En 2015 dans son billet Jamais sans mon scénario ! Jérôme "Brand" Larré avait commencé à lister les fonctions d'un scénario, en expliquant que ce qui comptait dans un scénario, ce n'était pas sa forme (linéaire, graphique, etc.) mais ses fonctions.
Voici ce qu'il avait donné :
– instancier la partie / donner une situation initiale ;
– donner un objectif ;
– donner une condition de fin ;
– donner une idée générale de ce vers quoi on va se diriger ensuite ;
– définir un cadre et des règles spécifiques à la partie ;
– proposer une adversité, un challenge, des difficultés ;
– proposer des récompenses ;
– créer une tension supérieure à celle qui aurait été improvisée ;
– faire croire aux joueurs qu’il y a quelque chose de vrai et légitime dans toute cette fiction ;
– expliquer comment la situation va évoluer en fonction de certaines décisions des joueurs ;
– montrer ce à quoi peut ressembler le jeu (scénario d’introduction) ;
– apprendre à jouer au jeu (scénario d’introduction) ;
– montrer une autre façon de se servir du jeu ;
– mettre en jeu un événement particulier (scénario storyline notamment) ;
– etc.
Quelles autres fonctions pourrait-on ajouter à cette liste ?
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Je complète :
Faire connaître un ou plusieurs éléments de l'univers de jeu ("Mettre en jeu un événement particulier" est une sous-fonction particulière).
Tester la moralité, mettre à l'épreuve les attachements (affectifs, politiques, religieux...) d'un ou de plusieurs personnages. C'est une sous-fonction de "Proposer une adversité, un challenge, des difficultés".
Faciliter l'animation du MJ/Épargner des efforts aux MJ (préparation, maîtrise, improvisation).
Lancer la partie/accrocher les joueurs>Accroches>rumeurs, questions orientées, accessoires intradiégétique, évènement, exposition…
Accélérer le lancement > pré-tirés, briefings
Favoriser et développer une ambiance > affiche, illustrations, accessoires, playlist, liste de saynètes, d’impressions, etc.
Fournir des éléments de sécurité émotionnelle
Présenter le scénario au MJ et aux PJ > résumé, 4e de couverture, pitch, description, classification (genre, sous-genres, thèmes, sujets, format : démo, convention, campagne…)
Préciser à qui s’adresse le scénario > jeu, univers, époque ; nombre de joueurs, niveau des personnages, personnages requis, niveau d’expertise du MJ
Fournir de l’information > encadrés (La vérité/L’envers du décors/A propos de/..), accessoires, listes d’indices, liste de révélations, liste/table de rumeurs, chronologie passée, cartes & plans, etc.
Montrer comme le scénario a été joué > compte-rendu de partie, récit, encadré d’exemples, novélisation de partie, actual play vidéo
Exprimer un propos (histoire, sujet, point de vue, morale)
Raconter une histoire au MJ-lecteur" (par opposition à l'histoire -le propos- racontée aux PJ par l'aventure jouée).
Proposer des éléments originaux à intégrer au récit pour permettre une improvisation riche et surprenante (PNJ, lieux, indices, situations...).
Fournir du matériel et des services aux perso (listes de matos, de prix, recommandation sur la négociation, la disponibilité)
Consommer les ressources des perso (torches, nourritures, munitions, activation de dons/sorts, PV, carburant, argent, etc.)
Permettre d'utiliser les récompenses, le butin
Fournir des infos différenciées entre le MJ et les PJ (text-box, carte annotée, etc.)
Limiter les possibilités des joueurs (espace, durée, moral...)
Si l'on se place du point de vue des auteurs et éditeurs : Vendre des suppléments pour permettre une rentrée d'argent.
Traduire, exploiter en jeu les mécaniques, le gameplay, l'univers et les thèmes du jeu. Par exemple dans le cas d'un jeu sur la peur du noir, un scénario apporterait de la tangibilité s'il propose un défi lié à l'obscurité et utilise les "règles du noir" (tangibilité des règles). Autre exemple : dans un jeu avec des îles et des navires volants à la Sky of Arcadia(2000), un scénario apporterait de la tangibilité s'il propose d'affronter la faune volante, d'aborder une île "par le sous-sol" ou d'affronter l'environnement frigide à l'air raréfié de la haute altitude (tangibilité de l'univers).
Apporter de l'interactivité, autrement-dit de l'agentivité aux PJ, des conséquences à leurs actes, un chamboulement du statu quo en fin d'aventure. La fin de l'aventure ne serait donc pas scriptée et l'univers pourrais être profondément modifié du fait du scénario joué.
Apporter du contexte
Fournir des scènes possibles
Fournir des propositions de résolution de l'aventure, des défis
Révéler tous les mystères, tous les secrets, tous les tenants et aboutissants de ce qui se passe dans l'aventure
Fournir une/des éléments de préparation de partie pour mener le scénario
Proposer des péripéties qui évoquent les tropes (ex pour du western : duel, attaque de bandits, attaque de diligence, capture de vaches, etc.)
Organiser les informations et les documents
Fournir des idées et inspirations (qui ne seront pas forcément utilisées pour CE scénario...)
Faciliter le jeu en distanciel/sur table virtuelle : plans, pions, aides, portraits et illustrations "prêt·es à importer"
Fournir des défis et des situations ludiques bien "game designés", qui exploitent bien les règles, la tactiques, etc. et qui traduisent concrètement l'intrigue, l'univers, le genre et ses tropes.
créer et conserver un intérêt dramatique.
Dernière modification par Qui Revient de Loin le mer. déc. 17, 2025 4:37 pm, modifié 14 fois.
Mes sites : Kosmos (un jdra sur la mythologie grecque qui a lu les auteurs antiques pour vous) ; blog de lectures ; site d'écriture.
Disclameur : j'ai écrit pour "Casus" et "Jdr Mag".
Favoriser et développer une ambiance > affiche, illustrations, accessoires, playlist, liste de saynètes, d’impressions, etc.
Fournir des éléments de sécurité émotionnelle
Présenter le scénario au MJ et aux PJ > résumé, 4e de couverture, pitch, description, classification (genre, sous-genres, thèmes, sujets, format : démo, convention, campagne…)
Préciser à qui s’adresse le scénario > jeu, univers, époque ; nombre de joueurs, niveau des personnages, personnages requis, niveau d’expertise du MJ
Fournir de l’information > encadrés (La vérité/L’envers du décors/A propos de/..), accessoires, listes d’indices, liste de révélations, liste/table de rumeurs, chronologie passée, cartes & plans, etc.
Montrer comme le scénario a été joué > compte-rendu de partie, récit, encadré d’exemples, novélisation de partie, actual play vidéo
pseudo a écrit : ↑dim. nov. 23, 2025 10:12 am
Divertir les participants, leur faire passer un bon moment.
A mon avis c'est la fonction essentielle.
C'est tellement essentiel que c'est pour moi le but du jeu dans son ensemble. Sinon ce n'est pas du jeu. Partant de là, c'est superfétatoire pour le scénario (pas tous les jours que j'arrive à placer ce mot ^^ ).
Un scénario peut être chiant car il est mal fait, mais je vois mal un scénario qui déciderait d'être chiant par design, sauf peut-être à FATAL. Toutes les fonctions du scénario concourent à divertir les participants.
Tybalt (le retour) a écrit : ↑dim. nov. 23, 2025 11:15 am
- épargner des efforts aux MJ.
Je suis 100% d'accord si tu entends par là la réduction de la charge cognitive : un scénario permet d'alléger la charge globale MJ, donc d'avoir plus de disponibilité pour le reste.
De mon ressenti, à partir du moment où j'ai préparé un scénario, la qualité de mes improvisations est grandement améliorée.
Proposer des éléments originaux à intégrer au récit (PNJ, lieux, indices, situations...).
Quand on improvise, on arrive généralement à trouver des façons de faire avancer l'histoire, mais on a parfois tendance à tomber dans des poncifs par manque d'inspiration ("Il y a un nom écrit... heu... sur une pochette d'allumettes").
Tybalt (le retour) a écrit : ↑dim. nov. 23, 2025 11:15 am
- épargner des efforts aux MJ.
Je suis 100% d'accord si tu entends par là la réduction de la charge cognitive : un scénario permet d'alléger la charge globale MJ, donc d'avoir plus de disponibilité pour le reste.
De mon ressenti, à partir du moment où j'ai préparé un scénario, la qualité de mes improvisations est grandement améliorée.
il y a un vieil adage dans les techniques d'expressions : pour bien parler de quelque chose, il faut le mériter.
La vérité derrière ça est que l'on est plus performant quand on parle de quelque chose que l'on connait, quand on sait de quoi on parle.
J'aime bien ce sujet de discussion et ce que vous dites.
Cela clarifie, simplifie, recentre notre création
Se faire plaisir / faire plaisir aux autres me semble la fonction primordiale du jeu.
Avec des aspects culturels (faire découvrir un imaginaire, réfléchir à un problème moral) ou spectaculaires (divertir par l'évasion imaginaire, par le jeu de PJ/PNJ amusants...).
Pour ceux qui se demandent où je veux en venir, je travaille à une synthèse* sur le design insulaire/modulaire de scénario à partir d'un corpus couvrant les 25 dernières années, et pour laquelle l'approche fonctionnelle me parait particulièrement féconde :
Le principe des indices flottants de Ron Edward (circa 2001) exposé par Mark J. Young, 2001, traduction de Pierre Buty, PTGPTB