[CR] Mystères à Whitby
- Blakkrall
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Re: [CR] Mystères à Whitby
On aura la suite bientôt ? C'est tellement sympa à lire !
J’ai passé l’âge où la méchanceté me rendait furieux. Maintenant c’est la stupidité qui me met hors de moi. Arturo Perez Reverte Deux hommes de bien
- Olivier.Legrand
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Re: [CR] Mystères à Whitby
Oui, normalement Laurent alias Mike a un petit "solo" décisif dans le développement de son personnage Mercredi prochain - et je gage que, le connaissant, il ne tardera pas à nous en faire un de ces CR dont il a le secret. J'ai aussi mené un solo assez important pour Rose (mais pas de CR prévu).
A priori, j'espère pouvoir mener un prochain épisode "dès que possible"...

- Blakkrall
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Re: [CR] Mystères à Whitby
Chouette ! merci pour les news !
J’ai passé l’âge où la méchanceté me rendait furieux. Maintenant c’est la stupidité qui me met hors de moi. Arturo Perez Reverte Deux hommes de bien
- Olivier.Legrand
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Re: [CR] Mystères à Whitby
Journal de Michael Beckman
- Mike, réveille-toi, tu vas être en retard.
La voix de Sondra. J’entrouvre les yeux, quittant un mauvais rêve. Un de plus.
- Tu ne vas pas rater ta rentrée, tout de même ?
Penchée sur moi, elle m’embrasse et je lui souris. Elle est enceinte de six mois. Notre premier enfant.
J’ai vingt-huit ans, je suis professeur de lettres et aujourd’hui je fais ma première rentrée au Lycée d’Haven Rock, une petite ville de Nouvelle-Angleterre où Sondra et moi avons emménagé quand j’ai décroché ce poste d’enseignant. Mon doctorat portait sur Poe, Bierce et Hawthorne, l’année précédente.
Quitter Whitby fut la meilleure décision de ma vie. En prenant le petit déjeuner aux côtés de Sondra, je me rappelle mes rêves futiles d’écrivain. Tout à l’heure, j’entamerai mon premier cours par Edgard Allan Poe et son « Corbeau » : selon Sondra, mon éloquence fera des merveilles sur mes élèves.
Nous vivons une époque étrange : il y a quelques mois, le rêve américain a volé en éclats quand les tours jumelles se sont effondrées.
Au volant, en direction du lycée, j’aperçois un point noir dans mon rétroviseur, une forme derrière moi qui vole dans mon sillage. Je suis suivi par un corbeau. Je choisis d’y voir un bon présage.
Dans la salle de classe où je pénètre pour la première fois, j’essaie d’être détendu. Dans un instant, ils seront là. Suis-je prêt ?
La sonnerie annonce le début des cours et ma classe s’emplit déjà. Les élèves me regardent, certains résignés, d’autres intéressés. Je dois me concentrer, mais mon esprit, malgré moi, cavale vers le rêve auquel j’ai été arraché ce matin. Je me souviens, maintenant : j’étais plus vieux et je revenais dans la petite ville où j’ai grandi, quelque part en Indiana.
Whitby. Tout était différent, dans ce rêve.
Je dois me concentrer. Il fait chaud, en cette fin d’été de Nouvelle-Angleterre. On a ouvert les fenêtres de la salle de classe. Je lis à voix haute « Le Corbeau » de ce bon vieil Edgar Allan Poe, portant toute mon attention sur chacun des mots. Je suis interrompu par le cri aigu d’une élève et le brouhaha qui suit.
Sur le bord de la fenêtre, un corbeau s’est posé et penche vers nous sa tête noire. Les enfants sont terrifiés, certains demandent si c’est un « truc » que j’ai prévu, un effet sensationnel. Tous refluent vers la sortie, terrorisés par l’irruption du volatile, puis commencent à s’enfuir.
L’oiseau me regarde. Mes yeux sont vissés dans les siens. Il pousse un croassement dans lequel j’entends ses mots : « Have you found the red door ? », ou est-ce « Nevermore » ?
La tête me tourne et le décor devient flou. Tout disparaît.
Je m’éveille en sursaut. Il est quatre heures du matin.
Dans quelques heures, je ferai ma rentrée, la première au lycée d’Haven Rock. J’appréhende ce jour.
Pareil cauchemar était inévitable.
- Mike ? Quelque chose ne va pas ?
- Non…ça va…je vais prendre un verre d’eau, rendors-toi…
Sondra se tourne et retrouve rapidement le sommeil. Elle est enceinte de six mois. Notre premier enfant. Je vais jusqu’à la salle de bains et bois un grand verre d’eau.
La porte rouge. Je sais où elle se trouve.
Au sous-sol, dans le garage où sont stockés les cartons que nous n’avons pas encore vidé depuis notre arrivée ici, se trouve une étagère derrière laquelle une porte rouge ouvre sur…
Je ne sais pas vers quoi donne cette porte condamnée. A peine vêtu, je m’y rends.
Derrière l’étagère où s’entasse des cartons, l’ombre rouge de la porte me nargue. Je la déplace, faisant au passage tomber un de ces cartons. De vieilles photographies et des bouquins s’en échappent. Sur les clichés, j’identifie un adolescent d’une quinzaine d’années. Où étais-je à quinze ans ? Je ramasse les livres : il y a mon nom sur leur couverture, mais les titres sont flous.
La porte rouge est devant moi. Ses linteaux portent une trace en forme de Y qui me rappelle quelque chose qui me rappelle un frisson. Je pose la main sur la poignée, hésite le temps de quelques battements de cœur et la tourne. Elle s’ouvre, vers l’extérieur.
Un rougeoiement intense, une vibration dans l’air m’accueille et me saisit. Un nouveau vertige s’empare de moi. Tout disparaît et je reviens à moi.
1989 : j’ai quinze ans, je suis dans ma chambre d’hôpital. Mon walkman sur les oreilles, j’écoute la voix de Robert Smith qui parle d’un homme-araignée.
Il y a quelqu’un d’autre dans ma chambre. Une jeune fille est assise dans le coin de la pièce et ses longs cheveux noirs lui recouvrent le visage. Je sais que je ne dois pas voir son visage. Je tente de l’approcher et l’entend murmurer : Mike, tu dois trouver la porte rouge.
- Eh bien, Mike, comment allons-nous aujourd’hui ?
Je me retourne. Le Docteur Delacroix est là, me regardant à travers ses grosses lunettes comme il regarderait un insecte étrange. Je bredouille quelque chose, mais il ne me laisse pas finir.
- Toujours ces cauchemars…il va falloir faire quelque chose.
Il semble ne pas voir la fille dans le coin de la pièce. Elle continue de chuchoter
- La porte rouge, Mike.
La réalité semble trembler un instant et le décor autour de moi change à nouveau. Je suis allongé, immobilisé par des sangles sur une table couverte de taches brunes. Quelque chose semble vrombir dans l’air. Le Docteur Delacroix est penché sur moi.
- Il est conscient. Redonnez-lui une dose.
Ça ne peut pas être vrai. La porte rouge. Je m’accroche à cette certitude, mais je sais que si je reste là (la porte rouge), il va me griller le cerveau. La porte rouge elle est dans mon esprit je me concentre de toutes mes forces et maintenant ça y est je la vois dans ma tête la porte rouge elle est là je m’y engage la porte rouge je m’échappe.
Je m‘éveille dans un cri. Je me rappelle maintenant. Je suis couché sur un vieux plancher, complètement nu. Je me relève doucement. Je sais où je suis : une cabane en lisière d’une immense forêt profonde. Là où les arbres disparaissent, c’est le No Man’s Land.
Où sont Raven et Willie ? J’attrape une vieille couverture et m’y emmitoufle. Sur la vieille table se trouve un livre relié de cuir, un manuscrit. Je l’entrouvre : Le livre des Ombres.
Une vibration dans l’air, comme un nuage de buée, se forme à hauteur de mon visage et prend peu à peu l’allure d’un visage. Je reconnais la vieille femme.
- Abigail… Abigail Twiceborn, celle qui est née deux fois.
La vieille femme me regarde. Elle prend de la consistance et est maintenant de chair et de sang. Elle s’assied et je m’installe à son côté.
- Tu n’es pas l’un d’eux. Tu n’es pas un cauchemar.
Elle a préparé une sorte de tisane et m’a tendu une tasse dans laquelle j’ai trempé les lèvres sans me poser de question. Puis elle a continué de parlé.
- Fetch. Voilà ce que je suis et ce que tu es. Le fetch de Michael Beckman, mon descendant lointain. Et je suis le fetch d’Abigail Twiceborn, qu’ils ont dite sorcière.
Tout le monde possède un double, mais seuls les nôtres le savent.
Je hoche la tête et me souviens maintenant. Quand Willie est venu nous chercher, Rose et moi, dans le Gardinel, c’était son fetch qui nous a tirés de là.
- D’où viens-tu, Michael ? De quand viens-tu ? Tu n’es pas là par hasard, je le sais.
- De Whitby... en 2024. Il est revenu. Le Dormeur sur le Seuil. Il s’est réveillé.
La vieille femme hoche la tête.
- Moharahani… c’est par l’esprit que nous l’affronterons, comme nous l’avons déjà affronté.
Quand le moment viendra, tu pourras revenir ici. Le livre t’attendra, dans la cabane, au bord du Monde Noir.
- Je reviendrai, Abigail.
Elle pose sa main sur les miennes. Elle est glacée. La vieille femme prononce mon prénom doucement. Je me réveille en sursaut.
Wabash Lodge, 27 Mai 2024
Je suis allongé sur le dos, nu, dans une des chambres du resort où je séjourne depuis trois jours. Agenouillée près de moi, une jeune femme dont les longs cheveux noirs masquent le visage est là, soucieuse. Raven se lève et va prévenir Willie, attrapant au passage un tee-shirt. Elle était nue aussi.
J’ai à peine le temps de reprendre mes esprits que Willie arrive avec elle. Mon vieil ami était inquiet. Je comprends qu’il a envoyé Raven à mon aide, lors de mon voyage de l’autre côté.
Le corbeau.
Nous sommes interrompus par la sonnerie du portable de Willie. Il répond de quelques mots et raccroche.
- Mike… Sondra est à l’accueil. Elle exige de te voir.
Je hoche la tête et lui emboîte le pas. J’ai le temps de croiser le regard de Raven et j’y lis la peur. Elle craint de me perdre.
Sondra est à bout et je la comprends. Elle veut rentrer chez nous, elle veut que je l’accompagne et que tout cela s’arrête.
- Mike, viens-tu avec moi ?
Je la regarde longuement, me maudissant pour ses yeux rougis par les larmes.
- Je dois rester, Sondra… Je n’ai pas terminé ce que je dois faire ici, je ne suis pas encore prêt. Il me faut encore un peu de temps…
Elle a tourné les talons, pour fuir ce lieu et sans doute aussi pour ne pas montrer ses larmes. Sondra sort du Wabash Lodge et de ma vie, et retourne chez elle. A cet instant précis, je me fais violence pour ne pas courir derrière elle. Une boule emplit ma gorge.
Ce soir-là, nous avons dîné chez Willie, et j’ai tout raconté à mes deux compagnons : ce passé empli de bonheur que je n’ai pas vécu, l’hôpital, la cabane, Abigail. J’ai désormais conscience de ce double en moi, que je pourrai convoquer quand il le faudra.
Nous veillons en silence, mais mes pensées m’entraînent vers Whitby, vers Sondra…
Dans quelques jours, je repartirai.
Chez moi. A Whitby.
- Mike, réveille-toi, tu vas être en retard.
La voix de Sondra. J’entrouvre les yeux, quittant un mauvais rêve. Un de plus.
- Tu ne vas pas rater ta rentrée, tout de même ?
Penchée sur moi, elle m’embrasse et je lui souris. Elle est enceinte de six mois. Notre premier enfant.
J’ai vingt-huit ans, je suis professeur de lettres et aujourd’hui je fais ma première rentrée au Lycée d’Haven Rock, une petite ville de Nouvelle-Angleterre où Sondra et moi avons emménagé quand j’ai décroché ce poste d’enseignant. Mon doctorat portait sur Poe, Bierce et Hawthorne, l’année précédente.
Quitter Whitby fut la meilleure décision de ma vie. En prenant le petit déjeuner aux côtés de Sondra, je me rappelle mes rêves futiles d’écrivain. Tout à l’heure, j’entamerai mon premier cours par Edgard Allan Poe et son « Corbeau » : selon Sondra, mon éloquence fera des merveilles sur mes élèves.
Nous vivons une époque étrange : il y a quelques mois, le rêve américain a volé en éclats quand les tours jumelles se sont effondrées.
Au volant, en direction du lycée, j’aperçois un point noir dans mon rétroviseur, une forme derrière moi qui vole dans mon sillage. Je suis suivi par un corbeau. Je choisis d’y voir un bon présage.
Dans la salle de classe où je pénètre pour la première fois, j’essaie d’être détendu. Dans un instant, ils seront là. Suis-je prêt ?
La sonnerie annonce le début des cours et ma classe s’emplit déjà. Les élèves me regardent, certains résignés, d’autres intéressés. Je dois me concentrer, mais mon esprit, malgré moi, cavale vers le rêve auquel j’ai été arraché ce matin. Je me souviens, maintenant : j’étais plus vieux et je revenais dans la petite ville où j’ai grandi, quelque part en Indiana.
Whitby. Tout était différent, dans ce rêve.
Je dois me concentrer. Il fait chaud, en cette fin d’été de Nouvelle-Angleterre. On a ouvert les fenêtres de la salle de classe. Je lis à voix haute « Le Corbeau » de ce bon vieil Edgar Allan Poe, portant toute mon attention sur chacun des mots. Je suis interrompu par le cri aigu d’une élève et le brouhaha qui suit.
Sur le bord de la fenêtre, un corbeau s’est posé et penche vers nous sa tête noire. Les enfants sont terrifiés, certains demandent si c’est un « truc » que j’ai prévu, un effet sensationnel. Tous refluent vers la sortie, terrorisés par l’irruption du volatile, puis commencent à s’enfuir.
L’oiseau me regarde. Mes yeux sont vissés dans les siens. Il pousse un croassement dans lequel j’entends ses mots : « Have you found the red door ? », ou est-ce « Nevermore » ?
La tête me tourne et le décor devient flou. Tout disparaît.
Je m’éveille en sursaut. Il est quatre heures du matin.
Dans quelques heures, je ferai ma rentrée, la première au lycée d’Haven Rock. J’appréhende ce jour.
Pareil cauchemar était inévitable.
- Mike ? Quelque chose ne va pas ?
- Non…ça va…je vais prendre un verre d’eau, rendors-toi…
Sondra se tourne et retrouve rapidement le sommeil. Elle est enceinte de six mois. Notre premier enfant. Je vais jusqu’à la salle de bains et bois un grand verre d’eau.
La porte rouge. Je sais où elle se trouve.
Au sous-sol, dans le garage où sont stockés les cartons que nous n’avons pas encore vidé depuis notre arrivée ici, se trouve une étagère derrière laquelle une porte rouge ouvre sur…
Je ne sais pas vers quoi donne cette porte condamnée. A peine vêtu, je m’y rends.
Derrière l’étagère où s’entasse des cartons, l’ombre rouge de la porte me nargue. Je la déplace, faisant au passage tomber un de ces cartons. De vieilles photographies et des bouquins s’en échappent. Sur les clichés, j’identifie un adolescent d’une quinzaine d’années. Où étais-je à quinze ans ? Je ramasse les livres : il y a mon nom sur leur couverture, mais les titres sont flous.
La porte rouge est devant moi. Ses linteaux portent une trace en forme de Y qui me rappelle quelque chose qui me rappelle un frisson. Je pose la main sur la poignée, hésite le temps de quelques battements de cœur et la tourne. Elle s’ouvre, vers l’extérieur.
Un rougeoiement intense, une vibration dans l’air m’accueille et me saisit. Un nouveau vertige s’empare de moi. Tout disparaît et je reviens à moi.
1989 : j’ai quinze ans, je suis dans ma chambre d’hôpital. Mon walkman sur les oreilles, j’écoute la voix de Robert Smith qui parle d’un homme-araignée.
Il y a quelqu’un d’autre dans ma chambre. Une jeune fille est assise dans le coin de la pièce et ses longs cheveux noirs lui recouvrent le visage. Je sais que je ne dois pas voir son visage. Je tente de l’approcher et l’entend murmurer : Mike, tu dois trouver la porte rouge.
- Eh bien, Mike, comment allons-nous aujourd’hui ?
Je me retourne. Le Docteur Delacroix est là, me regardant à travers ses grosses lunettes comme il regarderait un insecte étrange. Je bredouille quelque chose, mais il ne me laisse pas finir.
- Toujours ces cauchemars…il va falloir faire quelque chose.
Il semble ne pas voir la fille dans le coin de la pièce. Elle continue de chuchoter
- La porte rouge, Mike.
La réalité semble trembler un instant et le décor autour de moi change à nouveau. Je suis allongé, immobilisé par des sangles sur une table couverte de taches brunes. Quelque chose semble vrombir dans l’air. Le Docteur Delacroix est penché sur moi.
- Il est conscient. Redonnez-lui une dose.
Ça ne peut pas être vrai. La porte rouge. Je m’accroche à cette certitude, mais je sais que si je reste là (la porte rouge), il va me griller le cerveau. La porte rouge elle est dans mon esprit je me concentre de toutes mes forces et maintenant ça y est je la vois dans ma tête la porte rouge elle est là je m’y engage la porte rouge je m’échappe.
Je m‘éveille dans un cri. Je me rappelle maintenant. Je suis couché sur un vieux plancher, complètement nu. Je me relève doucement. Je sais où je suis : une cabane en lisière d’une immense forêt profonde. Là où les arbres disparaissent, c’est le No Man’s Land.
Où sont Raven et Willie ? J’attrape une vieille couverture et m’y emmitoufle. Sur la vieille table se trouve un livre relié de cuir, un manuscrit. Je l’entrouvre : Le livre des Ombres.
Une vibration dans l’air, comme un nuage de buée, se forme à hauteur de mon visage et prend peu à peu l’allure d’un visage. Je reconnais la vieille femme.
- Abigail… Abigail Twiceborn, celle qui est née deux fois.
La vieille femme me regarde. Elle prend de la consistance et est maintenant de chair et de sang. Elle s’assied et je m’installe à son côté.
- Tu n’es pas l’un d’eux. Tu n’es pas un cauchemar.
Elle a préparé une sorte de tisane et m’a tendu une tasse dans laquelle j’ai trempé les lèvres sans me poser de question. Puis elle a continué de parlé.
- Fetch. Voilà ce que je suis et ce que tu es. Le fetch de Michael Beckman, mon descendant lointain. Et je suis le fetch d’Abigail Twiceborn, qu’ils ont dite sorcière.
Tout le monde possède un double, mais seuls les nôtres le savent.
Je hoche la tête et me souviens maintenant. Quand Willie est venu nous chercher, Rose et moi, dans le Gardinel, c’était son fetch qui nous a tirés de là.
- D’où viens-tu, Michael ? De quand viens-tu ? Tu n’es pas là par hasard, je le sais.
- De Whitby... en 2024. Il est revenu. Le Dormeur sur le Seuil. Il s’est réveillé.
La vieille femme hoche la tête.
- Moharahani… c’est par l’esprit que nous l’affronterons, comme nous l’avons déjà affronté.
Quand le moment viendra, tu pourras revenir ici. Le livre t’attendra, dans la cabane, au bord du Monde Noir.
- Je reviendrai, Abigail.
Elle pose sa main sur les miennes. Elle est glacée. La vieille femme prononce mon prénom doucement. Je me réveille en sursaut.
Wabash Lodge, 27 Mai 2024
Je suis allongé sur le dos, nu, dans une des chambres du resort où je séjourne depuis trois jours. Agenouillée près de moi, une jeune femme dont les longs cheveux noirs masquent le visage est là, soucieuse. Raven se lève et va prévenir Willie, attrapant au passage un tee-shirt. Elle était nue aussi.
J’ai à peine le temps de reprendre mes esprits que Willie arrive avec elle. Mon vieil ami était inquiet. Je comprends qu’il a envoyé Raven à mon aide, lors de mon voyage de l’autre côté.
Le corbeau.
Nous sommes interrompus par la sonnerie du portable de Willie. Il répond de quelques mots et raccroche.
- Mike… Sondra est à l’accueil. Elle exige de te voir.
Je hoche la tête et lui emboîte le pas. J’ai le temps de croiser le regard de Raven et j’y lis la peur. Elle craint de me perdre.
Sondra est à bout et je la comprends. Elle veut rentrer chez nous, elle veut que je l’accompagne et que tout cela s’arrête.
- Mike, viens-tu avec moi ?
Je la regarde longuement, me maudissant pour ses yeux rougis par les larmes.
- Je dois rester, Sondra… Je n’ai pas terminé ce que je dois faire ici, je ne suis pas encore prêt. Il me faut encore un peu de temps…
Elle a tourné les talons, pour fuir ce lieu et sans doute aussi pour ne pas montrer ses larmes. Sondra sort du Wabash Lodge et de ma vie, et retourne chez elle. A cet instant précis, je me fais violence pour ne pas courir derrière elle. Une boule emplit ma gorge.
Ce soir-là, nous avons dîné chez Willie, et j’ai tout raconté à mes deux compagnons : ce passé empli de bonheur que je n’ai pas vécu, l’hôpital, la cabane, Abigail. J’ai désormais conscience de ce double en moi, que je pourrai convoquer quand il le faudra.
Nous veillons en silence, mais mes pensées m’entraînent vers Whitby, vers Sondra…
Dans quelques jours, je repartirai.
Chez moi. A Whitby.
- Blakkrall
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- Localisation : Montivilliers
Re: [CR] Mystères à Whitby
Merci pour cette suite (j'avoue que j'ai eu un peu de mal à me remettre dedans, ça faisait un moment !)
J’ai passé l’âge où la méchanceté me rendait furieux. Maintenant c’est la stupidité qui me met hors de moi. Arturo Perez Reverte Deux hommes de bien
- Olivier.Legrand
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- Inscription : mar. sept. 03, 2013 11:14 am
Re: [CR] Mystères à Whitby
You're welcome. Cet épisode solo très introspectif (et atypique) a sans doute constitué un des principaux tournants pour le personnage de Mike, avec beaucoup de références à son vécu et à ses récentes découvertes sur le passé de Whitby. Le prochain épisode (avec Rose) reviendra vers un format investigatif plus classique.
- Olivier.Legrand
- Prophète
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- Inscription : mar. sept. 03, 2013 11:14 am
Re: [CR] Mystères à Whitby
Hello tout le monde ! Nous avons joué samedi soir le 3ème (et avant-dernier) épisode de notre 3ème saison, dont Laurent vient juste d'achever le CR (un grand merci à lui). En route donc pour un nouveau chapitre du...
Journal de Michael Beckman
- Monsieur Beckman ? Voici votre commande, avec les remerciements du General Store !
- Merci.
Je m’apprête à refermer la porte. Si le livreur envoyé par le General Store avait été Luke, j’aurais peut-être pris un peu de temps pour parler, mais je ne connais pas ce gamin qui le remplace aujourd’hui et n’ai qu’une hâte : retourner travailler.
- Monsieur… dites… si je peux me permettre…
J’arrête mon geste et tente un sourire envers ce grand échalas qui est sans doute en train de financer ses futures études à l’Université, qui lui permettront peut-être de quitter cette ville.
- Vous êtes en train d’écrire votre prochain roman, c’est ça ?
Durant un instant, j’ai l’impression qu’il parle une langue étrangère et qu’il se trompe d’interlocuteur. Puis je me souviens que je suis encore officiellement écrivain, malgré les dizaines de messages de mon agent restés sans réponse. Je doute que ma carrière survive à ce que je suis en train de vivre, pour être honnête.
- Je… j’y travaille, effectivement.
Un large sourire se dessine sur son visage. Je viens d’illuminer sa journée avec un mensonge de plus. Quand il remonte dans son pick-up, je referme la porte et soupire. Si seulement il savait…
Whitby, mardi 25 mai 2024
L’été arrive. Quels cauchemars va-t-il nous amener ?
Depuis mon retour, je dors peu et ne sors guère. La maison est vide et silencieuse, maintenant que Dorothy n’est plus là et que Sondra est retournée chez elle.
Je ne suis plus le même homme, depuis mon voyage de l’autre côté. Mike Beckman l’écrivain existe-t-il encore ? Rien n’est moins sûr.
Je connais désormais trop bien le monde des cauchemars pour tenter d’en faire des fictions. Il me faudra du temps pour m’adapter, pour devenir un nouvel homme.
Mike Twiceborn.
La voiture de Rose s’est arrêtée devant la maison et elle est entrée, portant deux gobelets de café et un sac de donuts. J’étais encore dans mes vêtements de la veille, après une nuit passée sans dormir, à laisser mon esprit vagabonder entre passé et futur. Nous avons rapidement fait le tour des dernières informations.
Le procès Henderson aura lieu à la rentrée, mais cette affaire était le feuilleton de l’été pour pas mal de networks locaux.
De son côté, Rose a parlé à l’agent Winegger. Dans les années 90, il a fait partie du projet Black Book, qui prenait en charge au FBI les affaires dites « impossibles ». Cette section avait été aspirée par l’Agence, jusqu’à son démantèlement en 2001. Mais Wenniger avait conservé pas mal de ses dossiers et, surtout, confirmait l’étrange capacité d’oubli qu’avaient les gens de cette ville, le fameux esprit de Whitby.
Tandis que j’apprenais à traverser les ombres, au Wabash Lodge, Rose avait commencé à se constituer un réseau. Ses sentinelles étaient le Docteur Maxwell, Cassandra Kubasik, Luke Granger et David Langman. Elle avait également lié contact avec un trio de gamins, Lester Bryce, Michelle Mayo et Sarah Dewey, plus connus sous le nom du Weird Club. Je ne pus m’empêcher de sourire : ces trois mômes étaient sans le savoir des descendants du Gang of Four.
Un journaliste était arrivé à Whitby : Jack Sanford, venu de Chicago, enquêtait en free-lance sur l’affaire Henderson et cette étrange petite ville. Chicago Jack, comme on le surnommait, avait une réputation de fouineur acharné. Que cherchait-il ?
Mais ce n’était pas ce qui inquiétait le plus Rose. Jessica Auslander, lui avait appris que son père comptait venir la chercher le week-end prochain, avec son gang de bikers, les Direwolfs. Ce que Rose savait de ce gang suffisait à la mettre en alerte : ils traînaient dans leur sillage une réputation de violence et de mort. Les forces de l’ordre de Whitby ne pourraient faire face à ces nouveaux barbares.
Il s’en était passé, des choses, pendant mes semaines d’absence. Le No Man’s Land était en éveil et attendait l’heure de l’assaut. Nous redoutions Halloween et n’avions que quelques mois pour nous préparer. Mais déjà, il s’insinuait partout. Rose m’apprit également qu’elle avait entendu des fillettes chantonner une comptine qui lui avait glacé le sang.
Elsie’s in the river
Elsie’s in the water
Drowned by her own mother
‘cos she was such a bother
Elsie’s in the Wabash
Deep down she’s all awash
Eaten by creepies and crawlies
Deep down lies Greenteeth Elsie
Serions-nous prêts ?
La sonnerie de mon téléphone me tira de mes réflexions. J’ai mis quelques secondes à reconnaître le numéro de Ted Wilson.
Deux ans qu’il s’était donné la mort.
Au bout du fil, Monsieur Wilson me raconta que sa femme et lui avaient eu la visite d’un journaliste, la veille et que ce dernier avait posé des questions sur Teddy. Mais Martha et Edgar avaient vite compris que c’était moi qui l’intéressais. La vieille femme n’avait pas dormi de la nuit.
Sanford. S’il s’intéressait à moi, le plus simple serait de le rencontrer.
J’appelai le Hoosier Holiday Hotel et demandai à lui parler. Une voix pâteuse se fit bientôt entendre. J’y perçus la surprise, mais aussi le mépris envers cette ville. Nous nous rencontrerons cet après-midi.
Tandis que je tentai de retrouver une apparence humaine, Rose est retournée au poste de police. Là, elle a reçu Jessica Auslander qui voulait lui parler. Elle n’était plus la jeune fille arrogante et agressive que nous avions rencontré quelques mois plus tôt. Ses cheveux avaient retrouvé leur couleur brune et elle semblait en paix. Elle annonça de but en blanc à Rose qu’elle voulait rester à Whitby et ne pas suivre son père. Depuis peu, elle sortait avec Luke Granger, et pensait avoir trouvé la paix ici.
Elle n’avait pas osé en parler à son père et redoutait le moment où Jack Auslander et sa garde rapprochée d’une douzaine de bikers arriveraient. Luke comptait leur faire face, mais il les sous-estimait. Selon Jessica, ces hommes étaient tout le contraire de ce que Ms Kubasik essayait de faire.
Comme si nous avions besoin de ça…
L’Hoosier Holiday Hotel. En entrant, je me souviens de ce que nous avons vu là-bas, durant cette nuit d’Halloween, dans la chambre 14.
Phil Macey me broie les phalanges et commence à déverser un flot de paroles. Je comprends qu’il craint, lui aussi, l’arrivée des bikers. Puis, il m’indique que Jack Sanford est au bar.
Les années n’ont pas épargné Jack Sanford et le bourbon qu’il ingurgite, verre après verre, n’a rien arrangé. Il est venu pour l’affaire Henderson et s’est intéressé au passé de cette ville. Il est remonté 37 ans en arrière, jusqu’à une autre disparition : celle de Nigel. S’il est surpris que je l’aie contacté, il n’abat pas toutes ses cartes pour autant, mais je comprends une chose. Selon lui, je ne suis pas revenu à Whitby par hasard et je suis sans doute lié à ces disparitions. Entre deux verres de whisky, il tente de me sonder, mais je ne lui apprends rien qu’il ne sache déjà.
En le quittant, je le vois ouvrir son laptop et prendre des notes. Sur le perron de l’hôtel, j’appelle Rose pour lui raconter l’entrevue quand Gillian Knapp, la réceptionniste, me fait un signe.
La jeune femme m’apprend que Sanford pose beaucoup de questions, mais qu’il sort peu de sa chambre. D’ailleurs, quand il découvert l’incident d’Halloween, il a demandé à changer de chambre. Maintenant, il est au numéro 14.
Que cache-t-il ?
David Langman et Luke Granger sont penchés sur un ordinateur quand j’entre dans l’annexe du General Store qui sert de local à WhiTech, l’entreprise de service informatique créée par le jeune Langman.
- Monsieur Beckman !
- Salut, les garçons !
Je prends un air de conspirateur et, en baissant la voix.
- David, j’ai un petit service à te demander…
Le jeune Langman me laisse à peine le temps de finir, qu’il hoche déjà la tête.
- Supposons qu’un ordinateur soit connecté à un réseau Wi-Fi comme celui d’un hôtel. Tu saurais t’y connecter et récupérer ce qui s’y trouve ?
- Ça ne devrait pas poser trop de problème, Mike, répond-il, le plus sérieusement du monde.
Je le fixe un instant, mesurant à quel point il a changé depuis l’histoire du Chien Noir.
- Bien entendu, ça reste entre nous… et j’en prends l’entière responsabilité.
Le soir même, David Langman m’a fait parvenir par mail le résultat de ses recherches. Parmi des fichiers corrompus ou incomplets, il en a trouvé un, qui me concerne et a inquiété le jeune homme. En le parcourant, je sens mon sang se figer. Sanford est sur une fausse piste, mais sa thèse est pire encore que la vérité.
Document de Jack Sanford
Whitby, mercredi 26 juin 2024
Je ne dors pas.
Le cœur de Whitby bat dans son sommeil, je le sens.
Je sens aussi quelque chose qui me saisit, comme si le temps se tordait.
Le No Man’s Land. Il est là.
En fermant les yeux, je comprends que cela se passe à l’Hoosier Hotel, dans la chambre 14. Je fonce vers ma voiture, tout en appelant Rose.
Gillian Knapp nous ouvre la porte de nuit. Nous prétextons un appel téléphonique étrange de Jack Sanford. La jeune femme nous prête son passe sans sourciller. Tout semble calme dans le bâtiment.
Après avoir frappé sans réponse à la porte de la chambre 14, Rose a ouvert et nous avons découvert Jack Sanford affalé sur son lit, ronflant comme un sonneur, éclairé par l’écran de son laptop, une bouteille de bourbon presque vide sur sa table de nuit.
Instinctivement, mon regard s’est porté vers le mur derrière lequel se trouverait la chambre 13, si elle existait. Dans les ténèbres, j’ai vu un mouvement. Une forme qui s’est détachée des ombres et s’est approchée de Sanford, avec une démarche lourde, puis s’est penchée sur lui avant de se fondre avec son corps. Dans son sommeil, le journaliste a grommelé. Puis la nuit a semblé moins épaisse et la sensation d’oppression qui nous avait saisis a disparu.
J’ai jeté un œil à l’écran et y ai lu ce que David m’avait envoyé. Sanford avait ajouté quelques notes : « Ce soir, rencontre avec la source…Blackout ? ». Nous nous sommes regardés en silence, avant de repartir sur la pointe des pieds, comme nous étions venus.
Sur le chemin du retour, j’ai pris ma décision : je vais aller de l’autre côté.
Mon corps est allongé au milieu du salon, mais je m’en échappe aisément, me dédoublant. Je sens une présence, un regard dans le lointain.
Rose. Elle essaie de me suivre, je la laisse me rejoindre. Elle me suit jusqu’à la chambre 14 et là, j’appelle ce que j’ai vu tout à l’heure.
Dans le mur, une porte de ténèbres s’offre à nous. Nous franchissons le seuil et entrons dans la chambre voisine, celle qui n’existe qu’ici, dans les cauchemars, la chambre 13.
Je sens sous mes pieds nus le sol froid, je sens l’air lourd de la chambre, je perçois quelque chose de mauvais dans cette pièce et je LA vois.
Une silhouette féminine assise sur le lit, qui me tourne le dos.
Quand j’approche, elle se tourne vers moi. C’est Sondra.
Je la fixe : Sondra, dénuée de toute lumière intérieure, l’exact opposé de la femme pleine de vie et d’énergie que nous connaissons. Je comprends que je l’ai trahie, que je mérite d’être étouffé par les secrets enfouis au fond de son cœur, par ce que sa mémoire a refoulé. Sondra, ou plutôt son fetch, séparé de son double physique depuis toutes ces années. Voilà pourquoi elle ne se rappelle pas ce qui nous est arrivé, quand nous étions gosses.
Je tends les bras vers elle et la serre contre moi. Sondra s’abandonne et je l’absorbe, ressentant tout le désespoir, toute la peur que porte son fetch. Tout ce que je vais lui rendre, pour qu’elle soit de nouveau complète.
En silence, nous avons quitté l’Hoosier Hotel et avons rejoint la chambre où celle que j’aime dort. Son sommeil est agité. Je me penche sur elle, me maudissant pour ce que je lui fais à cet instant. Sa part d’ombre glisse doucement et s’enroule autour d’elle.
Elle s’éveille en hurlant.
- Mike !
Je reviens en moi, comme si je m’éveillais d’un rêve. Rose a sans doute ouvert les yeux brutalement, cœur battant la chamade, comme au sortir d’un cauchemar.
J’ai envoyé à Rose le message le plus court du monde pour m’assurer qu’elle allait bien, puis j’ai appelé Sondra, sans me soucier de l’heure.
Elle n’était pas étonnée de mon appel. Elle était en larmes, après un terrible cauchemar.
Nous nous verrons demain midi. Nous devons parler.
Je ne dormirai pas cette nuit.
Whitby, jeudi 27 juin 2024
Ce matin, Gillian Knapp, la réceptionniste du Hoosier Holiday Hotel m’a téléphoné. Jack Sanford a quitté l’hôtel et Whitby, prétextant des affaires à régler à Chicago. J’ai appris plus tard par Rose qu’il renonçait à son enquête et raccrochait définitivement.
J’ai retrouvé Sondra ce midi, à la bibliothèque. Elle était désolée de ce qui s’était passé au Wabash Lodge et avait pris une décision importante. Elle quitte Whitby pour Chicago, où elle compte repartir à zéro, loin de cette ville et de moi. Nous nous sommes étreints une dernière fois, puis elle s’est éloignée. En se retournant, elle m’a demandé si le nom de Delacroix me disait quelque chose. Elle ne parvenait pas à se rappeler pourquoi il était inscrit dans sa mémoire.
Je n’ai pas réussi à répondre, tant ma gorge était serrée.
Je suis rentré chez moi, ravagé. Quand j’ai entendu le vacarme, au loin, j’ai compris qu’ils arrivaient : les Dire Wolves.
Whitby, lundi premier juillet 2024
Rose m’a raconté son entrevue avec John « Sir Jack » Auslander. Entouré d’une douzaine de bikers tous plus patibulaires les uns que les autres, le père de Jessica s’est dirigé vers le poste de police. Il est entré, seul, tandis que sa garde d’honneur attendait dehors. Il a pris place dans le bureau de notre Town Marshal qui n’en menait pas large.
Rose a annoncé à John Auslander que Jessica, sa fille, la princesse des Dire Wolves, ne voulait pas quitter Whitby, parce qu’elle était amoureuse de Luke. Durant un instant qui a du paraître une éternité à Rose, il a réfléchi, puis a dit qu’il ne pouvait pas choisir pour elle et imposer à Jessica cette vie-là. Sir Jack n’a jamais pu refuser quoi que ce soit à sa fille.
A ce moment, l’assistante de Rose est entrée, annonçant que Jessica et Luke étaient là et demandaient à parler au chef des bikers. Tremblante devant John Auslander, Jessica lui a fait face : elle avait fait son choix. Se tournant vers Luke, il l’a prévenu : qu’il arrive quoi que ce soit à sa fille et il était mort.
Puis Sir Jack s’est levé et a serré sa fille contre lui. C’est alors que Rose a compris, en croisant son regard. John Auslander était condamné et le savait.
Dans une pétarade de fin du monde, les treize motards sont repartis et Whitby a respiré de nouveau.
- Un soda, Monsieur Beckman ?
- Appelle-moi Mike, s’il te plaît, Jessica.
Elle est épuisée, mais heureuse. Ce soir, ils dormiront dans la chambre qui fut celle de Dorothy. Une nouvelle vie commence pour eux.
- Vous allez vraiment habiter là… Mike ? demande-t-elle en montrant du menton la cabane au fond du jardin.
- Oh oui… j’ai toujours rêvé de faire ça.
J’ai passé l’après-midi à vider l’abri de jardin et à le nettoyer, avant d’y installer tout ce qu’il me faut pour y vivre, c’est-à-dire presque rien. Que cela passe pour une lubie de quinquagénaire, après tout.
Luke appelle Jessica, qui le rejoint, tandis que je les regarde, heureux pour eux. Puis, je sors de ma poche la photographie de Sondra. Elle a quitté Whitby et ne reviendra jamais.
Je n’ai plus rien à perdre.
Hier, j’ai rencontré les gamins du Weird Club. Leur courage, leur curiosité et leurs sourires m’ont ramené près de quarante ans en arrière, à l’époque du Gang of Four. Je veillerai sur eux car l’ennemi sera sans pitié. Il a conscience de mes nouvelles armes et s’en est pris à nous, insidieusement. Quand il frappera, nous ne serons pas seuls.
Journal de Michael Beckman
- Monsieur Beckman ? Voici votre commande, avec les remerciements du General Store !
- Merci.
Je m’apprête à refermer la porte. Si le livreur envoyé par le General Store avait été Luke, j’aurais peut-être pris un peu de temps pour parler, mais je ne connais pas ce gamin qui le remplace aujourd’hui et n’ai qu’une hâte : retourner travailler.
- Monsieur… dites… si je peux me permettre…
J’arrête mon geste et tente un sourire envers ce grand échalas qui est sans doute en train de financer ses futures études à l’Université, qui lui permettront peut-être de quitter cette ville.
- Vous êtes en train d’écrire votre prochain roman, c’est ça ?
Durant un instant, j’ai l’impression qu’il parle une langue étrangère et qu’il se trompe d’interlocuteur. Puis je me souviens que je suis encore officiellement écrivain, malgré les dizaines de messages de mon agent restés sans réponse. Je doute que ma carrière survive à ce que je suis en train de vivre, pour être honnête.
- Je… j’y travaille, effectivement.
Un large sourire se dessine sur son visage. Je viens d’illuminer sa journée avec un mensonge de plus. Quand il remonte dans son pick-up, je referme la porte et soupire. Si seulement il savait…
Whitby, mardi 25 mai 2024
L’été arrive. Quels cauchemars va-t-il nous amener ?
Depuis mon retour, je dors peu et ne sors guère. La maison est vide et silencieuse, maintenant que Dorothy n’est plus là et que Sondra est retournée chez elle.
Je ne suis plus le même homme, depuis mon voyage de l’autre côté. Mike Beckman l’écrivain existe-t-il encore ? Rien n’est moins sûr.
Je connais désormais trop bien le monde des cauchemars pour tenter d’en faire des fictions. Il me faudra du temps pour m’adapter, pour devenir un nouvel homme.
Mike Twiceborn.
La voiture de Rose s’est arrêtée devant la maison et elle est entrée, portant deux gobelets de café et un sac de donuts. J’étais encore dans mes vêtements de la veille, après une nuit passée sans dormir, à laisser mon esprit vagabonder entre passé et futur. Nous avons rapidement fait le tour des dernières informations.
Le procès Henderson aura lieu à la rentrée, mais cette affaire était le feuilleton de l’été pour pas mal de networks locaux.
De son côté, Rose a parlé à l’agent Winegger. Dans les années 90, il a fait partie du projet Black Book, qui prenait en charge au FBI les affaires dites « impossibles ». Cette section avait été aspirée par l’Agence, jusqu’à son démantèlement en 2001. Mais Wenniger avait conservé pas mal de ses dossiers et, surtout, confirmait l’étrange capacité d’oubli qu’avaient les gens de cette ville, le fameux esprit de Whitby.
Tandis que j’apprenais à traverser les ombres, au Wabash Lodge, Rose avait commencé à se constituer un réseau. Ses sentinelles étaient le Docteur Maxwell, Cassandra Kubasik, Luke Granger et David Langman. Elle avait également lié contact avec un trio de gamins, Lester Bryce, Michelle Mayo et Sarah Dewey, plus connus sous le nom du Weird Club. Je ne pus m’empêcher de sourire : ces trois mômes étaient sans le savoir des descendants du Gang of Four.
Un journaliste était arrivé à Whitby : Jack Sanford, venu de Chicago, enquêtait en free-lance sur l’affaire Henderson et cette étrange petite ville. Chicago Jack, comme on le surnommait, avait une réputation de fouineur acharné. Que cherchait-il ?
Mais ce n’était pas ce qui inquiétait le plus Rose. Jessica Auslander, lui avait appris que son père comptait venir la chercher le week-end prochain, avec son gang de bikers, les Direwolfs. Ce que Rose savait de ce gang suffisait à la mettre en alerte : ils traînaient dans leur sillage une réputation de violence et de mort. Les forces de l’ordre de Whitby ne pourraient faire face à ces nouveaux barbares.
Il s’en était passé, des choses, pendant mes semaines d’absence. Le No Man’s Land était en éveil et attendait l’heure de l’assaut. Nous redoutions Halloween et n’avions que quelques mois pour nous préparer. Mais déjà, il s’insinuait partout. Rose m’apprit également qu’elle avait entendu des fillettes chantonner une comptine qui lui avait glacé le sang.
Elsie’s in the river
Elsie’s in the water
Drowned by her own mother
‘cos she was such a bother
Elsie’s in the Wabash
Deep down she’s all awash
Eaten by creepies and crawlies
Deep down lies Greenteeth Elsie
Serions-nous prêts ?
La sonnerie de mon téléphone me tira de mes réflexions. J’ai mis quelques secondes à reconnaître le numéro de Ted Wilson.
Deux ans qu’il s’était donné la mort.
Au bout du fil, Monsieur Wilson me raconta que sa femme et lui avaient eu la visite d’un journaliste, la veille et que ce dernier avait posé des questions sur Teddy. Mais Martha et Edgar avaient vite compris que c’était moi qui l’intéressais. La vieille femme n’avait pas dormi de la nuit.
Sanford. S’il s’intéressait à moi, le plus simple serait de le rencontrer.
J’appelai le Hoosier Holiday Hotel et demandai à lui parler. Une voix pâteuse se fit bientôt entendre. J’y perçus la surprise, mais aussi le mépris envers cette ville. Nous nous rencontrerons cet après-midi.
Tandis que je tentai de retrouver une apparence humaine, Rose est retournée au poste de police. Là, elle a reçu Jessica Auslander qui voulait lui parler. Elle n’était plus la jeune fille arrogante et agressive que nous avions rencontré quelques mois plus tôt. Ses cheveux avaient retrouvé leur couleur brune et elle semblait en paix. Elle annonça de but en blanc à Rose qu’elle voulait rester à Whitby et ne pas suivre son père. Depuis peu, elle sortait avec Luke Granger, et pensait avoir trouvé la paix ici.
Elle n’avait pas osé en parler à son père et redoutait le moment où Jack Auslander et sa garde rapprochée d’une douzaine de bikers arriveraient. Luke comptait leur faire face, mais il les sous-estimait. Selon Jessica, ces hommes étaient tout le contraire de ce que Ms Kubasik essayait de faire.
Comme si nous avions besoin de ça…
L’Hoosier Holiday Hotel. En entrant, je me souviens de ce que nous avons vu là-bas, durant cette nuit d’Halloween, dans la chambre 14.
Phil Macey me broie les phalanges et commence à déverser un flot de paroles. Je comprends qu’il craint, lui aussi, l’arrivée des bikers. Puis, il m’indique que Jack Sanford est au bar.
Les années n’ont pas épargné Jack Sanford et le bourbon qu’il ingurgite, verre après verre, n’a rien arrangé. Il est venu pour l’affaire Henderson et s’est intéressé au passé de cette ville. Il est remonté 37 ans en arrière, jusqu’à une autre disparition : celle de Nigel. S’il est surpris que je l’aie contacté, il n’abat pas toutes ses cartes pour autant, mais je comprends une chose. Selon lui, je ne suis pas revenu à Whitby par hasard et je suis sans doute lié à ces disparitions. Entre deux verres de whisky, il tente de me sonder, mais je ne lui apprends rien qu’il ne sache déjà.
En le quittant, je le vois ouvrir son laptop et prendre des notes. Sur le perron de l’hôtel, j’appelle Rose pour lui raconter l’entrevue quand Gillian Knapp, la réceptionniste, me fait un signe.
La jeune femme m’apprend que Sanford pose beaucoup de questions, mais qu’il sort peu de sa chambre. D’ailleurs, quand il découvert l’incident d’Halloween, il a demandé à changer de chambre. Maintenant, il est au numéro 14.
Que cache-t-il ?
David Langman et Luke Granger sont penchés sur un ordinateur quand j’entre dans l’annexe du General Store qui sert de local à WhiTech, l’entreprise de service informatique créée par le jeune Langman.
- Monsieur Beckman !
- Salut, les garçons !
Je prends un air de conspirateur et, en baissant la voix.
- David, j’ai un petit service à te demander…
Le jeune Langman me laisse à peine le temps de finir, qu’il hoche déjà la tête.
- Supposons qu’un ordinateur soit connecté à un réseau Wi-Fi comme celui d’un hôtel. Tu saurais t’y connecter et récupérer ce qui s’y trouve ?
- Ça ne devrait pas poser trop de problème, Mike, répond-il, le plus sérieusement du monde.
Je le fixe un instant, mesurant à quel point il a changé depuis l’histoire du Chien Noir.
- Bien entendu, ça reste entre nous… et j’en prends l’entière responsabilité.
Le soir même, David Langman m’a fait parvenir par mail le résultat de ses recherches. Parmi des fichiers corrompus ou incomplets, il en a trouvé un, qui me concerne et a inquiété le jeune homme. En le parcourant, je sens mon sang se figer. Sanford est sur une fausse piste, mais sa thèse est pire encore que la vérité.
Document de Jack Sanford
Whitby, mercredi 26 juin 2024
Je ne dors pas.
Le cœur de Whitby bat dans son sommeil, je le sens.
Je sens aussi quelque chose qui me saisit, comme si le temps se tordait.
Le No Man’s Land. Il est là.
En fermant les yeux, je comprends que cela se passe à l’Hoosier Hotel, dans la chambre 14. Je fonce vers ma voiture, tout en appelant Rose.
Gillian Knapp nous ouvre la porte de nuit. Nous prétextons un appel téléphonique étrange de Jack Sanford. La jeune femme nous prête son passe sans sourciller. Tout semble calme dans le bâtiment.
Après avoir frappé sans réponse à la porte de la chambre 14, Rose a ouvert et nous avons découvert Jack Sanford affalé sur son lit, ronflant comme un sonneur, éclairé par l’écran de son laptop, une bouteille de bourbon presque vide sur sa table de nuit.
Instinctivement, mon regard s’est porté vers le mur derrière lequel se trouverait la chambre 13, si elle existait. Dans les ténèbres, j’ai vu un mouvement. Une forme qui s’est détachée des ombres et s’est approchée de Sanford, avec une démarche lourde, puis s’est penchée sur lui avant de se fondre avec son corps. Dans son sommeil, le journaliste a grommelé. Puis la nuit a semblé moins épaisse et la sensation d’oppression qui nous avait saisis a disparu.
J’ai jeté un œil à l’écran et y ai lu ce que David m’avait envoyé. Sanford avait ajouté quelques notes : « Ce soir, rencontre avec la source…Blackout ? ». Nous nous sommes regardés en silence, avant de repartir sur la pointe des pieds, comme nous étions venus.
Sur le chemin du retour, j’ai pris ma décision : je vais aller de l’autre côté.
Mon corps est allongé au milieu du salon, mais je m’en échappe aisément, me dédoublant. Je sens une présence, un regard dans le lointain.
Rose. Elle essaie de me suivre, je la laisse me rejoindre. Elle me suit jusqu’à la chambre 14 et là, j’appelle ce que j’ai vu tout à l’heure.
Dans le mur, une porte de ténèbres s’offre à nous. Nous franchissons le seuil et entrons dans la chambre voisine, celle qui n’existe qu’ici, dans les cauchemars, la chambre 13.
Je sens sous mes pieds nus le sol froid, je sens l’air lourd de la chambre, je perçois quelque chose de mauvais dans cette pièce et je LA vois.
Une silhouette féminine assise sur le lit, qui me tourne le dos.
Quand j’approche, elle se tourne vers moi. C’est Sondra.
Je la fixe : Sondra, dénuée de toute lumière intérieure, l’exact opposé de la femme pleine de vie et d’énergie que nous connaissons. Je comprends que je l’ai trahie, que je mérite d’être étouffé par les secrets enfouis au fond de son cœur, par ce que sa mémoire a refoulé. Sondra, ou plutôt son fetch, séparé de son double physique depuis toutes ces années. Voilà pourquoi elle ne se rappelle pas ce qui nous est arrivé, quand nous étions gosses.
Je tends les bras vers elle et la serre contre moi. Sondra s’abandonne et je l’absorbe, ressentant tout le désespoir, toute la peur que porte son fetch. Tout ce que je vais lui rendre, pour qu’elle soit de nouveau complète.
En silence, nous avons quitté l’Hoosier Hotel et avons rejoint la chambre où celle que j’aime dort. Son sommeil est agité. Je me penche sur elle, me maudissant pour ce que je lui fais à cet instant. Sa part d’ombre glisse doucement et s’enroule autour d’elle.
Elle s’éveille en hurlant.
- Mike !
Je reviens en moi, comme si je m’éveillais d’un rêve. Rose a sans doute ouvert les yeux brutalement, cœur battant la chamade, comme au sortir d’un cauchemar.
J’ai envoyé à Rose le message le plus court du monde pour m’assurer qu’elle allait bien, puis j’ai appelé Sondra, sans me soucier de l’heure.
Elle n’était pas étonnée de mon appel. Elle était en larmes, après un terrible cauchemar.
Nous nous verrons demain midi. Nous devons parler.
Je ne dormirai pas cette nuit.
Whitby, jeudi 27 juin 2024
Ce matin, Gillian Knapp, la réceptionniste du Hoosier Holiday Hotel m’a téléphoné. Jack Sanford a quitté l’hôtel et Whitby, prétextant des affaires à régler à Chicago. J’ai appris plus tard par Rose qu’il renonçait à son enquête et raccrochait définitivement.
J’ai retrouvé Sondra ce midi, à la bibliothèque. Elle était désolée de ce qui s’était passé au Wabash Lodge et avait pris une décision importante. Elle quitte Whitby pour Chicago, où elle compte repartir à zéro, loin de cette ville et de moi. Nous nous sommes étreints une dernière fois, puis elle s’est éloignée. En se retournant, elle m’a demandé si le nom de Delacroix me disait quelque chose. Elle ne parvenait pas à se rappeler pourquoi il était inscrit dans sa mémoire.
Je n’ai pas réussi à répondre, tant ma gorge était serrée.
Je suis rentré chez moi, ravagé. Quand j’ai entendu le vacarme, au loin, j’ai compris qu’ils arrivaient : les Dire Wolves.
Whitby, lundi premier juillet 2024
Rose m’a raconté son entrevue avec John « Sir Jack » Auslander. Entouré d’une douzaine de bikers tous plus patibulaires les uns que les autres, le père de Jessica s’est dirigé vers le poste de police. Il est entré, seul, tandis que sa garde d’honneur attendait dehors. Il a pris place dans le bureau de notre Town Marshal qui n’en menait pas large.
Rose a annoncé à John Auslander que Jessica, sa fille, la princesse des Dire Wolves, ne voulait pas quitter Whitby, parce qu’elle était amoureuse de Luke. Durant un instant qui a du paraître une éternité à Rose, il a réfléchi, puis a dit qu’il ne pouvait pas choisir pour elle et imposer à Jessica cette vie-là. Sir Jack n’a jamais pu refuser quoi que ce soit à sa fille.
A ce moment, l’assistante de Rose est entrée, annonçant que Jessica et Luke étaient là et demandaient à parler au chef des bikers. Tremblante devant John Auslander, Jessica lui a fait face : elle avait fait son choix. Se tournant vers Luke, il l’a prévenu : qu’il arrive quoi que ce soit à sa fille et il était mort.
Puis Sir Jack s’est levé et a serré sa fille contre lui. C’est alors que Rose a compris, en croisant son regard. John Auslander était condamné et le savait.
Dans une pétarade de fin du monde, les treize motards sont repartis et Whitby a respiré de nouveau.
- Un soda, Monsieur Beckman ?
- Appelle-moi Mike, s’il te plaît, Jessica.
Elle est épuisée, mais heureuse. Ce soir, ils dormiront dans la chambre qui fut celle de Dorothy. Une nouvelle vie commence pour eux.
- Vous allez vraiment habiter là… Mike ? demande-t-elle en montrant du menton la cabane au fond du jardin.
- Oh oui… j’ai toujours rêvé de faire ça.
J’ai passé l’après-midi à vider l’abri de jardin et à le nettoyer, avant d’y installer tout ce qu’il me faut pour y vivre, c’est-à-dire presque rien. Que cela passe pour une lubie de quinquagénaire, après tout.
Luke appelle Jessica, qui le rejoint, tandis que je les regarde, heureux pour eux. Puis, je sors de ma poche la photographie de Sondra. Elle a quitté Whitby et ne reviendra jamais.
Je n’ai plus rien à perdre.
Hier, j’ai rencontré les gamins du Weird Club. Leur courage, leur curiosité et leurs sourires m’ont ramené près de quarante ans en arrière, à l’époque du Gang of Four. Je veillerai sur eux car l’ennemi sera sans pitié. Il a conscience de mes nouvelles armes et s’en est pris à nous, insidieusement. Quand il frappera, nous ne serons pas seuls.
- Olivier.Legrand
- Prophète
- Messages : 909
- Inscription : mar. sept. 03, 2013 11:14 am
Re: [CR] Mystères à Whitby
(Ah oui, j'ai oublié le titre de l'épisode... Ca s'appelait SOUS LA SURFACE)
- Blakkrall
- Dieu des girouettes
- Messages : 10454
- Inscription : dim. déc. 20, 2009 7:10 pm
- Localisation : Montivilliers
Re: [CR] Mystères à Whitby
Merci Olivier !
J’ai passé l’âge où la méchanceté me rendait furieux. Maintenant c’est la stupidité qui me met hors de moi. Arturo Perez Reverte Deux hommes de bien