès ainsi que ce qui se passe mal, et pour qui ».]
Lorsqu’il arrive de l’autre côté de l’égout, la fiole tombe de la poche de Cléanthe et commence à dériver dans le courant, jusqu’à frapper le pied de l’Étranger, qui la ramasse et la compare à celle qu’il avait dans sa poche. Les deux sont identiques, et il ne sait plus laquelle est à qui. Cléanthe, agacé, en prend une au hasard en prétendant que c’est la sienne.
[Je reprends mon rôle de MJ.]
Derrière la porte grillagée qui se présente au groupe, on aperçoit une galerie d’art, qui regroupe à la fois des tableaux, des sculptures et divers livres posés sur des lutrins. Un petit bureau leur barre néanmoins la route, devant laquelle est assise une masse de cheveux blancs qui semble assoupie. L’Étranger dépose la nonne tétanisée (qui refuse avec force remerciements sa proposition de lui donner du bonheur) et s’approche de la masse androgyne pour la réveiller. Une voix cassée s’en échappe.
« – Oui ?
– Excusez-moi, madame… monsieur… Avez-vous l’estampe d’Olaf ?
– Oui.
– Puis-je la voir ?
– Oui. »
L’Étranger s’apprête à passer la porte, lorsque la masse l’en empêche :
« Stop ! Quel tarif ? Plein ou réduit ?
– Réduit, cher monsieur, explique Cléanthe. Tarif enfant pour le monsieur qui vous a posé la question, tarif enfant pour la bonne sœur qui sourit derrière lui, tarif explorateur pour monsieur… et moi, j’ai ma carte.
– Hmm. Pour vous, c’est gratuit. Cette carte vous donne également droit à la visite gratuite du phare, ainsi qu’à la bibliothèque de l’université. Pour les autres… douze cinquante.
– Laissez, c’est pour moi, dit Cléanthe en sortant un jeu de cartes. »
Il claque un deux, trois, quatre, cinq de pique, un six, sept, huit de cœur, un neuf, dix, onze de carreaux, un douze de trèfle, et une dame et un roi de cœur : « Belote, rebelote, et dix de der pour le pourboire.
– Bien aimable. »
La masse se lève et tire son bureau sur le côté de la galerie, jusqu’à disparaître complètement dans une anfractuosité du mur.
La galerie n’abrite que des œuvres érotiques et pornographiques, de peintures figuratives représentant des satyres et des nymphes jusqu’aux œuvres abstraites où des traits et des points de couleurs vives se livrent à des actes très osés. Il y a également des sculptures, et des livres, dont plusieurs recueils d’estampes : Les 72 positions autorisées et celles qu’on ne vous apprend pas à l’école, Les hommes ont un sexe, les femmes ont un sexe et Les estampes osées. Pendant que Cléanthe est en admiration devant une gravure intitulée « Satyres s’attirent, satyres se tirent », L’Étranger tourne les pages des Estampes osées, qui contiennent des dessins de sexe entre humains, entre humains et animaux, entre humains et plantes, entre plantes, entre minéraux… Et au détour d’une page, il voit le dessin d’un homme nu, entre deux âges, allongé sur un rocher et en train de se masturber (une estampe finalement assez tiède par rapport au reste du livre). Ce qui est troublant, par contre, c’est que son visage ressemble très fortement à celui de Miss Wellington.
En se rendant compte du contenu de la galerie, Eusébie devient cramoisie et refuse d’entrer, ce qui est problématique car la sortie de la galerie se situe de l’autre côté du tunnel. Cléanthe lui propose de lui cacher les yeux le temps qu’elle traverse la galerie, ce qu’elle accepte bon gré mal gré.
« N’oubliez pas qu’Itras vous regarde, mon enfant !
– Mais j’espère bien, ma sœur. »
L’Étranger décide de partir avec les trois recueils d’estampe, pour être sûr de ne pas se tromper. Il se dirige vers la sortie, qui se trouve à l’opposé du tunnel-galerie.
[Je demande à Mass de tirer une carte « Résolution ». Pierre lit « Oui, mais… Vous réussissez, mais vous perdez quelque chose de précieux dans le même temps ».]
La masse de cheveux interrompt soudain l’Étranger : « Si vous voulez emporter ces trois livres, ça vous coûtera le bonheur d’un souvenir ». Tout le bonheur de sa relation avec Miss Wellington se trouve soudain absorbé, et quand il regarde l’estampe d’Olaf, il ressent à présent un certain désagrément, une émotion qu’il ne parvient pas à décrire et qu’il n’avait jamais ressenti auparavant…
Scène 12 : D’une rouerie de Cléanthe qui se retourne contre Monsieur Crane qui le prend, finalement, plutôt bien
Les quatre larrons arrivent au croisement, et Eusébie demande quel chemin prendre, car elle n’a guère envie de se retrouver face aux adorateurs de Nindra.
« Mais je ne suis plus un adorateur de Nindra ! lance Cléanthe à la cantonade qui ne lui avait rien demandé.
– Ah bon, depuis quand ? demande monsieur Crane.
– Depuis que vous avez décidé de me remplacer ! En rémunération de cette mission, je vous ai promis l’introduction à un groupe bien sous tous rapports de gens importants de la ville qui ont des conversations spirituelles… C’était cela dont je parlais, c’était entendu… Vous avez topé, mon vieux.
– Mais enfin, on n’échange pas une place dans une secte comme ça !
– Vous en êtes sûr ? Vous avez topé, il va falloir assumer. Vérifiez dans votre agenda, il doit y avoir les dates des prochains sacrifices humains. Moi je ne suis plus concerné par cette affaire. »
Monsieur Crane sort son agenda d’une main tremblante : les horaires y sont effectivement inscrites, bien qu’il n’y ait pas de séance de sacrifice prévue aujourd’hui.
« Vous savez, monsieur Crâne, admoneste l’Étranger, c’est très très mal ce que vous faites. Il ne faut pas découper les gens en morceaux.
– Monsieur Crane, tout de même… gronde Eusébie. Vous auriez pu me le dire… Bon, écoutez, je veux bien passer à droite, mais si vous faites partie des adorateurs, il va falloir vous confesser. Sans absolution, je cesserai de vous accompagner. Faisons cela rapidement, dans cette alcôve. »
Elle tire monsieur Crane par la manche et le fait asseoir sans attendre sa réponse.
« Par la Très Sainte Lumière d’Itras qui nous baigne tous dans sa pureté, je reçois ici dans ce confessionnal, ô sainte déesse, un pécheur qui vient confier tous ses péchés. Accepte de les laver loin de lui de tes doux cheveux blonds. Je t’écoute, mon fils.
– Je… je suis un ad… un adorateur de Nindra… Je suppose…
– C’est très mal. As-tu déjà sacrifié des gens ?
– Je… ne crois pas, non… Je ne sais pas, cela m’a peut-être été transmis aussi…
– Soit tu sais, soit tu ne sais pas ! Ce ne sont pas le genre de choses qu’on ignore. Regarde tes mains, mon fils, et dis-moi si elles sont pures, si elles sont propres.
– Je viens de patauger dans un égout, alors… commence monsieur Crane en regardant ses mains. Mais elles ne sont pas souillées par le sang.
– C’est bien mon fils, dans ce cas cela signifie que tu as sacrifié par pensée seulement et non par action. Ton salut est encore envisageable. Itras, dans sa grande mansuétude, est prête à te pardonner, mais pour cela, il te faudra lui verser une obole. Un sacrifice en pensée, cela demande… ». Eusébie cherche dans son missel. « Fornication… mensonge… mégalomanie… complot politique… sacrifice humain involontaire… Ah, voici ! Sacrifice humain volontaire par pensée. Il te faudra ingérer trois créatures créées par les blanches mains d’Itras, afin que leur lumière t’irradie de l’intérieur. Tiens, tu as de la chance, voici un nid d’araignées. »
Monsieur Crane est ennuyé : s’il est un adorateur de Nindra, il ne peut pas manger les enfants de cette dernière. Il choisit plutôt quelques asticots qui trainent par terre, et les ingère avec difficulté, tout en se massant la main jusqu’à ce qu’elle soit couverte de plaques rouges.
Eusébie se relève, totalement apaisée, et accepte de poursuivre son chemin. Monsieur Crane mène la marche, d’un air décidé, et mène le groupe à travers le temple des adorateurs de Nindra.
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 13 : « Temple peu balayé fait bon accueil aux araignées » (proverbe)
Le groupe parcourt les couloirs poussiéreux, jonchés de toile d’araignées, en croisant de temps à autre un responsable de l’entretien : un homme qui remet les toiles d’araignées tombées par terre, une balayeuse remettant de la poussière où il en manque… Cléanthe amène monsieur Crane jusqu’au vestiaire et lui montre quel casier est le sien, tout en lui remettant la petite clef avec un squelette d’araignée qui y correspond. Alors que monsieur Crane est en train d’enfiler sa robe de bure, quelqu’un l’interpelle de l’autre côté du couloir.
« Ah, frère François, quel plaisir de vous voir ! lance monsieur Crane au petit homme penché sur de gros livres dans son bureau.
– Bonjour, frère Brumaire… J’étais justement plongé dans notre comptabilité, et il me semble que vous n’avez pas réglé votre cotisation ce mois-ci.
– Techniquement, glisse Cléanthe à monsieur Crane, vous êtes moi dans l’enceinte du temple. Ne vous inquiétez pas, cela veut sans doute dire que j’encaisserai le péché à votre place. Par contre, il va vous falloir payer.
– Tr… très bien, d’… d’accord… Frère François, pouvez-vous me rappeler combien je vous dois ?
– Eh bien, si je l’ajoute aux autres cotisations que vous n’aviez pas payées, plus les mensualités en retard… Ah, je suis un peu embêté mais j’ai bien peur que vous deviez nous céder votre logement. Je veux dire que les prochaines cérémonies pour le mois à venir auront lieu chez vous.
– M… mais n’avez-vous pas p… peur que ça vous change de cadre ?
– Ah, il vous revient évidemment le devoir de préparer votre logement avec les décorations rituelles qui conviennent, sous peine d’être immédiatement radié de l’ordre, comme vous le savez.
– C’est embêtant tout de même, glisse Cléanthe à l’Étranger, ça a vraiment l’air de l’ennuyer… Ça a l’air vraiment mieux, adorateur de Nindra, quand c’est lui qui l’est que moi.
– Il y a quelque chose de pas bien en vous, déclare l’Étranger à François, sans écouter Cléanthe. Il faut que je vous guérisse. »
Il saisit la figure de François et l’embrasse.
« Mais monsieur, mais enfin ! Je… je… je suis enchanté…
– Il faut vous donner du plaisir pour que vous changiez votre façon de penser. Vous êtes sur le mauvais chemin.
– Oui, évidemment… Mais quel chemin dois-je prendre, alors ? Adorateur de Nindra, c’est toute ma vie, je n’ai jamais rien fait d’autre…
– Venez avec moi, je vous ferai découvrir de nouvelles façons.
– Oh oui, avec plaisir ! »
Scène 14 : Très heureuse d’être vierge
L’Étranger entraine François aux toilettes pour lui donner du plaisir. En voyant cela, Eusébie se tourne vers Cléanthe et monsieur Crane : « Mais enfin ! Un être comme lui, il fait des choses… Ce n’est pas ce qui est dit dans les écritures ! Nous, sœurs de la Très Sainte Lumière d’Itras, nous avons vœu de célibat, ce n’est pas une erreur… N’est-ce pas ?
– Je m’emploie à dire à ce jeune homme que les gens s’évertuent à être malheureux pour leur propre plaisir, mais il ne veut pas me croire !
– Mais enfin, je suis très heureuse d’être vierge !
– Ma sœur, avance monsieur Crane, je ne suis pas un expert en théologie, mais il me semble normal que les envoyés d’Itras ne répondent pas aux mêmes principes et obligations que ses fidèles.
– Oui, vous avez raison, évidemment…
– Il répand l’amour sur le monde, c’est plutôt une bonne chose après tout.
– Pardon, Itras, d’avoir douté.
– Ça nous arrive à tous, répond monsieur Crane. Moi-même, parfois je doute de mon affiliation à Nindra… »
Après avoir fait l’amour, François vomit une boule noire dans les mains de l’Étranger, que celui-ci avale goulument.
« J’ai l’impression que… quelque chose m’a été enlevé… mais je me sens mieux sans cette chose… Qu’est-ce que vous m’avez fait ?
– Moi, rien. C’est toi qui a enfin découvert ce qu’était le bien.
– Peut-on être adorateur de Nindra et faire le bien ?
– Tu feras en sorte que ce soit le cas. »
François revient en tenant l’Étranger par la main ; il embrasse monsieur Crane sur la joue et lui signale que ses dettes sont effacées. « J’ai plein de nouvelles idées ! » s’exclame-t-il en arrachant des pages du livre de compte pour les y noter.
« Et c’est fini, on ne découpe plus personne en morceaux, sermonne l’Étranger.
– En parlant de ça… dit Cléanthe. Frère François, sauriez-vous me dire où le frère supérieur va jeter les morceaux de corps une fois les sacrifices terminés ?
– Excusez-moi, monsieur, mais cette information est réservée aux membres.
– Excusez mon majordome, intervient monsieur Crane, il a tendance à s’adresser aux gens en mon nom.
– Bon, vous voyez la salle avec l’immense guillotine, celle qui descend très lentement… En sortant de cette salle, vous prenez la première à gauche, vous dépassez les murs aux hurlements, et c’est juste après les geôles. Vous ne pouvez pas le manquer, il y a un crâne qui vomit du sang à l’entrée.
– Messieurs, dit Eusébie, nous nous égarons, je crois… Quittons ces lieux au plus vite au lieu de nous vautrer dans leur décrépitude. Rappelons-nous quel est le but de cette expédition.
– Bien sûr, ma sœur… J’ai juste une course à faire, puis je reviens et nous pourrons parler de votre rapport au fait de se vautrer avec des envoyés d’Itras. »
Le groupe parcourt les couloirs poussiéreux, jonchés de toile d’araignées, en croisant de temps à autre un responsable de l’entretien : un homme qui remet les toiles d’araignées tombées par terre, une balayeuse remettant de la poussière où il en manque… Cléanthe amène monsieur Crane jusqu’au vestiaire et lui montre quel casier est le sien, tout en lui remettant la petite clef avec un squelette d’araignée qui y correspond. Alors que monsieur Crane est en train d’enfiler sa robe de bure, quelqu’un l’interpelle de l’autre côté du couloir.
« Ah, frère François, quel plaisir de vous voir ! lance monsieur Crane au petit homme penché sur de gros livres dans son bureau.
– Bonjour, frère Brumaire… J’étais justement plongé dans notre comptabilité, et il me semble que vous n’avez pas réglé votre cotisation ce mois-ci.
– Techniquement, glisse Cléanthe à monsieur Crane, vous êtes moi dans l’enceinte du temple. Ne vous inquiétez pas, cela veut sans doute dire que j’encaisserai le péché à votre place. Par contre, il va vous falloir payer.
– Tr… très bien, d’… d’accord… Frère François, pouvez-vous me rappeler combien je vous dois ?
– Eh bien, si je l’ajoute aux autres cotisations que vous n’aviez pas payées, plus les mensualités en retard… Ah, je suis un peu embêté mais j’ai bien peur que vous deviez nous céder votre logement. Je veux dire que les prochaines cérémonies pour le mois à venir auront lieu chez vous.
– M… mais n’avez-vous pas p… peur que ça vous change de cadre ?
– Ah, il vous revient évidemment le devoir de préparer votre logement avec les décorations rituelles qui conviennent, sous peine d’être immédiatement radié de l’ordre, comme vous le savez.
– C’est embêtant tout de même, glisse Cléanthe à l’Étranger, ça a vraiment l’air de l’ennuyer… Ça a l’air vraiment mieux, adorateur de Nindra, quand c’est lui qui l’est que moi.
– Il y a quelque chose de pas bien en vous, déclare l’Étranger à François, sans écouter Cléanthe. Il faut que je vous guérisse. »
Il saisit la figure de François et l’embrasse.
« Mais monsieur, mais enfin ! Je… je… je suis enchanté…
– Il faut vous donner du plaisir pour que vous changiez votre façon de penser. Vous êtes sur le mauvais chemin.
– Oui, évidemment… Mais quel chemin dois-je prendre, alors ? Adorateur de Nindra, c’est toute ma vie, je n’ai jamais rien fait d’autre…
– Venez avec moi, je vous ferai découvrir de nouvelles façons.
– Oh oui, avec plaisir ! »
Scène 14 : Très heureuse d’être vierge
L’Étranger entraine François aux toilettes pour lui donner du plaisir. En voyant cela, Eusébie se tourne vers Cléanthe et monsieur Crane : « Mais enfin ! Un être comme lui, il fait des choses… Ce n’est pas ce qui est dit dans les écritures ! Nous, sœurs de la Très Sainte Lumière d’Itras, nous avons vœu de célibat, ce n’est pas une erreur… N’est-ce pas ?
– Je m’emploie à dire à ce jeune homme que les gens s’évertuent à être malheureux pour leur propre plaisir, mais il ne veut pas me croire !
– Mais enfin, je suis très heureuse d’être vierge !
– Ma sœur, avance monsieur Crane, je ne suis pas un expert en théologie, mais il me semble normal que les envoyés d’Itras ne répondent pas aux mêmes principes et obligations que ses fidèles.
– Oui, vous avez raison, évidemment…
– Il répand l’amour sur le monde, c’est plutôt une bonne chose après tout.
– Pardon, Itras, d’avoir douté.
– Ça nous arrive à tous, répond monsieur Crane. Moi-même, parfois je doute de mon affiliation à Nindra… »
Après avoir fait l’amour, François vomit une boule noire dans les mains de l’Étranger, que celui-ci avale goulument.
« J’ai l’impression que… quelque chose m’a été enlevé… mais je me sens mieux sans cette chose… Qu’est-ce que vous m’avez fait ?
– Moi, rien. C’est toi qui a enfin découvert ce qu’était le bien.
– Peut-on être adorateur de Nindra et faire le bien ?
– Tu feras en sorte que ce soit le cas. »
François revient en tenant l’Étranger par la main ; il embrasse monsieur Crane sur la joue et lui signale que ses dettes sont effacées. « J’ai plein de nouvelles idées ! » s’exclame-t-il en arrachant des pages du livre de compte pour les y noter.
« Et c’est fini, on ne découpe plus personne en morceaux, sermonne l’Étranger.
– En parlant de ça… dit Cléanthe. Frère François, sauriez-vous me dire où le frère supérieur va jeter les morceaux de corps une fois les sacrifices terminés ?
– Excusez-moi, monsieur, mais cette information est réservée aux membres.
– Excusez mon majordome, intervient monsieur Crane, il a tendance à s’adresser aux gens en mon nom.
– Bon, vous voyez la salle avec l’immense guillotine, celle qui descend très lentement… En sortant de cette salle, vous prenez la première à gauche, vous dépassez les murs aux hurlements, et c’est juste après les geôles. Vous ne pouvez pas le manquer, il y a un crâne qui vomit du sang à l’entrée.
– Messieurs, dit Eusébie, nous nous égarons, je crois… Quittons ces lieux au plus vite au lieu de nous vautrer dans leur décrépitude. Rappelons-nous quel est le but de cette expédition.
– Bien sûr, ma sœur… J’ai juste une course à faire, puis je reviens et nous pourrons parler de votre rapport au fait de se vautrer avec des envoyés d’Itras. »
J'écris des mini-JdR par dizaines !
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 15 : D’un marché bien vite expédié… et de nouvelles complications
Cléanthe va dans la direction indiquée par François ; il suit ses indications, dépassant avec force bâillements et ennuis la guillotine, les murs des hurlements qui lui susurrent à quel point c’est un raté à la vie neutre et sans saveur, les prisonniers des geôles qui lui proposent mille trésors contre leur libération, avant d’arriver au puits, fermé par une lourde grille qui est suffisamment large pour qu’il y glisse la fiole. Il tend une oreille et est très satisfait de ne pas l’entendre tomber.
« Vous avez fait vos cochonneries ? demande Eusébie. Allons-y alors.
– Je ne vous permets pas, ma sœur !
– Allons, j’ai bien vu la manière dont vous tripotiez cette bouteille. Je ne juge pas, chacun est libre de ses passe-temps, mais tout de même…
– Vous ne disiez pas ça dans le couloir tout à l’heure.
– Oh ! » Eusébie, outrée, gifle Cléanthe. « Si j’avais su, monsieur, je serais allée chercher mon financement ailleurs. Parlons-en d’ailleurs : vous nous faites arriver par une entrée qui n’est pas la bonne, vous refusez tous les items sur ma liste de base, et monsieur Crane ne voulait pas vous le dire pour ne pas vous vexer, mais il pense comme moi. Tout cela laisse un peu à désirer.
– Moi, vous savez, ce qui m’importe c’est qu’on réussisse la mission, se dérobe monsieur Crane.
– Mais dites-moi, demande Cléanthe à Eusébie en ignorant grossièrement monsieur Crane (pour lui faire payer l’humiliation devant François), vu la tête de vos anges, la relique sacrée d’Itras, ça ne serait pas un recueil d’estampes pornographiques, par hasard ?
– Là, vous allez trop loin ! »
Eusébie se précipite vers Cléanthe, folle de rage.
[Je décide de tirer une carte « Chance ». Je tire : « Prosopopée. Les animaux, les objets ou les concepts abstraits se mettent à parler. Qui parle et pour dire quoi ? ». ]
Une voix tonitruante résonne soudain.
« BON, ÇA VA BIEN CINQ MINUTES, LÀ ! tonne le couloir. J’ai des petites douleurs, je pense que c’est la fin du monde, gnagnagna… Je vais vous dire ce que c’est, la souffrance, moi. Ça fait des années, que dis-je, des décennies, qu’on sacrifie des gens ici, alors la souffrance, la tristesse, le désespoir, ça me connaît ! Vos petites querelles, excusez-moi, mais c’est ridicule. Si vous voulez vous entredéchirer, faites-le bien au moins. »
Eusébie s’arrête dans son élan, honteuse.
« Vous avez raison, je me suis laissée emporter, pardon.
– Il vaut mieux partir d’ici, dit l’Étranger, je sens comme une aura négative.
– Allons, pensez à la mission, dit monsieur Crane.
– Mais elle est accomplie, nous avons retrouvé les estampes !
– Non, dit Eusébie, nous ne sommes pas là pour la réussite d’une personne mais pour celle du groupe.
– Demandons à François où se trouvent les reliques, alors.
– Qu’est-ce que tu penses de mon dessin ? demande François, qui n’a rien écouté, à l’Étranger. Ce serait mieux avec des petites fleurs par là, non ? »
Le couloir, de dégoût, imite un bruit de vomissement.
« Vous n’avez qu’à demander à votre ange, là, dit Cléanthe d’un air agacé. Il trimballe un dessin pornographique depuis tout à l’heure, après tout.
– Vous m’avez l’air bien irrité, lui dit l’Étranger. Voulez-vous que je…
– Oh non, non, c’est simplement une forme de défoulement », répond Cléanthe sans repousser ses avances.
Scène 16 : Très heureuse de n’être plus vierge
Il lui vole son livre d’estampes dès qu’il se trouve assez proche, se recule de quelques pas et se tourne vers la sœur. « Vas-y, livre, dis-lui que tu es la relique d’Itras, dis-lui !
– EH OUAIS, J’SUIS LA RELIQUE D’ITRAS, ET ITRAS ELLE SE TRIPOTE TOUS LES JOURS, ELLE SE MET DES TRUCS DÉGUEULASSES DANS LE CUL ! »
Eusébie tombe à genoux, en pleurs, en se signant sans discontinuer.
« C’est faux, c’est faux ! Vous mentez tous, c’est un lieu de perdition ici ! Que m’avez-vous fait ?!
– Voilà, dit le couloir, c’est pas compliqué quand même ! »
L’Étranger s’avance d’un pas énergique vers Cléanthe pour le guérir : trop c’est trop.
[Pierre demande à Ozen de tirer une carte « Résolution ». Je lis « Non, et… Vous échouez, et un autre élément complique la situation, pour vous ou pour tout le monde ».]
L’Étranger embrasse Cléanthe, et le reste n’est pas très clair, mais une voix finit par tirer le groupe de sa torpeur : « Mais qu’est-ce que c’est que ce bazar, là ? On part cinq minutes, et quand on revient c’est n’importe quoi ! ». Chacun reprend ses esprits, nu, dans les bras de quelqu’un d’autre (reprenant certaines des 72 positions autorisées et celles qu’on ne vous apprend pas à l’école). Le bourreau de la confrérie les regarde d’un air sévère. « Vous m’avez encore mis de l’amour partout, ça va prendre au moins une semaine pour remettre de la souffrance et de la désolation par ici !
– Et encore, dit le couloir, heureusement que je vous ai appelé, ils y auraient passé la nuit sinon !
– Enfin de l’amour pour tout le monde ! s’extasie l’Étranger. Tu as compris, Cléanthe ?
– Oh oui ! J’ai compris ! »
Eusébie se rhabille, elle aussi ravie.
« J’ai touché du doigt la Très Sainte Lumière d’Itras… C’était merveilleux…
– Très chère amie, ce que vous avez touché du doigt, ce n’était pas la lumière. »
Avant que tout le monde ne parte, François retient l’Étranger : « Mon doux », lui susurre-t-il, « tu pourrais me laisser un de ces magnifiques livres ?
– Malheureusement, je dois les ramener car je ne sais pas lequel est celui d’Olaf.
– Dommage, ça m’aurait rempli de tellement de bonheur… »
L’Étranger, sans pouvoir se retenir, lui donne Les hommes ont un sexe, les femmes ont un sexe.
« Merci, merci ! Bon, si vous pouvez me laisser maintenant, j’ai… à faire, oui, avec mes livres… de compte, voilà !
– Souviens-toi : plus de gens découpés.
– Non, non… quoique…
– Oh oui, susurre l’excitation de François à son oreille. Tu sais ce qu’ils font, les gens découpés, avec leur moignon… »
Cléanthe va dans la direction indiquée par François ; il suit ses indications, dépassant avec force bâillements et ennuis la guillotine, les murs des hurlements qui lui susurrent à quel point c’est un raté à la vie neutre et sans saveur, les prisonniers des geôles qui lui proposent mille trésors contre leur libération, avant d’arriver au puits, fermé par une lourde grille qui est suffisamment large pour qu’il y glisse la fiole. Il tend une oreille et est très satisfait de ne pas l’entendre tomber.
« Vous avez fait vos cochonneries ? demande Eusébie. Allons-y alors.
– Je ne vous permets pas, ma sœur !
– Allons, j’ai bien vu la manière dont vous tripotiez cette bouteille. Je ne juge pas, chacun est libre de ses passe-temps, mais tout de même…
– Vous ne disiez pas ça dans le couloir tout à l’heure.
– Oh ! » Eusébie, outrée, gifle Cléanthe. « Si j’avais su, monsieur, je serais allée chercher mon financement ailleurs. Parlons-en d’ailleurs : vous nous faites arriver par une entrée qui n’est pas la bonne, vous refusez tous les items sur ma liste de base, et monsieur Crane ne voulait pas vous le dire pour ne pas vous vexer, mais il pense comme moi. Tout cela laisse un peu à désirer.
– Moi, vous savez, ce qui m’importe c’est qu’on réussisse la mission, se dérobe monsieur Crane.
– Mais dites-moi, demande Cléanthe à Eusébie en ignorant grossièrement monsieur Crane (pour lui faire payer l’humiliation devant François), vu la tête de vos anges, la relique sacrée d’Itras, ça ne serait pas un recueil d’estampes pornographiques, par hasard ?
– Là, vous allez trop loin ! »
Eusébie se précipite vers Cléanthe, folle de rage.
[Je décide de tirer une carte « Chance ». Je tire : « Prosopopée. Les animaux, les objets ou les concepts abstraits se mettent à parler. Qui parle et pour dire quoi ? ». ]
Une voix tonitruante résonne soudain.
« BON, ÇA VA BIEN CINQ MINUTES, LÀ ! tonne le couloir. J’ai des petites douleurs, je pense que c’est la fin du monde, gnagnagna… Je vais vous dire ce que c’est, la souffrance, moi. Ça fait des années, que dis-je, des décennies, qu’on sacrifie des gens ici, alors la souffrance, la tristesse, le désespoir, ça me connaît ! Vos petites querelles, excusez-moi, mais c’est ridicule. Si vous voulez vous entredéchirer, faites-le bien au moins. »
Eusébie s’arrête dans son élan, honteuse.
« Vous avez raison, je me suis laissée emporter, pardon.
– Il vaut mieux partir d’ici, dit l’Étranger, je sens comme une aura négative.
– Allons, pensez à la mission, dit monsieur Crane.
– Mais elle est accomplie, nous avons retrouvé les estampes !
– Non, dit Eusébie, nous ne sommes pas là pour la réussite d’une personne mais pour celle du groupe.
– Demandons à François où se trouvent les reliques, alors.
– Qu’est-ce que tu penses de mon dessin ? demande François, qui n’a rien écouté, à l’Étranger. Ce serait mieux avec des petites fleurs par là, non ? »
Le couloir, de dégoût, imite un bruit de vomissement.
« Vous n’avez qu’à demander à votre ange, là, dit Cléanthe d’un air agacé. Il trimballe un dessin pornographique depuis tout à l’heure, après tout.
– Vous m’avez l’air bien irrité, lui dit l’Étranger. Voulez-vous que je…
– Oh non, non, c’est simplement une forme de défoulement », répond Cléanthe sans repousser ses avances.
Scène 16 : Très heureuse de n’être plus vierge
Il lui vole son livre d’estampes dès qu’il se trouve assez proche, se recule de quelques pas et se tourne vers la sœur. « Vas-y, livre, dis-lui que tu es la relique d’Itras, dis-lui !
– EH OUAIS, J’SUIS LA RELIQUE D’ITRAS, ET ITRAS ELLE SE TRIPOTE TOUS LES JOURS, ELLE SE MET DES TRUCS DÉGUEULASSES DANS LE CUL ! »
Eusébie tombe à genoux, en pleurs, en se signant sans discontinuer.
« C’est faux, c’est faux ! Vous mentez tous, c’est un lieu de perdition ici ! Que m’avez-vous fait ?!
– Voilà, dit le couloir, c’est pas compliqué quand même ! »
L’Étranger s’avance d’un pas énergique vers Cléanthe pour le guérir : trop c’est trop.
[Pierre demande à Ozen de tirer une carte « Résolution ». Je lis « Non, et… Vous échouez, et un autre élément complique la situation, pour vous ou pour tout le monde ».]
L’Étranger embrasse Cléanthe, et le reste n’est pas très clair, mais une voix finit par tirer le groupe de sa torpeur : « Mais qu’est-ce que c’est que ce bazar, là ? On part cinq minutes, et quand on revient c’est n’importe quoi ! ». Chacun reprend ses esprits, nu, dans les bras de quelqu’un d’autre (reprenant certaines des 72 positions autorisées et celles qu’on ne vous apprend pas à l’école). Le bourreau de la confrérie les regarde d’un air sévère. « Vous m’avez encore mis de l’amour partout, ça va prendre au moins une semaine pour remettre de la souffrance et de la désolation par ici !
– Et encore, dit le couloir, heureusement que je vous ai appelé, ils y auraient passé la nuit sinon !
– Enfin de l’amour pour tout le monde ! s’extasie l’Étranger. Tu as compris, Cléanthe ?
– Oh oui ! J’ai compris ! »
Eusébie se rhabille, elle aussi ravie.
« J’ai touché du doigt la Très Sainte Lumière d’Itras… C’était merveilleux…
– Très chère amie, ce que vous avez touché du doigt, ce n’était pas la lumière. »
Avant que tout le monde ne parte, François retient l’Étranger : « Mon doux », lui susurre-t-il, « tu pourrais me laisser un de ces magnifiques livres ?
– Malheureusement, je dois les ramener car je ne sais pas lequel est celui d’Olaf.
– Dommage, ça m’aurait rempli de tellement de bonheur… »
L’Étranger, sans pouvoir se retenir, lui donne Les hommes ont un sexe, les femmes ont un sexe.
« Merci, merci ! Bon, si vous pouvez me laisser maintenant, j’ai… à faire, oui, avec mes livres… de compte, voilà !
– Souviens-toi : plus de gens découpés.
– Non, non… quoique…
– Oh oui, susurre l’excitation de François à son oreille. Tu sais ce qu’ils font, les gens découpés, avec leur moignon… »
J'écris des mini-JdR par dizaines !
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Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Scène 17 : Sœur Eusébie découvre l’amour
Une fois sortis du temple de Nindra, sœur Eusébie suggère une prière collective pour retrouver les reliques.
[Pierre décide de tirer une carte « Chance ». Il tire : « Noir et blanc. La scène passe en noir et blanc. Les couleurs disparaissent, ainsi que toute nuance. Tout devient bien ou mal, vertueux ou maléfique, et ainsi de suite ». ]
« Mes chers amis, dit Cléanthe alors que l’Étranger se met à irradier d’une lumière blanche et aveuglante, croyez-vous que nous ayons vraiment besoin de trouver une relique dans ces souterrains, alors que nous venons de trouver une représentation directe, brutale et violente de l’amour d’Itras, telle qu’elle le porte à tous les êtres ? Aucune relique à chercher au-delà de cela : le moment que nous avons cristallisé en nos cœurs, voilà la relique d’Itras.
– Cléanthe a raison ! s’exclame Eusébie.
– C’est de la vanité de continuer à chercher dans ces souterrains putrides, et c’est nous infliger bien du mal ! Nous devrions remonter à la surface, et profiter encore quelques temps ensemble de notre bien-être…
– Oui ! Oui ! Oui ! Tu as raison, mon amour ! »
Eusébie enlace Cléanthe, pendant que monsieur Crane les mène vers la sortie connue seulement par les adorateurs de Nindra. Lorsqu’ils arrivent enfin à la grille qui mène à l’extérieur, la créature qu’ils avaient croisé plus tôt dans l’eau semble les attendre, encore plus répugnante qu’auparavant.
« Pas si vite ! L’amour n’a qu’un temps. Ce qui s’est développé dans les souterrains doit y rester. Si vous quittez ces lieux, toutes ces expériences deviendront des souvenirs, elles resteront enfouies dans vos cœurs, mais vous ne pourrez jamais redescendre les chercher.
– C’est bien triste, et je n’aime pas quand c’est triste…
– Vous n’avez qu’à le purifier, lui aussi. »
L’Étranger s’approche de la créature et plonge sa main en elle. Un hurlement strident se fait entendre, et la créature explose, recouvrant le corps de l’Étranger de dizaines de boules noirâtres. Eusébie éclate alors en sanglots et se serre contre Cléanthe.
« Non, je ne veux pas sortir ! Restons là, gardons notre amour pur et vrai pour toujours !
– Mais Eusébie, dit Cléanthe, nous sortirons avec le souvenir dans nos cœurs que l’amour d’Itras est plus grand que tout…
– Les souvenirs, c’est de la merde ! Moi je veux de l’amour charnel, maintenant, tout de suite !
– Non, se plaint l’Étranger, ce n’est pas ce que je voulais…
– Oh, arrête un peu toi ! Je n’ai pas honte de ce que je ressens !
– Mais oui, acquiesce Cléanthe à l’adresse de l’Étranger, je n’ai cesse de vous dire que vous vous y prenez mal. Et maintenant, Eusébie, célébrons notre amour une dernière fois.
– Non, pourquoi une dernière fois !? Fais-moi l’amour contre ce mur ! »
Ils font l’amour, alors que l’Étranger s’éloigne, d’un air accablé (et monsieur Crane d’un air gêné). Cléanthe s’abandonne à l’extase, et ne se rend compte que trop tard qu’Eusébie en a profité pour l’enchaîner au mur.
Scène 18 : Les histoire d’amour finissent mal… en général
« Tu es mien pour toujours, à présent.
– Ma chérie, tu n’as pas besoin de chaines pour cela…
– Je ne veux pas du souvenir ! Je te veux, toi. On reste ici, c’est promis ? »
Monsieur Crane, revenu car il avait oublié son sac, assomme Eusébie et détache Cléanthe. Il embarque la nonne sur son épaule et propose à son acolyte un brandy pour oublier tout cela. Cléanthe accepte, et sort des égouts le plus heureux des hommes.
Les deux hommes se rendent compte, dix minutes plus tard, qu’ils sont sortis des égouts, mais le souvenir de leur expédition est déjà bien brumeux, comme s’il s’agissait d’une aventure vécue il y a des dizaines d’années…
L’Étranger erre dans la ville, jusqu’à se retrouver devant les locaux de la ligue de vertu. Il ne peut réprimer son dégoût lorsque Miss Wellington lui ouvre, et lui vomit un jet de bile noire à la figure et se vautre par terre. Apeuré, il lâche les estampes par terre et s’enfuit en courant, aux prises avec ce nouveau sentiment inconnu.
Cléanthe et monsieur Crane se retrouvent à la part du Diable, à côté de trois des marins du déjeuner. « Heureusement que vous êtes revenus », s’exclament-ils, vous étiez partis avant qu’on ait pu finir nos portraits !
– Un truc fort et violent, commande Cléanthe au serveur.
– Ah, si vous voulez, j’ai le spécial du patron : les yeux de chimpanzé, et ensuite je te mets un poing dans le bide.
– Allons-y, mettez-en nous deux. »
Le serveur s’exécute, et attend que ses clients aient fini leur verre pour les frapper par surprise. Ils tombent au sol et se tordent de douleur alors que les clients et clientes alentour les regardent d’un air navré, en projetant la cendre de leur cigarette sur leurs vêtements. Monsieur Crane, en représailles, déclenche une bagarre générale.
« Quand même, dit Cléanthe, affalé sur la table, au marin en sang en face de lui, vous avez tout à fait raté le portrait d’Eusébie. »
Une fois sortis du temple de Nindra, sœur Eusébie suggère une prière collective pour retrouver les reliques.
[Pierre décide de tirer une carte « Chance ». Il tire : « Noir et blanc. La scène passe en noir et blanc. Les couleurs disparaissent, ainsi que toute nuance. Tout devient bien ou mal, vertueux ou maléfique, et ainsi de suite ». ]
« Mes chers amis, dit Cléanthe alors que l’Étranger se met à irradier d’une lumière blanche et aveuglante, croyez-vous que nous ayons vraiment besoin de trouver une relique dans ces souterrains, alors que nous venons de trouver une représentation directe, brutale et violente de l’amour d’Itras, telle qu’elle le porte à tous les êtres ? Aucune relique à chercher au-delà de cela : le moment que nous avons cristallisé en nos cœurs, voilà la relique d’Itras.
– Cléanthe a raison ! s’exclame Eusébie.
– C’est de la vanité de continuer à chercher dans ces souterrains putrides, et c’est nous infliger bien du mal ! Nous devrions remonter à la surface, et profiter encore quelques temps ensemble de notre bien-être…
– Oui ! Oui ! Oui ! Tu as raison, mon amour ! »
Eusébie enlace Cléanthe, pendant que monsieur Crane les mène vers la sortie connue seulement par les adorateurs de Nindra. Lorsqu’ils arrivent enfin à la grille qui mène à l’extérieur, la créature qu’ils avaient croisé plus tôt dans l’eau semble les attendre, encore plus répugnante qu’auparavant.
« Pas si vite ! L’amour n’a qu’un temps. Ce qui s’est développé dans les souterrains doit y rester. Si vous quittez ces lieux, toutes ces expériences deviendront des souvenirs, elles resteront enfouies dans vos cœurs, mais vous ne pourrez jamais redescendre les chercher.
– C’est bien triste, et je n’aime pas quand c’est triste…
– Vous n’avez qu’à le purifier, lui aussi. »
L’Étranger s’approche de la créature et plonge sa main en elle. Un hurlement strident se fait entendre, et la créature explose, recouvrant le corps de l’Étranger de dizaines de boules noirâtres. Eusébie éclate alors en sanglots et se serre contre Cléanthe.
« Non, je ne veux pas sortir ! Restons là, gardons notre amour pur et vrai pour toujours !
– Mais Eusébie, dit Cléanthe, nous sortirons avec le souvenir dans nos cœurs que l’amour d’Itras est plus grand que tout…
– Les souvenirs, c’est de la merde ! Moi je veux de l’amour charnel, maintenant, tout de suite !
– Non, se plaint l’Étranger, ce n’est pas ce que je voulais…
– Oh, arrête un peu toi ! Je n’ai pas honte de ce que je ressens !
– Mais oui, acquiesce Cléanthe à l’adresse de l’Étranger, je n’ai cesse de vous dire que vous vous y prenez mal. Et maintenant, Eusébie, célébrons notre amour une dernière fois.
– Non, pourquoi une dernière fois !? Fais-moi l’amour contre ce mur ! »
Ils font l’amour, alors que l’Étranger s’éloigne, d’un air accablé (et monsieur Crane d’un air gêné). Cléanthe s’abandonne à l’extase, et ne se rend compte que trop tard qu’Eusébie en a profité pour l’enchaîner au mur.
Scène 18 : Les histoire d’amour finissent mal… en général
« Tu es mien pour toujours, à présent.
– Ma chérie, tu n’as pas besoin de chaines pour cela…
– Je ne veux pas du souvenir ! Je te veux, toi. On reste ici, c’est promis ? »
Monsieur Crane, revenu car il avait oublié son sac, assomme Eusébie et détache Cléanthe. Il embarque la nonne sur son épaule et propose à son acolyte un brandy pour oublier tout cela. Cléanthe accepte, et sort des égouts le plus heureux des hommes.
Les deux hommes se rendent compte, dix minutes plus tard, qu’ils sont sortis des égouts, mais le souvenir de leur expédition est déjà bien brumeux, comme s’il s’agissait d’une aventure vécue il y a des dizaines d’années…
L’Étranger erre dans la ville, jusqu’à se retrouver devant les locaux de la ligue de vertu. Il ne peut réprimer son dégoût lorsque Miss Wellington lui ouvre, et lui vomit un jet de bile noire à la figure et se vautre par terre. Apeuré, il lâche les estampes par terre et s’enfuit en courant, aux prises avec ce nouveau sentiment inconnu.
Cléanthe et monsieur Crane se retrouvent à la part du Diable, à côté de trois des marins du déjeuner. « Heureusement que vous êtes revenus », s’exclament-ils, vous étiez partis avant qu’on ait pu finir nos portraits !
– Un truc fort et violent, commande Cléanthe au serveur.
– Ah, si vous voulez, j’ai le spécial du patron : les yeux de chimpanzé, et ensuite je te mets un poing dans le bide.
– Allons-y, mettez-en nous deux. »
Le serveur s’exécute, et attend que ses clients aient fini leur verre pour les frapper par surprise. Ils tombent au sol et se tordent de douleur alors que les clients et clientes alentour les regardent d’un air navré, en projetant la cendre de leur cigarette sur leurs vêtements. Monsieur Crane, en représailles, déclenche une bagarre générale.
« Quand même, dit Cléanthe, affalé sur la table, au marin en sang en face de lui, vous avez tout à fait raté le portrait d’Eusébie. »
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- chaviro
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- Inscription : jeu. févr. 01, 2007 7:29 am
Re: [CR] Des nouvelles d'Itras By
Je veux pas dire, mais entre Emojk et Pikathulhu, j'ai l'impression que la consommation de psychotropes a sévèrement augmenté sur ce forum, ces derniers temps… vivement le retour de la droite au pouvoir, qu'elle nous rééduque tout ces hippies à la caserne 

L'OSR est le véganisme du JDR
«Les rôlistes ont bien raison de se défendre des machines à saucisses»(Romaric B.)
«Un TPK d'entrée, c'est bon»(Dude)
«Quand les joueurs en ont marre de voir leurs PJ sodomiser des poney morts, ils commencent à jouer»(Dr Dandy)
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«Un TPK d'entrée, c'est bon»(Dude)
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